Enseigner la géométrie en 2023 : quelle place pour l'algèbre linéaire ?
Bonjour
Un sujet m'intéresse depuis des décennies maintenant : comment enseigner la géométrie disons à partir de 9/10 ans jusqu'aux classes terminales des lycées ?
J'ai un avis qui peut paraître peu nuancé, toujours le même depuis des décennies : faire table rase du passé: "à bas Euclide", pour reprendre une injonction célèbre (colloque de Royaumont sur l'enseignement des maths , 1959 ).
Voici quelques arguments :
1. Il me semble déraisonnable de demander à des enseignants de suivre une voie, en substance la voie d' Euclide , alors que la seule chose qu'ils en connaissent est ce qu'ils ont pu penser en retenir de leurs propres études secondaires avant d'abandonner cette voie dans le supérieur;
2. L'un des avantages de l'algèbre linéaire, c'est qu'elle permet de présenter tous les développements de la "Géométrie élémentaire" d'une façon parfaitement rigoureuse, et cela sans effort; pour les plus jeunes des élèves on se contentera évidemment de les faire travailler dans l'espace vectoriel $\mathbb R^2$ ou même dans le $\mathbb Z-\text{module }\mathbb Z^2$ : par exemple, soit $A=(0,0), B=(8,0)$ et $C=(6,0)$ : le centre du cercle inscrit dans $ABC$ est $I=(2,2)$; beaucoup d'élèves de 6è ont du mal à faire de la symétrie axiale avec une équerre mais aucun avec $(x,y)\mapsto (y,x)$, symétrie orthogonale par rapport à la première bissectrice...
3. Évidemment peu de tentatives semblent plaider pour le deuxième point auquel on risque d'opposer l'échec de la réforme des "maths modernes" mais des auteurs tels que Serge Lang par exemple dans Linear Algebra, ont montré a quel point on pouvait simplifier l'enseignement du produit scalaire par exemple en le définissant d'emblée comme $$((x,y),(x',y'))\mapsto xx'+yy'$$ et l'on sait que beaucoup d'enseignants français de seconde, première, terminale y avaient/ ont recours. Je crois qu'aux Etats-Unis, c'est devenu la norme.
4. Considérons la géométrie projective supprimée des programmes de l'agrégation en 2010 je crois : considérer un espace projectif comme le quotient d'un espace vectoriel privé de 0 n'est jamais qu'une approche abstraite pédante qui revient à l'usage des coordonnées homogènes des anciens et tout enseignant serait à même de traduire en termes simples cette approche abstraite : d'ailleurs même Claire Voisin dans un exposé qu'elle faisait à des lycéens se limitait à $\mathbb R P^2$ et tout le monde conviendra qu'il est aberrant qu'un enseignant ne sache pas donner du sens au fait que deux droites parallèles se coupent à l'infini.
5. Bref commencer l'algèbre linéaire dès la seconde est une nécessité si l'on veut former des professeurs de mathématiques sérieusement. Quant aux autres scientifiques, limiter l'étude de l'algèbre linéaire à sa version calculatoire, les matrices, pour former des techniciens à courte vue, est regrettable.
Qu'en pensez-vous ?
Un sujet m'intéresse depuis des décennies maintenant : comment enseigner la géométrie disons à partir de 9/10 ans jusqu'aux classes terminales des lycées ?
J'ai un avis qui peut paraître peu nuancé, toujours le même depuis des décennies : faire table rase du passé: "à bas Euclide", pour reprendre une injonction célèbre (colloque de Royaumont sur l'enseignement des maths , 1959 ).
Voici quelques arguments :
1. Il me semble déraisonnable de demander à des enseignants de suivre une voie, en substance la voie d' Euclide , alors que la seule chose qu'ils en connaissent est ce qu'ils ont pu penser en retenir de leurs propres études secondaires avant d'abandonner cette voie dans le supérieur;
2. L'un des avantages de l'algèbre linéaire, c'est qu'elle permet de présenter tous les développements de la "Géométrie élémentaire" d'une façon parfaitement rigoureuse, et cela sans effort; pour les plus jeunes des élèves on se contentera évidemment de les faire travailler dans l'espace vectoriel $\mathbb R^2$ ou même dans le $\mathbb Z-\text{module }\mathbb Z^2$ : par exemple, soit $A=(0,0), B=(8,0)$ et $C=(6,0)$ : le centre du cercle inscrit dans $ABC$ est $I=(2,2)$; beaucoup d'élèves de 6è ont du mal à faire de la symétrie axiale avec une équerre mais aucun avec $(x,y)\mapsto (y,x)$, symétrie orthogonale par rapport à la première bissectrice...
