Les filles vraiment nulles en math ?

Bonjour à tous,

Voici une vidéo qui a été mise en ligne sur youtube il y a quelques jours : Les filles sont-elles vraiment nulles en math ? (Titre plutôt racoleur, mais bon, c'est youtube...) C'est plutôt bien fait, et des études (plus ou moins récentes) y sont mentionnées, ce qui pourrait apporter quelques pistes de réflexion sur ce sujet qui a été abordé plusieurs fois sur le forum.

Sur la vidéo proprement dite, il y a sans doute quelques commentaires à faire :

1) Il faut préciser que les stéréotypes sont néfastes dans les deux sens. En reprenant l'expérience de la vidéo, si les filles sont "poussées" à être moins performantes en géométrie, il en est de même pour les garçons en dessin. L'enjeu est de donner une éducation équilibrée aux enfants, et il serait dangereux de tomber dans le délire de persécution de certaines féministes.

2) Si la vidéo justifie de manière convaincante que les idées préconçues ont un impact sur les performances (et non sur les compétences, pour reprendre les mots de la vidéo), cela ne montre pas que la différence homme / femme est un produit à 100% d'origine sociétale. S'il est raisonnable de penser qu'il n'y a pas de réelle différence entre hommes et femmes au niveau des possibilités cognitives, cela ne veut pas dire qu'il n'existe pas de différences (à différents niveaux, comportementaux par exemple) d'origine biologique. D'ailleurs, il me semble qu'il y a également des études qui vont dans ce sens. (Ce qui est logique si l'on regarde le comportement d'autres animaux.)

3) Le faible pourcentage de femmes dans le monde mathématique est mentionné. Si l'on tient compte de la remarque précédente, ce n'est pas nécessairement un problème. Il est possible que génériquement la carrière de mathématicien intéresse moins les femmes. Bien sûr, cela reste à déterminer, et il faut s'assurer que cela n'est pas révélateur d'un problème plus grave. Mais il ne faut pas tomber dans l'attitude (stupide) consistant à forcer la représentation féminine sans chercher les causes de cette situation. D'ailleurs, depuis l'instauration de quotas dans les comités, certaines mathématiciennes refusent d'y participer, jugeant que leur participation est recherchée pour leur sexe et non pour leur qualité de mathématicien. J'ai également eu échos de situation assez pénibles dans l'organisation de jurys de thèse, à cause de quotas similaires. Enfin bref, il s'agirait de faire les choses intelligemment.

4) Les quelques suggestions faites à la fin de la vidéo me semblent être "dangereuses". Il ne s'agit que de pistes de réflexion, évoquées rapidement, mais elles peuvent être très facilement interprétées au pied de la lettre et conduire à des dérives assez dérangeantes. J'aurais apprécié plus de précautions sur ce passage.

Au-delà de tout ça, ce qui me dérange, ce n'est pas tellement l'existence de stéréotypes fille / garçon plus ou moins conscients, mais à quel point les enfants sont influençables. Et pas seulement les enfants, ça fonctionne également avec les adultes. Quand je vois l'efficacité de la publicité, je suis atterré. Je n'arrive pas à concevoir ce qui pousse quelqu'un à acheter un nouveau casque pour avoir le même que celui François Hollande sur son scooter, vidant les stocks de l'entreprise... En fait, mon sentiment est que toute cette histoire de stéréotypes n'est pas réellement pertinente. Aujourd'hui, il me semble qu'il n'y a plus vraiment d'obstacles pour une femme de devenir mathématicien ou plus généralement scientifique (hors cas particuliers, je parle de manière générique). Tout ce qu'il faut, c'est s'assurer qu'une personne (homme ou femme) ait la possibilité de faire ce pour quoi elle est douée. Et cela ne se fait pas, du moins il me semble, par une chasse aux sorcières sur les stéréotypes qui se cachent perfidement dans notre société, mais par une éducation critique de la population. Former des esprits indépendants, critiques, ouverts au questionnement sur ses convictions. Mettre en avant la lutte homme / femme me semble être un piège idéologique dangereux : on apprend aux enfants "l'égalité des sexes", mais ils n'en seront pas plus tolérants, ils seront simplement adeptes d'une nouvelle idéologie. (D'ailleurs, cette idée s'applique à d'autres contextes.)

Je ne sais pas si ouvrir une nouvelle discussion sur le sujet va réellement apporter quelque chose, mais cela ne peut pas faire de mal non plus.
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Réponses

  • Bonsoir,

    une première remarque : à 9min06, les trucs que j'interprète comme des barres d'erreurs sont énoooormes ! Je ne suis pas statisticien, mais ça m'a l'air bizarre ; j'espère que des spécialistes sauront m'éclairer.

    Voici mes réponses, point par point :

    1) Oui, les stéréotypes jouent dans les deux sens, mais où veux-tu en venir ? Il s'agit d'essayer de comprendre pourquoi il y a si peu de femmes en maths, n'est-ce pas ? Je ne sais pas si les hommes sont sous-représentés dans les filières "artistiques". Par contre, quand tu parles du "délire de persécution" de certaines féministes, je trouve que c'est un peu dur d'utiliser ce terme, d'autant plus que je ne sais pas de quel "délire" tu parles, et tu n'argumentes pas sur l'existence dudit délire. Je rappelle que le féminisme est un combat pour faire disparaître les inégalités basées sur le genre.

    2)
    Seirios a écrit:
    cela ne montre pas que la différence homme / femme est un produit à 100% d'origine sociétale

    Non, certes, mais qui affirme ça ? D'autre part, je pense à une chose assez banale : vue la plasticité du cerveau, par exemple, n'est-il pas tout à fait plausible que des stéréotypes martelés dès le plus jeune âge conduisent, plus tard, à des comportements très différenciés selon les genres ?
    De quelles études (allant dans le sens de l'existence de différences d'origine biologique) parles-tu ?

    3) C'est sûr que si on est misogyne, cela ne nous pose pas de problème qu'il y ait peu de femmes en maths. Veux-tu dire que s'il y avait des différences d'origine biologique des capacités cognitives en fonction du genre, cela ne poserait pas de problème qu'il y ait peu de femmes en maths ? Je tente une analogie : s'il y avait une forte corrélation entre genre et cancer (les hommes auraient plus de cancers que les femmes, et les personnes ayant un cancer seraient plutôt des hommes, disons), est-ce tu veux dire qu'il n'y aurait pas de raison de plus développer la recherche contre les cancers masculins ?
    Seirios a écrit:
    Il est possible que génériquement la carrière de mathématicien intéresse moins les femmes

    C'est très probable. Mais pourquoi ? Si c'est dû à des stéréotypes, je trouve ça dommage.

