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Calcul de rendement

Une question adressée plutôt aux intervenant des masters "bourse et placements" : comment se fait le calcul des rendements dans les industries hyperspéculatives.
Je suis tombé sur un cas d'école : le Zolgensma, traitement génétique curatif d'une dégénérescence du motoneurone découvert grâce à la générosité publique (Téléthon) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion-soc/l15b4275_rapport-information (1) dont le brevet a été quasiment donné à la société AveXis, elle-même rachetée plus de 7 milliards d'euros par Novartis, qui vend l'injection 2 millions d'euros ...

Donc en clair comment quantifier et qualifier un rendement d'investissement initial financé par la charité publique ayant abouti au médicament cédé au privé qui le vend à un tarif stratosphérique. En général quand un produit est développé par une entreprise, c'est assez facile, il suffit de prendre en compte les frais de R&D, mais là ils sont quasi nuls.

(1) paragraphe "un flou autour des coûts réellement supportés par les entreprises" ...
"J'appelle bourgeois quiconque pense bassement." Gustave Flaubert

Réponses

  • XAX: à ce prix-là il faut qu'ils vendent au moins $3500$ injections pour compenser la somme déboursée pour le rachat.
    Une bonne part des traitements produits sont financés en partie par de l'argent public (pas seulement le CICE).
  • Bonjour

    @xax :
    Disons que le brevet coûte $X$ million d'euros : il s'agit principalement de recherche et développment (salaire, administration, équipement). Ce coût ne dépend pas de l'origine de l'argent (donation privée ou publique, on s'en fout).

    Pour exploiter ce brevet, il faut injecter une somme conséquente $S$ dans le développement de molécules : ça prend un temps fou en années (disons de 3 à 15 ans). La probabilité de succès est faible.

    Quand une molécule est prometteuse, il faut payer son accéditation : ça coûte des centaines de millions d'euros et ça prend du temps.

    Revenons au début : le brevet ne vaut rien sauf si nous sommes prêts à investir des centaines de millions, avec un retour sur investissement dans le futur (pas un rond pendant des années) et sans certitude de succès.

    Un état ou la recherche publique ne sait pas prendre ce genre de risque : quel homme politique accepterait d'investir 2 milliard sur 10 ans pour tout perdre ? Comment justifier cette perte face au besoin de la société ?

    Les grandes entreprises acceptent ce risque : elles choisissent d'investir des dizaines milliards sur des années pour, en moyenne, former un retour sur investissement acceptable pour les investisseurs.

    Elles bénéficient donc d'une barrière à l'entrée énorme : on ne s'improvise pas entreprise pharmaceutique. Cette barrière permet des rendements moyens satisfaisants.

    Elles externalisent les brevets et même les molécules : les start-ups sont plus agiles, rapides et créatives. Mais aucune n'a les compétences industrielles, commerciales et financières pour lancer un médicament mondial.

    Elles sont donc rachetées par une grande entreprise.

    Il est donc trompeur (et démagogique) de juger les profits d'une telle entreprise sur un brevet ou une molécule : il faut prendre l'ensemble pour moyenner les résultats. La concurrence est la seule à déterminer les entreprises qui ont du succès ou de la chance. Les autres sont rachetées.

    Le calcul de l'achat d'un brevet ou d'une molécule se fait, en gros, comme ça.
    - Quel est l'investissement à venir pour transformer ce brevet ou cette molécule en médicament mondial ? Disons : 2 000 millions.
    - Quel est la durée avant la mise sur le marché ? Disons 10 ans en moyenne.
    - Quels sont les revenus annuel dudit médicament sur la durée restante du brevet ? Disons 500 millions sur 10 ans.

    La valeur nette actualisée est grosso merdo : 1 000 millions.

    L'entreprise offre donc $50$ à $150$ millions à la start-up (disons 5% jusqu'à 15% si le brevet est prometteur).

    Cette somme ne dépend en rien du coût de développement $X.$ Et encore moins de l'origine des fonds. La concurrence varie le prix d'achat de 5% à 15% selon le jugement de l'entreprise, sa stratégie, son besoin d’investissement, etc.

    Si la molécule échoue après les 10 ans de développement (effet secondaire sévère lors de la phase 3), l'entreprise perd 2 000 millions. Elle s'en remettra : ça fait partie de la moyenne. Dans la pratique, les entreprises prennent des décisions de continuer ou stopper le développement en fonction du temps pour éviter une perte de cette ordre de grandeur, mais ça arrive encore...

    Pour être complet, l'entreprise doit estimer le prix de vente futur : combien la société est-elle prête à payer pour un médicament donné ? Si ce prix est trop faible, le médicament n'est pas développé. Il faut donc faire attention à payer suffisamment pour inciter le développement des nouvelles molécules.
  • YvesM, je parlais uniquement du cas du Zolgensma. Il se trouve que le vecteur génétique était complément testé et le procédé de fabrication totalement validé. En clair il n'y avait plus rien d'autre à faire que de produire, ce que confirme les dates : le brevet a été cédé pour un prix dérisoire à AveXis en 2018 et commercialisé pratiquement tout de suite.

    Factuellement ce que tu racontes ne correspond pas à la réalité : rien que pour les thérapie géniques l'investissement décennal de la seule union européenne est de 1 milliard d'euros (source le rapport sus-cité) sur 10 ans justement. Les investissement publics sont considérables et les investissements privés de plus en plus faibles, preuve en est le nombre de chercheur de Sanofi divisé par deux ces dernières années. Le cas de la France est particulier (baisse des crédits recherches auprès de vrais chercheurs et dilapidation des fonds publics via des dispositifs sans contrôle CICE etc.).