3. Évidemment peu de tentatives semblent plaider pour le deuxième point auquel on risque d'opposer l'échec de la réforme des "maths modernes" mais des auteurs tels que Serge Lang par exemple dans Linear Algebra, ont montré a quel point on pouvait simplifier l'enseignement du produit scalaire par exemple en le définissant d'emblée comme $$((x,y),(x',y'))\mapsto xx'+yy'$$ et l'on sait que beaucoup d'enseignants français de seconde, première, terminale y avaient/ ont recours. Je crois qu'aux Etats-Unis, c'est devenu la norme.
4. Considérons la géométrie projective supprimée des programmes de l'agrégation en 2010 je crois : considérer un espace projectif comme le quotient d'un espace vectoriel privé de 0 n'est jamais qu'une approche abstraite pédante qui revient à l'usage des coordonnées homogènes des anciens et tout enseignant serait à même de traduire en termes simples cette approche abstraite : d'ailleurs même Claire Voisin dans un exposé qu'elle faisait à des lycéens se limitait à $\mathbb R P^2$ et tout le monde conviendra qu'il est aberrant qu'un enseignant ne sache pas donner du sens au fait que deux droites parallèles se coupent à l'infini.
5. Bref commencer l'algèbre linéaire dès la seconde est une nécessité si l'on veut former des professeurs de mathématiques sérieusement. Quant aux autres scientifiques, limiter l'étude de l'algèbre linéaire à sa version calculatoire, les matrices, pour former des techniciens à courte vue, est regrettable.
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Réponses
Dans ce cas, réintroduisons la géométrie d’Euclide dans le supérieur ?
Question de maturité ?
Question de didactique ?
Question de l’enseignant de L1-L2 à cette époque ?
Question de l’enseignement dans les années 2000 et avant ?
On trace aussi des droites perpendiculaires (cycle 3).
On parle de symétrie centrale en cycle 4 (disons 5e).
\cos\theta & -\sin\theta & 0 \\
\sin\theta & \cos\theta & 0 \\
0 & 0 & 1
\end{pmatrix}$$
Tu as 50 ans de retard ! Autant ta proposition avait un début de sens dans les années 1970, avec la valorisation des maths (remplaçant le latin-grec), autant c'est obsolète pour les générations actuelles.
Autre source de l’erreur classique : quand on trace un segment, disons le long de dix carreaux, il y a déjà des échecs (ça fait 9 ou ça fait 11, mince alors).
C’est en général lié à la manière de compter « dix » : compter dix noeuds du quadrillage en comptant le premier ou pas ?
Cordialement.
Je ne suis pas certain que tu rencontrerais un vif succès de nos jours avec ça.
Déjà, qui est-ce qui prouve qu'il est unique ?
Édit : s’en priver, non. Mais dire qu’on améliore la compréhension de la géométrie, je ne vois pas. J’enfonce le clou : la géométrie ce n’est donc que du calcul ? Oui en quelque sorte… mais alors c’est moche au possible !
Aussi, j’y pense, les dyslexiques ou dyscalculiques n’ont donc que le droit de s’empêtrer dans leurs difficultés dès qu’il faut tracer un triangle. Ça m’intrigue aussi…
Pourquoi dire à des gamins de 3 ans de ranger des pièces carrées ou rondes dans des emplacements carrés ou ronds s’il suffit de leur montrer des symboles trouvables avec un clavier ? Est-ce tant que ça ringard ?
Pourquoi aussi la parabole du voisin n’est pas un nombre mais un objet qui capte l’émission d’Hanouna ?
Le Rubik’cube, celui-là aussi, c’est juste un groupe pourtant. Pourquoi aller acheter du plastique quand on peut composer des éléments d’un groupe sur un papier ou un ordinateur doté d’un traitement de texte ?
Ok.
Ératosthène séchait déjà les cours pour regarder le football à la télévision?