Quel a été le cheminement intellectuel pour..

Bonjour,

Je suis docteur en médecine et profitant d'un peu de temps en vacance je suis tombé sur votre site web. Je suis un féru de relativité générale et je dois avouer que j'ai lu pas mal de documentation sur le sujet, y compris des articles de vulgarisation. Mais, jusqu'à aujourd'hui je n'ai pas compris pourquoi, sur un plan historique, on (ou plutôt Einstein) en est arrivé a dire que la masse courbait l'espace temps et que les corps suivaient des trajectoires "extrémales/minimale" appelées géodésiques sur cet espace-temps courbés.

Sur un plan mathématique (je ne maitrise pas du tout) il s'agit de déterminer les courbure, rayon de courbure et géodésiques sur des espaces de Riemann en géométrie différentielle. Mais ma question demeure : Pourquoi en est-on arrivé a dire que la masse courbe l'espace temps et que les corps suivent les géodésiques de cet espace-temps ? S'agit-il d'une idée miraculeuse ? D'une déduction ? D'un éclair de génie ?

Quel a été le cheminement intellectuel pour arriver a cette conclusion ?

Réponses

  • Bonsoir.

    Einstein lui-même l'a expliqué dans une petit bouquin corédigé (avec Enfeld si ma mémoire est bonne). Tu devrais pouvoir le trouver.

    Cordialement.

    NB : C'est pas vraiment des maths ...
  • Sur un plan mathématique (je ne maitrise pas du tout) il s'agit de déterminer les courbure, rayon de courbure et géodésiques sur des espaces de Riemann en géométrie différentielle. Mais ma question demeure : Pourquoi en est-on arrivé a dire que la masse courbe l'espace temps et que les
    corps suivent les géodésiques de cet espace-temps ? S'agit-il d'une idée miraculeuse ? D'une déduction ? D'un éclair de génie ?

    Plus précisément, il s'agit de déterminer la géométrie de l'espace-temps à partir de son contenu en énergie-impulsion.
    Les notions de masse grave et masse inerte vous sont-elles familières ?
    Le principe d'équivalence ?

    Pour une introduction en douceur (les équations ne dépassent pas le niveau terminale, et vous pouvez en sauter la plus grande partie) : http://www.imnc.univ-paris7.fr/alain/Documents.web/TCC.web/TCC.gravitation.web/TCC.grav.01.pdf


    ps : fouillez aussi sur http://forums.futura-sciences.com/ le sujet y a été abordé des palanquées de fois...
  • Et bien que qualifiée de "générale", la théorie d'Einstein devrait pouvoir être encore généralisée dans le cadre de la relativité d'échelle développée par Laurent Nottale. Cette fois, il s'agira, a priori, de déterminer la géométrie (fractale*) de l'espace-temps-djinn à partir de son contenu en énergie-impulsion-complexergie. Tout un programme ! :)

    *voir à ce sujet les travaux de Jacky Cresson visant à donner une assise mathématique rigoureuse aux intuitions de Nottale.
  • Pourquoi en est-on arrivé a dire que la masse courbe l'espace temps et que les corps suivent les géodésiques de cet espace-temps ? S'agit-il d'une idée miraculeuse ? D'une déduction ? D'un éclair de génie ?

    Pour compléter les réponses précédentes (en très bref et très simplifié) il y a deux choses dans le contexte historique:

    a) le fait que les corps soumis à la seule gravitation suivent des géodésiques: c'est une hypothèse de départ d'Enstein, inspirée de ce qui était connu en mécanique classique et en relativité restreinte (principe d'équivalence, etc.).

    Il existe de nos jours d'autres façons d'arriver aux équations d'Enstein, qui effectivement n'utilisent pas ceci comme hypothèse, mais le déduise également.

    b) le fait que la masse courbe l'espace-temps: ça se voit en interprétant les composantes de l'équation finale, et même au cours du raisonnement.

    En effet, un point important est que déjà la théorie de Newton peut se reformuler comme une équation de Poisson: une reformulation connue avant Einstein, au XIXe siècle, qui montre que pour un domaine continu soumis à la seule gravitation Newtonienne (idéalisant un petit nuage de poussières), le Laplacien du potentiel gravitationnel est proportionnel à la densité de matière de ce nuage.

    Or Einstein montre, dans le contexte géométrique qui est le sien, que justement ce Laplacien du potentiel est proportionnel à une quantité qui mesure la déformation de l'espace-temps (évolution de géodésiques proches). Et donc, comme toujours lorsque A=B et B=C, il en déduit A=C, autrement dit que la densité de matière donne la mesure de la déformation de l'espace-temps. Bien sûr les choses sont plus élaborées, il y a une formulation tensorielle en définitive (que Enstein n'a pas obtenu du premier coup, terme correctif rajouté quelques semaines après), mais c'est l'idée de 1915.

    Bref, plutôt qu'un éclair de génie, c'est un mélange de raisonnements de géométrie différentielle (de très haute volée pour l'époque) et de connaissances préalables en physique classique et relativiste, qui a demandé du temps.