    Tu critiques ensuite la démarche qui consiste à établir des quotas, mais c'est, à mon avis, hors-sujet. Je pense qu'il faut se mettre d'accord sur le problème avant de débattre des moyens de le résoudre ! En outre, je ne suis pas sûr qu'établir des quotas favorise la résolution du problème, mais je ne vois pas pourquoi tu es si catégorique sur cette méthode. Si l'idée est qu'en forçant la balance à se rééquilibrer pendant quelques générations afin de "reprogrammer" les stéréotypes, je pense qu'il est possible que ça puisse marcher.

    4) D'accord sur le fait que le type extrapole, même à la fin de chacune des expériences qu'il présente, et ça m'a gêné.
    Seirios a écrit:
    Aujourd'hui, il me semble qu'il n'y a plus vraiment d'obstacles pour une femme de devenir mathématicien

    Hahahaha, je te dirais bien qu'il y a un obstacle de taille : je pense qu'une femme va avoir du mal à devenir mathématicien, mais aussi maïeuticien ou charpentier. Mais pardonne-moi cette digression inclusive ! J'ai envie de te demander ce que tu en sais ? D'où tires-tu cette impression ? De ton expérience personnelle ? A supposer que tu es un homme (statistiquement, tu dois en être un :-D), tu n'aurais pas toi-même rencontré ces stéréotypes de la même manière qu'une femme les aurait subis, non ? Et quand bien même, une expérience personnelle ne vaut jamais grand chose ("moi j'ai guéri du cancer avec l'homéopathie").
    La vidéo mentionne que les stéréotypes peuvent avoir une influence s'ils viennent de la mathématicienne en devenir, mais aussi des profs. Sur ce site, on peut essayer de jouer à un jeu qui explore les stéréotypes qui sont ancrés en chacune ou chacun de nous. Moi qui pensais être féministe, je me suis découvert plein d'automatismes misogynes et racistes, par exemple. Même en voulant faire "bien", je ne peux être sûr de ne pas avoir moi-même renforcé des stéréotypes négatifs au cours de mes enseignements à la fac !
    Au fait, la pub (et les stéréotypes) marche même quand on est conscient ou consciente d'y être exposée ou exposé !
    Seirios a écrit:
    Tout ce qu'il faut, c'est s'assurer qu'une personne (homme ou femme) ait la possibilité de faire ce pour quoi elle est douée

    Moi, je préférerais que toute personne ait la possibilité de faire ce qui lui plaît, mais bon, pourquoi pas.

    Par contre, je pense que c'est utile de faire la chasse aux stéréotypes, parce qu'on a quand même l'espoir de minimiser leurs effets.
    Seirios a écrit:
    on apprend aux enfants "l'égalité des sexes", mais ils n'en seront pas plus tolérants

    Je suis d'accord si on rajoute "forcément" avant "tolérants".
  • Désolé de dire ça aussi abruptement, mais le fait que tu penses que "Aujourd'hui, il me semble qu'il n'y a plus vraiment d'obstacles pour une femme de devenir mathématicien ou plus généralement scientifique" montre que tu ne connais pas le sujet. Renseigne-toi sur des sources sérieuses, des études (autres que des vidéos Youtube...) et tu verras que ce n'est absolument pas le cas.
  • C'est quoi les obstacles, en fait?
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • 1) Oui, les stéréotypes jouent dans les deux sens, mais où veux-tu en venir ? Il s'agit d'essayer de comprendre pourquoi il y a si peu de femmes en maths, n'est-ce pas ? Je ne sais pas si les hommes sont sous-représentés dans les filières "artistiques". Par contre, quand tu parles du "délire de persécution" de certaines féministes, je trouve que c'est un peu dur d'utiliser ce terme, d'autant plus que je ne sais pas de quel "délire" tu parles, et tu n'argumentes pas sur l'existence dudit délire. Je rappelle que le féminisme est un combat pour faire disparaître les inégalités basées sur le genre.

    Ma remarque était un peu hors sujet, mais ce que je voulais dire c'est qu'il y a certaines féministes (je ne sais pas en quelle proportion) qui ont une tendance à tout interpréter comme une oppression de la femme. (J'ai quelques exemples précis en tête, mais cela risquerait de nous faire dévier trop loin dans le hors sujet.) Le risque est d'imposer une nouvelle idée préconçue, celle de la femme oppressée et de l'homme oppresseur. Dans cette optique, il m'aurait semblé pertinent de rappeler que la lutte contre les stéréotypes ne se focalise pas uniquement sur les femmes.
    D'autre part, je pense à une chose assez banale : vue la plasticité du cerveau, par exemple, n'est-il pas tout à fait plausible que des stéréotypes martelés dès le plus jeune âge conduisent, plus tard, à des comportements très différenciés selon les genres ?

    Absolument. Mais c'est un effet qu'il faut étudier et nuancer, puisqu'il n'y a sans doute pas que ça qui rentre en ligne de compte. En écrivant cette remarque, j'avais en tête ce que l'on appelle la "théorie du genre", qui justement nie l'existence de différences fondamentalement biologiques.
    De quelles études (allant dans le sens de l'existence de différences d'origine biologique) parles-tu ?

    C'est quelque chose que j'ai vu passé quelque part, je vais essayer de le retrouver.
    3) C'est sûr que si on est misogyne, cela ne nous pose pas de problème qu'il y ait peu de femmes en maths. Veux-tu dire que s'il y avait des différences d'origine biologique des capacités cognitives en fonction du genre, cela ne poserait pas de problème qu'il y ait peu de femmes en maths ?

    Ce que je veux dire, c'est que, même dans une société parfaite absente de tout stéréotype, il se pourrait qu'il y ait un faible pourcentage de femmes en mathématiques. Les causes de ce phénomène pourraient ne pas être corréler à une quelconque oppression. Au final je n'en sais rien, mais je voulais simplement insister sur le fait que ce pourcentage n'est pas le problème en soit, mais simplement une conséquence d'un problème potentiel, qu'il reste à identifier.
    En outre, je ne suis pas sûr qu'établir des quotas favorise la résolution du problème, mais je ne vois pas pourquoi tu es si catégorique sur cette méthode. Si l'idée est qu'en forçant la balance à se rééquilibrer pendant quelques générations afin de "reprogrammer" les stéréotypes, je pense qu'il est possible que ça puisse marcher.

