Pas de différentielle fonctorielle sur l'algèbre tensorielle ?

Bonsoir,
je ne savais pas dans quel forum poster.
Lafontaine, dans son livre d'introduction aux variétés différentiables, dit (p. 211 de mon édition), après un petit paragraphe sur les tenseurs :
"Par contre, on peut montrer que la différentielle n'a pas d'analogue (même si on exige simplement d'avoir un opérateur linéaire sur les tenseurs qui commute avec les $\phi^*$ [Ndmoi : tirés en arrière par des difféomorphismes]). Cela explique le rôle prépondérant des formes différentielles et de l'opérateur $d$ quand on étudie les variétés [...]".
Je ne me suis pas encore posé sur le problème pour y réfléchir. C'est facile ? Et puis, c'est un peu fou, non ?

Réponses

  • marco
    Modifié (November 2021)
    Bonjour,

    J'ai montré qu'il n'existait pas d'opérateur linéaire $L$ (à part l'opérateur nul) qui transforme un champs de vecteur $X$ sur une variété de dimension $1$, en un "champs" d' application linéaire $LX$ (un tenseur donc), et tel que $L$ commute aux tirés en arrière.
    On montre d'abord que si il existe une carte telle que $X$ soit un champs de vecteur constant, alors $LX=0$.
    En effet, soit $V=\R$ une variété de dimension $1$. On note $X_c$ le champs de vecteur constant égal à $c$ ($c \in \R$ étant aussi un vecteur). On note $\phi_p$ le difféomorphisme de $V$ dans $V$ qui à $x$ associe $px$ (si $p>0$).
    Alors $\phi_p^*X_c(x)=\frac{1}{\phi_p'(x)}X_c(\phi_p(x))$ par définition du tiré en arrière.
    Donc $\phi_p^*X_c(x)=\frac{1}{p}c$ car $X_c$ est constant égal à $c$, donc $\phi_p^*X_c(x)=\frac{1}{p}X_c(x)$
    Donc $L\phi_p^*X_c(x)(u)=\frac{1}{p}LX_c(x)(u)$ car $L$ est linéaire.

    Par définition du tiré en arrière, $\phi_p^*LX_c(x)(u)=\frac{1}{\phi_p'(x)}LX_c(\phi_p(x))(\phi_p'(x)u)$.
    Donc $\phi_p^*LX_c(x)(u)=\frac{1}{p}LX_c(px)(pu)=LX_c(px)(u)$ car, pour tout $y \in \R$, $LX_c(y)(u)$ est une application linéaire en $u$.

    Donc, à cause de la commutation avec les tirés en arrière, on a $L\phi_p^*X_c(x)(u)=\phi_p^*LX_c(x)(u)$. C'est-à-dire $\frac{1}{p}LX_c(x)(u)=LX_c(px)(u)$.
    Si on choisit $x=0$ et $p\neq 1$, on obtient donc $\frac{1}{p}LX_c(0)(u)=LX_c(0)(u)$, donc $LX_c(0)(u)=0$.

    Commme $x=0$ est un point quelconque la variété $V$, on obtient donc $LX_c(x)(u)=0$ pour tout $x \in V$.
    On aurait aussi pu choisir des difféomorphismes $\phi_{p,x_0}:x \mapsto x_0+p(x-x_0)$ pour montrer que c'était valable pour tout $x$ de $V$.

    Soit la variété $W=]a,b[$ et $\phi$ l'inclusion de $W$ dans $V$, alors soit $Y_c$ le champs de vecteur constant sur $W$ égal à $c$. Alors $\phi^*X_c=Y_c$.
    Donc $LY_c=L\phi^*X_c=\phi^*LX_c=\phi^*0=0$ où $0$ est le tenseur nul respectivement sur $V$ puis sur $W$.

    Soit $Z$ de carte $]f,g[$ une variété de dimension $1$, soit $X$ un champs de vecteur sur $Z$. Si $X$ est nul sur $Z$, alors $LX=0$. Si $X$ est non nul et par continuité ne s'annule pas sur $]a,b[ \subset ]f,g[$, alors il existe $\phi$ un difféomorphisme de $]k,l[$ sur $]a,b[$ tel que $\phi^*X$ est constant égal à $1$. En effet, on cherche $\phi$ tel que $\frac{1}{\phi'(x)}X(\phi(x))=1$, donc on choisit $\phi(x)=F^{-1}(x)$ où $F$ est une primitive de $\frac{1}{X}$.

    Donc $\phi^*X=X_1$, donc $L\phi^*X=LX_1=0$, car $X_1$ est constant, donc, par commutation, $\phi^* LX=0$, donc $LX=0$ sur $]a,b[$.

