Mathématiques de l’horloge praguoise
Bonjour,
$\mathbf{1.}$ La suite périodique de longueur $6$ suivante
\begin{equation}
1 \: \: 2\: \: 3\: \: 4\: \: 3 \: \:2
\end{equation} possède une étonnante propriété : il est possible d’insérer des signes $+$ entre des termes opportunément choisis de la suite et des marqueurs de séparation entre les sommes ainsi formées, de manière à obtenir la suite ordonnée des entiers naturels.
Ainsi, en utilisant des virgules pour marqueurs, on forme à partir de la suite périodique précédente
\begin{equation}
1, \: 2, \: 3, \: 4, \: 3+2, \: 1+2+3,\: 4+3,\: 2+1+2+3,\: 4+3+2,\: 1+2+3+4,\:\ldots
\end{equation} et ainsi de suite... On appelle module $m$ de la suite, la somme des nombres composant la « longueur » de la période. Ici $m=1+2+3+4+3+2=15$. La somme des nombres situés avant la $k$-ième virgule est le $k$-ième nombre triangulaire.
C’est ainsi que l’horloge astronomique de Prague sonne les $24$ heures depuis plus de $600$ ans ! Elle a été installée en $1410$ dans la vieille ville par le mécanicien Mikulas de Kadan. Par exemple la cinquième heure $(=3+2)$ est sonnée par une volée de $3$ cloches suivie d’un silence (correspondant au signe $+$) puis une volée de $2$ cloches.
La seizième heure est sonnée par $(1+2+3+4+3+2+1)$ alors que la dix-septième heure l’est par $(2+3+4+3+2+1+2)$.
Cette horloge est à l’origine de beaux problèmes arithmétiques.
Pour les détails, consulter l’article de la revue « The mathematical intelligencer », $\textbf{Prague clocks}$ par Chan Bae, John Conway, Lukas Kohlhase, Sunghyuk Park-Volume $38$, Numéro $1$, année $2016$.
$\mathbf{2.}$ Il y a des années de cela, j’ai fait l’acquisition, chez un libraire indépendant, d’un ouvrage datant de $1852$. Il se présente comme une sorte de thèse sur l’architecture romane et gothique comportant de nombreuses planches illustrées accompagnées de commentaires historiques.
J’ai été frappé par la précision géométrique du dessin. Des petites nefs aux voussures, en passant par les vantaux des portes et les motifs symétriques des clôtures : tout y est décrit avec une rigueur et un sens esthétique admirables.
Pour les amateurs de dessins architecturaux et de géométrie descriptive.
Ces dessins ont plusieurs auteurs Français, Italiens et Allemands. Ils ont été imprimés au milieu du dix-neuvième siècle par l’imprimerie Bestault, 41 rue Dauphine, Paris.
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$\mathbf{1.}$ La suite périodique de longueur $6$ suivante
\begin{equation}
1 \: \: 2\: \: 3\: \: 4\: \: 3 \: \:2
\end{equation} possède une étonnante propriété : il est possible d’insérer des signes $+$ entre des termes opportunément choisis de la suite et des marqueurs de séparation entre les sommes ainsi formées, de manière à obtenir la suite ordonnée des entiers naturels.
Ainsi, en utilisant des virgules pour marqueurs, on forme à partir de la suite périodique précédente
\begin{equation}
1, \: 2, \: 3, \: 4, \: 3+2, \: 1+2+3,\: 4+3,\: 2+1+2+3,\: 4+3+2,\: 1+2+3+4,\:\ldots
\end{equation} et ainsi de suite... On appelle module $m$ de la suite, la somme des nombres composant la « longueur » de la période. Ici $m=1+2+3+4+3+2=15$. La somme des nombres situés avant la $k$-ième virgule est le $k$-ième nombre triangulaire.
C’est ainsi que l’horloge astronomique de Prague sonne les $24$ heures depuis plus de $600$ ans ! Elle a été installée en $1410$ dans la vieille ville par le mécanicien Mikulas de Kadan. Par exemple la cinquième heure $(=3+2)$ est sonnée par une volée de $3$ cloches suivie d’un silence (correspondant au signe $+$) puis une volée de $2$ cloches.
