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Limite pointée et épointée

Bonjour tout le monde,

Je voudrais avoir des retours d'expériences de prof surtout dans le supérieur et en classe prépa sur ce sujet. J'ai réalisé ça il y a pas longtemps en discutant avec mes élèves actuels qui ne sont pas issus de formation française.

Soit $f \colon \R \to \R$ et soit $a,\ell \in \R$.

Quand j'étais "petit" j'ai appris que $f(x) \to \ell$ quand $x \to a$ veut dire que pour tout $\varepsilon > 0$ il existe $\delta >0$ tel que pour tout $x \in \R$ si $\vert x - a \vert < \delta$ alors $\vert f(x)-\ell \vert < \varepsilon$. Cette définition porte le nom de "limite pointée".

Mais il existe une version légèrement différente: $f(x) \to \ell$ quand $x \to a$ veut dire que pour tout $\varepsilon > 0$ il existe $\delta >0$ tel que pour tout $x \in \R$ si $0 < \vert x - a \vert < \delta$ alors $\vert f(x)-\ell \vert < \varepsilon$. Cette définition porte le nom de "limite épointée".

La différence est qu'on autorise $x = a$ dans la première et pas dans la seconde. Ainsi la fonction $f(x) = 0$ partout sauf $f(0) = 1$ n'admet pas de limite en 0 pour la première définition mais admet 0 comme limite en 0 pour la seconde.

Evidemment pour un mathématicien chevronné ca ne pose pas vraiment de problème de prendre l'une ou l'autre mais ce n'est pas le cas des élèves. Ca a un certain nombre de conséquences, qui sont bien détaillé dans un document de Perrin sur le sujet (notamment qu'avec la limite pointée si la limite existe alors nécessairement $f(a) = \ell$, ie $f$ est continue en $a$).

Le point gênant c'est que la limite pointée est un truc franco-français. C'est la version officielle des programmes de lycée et de prépa (et apparemment c'est celle choisie par Bourbaki je n'ai pas vérifié) mais dans le reste du monde, tout le monde utilise la limite épointée (cf par exemple Wikipédia, les grands livres de référence d'analyse internationale style Rudin, Apostol, ou n'importe quel poly de cours en langue étrangère).

Je voulais donc savoir quelle version vous enseignez et pourquoi. Et si vous avez des retours d'expériences là-dessus ca m'intéresse !

PS: d'ailleurs à ce propos les pages Wikipédia ici et auraient bien besoin d'un coup de plumeau sur ces notions...

Réponses

  • C'est un sujet assez sensible, je me souviens d'avoir lu un article complètement hystérique qui se servait de cette différence de définition pour expliquer qu'en France tout allait mal, qu'on faisait n'importe quoi, que le niveau baissait etc (ce qui est sans doute vrai par ailleurs mais c'est indépendant de ce problème).

    Globalement, le document de Perrin que j'ai lu il y a un certain temps, m'avait bien plu. En gros il dit qu'il faut prendre le problème de façon apaisée, être cohérent avec ses définitions, et que tout ira bien.

    Personnellement je préfère la définition française, de Bourbaki donc. Ca fait une théorie plus belle, qui se généralise mieux à plus de variables, voire aux espaces topologiques. C'est la définition utilisée en prépa, aussi.
  • Je suppose que tu parles de cet article.

    Sinon je suis d'accord je prends le problème de manière apaisé ;) c'est juste pour avoir un aperçu de ce que font les gens et avoir des arguments intéressants ! Pourquoi tu dis que ca se généralise mieux à plusieurs variables ? Et mentionnes-tu l'existence de la limite épointée à tes élèves (si tu enseignes) en plus de la limite pointée ?
  • Bonjour,
    je ne pense pas que la définition "pointée" soit celle de Bourbaki, car en 1979, j'ai eu droit à la définition "épointée" et je ne crois pas qu'à l'époque on se soit permis de sortir de sa définition (surtout A Warusfel dont je joins la copie d'un extrait du manuel).
    Je me souviens que l'affaire m'avait un peu perturbé, car je jugeais ce choix "inutilement compliqué", mais après on s'habitue.

    Voici la façon dont le manuel "Aleph1" (Hachette 1976) introduisait la notion de limite. On voit que c'est assez précis. Je rappelle qu'à l'époque on introduisait la notion de continuité puis celle de limite en première CDE, la notion de suite numérique n'étant vue qu'en terminale.

