Finalement, il existe le hasard ?
Bonjour
Bien le merci.
Je connais un peu de physique quantique mais pas au point de comprendre la fameuse mise en évidence de l'existence du hasard autrement que par le scénario simplifié : Bell a imaginé des expériences telle que les résultats devraient vérifier les inégalités qui portent son nom si la théorie était déterministe, puis Aspect a pu réaliser lesdites expériences et constater que les inégalités étaient violées, et par conséquent le hasard existe.
Mais je sais aussi que Bohm a mis en place une théorie déterministe tout aussi valable que la théorie qu'on enseigne traditionnellement.
Je suis bien conscient du rôle de l'hypothèse en sciences, mais je trouve toujours cette cohabitation difficile à comprendre.
Saurez-vous m'expliquer le pourquoi de la chose ?Bien le merci.
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Réponses
Mais au final quelle est la différence avec le lancer à pile ou face ? On se doute tout aussi bien que le résultat est théoriquement prévisible, mais impossible en pratique.
Pourquoi dans ce cas ne considérait-on pas déjà que le "hasard véritable au sens physique" existait avant la théorie quantique ?
J'ai un peu du mal à comprendre le changement de paradigme. Je ne sais pas si c'est accessible sans mettre les mains dans le cambouis.
Personnellement, je n’ai jamais vu un énoncé formel (et encore moins une démonstration de cet énoncé) affirmant que la théorie de Bohm est « tout aussi valable » que la MQ habituelle. Un membre du forum a en fait proposé un argument très simple de la forme « si Bohm vérifie bla-bla-bla alors il faut jeter Bohm à la poubelle » et je n’ai jamais réussi à comprendre si bla-bla-bla. Je suis donc très sceptique quant à cette théorie…
Par ailleurs, le mot « local » dans « théorie à variables cachées locales » me semble mal accordé, grammaticalement. Je n’ai jamais vu de définition de l’expression « variable cachée locale », je pense que le seul truc qui a un sens, c’est « théorie à variables cachées locale ».
Pour autant que je sache, la question du hasard n’est pas officiellement réglée au sein de la communauté physique, mais en regardant les énoncés techniques de type Kochen-Specker, on peut quand même se faire un avis.
Bref, je te conseille de ne pas te laisser avoir par le jargon philosophico-physique qui est parfois très superficiel, et de regarder en détail les résultats formels et techniques, qui ne sont pas trop durs. Par exemple, l’énoncé formel de https://plato.stanford.edu/entries/kochen-specker/#statement est éclairant, quand on y réfléchit.
Je dirais qu’on a deux principales variantes de déterminisme :
C'est pareil pour la déçision de tourner la tête à gauche. Si tu tourne la tête à gauche plutôt qu'à droite, il y a forcément une raison si on croit en le principe de causalité (qui pourrait être remis en cause par l'inégalité de Bell même si tout le monde pense que c'est plutôt la localité). Par contre, cette raison pourrait ne pas être considérée comme un choix conscient car ça pourrait être par exemple un automatisme dû au fait qu'il y a trop de lumière à droite.
Pour d'autres, le fait qu'il existe des raisons à nos choix conscients montrerait qu'ils sont déterministes car si on connaissait toutes ces raisons, on serait capable de deviner le choix. Mais comme c'est irréfutable à cause des limites techniques comme l'a dit gerard0, cela tient plus de la philosophie que de la théorie scientifique pour l'instant.
Personnellement, je me sens libre de choisir même si je suis rationnel (donc malgré le fait que mes choix dépendent de raisons extérieures). Et vu comment les experts galèrent à prévoir l'"irrationnalité" des agents économiques sur les marchés financiers, c'est pas demain qu'on va me donner tord...
C'est pas pour vous décourager mais mon avis c'est qu'on ne pourra jamais régler la question du hasard.
À titre d'exemple:[*** Modéré. Hors sujet. AD]
-A l'époque je pensais naïvement, comme beaucoup de monde, que le monde était déterminé dès le départ, qu'on pouvait cyniquement le voir comme molécules qui s'entrechoquent selon des trajectoires inévitablement dictées par leur état initial et les lois de la physique, et que tout ce qui existe, du motif aléatoire sur le tronc des arbres de mon jardin à mon envie inexplicable de jambon du 6 août 2022, était conséquence de cet élan initial donné aux particules de notre monde.