La seizième heure est sonnée par $(1+2+3+4+3+2+1)$ alors que la dix-septième heure l’est par $(2+3+4+3+2+1+2)$.
Cette horloge est à l’origine de beaux problèmes arithmétiques.
Pour les détails, consulter l’article de la revue « The mathematical intelligencer », $\textbf{Prague clocks}$ par Chan Bae, John Conway, Lukas Kohlhase, Sunghyuk Park-Volume $38$, Numéro $1$, année $2016$.
$\mathbf{2.}$ Il y a des années de cela, j’ai fait l’acquisition, chez un libraire indépendant, d’un ouvrage datant de $1852$. Il se présente comme une sorte de thèse sur l’architecture romane et gothique comportant de nombreuses planches illustrées accompagnées de commentaires historiques.
J’ai été frappé par la précision géométrique du dessin. Des petites nefs aux voussures, en passant par les vantaux des portes et les motifs symétriques des clôtures : tout y est décrit avec une rigueur et un sens esthétique admirables.
Pour les amateurs de dessins architecturaux et de géométrie descriptive.
Ces dessins ont plusieurs auteurs Français, Italiens et Allemands. Ils ont été imprimés au milieu du dix-neuvième siècle par l’imprimerie Bestault, 41 rue Dauphine, Paris.
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Réponses
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Je joins l'article en question. Il faut saluer l'esprit encyclopédique de John Conway (1937-2020).
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Comment l'ai-je obtenue, sachant que je me suis imposé la valeur 17 ? En revanche, je n'ai pas encore réfléchi au cas où c'est la longueur de la période qui est imposée...
Remarque. Bien entendu, on peut ne mettre que des 1 ; il me semble en revanche que celle que j'ai donnée est de période minimale pour la somme fixée.
dans ton exemple, $p=9$ et $\displaystyle s=\sum_{i=1}^{9} a_i=17$.
Pour un $s$ donné, on construit une suite $(a_i)$ vérifiant la propriété suivante.
Pour tout $n \in \{1,\ldots,9\}$ et tout $j \in \{1,2,\ldots,a_n-1\}$, le nombre
\begin{equation}
N=8\Big(\sum_{i=1}^n a_i-j\Big) + 1
\end{equation} n’est pas un résidu quadratique modulo $s=17$.
Ça, c’est pour la théorie. En pratique il doit exister un algorithme numérique !
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comment sais-tu que l'on aura $p=9$ ? Est-ce le plus grand entier pour lequel $a_1,\dots,a_n$ existe ? En outre, ton principe suppose-t-il que $s$ est un entier premier ? Ce n'était pas le cas pour l'exemple praguois $s=15$, quoique l'on puisse toujours parler de résidu modulo ce que l'on veut. As-tu essayé $s=12$ ?
Je me demande d'où cette suite périodique de longueur 6 a bien pu sortir. S'agit-il de calculs empiriques et de test répétés jusqu'à ce que ça marche, ou bien y a-t-il une vraie stratégie derrière ? La mécanique des horloges aurait-elle précédée le calcul modulaire ? (ok on peut faire remonter l'origine de ces calculs à l'antiquité, mais le déclic se produit avec Gauss je pense). Le déclic, mais le clic de l'horloge... que sait-on du mécanicien horloger Mikulas de Kadan ?
Au départ, on n’a que la somme de la période $s$.
Mais je ne vois pas comment on peut en déduire la valeur de $p$. Peut-être par le calcul des nombres triangulaires $T_k$ ?
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Les différences entre les éléments de cet ensemble forment une suite dont le nombre de termes est la valeur de $p$ cherchée.
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Par exemple, avec $s=6$, les restes sont 0,1,3,4,(6) et la suite est $1,2,1,2$, qui est la concaténation de deux suites de somme $3$.
Sauf erreur de ma part, pour $s=8$, on obtient $1,1,1,1,1,1,1,1$, suite triviale...
Il doit y avoir bien entendu une arithmétique intéressante là-dessus, ainsi que de bons TD de programmation ; avis aux amateurs de devoirs de début d'année.