    Cordialement.
  • Heu ...Mathurin,

    les programmes étaient définis par l'inspection générale, pas par Bourbaki. Si je me souviens bien, à cette époque, dans les sections F (devenues STI, puis STIDD), nous avions depuis longtemps laissé de côté toute allusion aux limites épointées, pour porter l'accent sur les utilisations réelles de la notion de limite (jamais dans le domaine de continuité, donc seulement en des points particuliers où suffisent les limites à droite et à gauche).
    Puis cette idée raisonnable (ne pas perdre du temps avec les complications d'une définition qui les introduit) est devenue la règle avec la notion actuelle de limite, que j'ai ensuite enseignée en S. D'ailleurs ce qui était possible avec les élèves triés, choisis sur leurs capacités mathématiques de troisième type I, poussés ensuite, devenait très délicat avec le collège unique et la seconde "de détermination" (unique aussi). Pour les élèves, ces subtilités semblaient du pinaillage.

    Cordialement.

    NB : Il me semble que la limite de Bourbaki (suivant un filtre) permet de définir aussi bien une limite épointée qu'une limite "pointée".
  • Bonjour gerard0 et merci de ta réponse,

    je pense qu'il y a plusieurs questions :

    - sur Bourbaki, tu as bien sûr raison, mais ton NB fait aussi tomber l'argument de ceux qui l'appellent à la rescousse pour justifier la version "pointée".
    Je me contentais de mentionner qu'A Warusfel, ancien membre de la commission Lichnerowicz, ne serait jamais allé contre une recommandation explicite des membres du groupe Bourbaki (qui en tant que tel n'a jamais fait de pédagogie).

    - la question suivante est le choix de la bonne méthode d'introduction de la notion de limite, selon les publics visés.
    La méthode "épointée" est au premier abord un peu plus complexe, mais elle a l'avantage d'être internationale. Elle se prête ensuite bien à l'étude de cas un peu "tordus" que l'on peut rencontrer.
    Le manuel que j'ai cité s'adressait aux classes de C,D et E, soit l'équivalent des S actuels.

    Je suis également d'accord avec toi pour dire que ce qui empêche l'enseignement de la version "épointée" en première S aujourd'hui, est ce que l'on regroupe sous le nom de "collège unique" (pas de classes de niveaux au collège) et la seconde indifférenciée, ce qui oblige à enseigner aux élèves, théoriquement, sélectionnés pour les sciences en première, ce que l'on enseignait autrefois au collège dans les classes de "niveau avancé".

    Là où nous divergerons peut-être est que je crois que pour des physiciens et ingénieurs "à la française" (c'est à dire de bon niveau), il est nécessaire tôt ou tard de revenir à la version "épointée" (ce qui du coup créée une difficulté supplémentaire).

    - Il me semble que la question est plus générale encore : Veut-on n'avoir pour ingénieurs en France que des "techniciens supérieurs ayant de la bouteille", ou bien des gens ayant une véritable culture scientifique ?

    Le système actuel me semble vouloir que les ingénieurs et scientifiques français, soient des gens ayant d'abord reçu une formation de techniciens. Dans mon cas personnel, étant d'une famille nettement "littéraire", je sais que si l'on m'avait présenté au lycée les maths et la physique comme elles le sont de nos jours, j'aurais choisi de faire du droit ou de la communication. C'est la subtilité qui créée l'intérêt, même si le métier d'ingénieur est de rendre simple des choses naturellement compliquées.
    Mais cela mériterait un autre fil.

    Cordialement
  • La méthode "épointée" ... se prête ensuite bien à l'étude de cas un peu "tordus" que l'on peut rencontrer.
    Pourquoi ?
    e crois que pour des physiciens et ingénieurs ... il est nécessaire tôt ou tard de revenir à la version "épointée"
    Pourquoi ?

    Ça manque bigrement d'argumentation.
  • J'ai pratiqué et enseigné les deux versions, il n'y a aucun avantage à utiliser la version épointée sauf justement :
    Elle se prête ensuite bien à l'étude de cas un peu "tordus" que l'on peut rencontrer.
    quand les cas tordus ont été fabriqués par les tenants de cette définition.
    Elle ne sert pas vraiment au niveau lycée, ni probablement L1-L2 sauf si on l'enseigne. Car ces "cas tordus" sont justement des cas limites. Et comme il est facile "d'épointer" une limite classique, on traitera ces cas tordus avec l'outillage utile.Pas la peine de compliquer les choses pour d'autres.