    Donc $L$ est l'opérateur nul (par continuité, en effet, il faut le montrer sur $Z$)

  • marco
    Modifié (November 2021)
    En dimension $n$, on doit pouvoir faire de même, en écrivant un champs de vecteur $X$ quelconque, sous la forme $X(x)=\sum_{i=1}^n a_i(x)E_i$, où $E_i$ est le champs constant égal au $i$-ème vecteur de la base. Et en montrant que $LY_i=0$, où, pour tout $x$ appartenant à la variété, $Y_i(x)=a_i(x)E_i$. Donc on aura $LX=0$, par linéarité.
    Pour montrer que $LY_i=0$, on se ramène à un champs de vecteur constant par un difféomorphisme bien choisi (au voisinage d'un $x$ tel que $a_i(x)\neq 0$). Puis on conclut par continuité.
  • C'est quoi un "tenseur" ici ? C'est juste un élément (une section ?) de $(TM)^{\otimes p }\otimes ((TM)^*)^{\otimes q}$ ou il faut un truc en plus ? 
  • Georges Abitbol
    Modifié (November 2021)
    Marco : Merci, je vais regarder !
    Max : Ben mon interprétation du texte, c'est comme tu dis, oui !
    En fait, je m'attendais à ce que quelqu'un.e parmi vous connaisse l'énoncé précis.
    PS. Mince, je me disais qu'il me suffisait peut-être d'écrire directement un courrier à Jacques Lafontaine, mais il est décédé l'année dernière. Je suis un peu triste de n'avoir pas pu le rencontrer et lui dire tout le bien que je pense de son livre...
  • marco
    Modifié (November 2021)
    On doit montrer, je crois, qu'il n'y a pas de famille d'opérateurs linéaires $(L_M)_M$ définies pour toute $M$ variété différentielle, tels que $L_M$ va des sections de $(TM)^{\otimes p} \otimes (TM^*)^{\otimes q}$ dans les sections de $(TM)^{\otimes p} \otimes (TM^*)^{\otimes (q+1)}$, et tels qu'ils commutent aux tirés en arrière par les difféomorphismes (autre que la famille d'opérateurs nuls).

  • Maxtimax
    Modifié (November 2021)
    marco : merci pour l'énoncé plus précis - mais je ne le comprends pas, il me semble faux : la projection canonique $p_V : V^{\otimes n}\to \bigwedge^n V$ est naturelle en $V$, et (en caractéristique $0$) elle a une section tout autant naturelle, donnée par l'application $n$-linéaire alternée $(v_1,...,v_n)\mapsto \frac{1}{n!} \sum_{\sigma \in \mathfrak S_n} \epsilon(\sigma) v_{\sigma(1)}\otimes \cdots \otimes v_{\sigma(n)}$. Je l'appelle $s_V$. Enfin, plutôt, je vais passer au dual et inverser les notations, de sorte que $s_V : (\bigwedge^n V)^* \to (V^\otimes n)^* $ et $p_V : (V^{\otimes n})^* \to (\bigwedge^n V)^*$.
    Je rajoute que $(V^*)^{\otimes n}\to (V^{\otimes n})^*$ donnée par $l_1\otimes \cdots \otimes l_n \mapsto (v_1\otimes \cdots \otimes v_n \mapsto l_1(v_1)\cdots l_n(v_n))$ est un isomorphisme naturel, et on a un truc similaire pour $\bigwedge^n V^* \cong (\bigwedge^n V)^*$.  Je les considère comme des identifications et ne le mentionne plus. 
    En particulier, il semblerait que (pour tout $p$), l'application suivante est naturelle en les difféomorphismes de $M$ : $(TM)^{\otimes p}\otimes (TM^*)^{\otimes q} \to (TM)^{\otimes p}\otimes (\bigwedge^q TM)^* \overset{id\otimes d}\to (TM)^{\otimes p}\otimes (\bigwedge^{q+1}TM)^* \to (TM)^{\otimes p}\otimes (TM^*)^{\otimes q +1}$.

    Par ailleurs, elle est non nulle pour des raisons évidentes (enfin devrais-je dire : tout autant peu nulle que $d$).
    Je dis une bêtise ? 
  • marco
    Modifié (November 2021)
    Tu dois avoir raison. Je crois que j'ai mal retranscrit la condition de commutation avec les tirés en arrière.
  • marco
    Modifié (November 2021)
    Ah, je viens de comprendre... Tu veux dire que l'application que tu as définie est nulle dès que $q$ est supérieur ou égal à $n$, car $d$ est nulle dès que $q\geq n$. Merci. Dans ma "démonstration", $q=0$ et $n=1$, donc elle est fausse.
  • Maxtimax: comment fais-tu pour définir $TM \otimes (\wedge^0TM)^* \rightarrow TM \otimes (\wedge^1 TM)^*$ ? Car si on a $V$ un champs de vecteur, $P$ une fonction $C^{\infty}$ sur la variété et $f$ une fonction $C^{\infty}$ sur la variété, on a $(fV) \otimes P=V \otimes (fP)$. Mais l'image, par $id \otimes d$, de $(fV) \otimes P$ est $(fV) \otimes dP$ alors que l'image de $V \otimes (fP)$ est $V \otimes (Pdf+f dP)$.
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