    Je parle des quotas tels qu'ils sont imposés aujourd'hui, pas dans l'absolu. Demander une forte représentation des femmes dans les jurys de thèse, dans les comités de sélection et autres, je trouve ça totalement inutile. La raison en est qu'il s'agit de groupes ayant une visibilité très restreinte. Pour y avoir à faire, il faut déjà être dans le monde universitaire, donc en quoi est-ce que cela pourrait favoriser l'intégration de femmes venant de l'extérieur ?
    J'ai envie de te demander ce que tu en sais ? D'où tires-tu cette impression ? De ton expérience personnelle ?

    Je précise que, dans ce que je dis, je ne suis sûr de rien. J'ai tout à fait conscience de la limitation de mon jugement. D'où l'intérêt d'en discuter.
    A supposer que tu es un homme (statistiquement, tu dois en être un :-D)

    Oh le tricheur !
    A supposer que tu es un homme (statistiquement, tu dois en être un :-D), tu n'aurais pas toi-même rencontré ces stéréotypes de la même manière qu'une femme les aurait subis, non ?

    Il en serait de même pour une femme. Il me semble faux de dire que les femmes sont victimes de stéréotypes, ce serait plutôt des femmes qui sont victimes de stéréotypes. On peut trouver en ligne des interviews de mathématiciennes qui disent ne pas avoir subi de "pression masculine". (Cela me rappelle un mail qui a circulé dans un labo, pendant la période des recrutements. Une femme souhaitait qu'une candidate soit auditionnée, bien que son dossier ne soit pas raccord avec le descriptif du poste, pour compenser ce qu'elle avait dû "subir" pendant ses études. Seulement, elle n'en savait rien, c'est également un stéréotype.)
    Moi, je préférerais que toute personne ait la possibilité de faire ce qui lui plaît, mais bon, pourquoi pas.

    On peut aimer faire quelque chose, mais n'avoir aucun talent pour cela. Dans ce cas, on peut en faire son loisir, mais son métier ce serait dommage. Mieux vaut trouver quelque chose pour lequel on est réellement doué. (Dans mon esprit, être doué pour quelque chose implique que ça nous plaît.)
    Par contre, je pense que c'est utile de faire la chasse aux stéréotypes, parce qu'on a quand même l'espoir de minimiser leurs effets.

    Il est possible que ce soit loin d'être la méthode la plus efficace, auquel il serait dommage de dépenser de l'énergie pour cela. Il est même possible que ce soit un impossible. Je pense notamment aux ambiguïtés du langage : une phrase pourra être interprétée de bien des manières. Et cela pose un réel problème. Il n'y a pas longtemps, je suis tombé sur l'interview d'un animateur télé qui reprenait du service après plusieurs années d'arrêt. Après avoir tourné sa première émission, on est venu lui dire que certaines plaisanteries allaient être coupées au montage, et qu'il vaudrait mieux les éviter à l'avenir. Autrement dit, par peur du stéréotype, on ne dit plus rien du tout. C'est une tendance dangereuse.
    Sur ce site, on peut essayer de jouer à un jeu qui explore les stéréotypes qui sont ancrés en chacune ou chacun de nous. Moi qui pensais être féministe, je me suis découvert plein d'automatismes misogynes et racistes, par exemple. Même en voulant faire "bien", je ne peux être sûr de ne pas avoir moi-même renforcé des stéréotypes négatifs au cours de mes enseignements à la fac !

    Et qu'est-ce que ce site est sensé démontré ? Quel lien y a-t-il entre une suite de réponses instinctives et un comportement réfléchi dans la vie réelle ?
    Au fait, la pub (et les stéréotypes) marche même quand on est conscient ou consciente d'y être exposée ou exposé !

    Je demande à voir. C'est vraiment une idée avec laquelle j'ai du mal. Même si c'est le cas, alors je reprends ce que j'ai dit dans mon message précédent : la formation critique d'un esprit devrait rendre obsolète de telles considérations.
  • Héhéhé a écrit:
    Désolé de dire ça aussi abruptement, mais le fait que tu penses que "Aujourd'hui, il me semble qu'il n'y a plus vraiment d'obstacles pour une femme de devenir mathématicien ou plus généralement scientifique" montre que tu ne connais pas le sujet. Renseigne-toi sur des sources sérieuses, des études (autres que des vidéos Youtube...) et tu verras que ce n'est absolument pas le cas.

    Ce que je veux dire, c'est qu'il ne me semble pas y avoir d'obstacle automatique. Comme dit dans mon message précédent, on peut trouver sur internet des interviews de mathématiciennes (réputées) affirmant qu'elles n'ont pas eu l'impression de subir la moindre pression. Cela dit, si tu as argument précis en tête contre cette idée, je serais heureux de les entendre.

    (Une précision en passant : prendre une vidéo youtube n'est pas automatiquement signe de mauvaise qualité, cela dépend de qui a réalisé la vidéo. De manière analogue, les "études" ne sont pas nécessairement d'une pertinence absolue.)
  • Foys:

    Se retrouver dans un milieu où il y a beaucoup d'hommes, se retrouver dans un milieu de "brutes" (publish or perish...) par exemple.
  • Le "publish or perish" est nettement moins présent en France puisque les chercheurs sont fonctionnaires. Et en quoi un tel milieu serait-il moins désagréable pour un homme ? Pour ma part, ce qui me plaît dans la recherche, c'est qu'on travaille comme on veut. (Enfin presque.)
  • Les filles sont-elles vraiment nulles en math ?
    Non, elles sont juste un peu nulles. :)o

    Comme les garçons quoi.
  • On trouvera plein de documents et de sources sur femmes-et-maths.fr
  • Je vois que la censure bat son plein ici...