    A priori, Warufsel appliquait les programmes, pas les habitudes bourbakiennes. Donc ton interprétation de ce qu'il a écrit n'est que des suppositions sans fondement. Et il suffit de voir les contorsions qu'il fait pour rendre "naturelle" la définition qu'il doit présenter pour se rendre compte qu'il n'est pas à l'aise. D'ailleurs, 90% de ce chapitre devaient passer au dessus de la tête des élèves, dans les lycées "normaux". Ce fut le cas dans mes classes de lycée quand j'y étais élève, et une bonne moitié de ma promo MP à la fac était en difficulté avec le "calcul des epsilons". Dont une majorité d'anciens bons élèves de science ex et une grande partie de bons élèves de Maths élem.

    Je suis aussi très surpris par la référence aux physiciens, qui utilisent essentiellement des modèles continus ou des suites pour les modèles discrets.

    Cordialement.

    NB : Ce n'est pas parce qu'une notion est utilisée par les pays anglo-saxons qu'elle est meilleure ! Les pieds, pouces, yard et mile sont déraisonnablement compliqués, par exemple.
  • Rebonjour,

    Ce qui est bien avec les mathématiques, c’est qu’elles sont implacables. Au temps pour moi !
    Suite aux remarques de GaBuZoMeu et gerard0, j’ai réétudié la question et il apparait qu’il n’y a pas de justification sérieuse pratique à s’accrocher au cas épointé.
    Il apparait bien que la solution « œcuménique » proposée par Zo! est la bonne : il suffit de mentionner la partie du domaine de définition dans laquelle sont inclus les voisinages du point « a » où l’on cherche la limite. C’est en tout cas celle qu’utilise mon Ramis Deschamps (« cours de maths spés », Masson 1976) qui introduit directement la notion de limite dans le cas des espaces topologiques par ce qui suit. (Où « V anglaise » indique l’ensemble des voisinages d’un point).


    Pour la dérivation en evn, il utilise en revanche une limite épointée.
    C’est probablement la cause du choix de l’Aleph1 de 1ère : aligner la définition générale de la limite avec celle qui est utilisée dans le calcul du nombre dérivé en a. En effet celui-ci est défini comme la limite épointée du taux d’accroissement de la fonction en a. Le caractère épointé est obligatoire puisque ce taux d’accroissement n’est pas défini en a.
    Si je n’ai pas commis de nouvelle erreur, le choix de la limite épointée ou pas dans le cas réel, se règle donc simplement en mentionnant l’ensemble dans lequel se situent les voisinages où l’on travaille.

    Par ailleurs, les programmes de 1970 ne précisent pas le type de limite à utiliser (peut-être leurs commentaires), mais A Warusfel était très proche de leurs rédacteurs. Ensuite il s’agit plus d’habitude internationale que strictement anglo-saxonne.
    Enfin je voudrais défendre vigoureusement les « epsilons » ; certes il y a peut-être mieux comme première approche intuitive de ces notions, mais nous avons tous besoin (justement parce que nous évoluons dans un monde incertain) d’avancer en terrain simple et sûr. Or en fin de compte seul le rigoureux est simple, ce qui est bon, tant pour les ingénieurs que pour les physiciens.
    Cordialement.61200
  • Héhéhé a écrit:
    > Bonjour tout le monde,
    >
    >
    > Le point gênant c'est que la limite pointée est
    > un truc franco-français.
    >


    Pourquoi est-ce gênant ?
    La seule raison d'adopter la définition Weierstrassienne de la limite (pour des fonctions de R dans R) c'est pour dire aux élèves que la limite en un point a ne dépend que des valeurs de la fonction dans un voisinage de a et pas de valeur eventuelle que la fonction prends au point a. C'est peut-être un tantinet plus intuitif que la définition de Bourbaki. Mais il n'y pas de bon ou de mauvais choix. Les deux choix sont corrects, il suffit de ne pas employer les deux définitions au même temps pour éviter des contradictions.
    Et non, la définition Bourbakiste de la limite n'est pas une spécificité française. Elle est aussi employée dans d'autres pays y compris les Etats-Unis.
  • Parce que malgré la volonté d'un certain nombre de politiciens de nos jours, la France n'est pas seule au monde. Nos étudiants vont étudier dans des facs à l'étranger, nous accueillons nous-même des étudiants étrangers, sans compter la recherche qui se fait à un niveau international, s'entendre sur des définitions de base ne me semble pas inutile...