Remarque. J'ai omis de dire que, lorsque $s$ est pair, la période de la suite des restes des $T_k$ est $2s$ et non pas $s$, mais que les valeurs prises par ces restes entre $s$ et $2s-1$ sont les mêmes que celles prises entre $0$ et $s-1$ ; il est donc inutile de doubler la période. Une remarque analogue montre que, dans ce même cas, la suite obtenue est la concaténation de deux suites de somme $s/2$ (mais pas forcément de $s$ suites de somme $2$).
Partons de $s=15$ par exemple et de la suite à un élément $(15)$ ; à partir de là, on la découpe à la demande pour "caser" successivement les entiers $1,2,3,...$
Il me faut une cloche : j'écris $1,14$.
Il m'en faut deux, à présent ; j'écris $1,2,12$.
Ensuite $1,2,3,9$, puis $1,2,3,4,5$ qui convient (hasard heureux) pour caser 4,5,6 cloches. Pour en caser sept, je suis obligé de procéder à une nouvelle découpe : $1,2,3,\underbrace{4,3}_7,2$, découpe qui ne remet évidemment pas en cause les associations précédentes.
Enfin, à ce stade, tout convient sans nouvelle intervention : $1,2,3,4,3,\underbrace{2,1,2,3}_8,\underbrace{4,3,2}_9,...$
Le plus grand nombre nécessitant une nouvelle découpe pour « caser » tous les entiers (ici $7$ pour $s=15$) est une nouvelle propriété intéressante de ces suites !
Ludwig: je crois que les travaux théoriques qui ont inspiré le mécanicien de Prague s’appellent « suites de Sindel ».
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j’avoue que je sèche, sans surprises, sur ton problème. Je n’arrive pas à obtenir une suite dont la période contient un $0$.
Pour construire la suite en question, on peut procéder en choisissant $t$ nombres compris entre $1$ et $s$ et tels que $8b_n+1$ soit un carré modulo $s$.
Puis on construit $(a_i)$ en choisissant $a_1=b_1$ et $a_n=b_n-b_{n-1}, \: 2 \leq n \leq t$.
Mais je ne vois pas comment, à partir de ces conditions, faire apparaître la suite $2 \: 0 \: 2\: 1$ dans l’unique suite de période minimale correspondant à $s$.
Est-ce bien en cela que consiste ton problème ? Ou peut-être que je l’ai mal compris.
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Cela dit, j'ai peu réfléchi avec $2021$ et je ne sais pas encore répondre à la question !
Ne serait-il pas plutôt envisageable que ce soit les connaissances avancées des engrenages par les horlogers qui ont guidées le travail de Sindel ? Il aurait formalisé les trouvailles des mécaniciens.
c’est un point d’Histoire des sciences que j’ignorais mais il se trouve que le maître-horloger Mikulas de Kadan s’est associé à un professeur de mathématiques de l’université de Prague, Jan Ondrejuv Sindel, pour la construction de l’horloge.
Les deux aspects (mécaniques et mathématiques) se confondent presque dans cet ouvrage.
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Il étudia la médecine à Vienne, enseigna les mathématiques et l'astronomie à l’université Charles IV de Prague dont il fut nommé recteur en 1410.
Il devint par la suite Docteur en médecine, prêtre catholique, médecin et astrologue personnel de Sigismond et de Venceslas IV roi de Bohême surnommé l’ivrogne.
Bien que peu impliqué dans les querelles religieuses, diverses tensions l’obligent à quitter Prague pour la ville d’Olomouc en Moravie.
Il se trouve qu’il y a une célèbre horloge astronomique à Olomouc: une de ses réalisations ?
Il passera ses dernières années à exercer la médecine à Nuremberg et reviendra à Prague où il mourra en 1457.
Depuis 1982, l’astéroïde 3847 porte son nom.
PS: Sindel n’est pas le frère de Sigismond le Saint Empereur Romain Germanique comme je l'ai écrit. Son frère est Venceslas IV bien sûr.
Désolé pour la méprise due à une tournure ambiguë.
J’ai édité mon post.
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