    [Pour les obscénités toujours ! :-X AD]
  • @Seirios : Je crois qu'on se rejoint sur certains points. Quelques petites choses :
    - dire que la "théorie du genre" nie les différences biologiques, je pense que c'est un peu fort ; je pense que cette expression désigne un champ de recherche universitaire de personnes qui étudient l'origine et les manifestations des discriminations en décidant de se placer du point de vue du genre ; pour faire une analogie, c'est comme si on "accusait" les neurosciences de nier l'existence de la conscience parce qu'elle décide d'étudier les comportements du point de vue du cerveau. Je le dis juste parce que je n'aime pas l'expression "théorie du genre" qui est souvent véhiculée par des personnes qui pensent que le genre est du niveau d'une opinion alors que c'est un champ de recherche ou un concept sociologique ;

    - je suis tout à fait d'accord avec toi sur le fait que rien ne dit qu'on ne retrouverait pas cette différence dans une société sans stéréotypes ;

    - à propos des témoignages de femmes qui disent n'avoir subi aucune pression, je suis assez critique ; les pressions dont on parle sont assez insidieuses et difficiles à remarquer, mais mesurables (j'espère que ça a été fait) : par exemple, cela pourrait se manifester par le fait qui semble avoir été observé (je n'ai pas de source en tête mais je tâcherai de chercher) que les femmes se font plus interrompre. On peut imaginer qu'à la longue, ça donne de moins en moins envie de parler ! Et sinon, pour comparer avec la pub, quand des gens achètent une télé, un ordi ou quoi que ce soit, c'est sûr que personne ne va dire "ah ben je l'ai acheté parce que je suis idiot et je crois tout ce qui est affirmé dans les pubs". Bref, ça ne me suffit pas, comme argument.

    - "Et qu'est-ce que ce site est sensé démontré ? Quel lien y a-t-il entre une suite de réponses instinctives et un comportement réfléchi dans la vie réelle ?" ? Ah, rien du tout ! C'est juste pour signaler que même quand on pense être dénuée ou dénué, ou débarrassé ou débarrassée de ses stéréotypes, ils reviennent au galop. Je crois que les données du site servent pour des études, mais je ne sais pas ce qu'il en ressort. Pour moi, ça illustre juste le fait que les stéréotypes sont d'une certaine façon, "ancrés" dans le cerveau, un peu du même tonneau qu'un "instinct de survie" dont on dit que certaines personnes l'ont dans des moments de grand danger, et que cela les amène à faire des choses qu'elles n'auraient pas été capables en temps normal.

    - et pour le fait que la pub marche (et les stéréotypes aussi) même si on a conscience d'y être exposé ou exposée, ben, pour la pub, j'ai envie de te dire que si la pub ne marchait pas, les entreprises ne dépenseraient pas autant d'argent dedans ! Donc, je pense que la pub marche. Or les gens sont conscients de recevoir de la pub à longueur de journée ! Un exemple tout bête : une fois, j'ai voulu acheter un produit pour déboucher mes toilettes ; je n'ai pas l'impression d'avoir vu beaucoup de pubs pour de tels produits, et je pense que je n'en ai vu que d'une seule marque. Et je constate que pour désigner ce produit, j'utilise en fait le nom de la marque pour le désigner. Je n'ai pas de telle justification pour les stéréotypes, mais je pense que c'est un peu le même mécanisme en jeu. Je pense enfin aux illusions d'optique : parfois, même si on les connaît, on continue de se faire avoir.

    @Foys : Sans parler de problèmes de harcèlement, on m'a parlé d'un prof qui avait déconseillé une matière "aux demoiselles" car trop dure, par exemple. Je suis prêt à parier que tu as déjà dû entendre des histoires de ce style là où tu travailles ! Et après, ben, des collègues (femmes) m'ont rapporté avoir l'impression d'être moins prises au sérieux que leurs collègues hommes. On peut aussi imaginer que l'idée de faire de longues études entre en conflit avec l'injonction à être mère. Quand ce n'est pas des atteintes graves et explicitement misogynes, je pense que c'est une sorte d'ambiance où, affirmées sur le ton de l'humour, de la sociologie de comptoir, des stéréotypes sont entretenus ; je crois qu'on désigne ça par "misogynie ordinaire", et le pire, c'est que tout le monde y participe, femmes comprises.
    Bref, ce n'est pas un obstacle comme une haie à franchir, mais plutôt comme un caillou dans la chaussure qui finit par faire très mal au pied.
  • Héhéhé a écrit:
    On trouvera plein de documents et de sources sur femmes-et-maths.fr

    Merci pour cette documentation. Cela dit, suggérer quelques points clefs avant de se référer à plusieurs centaines de pages aurait été sympa...

    Ces documents sont en majorité descriptifs. C'est-à-dire qu'ils regroupent des statistiques montrant les inégalités hommes / femmes, mais ils n'expliquent rien. Dans les autres documents, ce qui semble être mis en avant, c'est l'effet des stéréotypes. Il s'agit donc d'une influence plutôt inconsciente, ponctuelle et répétée qui a des effets réels à long terme.

    L'image qui me vient est celle de la particule de pollen dans le mouvement brownien. Durant sa vie, une personne (homme ou femme) va essentiellement se laisser transporter au gré des courants, du bruit de fond. Seulement, ce bruit de fond n'agit pas sur les hommes et les femmes de la même manière. Il va avoir tendance à écarter les femmes des carrières scientifiques, entre autre. (Mais de la même manière, il écartera les hommes d'autres carrières.)

    Je suis d'accord avec ce point de vue, et les statistiques me semblent le justifier de manière convaincante. Mais ce que je suggère, c'est que le problème n'est pas tant ce bruit de fond (sur lequel il est très difficile d'agir efficacement), mais qu'une personne se laisse dériver. Autrement dit, rien ne dit dans ces statistiques qu'une personne souhaitant vraiment faire des mathématiques son métier sera pénalisée selon son sexe. D'où ma phrase : "Aujourd'hui, il me semble qu'il n'y a plus vraiment d'obstacles pour une femme de devenir mathématicien ou plus généralement scientifique". Et j'en reviens au dernier paragraphe de mon premier message : ne serait-il pas plus intéressant de donner une personnalité forte, indépendante, à toutes les particules de pollen pour qu'elles puissent se diriger sans que leur trajectoire ne soit affecter outre mesure par le bruit de fond éventuel ? On sort alors du féminisme pour se diriger vers l'éducation de l'individu.