Ça ne veut pas dire qu'il faut être partisan de l'ultradéterminisme, car de toute manière on n'a aucun moyen de lire cette trajectoire, les seuls calculs faisables étant ceux de cas simples, souvent mis en scène, dans lesquels on sait exploiter mathématiquement les lois de la physique
-Mais en fait, Bell aurait montré que cette histoire de "déterminisme" au sens où l'état du monde connu complètement à un seul instant donné ne peut conduire qu'à un seul scénario possible, était fausse. Autrement dit, Cauchy-Lipschitz, grand théorème de la lecture physique du monde qu'on a tous en soi, ne serait pas vrai "concrètement". L'univers passerait son temps à éternuer pour bouleverser de façon totalement imprédictible et de cette manière "mettre à jour" la trajectoire du système formé par toutes les particules du monde
En gros, notre univers est en ce sens fondamentalement différent qu'un système complexe de vivant artificiel qu'on pourrait créer, par exemple, par jeu de la vie.
Pour l'histoire de la théorie de Bohm ça m'étonne d'apprendre qu'il n'y avait aucune preuve de son équivalent avec notre théorie héritée de Copenhague/Einstein, surtout sachant que Bell lui-même avait reconnu la pertinence de ce modèle rival (si quelqu'un a le titre du papier/ouvrage dans lequel Bell évoque Bohm ?).
Mais de toute façon, l'épistémologie de la physique quantique, c'est quelque-chose de très particulier. Les instruments de mesure en physique quantique sont construits à l'aide de la physique quantique. Vous voyez le problème ? Ce genre de "loophole", cumulé avec l'incomplétude de la théorie dans son ensemble (on sait qu'on n'a pas compris un truc, car il y a plein de paradoxes) fait qu'il est difficile de penser philosophiquement les conclusions de cette théorie si on veut être un minimum sérieux. D'où l'interprétation de Copenhague qui est probablement la plus saine.
Le monde quantique de l'infiniment petit, c'est un autre monde qui a ses propres règles différentes de celles que l'on connait dans notre monde à nous.
Je n’ai pas dit qu’il n’y a pas de preuve (je me suis mal exprimé), pour Bohm, mais qu’il n’y a pas de preuve assez formalisée à mon goût. Je pense que la communauté physique concernée se contente d’énoncés intermédiaires que je ne juge pas traduire fidèlement l’expression « Bohm fait les mêmes prédictions que la MQ ». En fait, j’ai vu un énoncé qui dit : si une particule ajoutée au modèle a comme condition initiale un point aléatoire de loi donnée par le carré du module de la fonction d’onde, si on la fait évoluer selon l’équation de la théorie de Bohm faisant intervenir sa position et la fonction d’onde, alors pour tout $t$, la loi de la particule est donnée par le carré du module de la fonction d’onde au temps $t$.
Autrement dit, on peut « réaliser » la famille, indexée par le temps $t$, des lois de probabilité données par la fonction d’onde au temps $t$ par une vraie dynamique déterministe à condition initiale aléatoire. Et donc, pour les fentes de Young, on peut toujours supposer qu’il y a une particule imaginaire qui, elle, passe bien par l’une des fentes. Le problème est : et alors ? Qu’est-ce que ça apporte, de dire qu’à l’histoire racontée par l’équation de Schrödinger, on peut ajouter une histoire déterministe d’une particule imaginaire ?
Quant à Bell, je t’invite à ne pas te contenter de ce paragraphe vague. C’est vraiment simple ! Déjà, exercice : démontre que pour tous réels $a,b,a’,b’$ qui sont soit $1$ soit $-1$, $\vert ab + a’b + ab’ - a’b’ \vert = 2$.
C'est tout aussi surprenant d'apprendre que le résultat de Bell est élémentaire (de la même manière que ça m'avait surpris de voir dans mon cours de L3 que l'inégalité de Heisenberg n'était qu'un résultat plutôt simple sur la transformée de Fourier, et pourtant je me fais toujours un monde de la mécanique quantique). Je pense lire le lien que tu as posté en intégralité. Mon rêve serait de me plonger dans mon Messiah si j'en trouve le temps un jour.