    Je ne dis pas qu'il faut adopter la limite épointée (je n'ai pas d'avis sur la question et ça ne change pas grand chose finalement). Je regrette juste que mes professeurs ne m'aient pas dit au moment de m'enseigner ça: "attention ailleurs on utilise une autre notion légèrement différente, gardez bien cela en tête". J'imagine certains de nos étudiants avoir connu des moments de solitude et d'incompréhension à l'étranger...

    Si tu as des sources non françaises qui utilisent la limite pointée je suis preneur ;)
  • Juste une remarque historique : j'ai fait mes études en France, et la définition de la limite utilisée était celle de la limite épointée ( en 1969).
    Je me souviens nettement de la définition de la continuité.

    La fonction $f$ est continue en $a$ ssi $\lim\limits_{a} f=f(a)$.
  • Le vénérable « Pisot-Zamansky » de 1963 faisait dans l' « épointé ». Je joins néanmoins une définition « pointée » prise dans le cours du professeur Daniel Ponasse, Faculté des Sciences de Lyon, 1963/64.

    Il me semble effectivement que dans les années 1970-80 la définition « épointée » était en vigueur en Terminale C et en prépa : j'ai sous les yeux un manuel de prépa-HEC de 1981 qui donne cette définition.

    La version « épointée » me semble singulièrement maladroite. On ne voit pas pourquoi exclure spécialement le point. Un des défauts de cette définition c'est qu'elle ne permet pas de composer les limites. Soit $f(x)=0$ si $x \neq 0$ et $f(0)=1$. Alors $f(f(0))=0$ et $f(f(x))=1 $ si $x \neq 0$. D'où : $\displaystyle \underset{x\rightarrow 0 }{\lim } f(x)=0 $, mais $\displaystyle \underset{x\rightarrow 0 }{\lim } f(f(x))=1 $.

    De nos jours en MPSI le programme est évasif sur cette question : http://www.maths-france.fr/MathSup/mathematiques-mpsi-2013.pdf. Et je pense qu'il a raison, il suffit de préciser l'ensemble de définition de la fonction, comme disent d'autres intervenants, comme Mathurin, c'est la « définition œcuménique » selon GaBuZoMeu.

    Et j'en ai un peu ras la casquette des arguments selon lesquels la définition « pointée » serait mauvaise parce que « franco-française ». Depuis des siècles nous avons une école mathématique « franco-française » qui est une des premières du monde, et l'on ne voit pas pourquoi elle devrait se plier à des usages étrangers, sauf s'ils se révèlent meilleurs. Nous ne faisons pas cours spécialement à l'intention d'étudiants vagabonds et hors-sol.

    Bonne soirée.
    Fr. Ch.
  • 1) Personne n'a dit que la limite pointée est mauvaise car franco-française, je regrette juste que les définitions alternatives ne soient pas toujours mentionnées.

    2) Vu que la grande majorité des étudiants partent à l'étranger au moins une fois dans leurs études (je rappelle qu'un stage, en industrie ou laboratoire, à l'étranger est très souvent obligatoire dans les écoles d'ingénieurs), ta dernière réflexion me parait étrange. On vit dans un monde globalisé, qu'on le veuille ou non !

    Désolé d'être un peu sec sur ce coup là mais j'ai l'impression que c'est une réflexion typique d'un prof du secondaire (j'inclue la prépa) qui n'a jamais quitté le petit cocon du système d'éducation française. Il existe un monde en dehors avec lequel il est bon de composer. Les élèves sont les premiers demandeurs à vouloir connaitre les nomenclatures utilisées internationalement, et ils ont bien raison.
  • Il y a quoi comme théorèmes qui doivent être modifiés selon l'une ou l'autre définition ?
  • Et puis...je ne vous raconte pas pour certains raisonnements où on choisit une suite, arbitraire, $(a_n)_n$ qui tend vers $a$ mais surtout avec aucun des termes n'égalant $a$ car sinon ça fausserait le raisonnement et patati et patata. Puis lorsque l'on compose par $f$, comme le dit @Chaurien, il faudrait s'assurer que les images ne sont pas égales à $f(a)$ sinon "pan-pan-cul-cul"...

    Comme cela a été dit, exclure une valeur, pourquoi ?

    Dans plusieurs définitions, on préfère le "inférieur ou égal" au "strictement inférieur" (toute proportion gardée).