    @Georges Abitbol : D'après ce que je viens de dire et ce que tu as écrit, il me semble que nous sommes d'accord sur l'essentiel. Là où nous différons, c'est peut-être sur la manière de réagir. Chercher des stéréotypes dans les moindres recoins ne me semble pas être une bonne idée.
  • FDP a écrit:
    Se retrouver dans un milieu où il y a beaucoup d'hommes, se retrouver dans un milieu de "brutes"

    @FDP égal à lui-même....toujours d'une KOLOSSALE finesse...

    J'imagine que @FDP préfère cela:
    Liberté, égalité, choucroute.
  • Seirios a écrit:
    Le "publish or perish" est nettement moins présent en France puisque les chercheurs sont fonctionnaires.

    Un ambassadeur aussi est un fonctionnaire mais on ne les recrute pas en passant une annonce à Pôle emploi.
    Même dans la fonction publique il y a des processus de recrutement qui sont différents selon le poste concerné.
    Seirios a écrit:
    Et en quoi un tel milieu serait-il moins désagréable pour un homme ?

    Il l'est certainement pour un certain nombre d'hommes.
  • Fin de partie a écrit:
    Un ambassadeur aussi est un fonctionnaire mais on ne les recrute pas en passant une annonce à Pôle emploi.
    Même dans la fonction publique il y a des processus de recrutement qui sont différents selon le poste concerné.

    Où veux-tu en venir exactement ? Si tu pouvais préciser un peu ta pensée.
    Fin de partie a écrit:
    Il l'est certainement pour un certain nombre d'hommes.

    Et il l'est aussi certainement pour un certain nombre de femmes. Génial, avec ça on est bien avancé...
  • Une petite incursion féminine dans ce débat masculin (enfin je crois). A propos de ces deux phrases de Seirios :
    Seirios a écrit:
    Aujourd'hui, il me semble qu'il n'y a plus vraiment d'obstacles pour une femme de devenir mathématicien
    [...]
    Autrement dit, rien ne dit dans ces statistiques qu'une personne souhaitant vraiment faire des mathématiques son métier sera pénalisée selon son sexe.

    Je ne connais pas les statistiques en question, mais je me permets de vous faire de part mon opinion personnelle, basée sur mes expériences personnelles (j'entends par là, ce que j'ai vécu moi-même et vu autour de moi).
    Avant toute chose, je précise que j'ai bien conscience que ceci n'a pas valeur de vérité universelle.

    J'ai très longtemps pensé que la première phrase de Seirios était vraie. Je ne le pense plus, mais je pense que la deuxième est assez vraie. J'explique un peu :

    Durant mes études postbac, je n'ai effectivement jamais eu l'impression d'être déconsidérée à cause de mon sexe. Autrement dit, à partir du moment où j'ai choisi d'étudier les maths, je n'ai pas eu l'impression de rencontrer plus d'obstacles que la gente masculine.

    En revanche, je suis assez convaincue qu'il reste beaucoup d'idées préconçues, souvent inconscientes, qui amènent à traiter les filles différemment que les garçons dans la scolarité, et notamment dans la partie scientifique de la scolarité. Je pense que cela a une réelle influence sur la manière dont les filles se perçoivent et surtout perçoivent leurs capacités, d'où une certaine autocensure.

    L'an dernier, sur un fil sur l'absence de lauréates au concours de l'ENS Paris, aléa avait posté ce texte. C'est une étude sociologique très intéressante que je vous encourage à lire. On y voit notamment que à performances scolaires égales les filles sont moins encouragées que les garçons par leur professeurs. Exemple typique, pour la même note, une fille se verra souvent attribué le commentaire "travail sérieux", et le garçon "peut mieux faire". Voir à ce sujet la partie 4 du texte, à partir de la page 87.

    Quand on interroge les profs sur les raisons qui les poussent à écrire ces commentaires, on voit qu'ils n'y a au fond rien de tangible qui justifie cela : que des impressions basées sur l'attitude :
    Blanchard et al a écrit:
    Au cours des discussions informelles avec les professeurs lors de la passation ou du recueil des questionnaires, nous leur avons systématiquement demandé ce qu’ils mettaient derrière cette catégorie de «potentiel » largement usitée.
    Ce type de question a, la plupart du temps, suscité de la confusion chez nos interlocuteurs. La notion de potentiel était en effet rapportée uniquement soit à des indices très généraux énoncés au conditionnel («une attitude plus relâchée des garçons» versus «le studieux des filles qui donnerait l’impression qu’elles donnent tout ce qu’elles peuvent» [...])

    Dans mon expérience personnelle avant bac, j'ai vécu ce genre de chose. Je me souviens qu'en terminale, j'avais un très bon ami et que nous étions tous les deux les premiers de la classe en maths. On avait les mêmes notes et on bossait ensemble (enfin, on bavardait plus qu'on ne bossait, d'ailleurs...) Le prof lui a mis comme annotation finale sur son carnet scolaire "élève très doué". Moi j'ai eu "élève très travailleuse et d'un très bon niveau". Je ne travaillais pourtant pas plus que lui...

    Cet autre article (en anglais) énonce l'idée que les filles se croient an général moins capables de progresser que les garçons. Là encore, je me retrouve dans cet état d'esprit, ou en tout cas je retrouve l'étudiante que j'ai été, qui croyait que "si je n'ai pas compris immédiatement, c'est mort, ça ne sert à rien de continuer". J'ai attendu d'être en prépa agreg pour commencer à envisager les choses de manière plus nuancée, et ça ne s'est pas fait un jour.

    Je ne veux pas raconter ma vie, mais je vous assure que mon parcours a été rendu difficile du fait de la manière dont je me percevais, et percevais mes capacités à pouvoir faire ce que je voulais. Donc oui, je n'ai pas rencontré d'obstacles "extérieurs" en postbac, mais oui aussi, j'ai rencontré des difficultés "intérieures" dues en grande partie à l'idée que je n'étais "pas faite pour cela".
  • Seiros a écrit:
    Où veux-tu en venir exactement ? Si tu pouvais préciser un peu ta pensée.