    Je pense que l'origine des fonds est significative : en effet, cet argent n'existe pas dans les investissements publics ou privés. D'autre part les thérapies géniques n'intéressaient absolument pas le privé car en cas de traitement adéquat (implant de gène) un seul coup suffit. C'est pour cela que seule la charité publique a permis le financement de la recherche et développement.

    Ce qui m'intéresse donc c'est de quantifier un rendement de ce type ; l'investissement et pour tout dire les intentions du privé lucratif sont nuls, mais les profits considérables.

    Donc on a un rendement qui est de l'ordre de (Chiffre d'Affaire)/$\epsilon$ donc qui tend potentiellement vers l'infini ; c'est quelque chose que je n'ai jamais encore vu (je n'épilogue pas sur le côté éthique qui se passe de commentaire).

    En question subsidiaire j'aimerais bien savoir s'il existe des modèles économiques qui quantifient les rendements de prédation de ce type. Je trouve ce genre de dynamique vraiment spectaculaire.
    "J'appelle bourgeois quiconque pense bassement." Gustave Flaubert
  • Bonjour,

    Les autorités qui valident les médicaments et celles qui fixent les prix savent compter.

    Le rendement se calcule comme un retour sur investissement. C’est tout.

    Je ne comprends pas ce que tu cherches de plus.

    Le brevet n’est qu’une partie du coût et ton epsilon au dénominateur est en fait des centaines de millions ou des milliards d’investissement pour accréditer, fabriquer, distribuer le médicament.

    En économie, on sait que le produit à plus fort rendement dans le monde est la rondelle en laiton pour tuyauterie : en coûte 2 centimes et est vendue 2 euros : fois 100.

    Tu vois qu’on est très loin d’une molécule…

    Regarde le rapport annuel de Sanofi. Tu trouveras des ordres de grandeurs et la profitabilité moyenne.
  • Et bien en fait dans le rapport il est indiqué qu'il n'y a plus de pilotage des productions pharmaceutiques en fonctions des besoins mais uniquement en fonction des coups [coûts ?] financiers (1), nous avons donc une industrie qui s'est totalement financiarisée en une douzaine d'années (2).
    Donc ce que je recherche c'est donc un modèle de développement économique, probablement assez sophistiqué d'un point de vue mathématique, qui doit reposer sur des probabilités d'émergence de nouvelles molécules à forte rentabilité ou la retouche de brevets existant pour empêcher les génériques. Je suis sûr que les choses sont guidés comme ça maintenant, absolument sans aucune autre considération, même pas la santé publique, et même en contradiction avec celle-ci (ce sont les mots du rapport, je ne brode pas(3)).

    Je crois que ce que tu as décris plus haut dans le processus du business pharmaceutique, c'était le storytelling d'il y a 10 ans, je ne crois pas qu'ils osent sérieusement ressortir de tels trucs dans le contexte actuel.

    La rondelle de laiton à 2 € tu plaisantes ? Chez Weldom on te donne un petit sac tu mets ce que tu veux pour 5 €, dont je dirais 0,2€ au max :-)

    (1) le paragraphe "Un secteur de plus en plus financiarisé" fait ce constat mais n'évoque pas de pistes détaillées de changement de business model
    (2) la production de médicaments vitaux mais peu rentables est abandonnée : 44 ruptures de stocks en 2008 contre 2474 en 2020.
    (3) "La financiarisation de l’industrie pharmaceutique s’illustre en outre par ailleurs par quelques pratiques délétères de certaines grandes entreprises pharmaceutiques, en contradiction avec l’objectif d’innovation en santé publique."
    "J'appelle bourgeois quiconque pense bassement." Gustave Flaubert
  • Bonjour,

    @xax :

    Ne te fais pas plus con que tu n'es. On peut faire une lecture financière d'une industrie, ça ne prouve en rien que cette industrie n'est que financière. Elle ne l'est pas. Elle développe et mets sur le marché des médicaments que les sociétés sont prêtes à acheter à un certain prix. C'est tout.

    Une entreprise pharmaceutique en faillite n'est pas utile à la société.

    Opposer financiarisation et noble cause est débile.
  • YvesM a écrit:
    Un état ou la recherche publique ne sait pas prendre ce genre de risque : quel homme politique accepterait d'investir 2 milliard sur 10 ans pour tout perdre ? Comment justifier cette perte face au besoin de la société ?

    Une bonne partie de la recherche en France ne débouche pas sur des profits.
    Qu'est-ce que cela rapporte en retour en argent sonnant et trébuchant un chercheur en histoire qui travaille sur un aspect de la Révolution française par exemple?

    PS:
    Si je lis bien, le budget du CNRS est de 3,7 milliards d'euros en 2021.
  • Tiens YvesM s'agite dans l'insulte, donc on approche de la gruge :-)

    Je me permets de recadrer à ton attention :

    1. un rapport d'information parlementaire https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion-soc/l15b4275_rapport-information expose des changements profonds et rapides dans l'industrie pharmaceutique, et j'ai mis un traitement en exergue, le Zolgensma, conçu avec la charité publique, donné clef en main au business qui en a fait le médoc le plus cher au monde,

    2. je conjecture que le changement rapide de paradigme du business model pharma (du besoin médical au financier exclusif, évolution détaillée dans le rapport) s'est construit sur un modèle économique qui doit être basé sur un arsenal mathématique relevé dont j'aimerais bien connaître les tenants, et qui aboutit à des rendements CA/$\epsilon$ gigantesques, comme en témoigne les dividendes les plus élevés du CAC 40.
    Je suis absolument persuadé qu'un tel truc existe, on ne peut pas réorienter totalement et exclusivement une industrie de cette taille si rapidement sans un modèle de fond bien chiadé et manifestement robuste.
    "J'appelle bourgeois quiconque pense bassement." Gustave Flaubert
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