    Bon, c'est peut-être subjectif...en effet...
  • @ Héhéhé
    D'abord on écrit « j'inclus », ce n'est pas le verbe « incluer », il y a des verbes qui ne sont pas du premier groupe, sais-tu ? http://la-conjugaison.nouvelobs.com/du/verbe/inclure.php
    Ensuite, si tu regardes mes messages tu verras que le prof-du-secondaire que je serais selon toi cite en majorité des références anglo-saxonnes, non par anglomanie mais parce que je cite tout ce que je trouve d'intéressant, quelle qu'en soit la provenance. Alors tes remarques sur le « cocon » et tout ça, tu peux te les garder, pour ne pas dire plus.
  • Quand on sait pas quoi dire, on pointe les fautes d'orthographes.
  • Héhéhé a écrit:
    1) Personne n'a dit que la limite pointée est mauvaise car franco-française, je regrette juste que les définitions alternatives ne soient pas toujours mentionnées.

    2) Vu que la grande majorité des étudiants partent à l'étranger au moins une fois dans leurs études (je rappelle qu'un stage, en industrie ou laboratoire, à l'étranger est très souvent obligatoire dans les écoles d'ingénieurs), ta dernière réflexion me parait étrange. On vit dans un monde globalisé, qu'on le veuille ou non !

    Dans ce cas, il y a beaucoup de choses à mentionner, et pas que sur les limites : $\N$ qui ne contient pas $0$ pour certains, "increasing" qui signifie strictement croissante en anglais, "positive" qui signifie strictement positif, etc. Du coup, plutôt que faire un catalogue complet qui risque d'embrouiller les étudiants, leur dire simplement "attention si vous bossez sur des bouquins étrangers, les définitions risquent de ne pas être tout à fait les mêmes" me semble suffisant.
  • Tant qu'à discuter la définition de la convergence, je propose de s'affranchir de l'hypothèse « $a$ un point adhérent au domaine de définition de $f$ » qui alourdit inutilement les énoncés. On l'ajoutera seulement là où elle est pertinente : principalement le théorème d'unicité des limites (et on réservera la notation $\lim$ à cette situation, ce qui évitera bien des abus).
  • Il faudra aussi importer les "nombres non négatifs", ou "les fonctions non décroissantes" (*) pour ne pas se marginaliser?

    Soit $E$ un ensemble non vide. Soit $\mathcal F$ un ensemble de parties de $E$, il y a équivalence entre les énoncés suivants:

    1°) Il existe un espace topologique $X$, une fonction injective $i:E\to X$ et un point $a$ adhérent à l'image de $i$, tel que $\mathcal F$ est l'ensemble des $i^{-1}(V)$ où $V$ parcourt l'ensemble des voisinages de $a$
    2°) $\mathcal F$ est un filtre.

    Donc en l'espèce, finalement si $Y$ est un espace topologique, une fonction $f:E \to Y$ converge suivant le filtre $\mathcal F$ vers $\ell$ si et seulement si $f \circ i^{-1}(t)$ converge au sens des limites épointées vers $\ell$ lorsque $t$ tend vers $a$.

    [size=x-small](*)google+"nondecreasing" pour une séance de fous rires, ou d'indignation selon les sensibilités [/size]
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Les espaces topologiques (non métrisables) sont assez marginaux dans les cursus étudiants les plus répandus, on peut donner un résultat un peu similaire dans le cas métrique.
    Soit $(B_n)$ une famille de parties non vides d'un ensemble $E$, décroissante ($\forall n \in \N, B_{n+1}\subseteq B_n$ et telle que $\bigcap_{n \in \N}B_n=\emptyset$). Si $x \in \N$ on pose $\nu(x)=\min \{n \in \N \mid x \notin B_n\}$. Soit $X$ l'espace vectoriel de toutes les applications bornées de $E$ dans $\R$ muni de la norme $\|u\|_{\infty}:= \sup \{|u_t|: t \in E\}$. Si $x \in E$ posons $i(x)(t):=0$ si $t \neq x$ et $\frac{1}{\nu(x)}$ si $x =t$. Bon il est clair que $0$ est adhérent à l'image de $i$ que nous noterons $A$, et que $i$ est injective; d'autre part si $Y$ est un espace topologique, $\ell \in Y$ et $f:E \to Y$, alors :
    $$\lim \limits_{x \to 0, x \in A} f \circ i^{-1} (x) = \ell \iff \forall V \text{ voisinage de } \ell, \exists n \in \N, f(B_n) \subseteq V$$.