    Un enseignant-chercheur est peut-être un fonctionnaire de l'Etat mais cette simple observation ne préjuge en rien du processus de recrutement et en particulier que ce processus est peut-être genré.
  • Les chiffres parlent d'eux-même et appuient l'idée qu'il n'y a aucun obstacle pour les femmes à faire carrière en mathématiques :
    • section "Mathématiques"
      professeurs des universités : 31 femmes pour 482 hommes ;
      maîtres de conférences : 156 femmes pour 680 hommes ;
    • section "Mathématiques appliquées et applications des mathématiques" :
      professeurs des universités : 109 femmes pour 542 hommes ;
      maîtres de conférences : 385 femmes pour 784 hommes.
    • ensemble de toutes les sections :
      professeurs des universités : 4864 femmes pour 15388 hommes ;
      maîtres de conférences : 15985 femmes pour 20199 hommes.
    Aucun obstacle, sans doute.
  • Bonjour

    Pour que omega se sente moins seule. Moi aussi je ne parle que de mon expérience personnelle (je suis retraitée). J'ai toujours travaillé dans une fac, et je n'ai jamais eu l'impression que le fait d'être une fille me déconsidérait. Néanmoins, j'ai avancé moins loin que mes collègues masculins. J'étais peut-être moins forte, mais surtout je n'avais pas envie de m'impliquer comme eux. J'ai continué à faire des tas d'autres choses plutôt que passer mon temps à "rechercher". En revanche j'ai beaucoup investi dans mon rôle d'enseignante. Il se trouve que c'est aussi le cas de la plupart de mes collègues femmes. Tout ceci n'a aucune valeur statistique.
  • J'aimerais ajouter une idée que je viens d'avoir : le fait que des mathématiciennes témoignent du fait qu'elles n'ont pas ressenti d'obstacles dans leurs études n'implique pas que de tels obstacles n'existent pas. On pourrait imaginer une sorte de biais de la survivante : s'il y a des obstacles, il n'est pas étonnant que le peu (par rapport aux hommes, je veux dire) de femmes qui les franchissent ne les ressentent pas toutes comme tels !
  • Le meilleur thesard que j'ai eu etait une jeune femme qui a continue a publier des choses nouvelles par rapport a sa these pendant quelques annees. Mais quand il a ete question d'habilitation, elle a declare 'je ne suis pas assez bonne pour diriger les autres en recherche'. Pas question de la faire changer d'avis. Et elle est restee un quart de siècle plus tard un excellent maître de conferences, qui enseigne, qui organise et qui publie un tout petit peu. Ah! les femmes...
  • @omega : Je tiens à préciser que, dans mon esprit, je ne fais aucune différence entre les deux phrases que tu cites, à savoir "Aujourd'hui, il me semble qu'il n'y a plus vraiment d'obstacles pour une femme de devenir mathématicien" et "Autrement dit, rien ne dit dans ces statistiques qu'une personne souhaitant vraiment faire des mathématiques son métier sera pénalisée selon son sexe". Autrement dit, ton commentaire reste en en accord avec l'image que je me fais de la situation pour le moment.

    @Math Coss : Le mot "obstacle" n'était peut-être pas bien choisi. L'équivalence mentionnée dans le paragraphe précédent devrait rendre plus clair ce que j'ai essayé de dire.
  • Fin de partie a écrit:
    Un enseignant-chercheur est peut-être un fonctionnaire de l'Etat mais cette simple observation ne préjuge en rien du processus de recrutement et en particulier que ce processus est peut-être genré.

    Un biais qui me paraît possible est le suivant.

    Un point important dans les recrutements est la qualité des journaux dans lesquels on publie ses articles. Si le bruit de fond des stéréotypes conduit les femmes à une sous-évaluation de leur propre travail (ce qui semble être le cas de manière générique), alors il est possible qu'elles aient tendance à publier dans des revues moins bien cotées, d'où un moins bon dossier, d'où moins de chance d'être recrutée. Il serait intéressant d'avoir une statistique sur le pourcentage des articles écrits par des femmes dans le "top 10" des revues et de le comparer avec le pourcentage total de mathématiciennes.

    Par contre, je ne sais pas à quel point ce phénomène pourrait être pertinent chez les jeunes mathématiciennes. Les premières publications, ie. celles qui viennent de la thèse, sont encadrées par le directeur de thèse (statistiquement un homme). Ensuite, beaucoup de publications se font en collaboration (donc statistiquement avec un homme). Et puis lorsque l'on ne connaît pas très bien la réputation des journaux (ce qui est le cas chez les post-docs), et bien on demande conseille (encore une fois, statistiquement auprès d'un homme). D'autant qu'en tant que post-doc, on est conscient (ou en tout cas on devrait l'être) de l'importance de publier dans de bonnes revues, d'où un soin tout particulier à ces choix.
  • Il y a des tas de biais bien antérieurs au recrutement comme enseignant-chercheur.

    Un autre chiffre saisissant, c'est la différence entre la proportion de filles qui ont le bac S (entre 45 et 50 %, et qui ont des meilleurs résultats en moyenne que les garçons) et celles qui entrent à Polytechnique (15,6 % en 2012) ou dans une ENS en math. (encore moins – jusqu'à 0 % aux ENS de Paris ou Lyon). Le problème semble français : il y avait par exemple près de 30 % de filles parmi les élèves internationaux de l'X en 2012, significativement plus.

    Je ne crois pas qu'il y ait des barrages explicites mais les filles semblent dissuadées de se lancer dans des études scientifiques ou compétitives (ici le "ou" n'est pas exclusif). Une des explications, c'est la perception de son propre niveau : les filles se sentent souvent moins fortes que ce qu'elles sont et souvent, moins fortes que ce que pensent des garçons de niveau égal.

    En gros, on vit dans un pays machiste, quoi, et plus machiste que les voisins.
  • Si je m'intéresse à ce qui se passe dans les recrutements, c'est parce qu'à ce niveau, les candidats sont sans doute en grande majorité motivés à faire de la recherche. On ne devrait donc plus être dans le cas de la particule de pollen qui se laisse portée comme mentionné dans un de mes messages précédents. Autrement dit, je teste mon affirmation "rien ne dit dans ces statistiques qu'une personne souhaitant vraiment faire des mathématiques son métier sera pénalisée selon son sexe".
  • Seirios, je te propose un autre biais possible pour le recrutement. Aujourd'hui pour être recruté en tant que maître de conf en math il faut faire des post doc, donc dans une autre ville, parfois un autre pays. En supposant qu'on ait eu la mauvaise idée d'être en couple à la fin de la thèse on se retrouve généralement devant les choix suivants :
    -se séparer
    -tenter une relation à distance
    -embarquer ledit conjoint dans ladite ville en espérant qu'il/elle trouvera un travail, des amis, apprendra la langue locale...
    -ne pas faire de post doc et rester proche de son conjoint.
    Je pense que les hommes sont moins enclin à abandonner leur travail et à suivre leur femme à l'autre bout du monde que l'inverse. La même situation se retrouve au passage de MC à prof : il faut changer de ville et donc souvent emmener son conjoint et ses enfants avec soi, encore une fois je pense que les femmes sont moins prêtes que les hommes à faire ça.