Enfin je suis d'accord pour dire que toutes les vulgarisations pêchent souvent par imprécision des termes, et, moins pardonnable, tentation de faire de l'audimat en déformant les faits pour les rendre plus sensationnels (en méca Q comme pour le reste : par exemple la loi de Benford est vendue comme un phénomène miracle qui marcherait quel que soit le jeu de données dont on dispose). Mais même dans des cours sérieux disposés à l'université, on a tendance à présenter les choses en employant le mot "hasard" (pour introduire le sujet et ses paradoxes par rapport à la mécanique classique, traditionnellement, par les fentes d'Young).
Donc si je comprends bien le paradigme n'a pas vraiment changé et il s'agirait simplement de la mise en évidence de variables trop complexes pour être accessibles ou simplement visibles.
C'est effectivement plus compréhensible.
J'imagine que résoudre l'exercice en se contentant de balayer tous les cas possibles n'est pas ce que tu recommandes.
Quid ? 😀
Mais je parle du point de vue purement philosophique.
Montrer que la moyenne (sur les quatre choix possibles de $(x,y)$) des $s(a,b,a',b',x,y)$ est plus petite que $\frac{1}{2}$.
Mais GA fait tellement d'efforts que je suis obligé de résoudre son problème alors que j'avais prévu de consacrer ma journée à lire Balzac dans mon hamac. Cœur de pierre.
Bon, ce n’est pas non plus la résolution du siècle.
Pour ma part ce sera Le Cousin Pons.
Enfin, je pourrai regarder l'exercice (le gros hein) et le cours dans le blanc des yeux et dire, à l'instar de Rastignac : "À nous deux, maintenant".
GHZ est l'un des phénomènes quantiques les plus simples à décrire et en même temps l'un des plus brutaux en termes de paradoxes.
(i) chaque appareil est à usage unique (les mesures détruisant les effets quantiques qui nous intéressent ici)
(ii) $m(1,x)+m(2,x)+m(3,x)$ est toujours pair (si chaque expérimentateur appuie sur $x$, ils obtiendront collectivement aucun, ou deux "1" )
(iii) si parmi $b_1,b_2,b_3$ il y a exactement un $x$ et deux $y$ alors $m(1,b_1)+m(2,b_2)+m(3,b_3)$ est toujours impair (si un seul expérimentateur appuie sur $x$ et les deux autres appuient sur $y$ alors ils obtiendront collectivement un ou trois "1")
(iv) les appareils peuvent être activés à n'importe quelle distance et à n'importe quel moment (c'est ici qu'il y a un conflit avec la relativité; en pratique cela a été testé sur quelques kilomètres de distance et à des intervalles de temps suffisamment petits pour que d'après la relativité, aucune communication entre les appareils ne soit possible).
Après il y a un argument plus scientifique : on sait que la physique quantique ne peut pas cohabiter avec la relativité tout le temps : les 2 théories ont leur domaine de validité mais si on les considère comme absolues alors ce domaine de validité doit « tout prendre en compte », or elles fournissent des résultats incohérents, là où elles devraient toutes les deux cohabiter. Donc si l'une d'elle est « vraie », alors l'autre est « fausse » (les 2 peuvent et sont en fait sûrement « fausses »), donc au moins l'une des deux n'est pas « satisfaisante » scientifiquement, or elles reposent autant toutes les deux sur des bases solides.
Hein ?
Et en physique, on n'a jamais eu encore de théorie complète, je pense, mais donc quand on le fait, on risque de retomber souvent dans de la philosophie.
Sinon ce n'est peut-être pas du déterminisme comme tu l'as défini, mais ce n'est pas non plus une histoire de probabilités, c'est juste que « nos mondes » sont sans cesse en « duplication » suivant toutes les branches possibles, mais celui où j'interviens là, n'est qu'un univers parmi d'autres, tous les résultats possibles de la réduction de la superposition d'état se produisent bien tous, dans autant de nouveaux mondes qu'il y a de possibilités.
Et dire que c'est une interprétation car elle prédit la même chose que la physique quantique, c'est, j'ai peur, une manière subtile de poser de manière adhoc (donc sans fondements réels) la « supériorité de la physique quantique » (son interprétation la plus consensuelle en fait), par rapport à toute autre « présentation ».
Enfin, c'est ce que j'en pense, je ne suis pas un spécialiste non plus.
Je pensais que c'etait clair dans mes messages précédent mais apparemment non...