    Quand $Y$ est un espace métrique le critère devient donc : $f \circ i^{-1}(t)$ converge au sens des limites épointées quand $t$ tend vers $0$ si et seulement si $\forall \varepsilon >0 \exists n \in \N \ \forall x \in B_n, d(f(x),\ell)<\varepsilon $. On est en situation familière.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Dans Bourbaki, la limite est définie à partir de filtres (dommage que Henri Cartan n'ait pas dénommé « philtre » son invention). Je ne pense pas que ce groupe ait été directement pour quelque chose dans les programmes de 1970. Il était plutôt comme une référence plus ou moins mythifiée pour les adorateurs des dites « math-modernes », dont j'étais à l'époque, quoique plus modérément que d'autres - la jeunesse est aussi le temps des bêtises.

    Dans Jean Dieudonné, Fondements de l'Analyse moderne, Gauthier-Villars, 1969, 1972, III, 13, la limite est définie sans exclure explicitement aucun point, en jouant sur l'ensemble de définition. Notons que ce n'est pas une référence « franco-française », puisque la première édition de ce traité, en 1960, reprenait le cours de l'auteur à la Northwestern University de Chicago, s'est faite en anglais (Fundations of Modern Analysis, Academic Press ed.), et a été bien accueillie par nos cousins états-uniens : https://projecteuclid.org/download/pdf_1/euclid.bams/1183524143
    Traduit ensuite en français par Denise Huet, il a constitué le premier volume des monumentaux « Éléments d'analyse », publiés directement en français à partir du tome 2, et bien sûr traduits ensuite en anglais.

    Bonne journée.
    Fr. Ch.
  • Il me semble, d'un point de vue un peu terre à terre et pragmatique, qu'il est important de prendre une définition de limite qui permet d'affirmer que la fonction $f$ définie par $f(x) = 0$ sur $\R\backslash \{0\}$ et $f(0)=1$ a une limite en $0$ qui vaut $0$. C'est un exemple fondamental pour les élèves pour qu'ils comprennent que prendre une limite est plus subtil qu'évaluer en le point.
  • @ cyrano
    Il n'est pas évident que ce soit si important. Avec la définition « pointée », cette fonction n'a pas de limite en 0, et c'est peut-être mieux ainsi. Le mieux est probablement de préciser l'ensemble décrit par la variable.
  • Cyrano,

    elle sert à quoi, ta fonction, sinon comme joujou pour les différentes définitions de limite ?

    Cordialement.
  • @gerard0 : La notion de limite étant en général assez mal expliquée en secondaire (parfois ils n'ont plus de définition en $\epsilon, \eta$ mais juste un petit dessin suggérant la définition), je me retrouve avec énormément d'élèves qui pensent que $$\lim_{x\to x_0} f(x) = f(x_0)$$ est toujours vrai. (Pour autant que la fonction soit définie en $x_0$) Bien sûr ils sentent bien au fond d'eux que c'est bizarre, que la notion de limite n'aurait aucun intérêt si ça devait se passer ainsi. La fonction que je donne est pour moi un des exemples les plus basiques à construire puisqu'elle est définie en $0$ mais qu'on a $\lim_{x\to 0}f(x) = 0$ et $f(0)=1$.

    @Chaurien : Oui ça ne change pas grand chose. J'ai l'impression que psychologiquement ou visuellement, ça passerait mieux avec une valeur qui vaut $0$ qu'avec une limite qui n'existe pas, mais je me fais peut-être des idées. Après, personnellement on m'a enseigné la limite pointée et malgré tout je croyais à l'époque que la limite de $f$ valait $0$. (Or comme tu le rappelles elle n'existe pas en version pointée) Ca me semblait plus "naturel" que la réponse soit $0$.


    EDIT : Après mûre réflexion, je suis d'accord avec Chaurien. Le meilleur consensus est probablement de prendre la limite pointée (définition plus simple et pratique) et à côté de ça de prouver que $$\lim_{x\to 0, x\neq 0} f(x) =0.$$
  • Cyrano,

    effectivement, cette idée est un peu construite par l'usage primordial des fonctions continues et le fait que l'on ne cherche les limites qu'aux bornes ouvertes des domaines de définition. Le travail sur les limites n'est pas un objectif du secondaire; j'ai même enseigné à une époque les dérivées sans utiliser les limites : C'était le programme des classes de brevet de technicien (transformé depuis en bac).

    Cordialement.
  • Mon soucis avec la limite épointée c'est que la caractérisation séquentielle passe plutôt mal, alors que je la trouve fort pratique pour faire comprendre des choses.
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