    En fait ce problème touche toutes les personnes qui ne veulent pas faire passer leur travail avant leur vie amoureuse/familiale, chose qu'on attend plus souvent des femmes que des hommes. À noter que c'est quelque chose de relativement récent, environ 20/30 ans je crois ? Avant il n'était pas rare d'être recruté dans son labo de thèse et sans avoir à passer par la case post doc si je ne m'abuse.
  • La question du plus faible nombre de filles en maths dépasse largement le microcosme de la recherche universitaire. Les filles sont sous-représentées dans tous les métiers techniques. Est-ce parce qu'elles n'aimaient pas jouer aux petites voitures quand elles étaient plus jeunes ?
  • Seirios a écrit:
    Je tiens à préciser que, dans mon esprit, je ne fais aucune différence entre les deux phrases que tu cites

    J'ai bien compris. Mais je pense que la distinction est quand même pertinente.

    Ce qui conduit une partie non négligeable de personnes à penser qu'être une femme ne présente plus une difficulté de nos jours pour mener une carrière de mathématicien est que quand on regarde ce qui se passe dans le supérieur, et a fortiori au niveau du doctorat et des recrutements, on ne verra effectivement rien, ou pas grand-chose qui justifie cela : les personnes sont jugées sur leurs résultats de ce que j'ai pu en voir, et je n'ai jamais eu le sentiment qu'une femme (moi ou une autre) était sous-estimée parce que c'était une femme.

    En revanche, je persiste à penser que les femmes ont tendance à être beaucoup moins confiantes en leur propres capacités et que cela a une influence considérable sur la manière dont on aborde les études. Des études statistiques et sociologiques (comme dans le texte que j'ai donné plus haut) montrent qu'à résultats égaux, les garçons ont globalement une plus haute opinion d'eux-mêmes que les filles. Je pense que cela influence considérablement la manière d'appréhender les études, y compris au niveau du doctorat.
  • Une interview intéressante sur un sujet connexe.
    Math Coss a écrit:
    Les chiffres parlent d'eux-même et appuient l'idée qu'il n'y a aucun obstacle pour les femmes à faire carrière en mathématiques :

    section "Mathématiques"
    professeurs des universités : 31 femmes pour 482 hommes ;
    maîtres de conférences : 156 femmes pour 680 hommes ;
    section "Mathématiques appliquées et applications des mathématiques" :
    professeurs des universités : 109 femmes pour 542 hommes ;
    maîtres de conférences : 385 femmes pour 784 hommes.
    ensemble de toutes les sections :
    professeurs des universités : 4864 femmes pour 15388 hommes ;
    maîtres de conférences : 15985 femmes pour 20199 hommes.

    Aucun obstacle, sans doute.
    En quoi ces chiffres prouvent l'existence d'un obstacle quelconque?
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Foys a écrit:
    En quoi ces chiffres prouvent l'existence d'un obstacle quelconque?

    En quoi ils prouvent qu'il n'y a pas d'obstacle?

    Il y a autour de 50% de femmes dans la population et pourtant selon les chiffres de Math Coss:

    " professeurs des universités : 31 femmes pour 482 hommes "

    C'est à dire moins de 6,5% de femmes si je compte bien.

    A ma connaissance il n'y a pas besoin d'être baraqué pour devenir prof' des Universités et exercer cette profession. B-)-
  • Ces chiffres peuvent être mis sur le compte d'autres facteurs, comme entre autres des différences de choix de carrière, de motivation personnelle et de goût pour cette activité.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • mojojojo a écrit:
    Avant il n'était pas rare d'être recruté dans son labo de thèse et sans avoir à passer par la case post doc si je ne m'abuse.
    Encore une mesure "progressiste" au passage.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Les luttes contre les stéréotypes feront fi de contextes.

    images?q=tbn:ANd9GcQUPU3FC2nOCwwsNSiEwf67RFT3WTKq-lqJl1-CoX9e2drjzDAN
  • Il n'y aura jamais de preuve au sens axiomatique.

    On peut tout de même s'étonner de la chute du nombre de femmes de l'échelon MCF à l'échelon PR, qui est bien plus drastique que dans les autres sections. Les femmes mathématiciennes (« pures ») ont statistiquement moins de promotions que les mathématiciens et que les femmes universitaires d'autres sections. C'est que la conjonction « femme + mathématicienne » a des effets étonnants, non ? Ça me semble difficile à expliquer par des facteurs internes.
  • Le problème des biais sociaux, c'est qu'il faut faire comprendre aux gens qu'ils doivent agir même s'ils ne portent pas la pleine responsabilité du biais social.
    En fait, c'est toujours la faute de l'autre.

    Une bonne partie des problèmes d'égalité des sexes dans la vie professionnelle est la combinaison de deux facteurs
    - une trop grande exigence de disponibilité et d'investissement du monde professionnel
    - une inégalité des sexes dans le couple.

    En réalité, le monde professionnel doit comprendre qu'un mode de fonctionnement plus respectueux des individus permettra à chacun de vivre mieux, et en particulier ne viendra pas nourrir le cercle vicieux qui fait que l'un est sur-investi dans la gestion du foyer, sous-investi dans la compétition professionnelle, tandis que l'autre fait l'inverse.
  • Foys a écrit:
    Ces chiffres peuvent être mis sur le compte d'autres facteurs, comme entre autres des différences de choix de carrière, de motivation personnelle et de goût pour cette activité.

    D'après les chiffres donnés par Math Coss, parmi les mcf, il y a 22 % de femmes mcf en math, et parmi les profs, toujours en math, 6,5 %. Je ne vois pas en quoi, la motivation personnelle et surtout le goût pour cette activité serait plus fort chez hommes que chez les femmes, quand on se place chez les mcf.

    Comme l'ont fait remarqué plusieurs personnes, il persiste au sein de beaucoup de foyers parentaux un déséquilibre entre l'homme et la femme, où celle-ci va davantage s'occuper des enfants et des charges matérielles (courses, ménage,...). Est-que vraiment les femmes ont un goût naturel, inné, prononcé pour les courses et le ménage qui fait qu'elles préfèrent s'adonner à ces activités qu'à leur métier, notamment un métier comme celui de chercheur qui est un métier qu'on choisit généralement par passion et pas juste pour faire bouillir la marmite ?

    L'idée que c'est la femme qui doit s'occuper des enfants et l'homme qui doit mener une carrière professionnelle est encore très ancrée dans les mentalités, même si beaucoup ne s'en rendent pas compte voire s'en défendent : "ah mais moi, j'aide ma femme à la maison".... déjà le simple fait de dire "j'aide ma femme" plutôt que "avec ma femme on se partage les tâches" est révélateur. Beaucoup d'hommes, qui "aident leurs femmes" ont l'impression de faire un effort, de faire quelque-chose de bien, et pas quelque-chose de tout simplement normal.
  • Rassurons-nous, nous ne sommes pas seuls ! Dans un autre domaine, le cinéma, [Agnès Varda->https://www.vanityfair.fr/actualites/videos/le-discours-emouvant-et-engage-de-cate-blanchett-et-agnes-varda-au-festival-de-cannes/34383] parlait à Cannes de « chiffres éloquents, irréfutables » en évoquant le nombre de films réalisés par des femmes en compétition officielle à Cannes (82 sur 1688 réalisés par des hommes), de présidentes (2 sur 71), de palmes d'or (2, dont une ex-aequo et une honoraire). Cf. aussi le débat sur la parité dans On aura tout vu d'hier.

    Motivation personnelle ou choix de carrière, c'est évident.
  • Non seulement les filles sont nulles en maths,
    mais elles ne touchent pas leur canette dans toutes les activités vitales.

    Nulles aux billes.
    Zéro aux osselets.
    Aucune imagination pour claquer l'artiche du ménage aux courses ou au bistrot.
    De vraies calamités pour les créneaux à l'oreille.
    Incapables de comprendre quoi que ce soit au foot en dehors du lavage des maillots.
    Ne possèdent que rudiments de stratégie d'occupation à long terme des fauteuils et canapés.

    Dès qu'on touche aux questions fondamentales, les greluches sont perdues dans la nature.

    Exemple : Les mectons sont entraînés à répondre à une question, mais la bonne.

    e.v.80498
    Personne n'a raison contre un enfant qui pleure.


  • Elle balance des bombes mais on ne peut pas dire que c'est un canon...
  • C'est exactement ce que je disais.

    Là où il y a besoin de cinq gonzesses, les mecs mettent un gardien et un seul.

    e.v.
    Personne n'a raison contre un enfant qui pleure.


  • Math Coss a écrit:
    On peut tout de même s'étonner de la chute du nombre de femmes de l'échelon MCF à l'échelon PR, qui est bien plus drastique que dans les autres sections. Les femmes mathématiciennes (« pures ») ont statistiquement moins de promotions que les mathématiciens et que les femmes universitaires d'autres sections. C'est que la conjonction « femme + mathématicienne » a des effets étonnants, non ? Ça me semble difficile à expliquer par des facteurs internes.

    Tu peux dire que, sur deux dossiers équivalents, le recrutement privilégiera un homme plutôt qu'une femme ?

    Si j'interprète correctement les interprétations proposées par d'autres intervenants, une explication pourrait être la suivante. Statistiquement, les femmes ont davantage l'habitude de s'impliquer dans la vie familiale. C'est autant de temps perdu pour la recherche, et donc pour la constitution d'un bon dossier. Autrement dit, statistiquement, le dossier un homme pourrait être meilleur puisqu'il consacrera plus de temps à la recherche.

    Ce serait intéressant de reprendre les statistiques MCF / PR en fonction d'autres facteurs, par exemple les congés parentaux. Histoire de voir si la corrélation entre promotion au grade PR et moindre investissement dans la vie de famille (qui n'est pas facile à quantifier) se confirme.
  • > Autrement dit, statistiquement, le dossier un
    > homme pourrait être meilleur puisqu'il consacrera
    > plus de temps à la recherche.

    C'est difficile de faire des stats sur des echantillons aussi petits: il vaudrait mieux regarder au cas par cas.
    En tout cas, il y a de multiples causes qui peuvent jouer: par exemple, le fait que le CNRS avantage un peu les femmes,
    ce qui fait que les femmes en poste au CNRS y restent, alors qu'un certain nombre d'hommes (souvent avec de bons
    dossiers) le quittent et concurrencent les femmes MdC pour des postes de profs. Aussi la regle de non recrutement
    local peut penaliser plus les femmes que les hommes (du fait des contraintes familiales). Il semble aussi que les femmes
    vivent plus difficilement les echecs que les hommes et ne candidatent qu'une fois, etc.
  • Ma conviction : sur des facteurs du genre « congés parentaux », il n'y a pas de différence significative entre sections du CNU. Tiens, voici un effet spécifique des math. : la prime à la jeunesse y est plus importante qu'ailleurs – l'âge de recrutement est plus bas qu'ailleurs, que ce soit en MCF qu'en PR. Pour le passage en PR en particulier, c'est évidemment un handicap pour une femme qui aurait ralenti un temps son activité de recherche pour faire des enfants.

    Trente-et-une professeures contre quatre cent quatre-vingt-deux professeurs en section 25 : sérieusement ? Moins qu'en génie civil ou en génie électrique ? C'est évidemment bien mieux en 26, avec 109 contre 542, c'est presque le brillant taux de 17,6 % de l'ensemble des sciences.
  • Je pense que les situations pointées par Math Coss et godesba sont assez justes. Certes, hommes et femmes sont évalués sur les mêmes critères pour passer prof.
    Mais d'une part le fait d'avoir des enfants va, en général, ralentir davantage une femme qu'un homme dans son travail, donc comme en maths, on aime bien recruter des gens jeunes, les femmes qui ont eu des enfants auront souvent à âge égal, un dossier moins fourni que celui d'un homme qui a eu des enfants. Bien sûr, il y a des exceptions notoires, mais ça reste des exceptions.
    D'autre part, il est plus rare dans notre société qu'un homme suive sa compagne parce qu'elle a eu une promotion que l'inverse. Des femmes qui ne postulent pas prof parce qu'elles peuvent pas déménager, il y en a pas mal... Encore une fois, il y a aussi des hommes dans ce cas, mais dans une proportion moindre.
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