    Voilà, je ne connais pas assez les détails historiques pour en dire plus. Sources (mais qui demandent un certain bagage):
    - http://fr.wikipedia.org/wiki/Champ_gravitationnel#Forme_int.C3.A9grale_des_.C3.A9quations_du_champ_et_du_potentiel_gravitationnels
    - un livre en français de Hakim (niveau bac+4) est celui-ci http://books.google.fr/books?id=PUKGVzi3cuMC&hl=fr&source=gbs_navlinks_s
    - les livres de Frankel, Wald, Misner-Thorne-Wheeler.
  • C'est un cheminement très complexe, plein d'essais et de retours en arrière, ça ne s'explique pas comme ça en quelques lignes. Les historiens des sciences s'interrogent beaucoup sur la question, sans vraiment trouver de réponse. Tu peux regarder l'article suivant qui est assez complet

    http://pitt.edu/~jdnorton/papers/Einstein_field_eqn_1-4.pdf


    Pour la relation entre la masse et la courbure, c'est expliqué partiellement par le principe d'équivalence. Cependant, on ne passe pas directement du principe d'équivalence aux équations d'Einstein, c'est plus complexe. Par exemple, la courbure des rayons du soleil n'est pas expliqué par le principe d'équivalence, contrairement à ce que pensait Einstein au début.


    Sinon, pour répondre à ta question plutôt qu'un éclair de génie c'est plutôt un orage, succession d'éclairs et de douches froides, qui a duré plusieurs années pendant lesquelles Einstein a fait preuve à la fois d'un génie incroyable et d'une bêtise qu'il était le premier à regretter.

    Mauricio
    PS: Si tu ne l'as pas lu, je te conseille le livre d'Einstein "La relativité" bien qu'il n'aborde que très peu la question.
    PPS : Pour Gérard:
    http://www.univ-irem.fr/reperes/articles/58_article_405.pdf
    (Les maths ce n'est pas seulement compter les nombres premiers entre 2e10 et 3e11 !)
  • Mauricio,

    c'est amusant, car tu reviens sur ma remarque (" C'est pas vraiment des maths ... ") après l'avoir fortement développée en expliquant en substance qu'il s'agit d'épistémologie et d'histoire des sciences.
    Pour moi, l'un des intérêts des réflexions d'Einstein c'est que justement " C'est pas vraiment des maths ... " au départ, et que la mathématisation vient après une vraie réflexion physique : pas de modèle mathématique posé à priori. C'est aussi ce qui me plaisait dans les bouquins de Landau et Lifchitz que j'ai beaucoup fréquentés lorsque j'étais étudiant.

    Mais ton renvoi est intéressant.

    Cordialement.
  • L'article des irem que tu fournis en lien Mauricio est une mine d'or de réflexion pour un enseignant de mon point de vu en tout cas. Aurais-tu d'autre témoignage aussi structuré d'enseignant sur leur vécu ? Il est regrettable qu'on étudie pas ce genre de texte en formation.
  • je ne me connecte pas souvent car en voyage et en plus je me suis casse les cotes. . .

    Mais il me semble opportun de dire que dans le cas de la demarche d Einstein, on a un cheminement bien typique de lui qui consiste a dire "mettons un signe egal entre des choses dont on RESSENT puis postule qu elle sont indiscernables via des sensations**"

    Bon bien sur je caricature, mais cette demarche qui genere ensuite automatiquement des axiomes formels bien typiques a ete fructueuse. Pour le fait que l acceleration ressenti dans un ascenceur EST EGALE (en nature) a celle qui nous tient colles a la terre, fallait oser

    ** bon le mot sensation est peut etre mal choisi mais bon. .
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Salut à tous,
    Gerard : on peut dire effectivement qu'il n'y pas de modèle a priori, et plus généralement pas de théorie a priori. Il y a une réalité mathématique et physique à laquelle on doit s'adapter. Même en mathématique, il n'y pas de modèle à poser a priori, du moins c'est un école de pensée dans la tradition de Poincaré qui nous invite à chercher les concepts dans la physique ou dans l'expérience mathématique la plus pure (résoudre des équations, intégrer des fonctions etc.).

    Je crois que le problème d'Einstein avec les mathématiques est davantage d'ordre sociologique : Hurwitz n'en n'a pas voulu comme assistant, Minkowski le considérait comme un étudiant médiocre. Bien sûr, après 1905, les choses ont changé, mais je pense qu'il en a gardé une certaine amertume.

    Remi : Oui Pham est très bon, comme mathématicien et sûrement comme enseignant. Moins détaillé, mais aussi intéressant, il y a le texte d'Arnold au Palais de la découverte, mais je ne l'ai pas sous la main. Pham et Arnold c'est essentiellement la même école mathématique. Bizarrement au pays de Poincaré, cette approche est très sous-représentée dans nos milieux universitaires.

    Christophe : si tu réfléchis le principe d'équivalence est encore une démarche qui s'nscrit dans une longue tradition mathématique. Lorsque tu écris x^2+x, un grec aurait probablement dit : cela n'a pas de sens, on ne peut additionner une aire avec une longueur ! De la même façon la loi de Newton (somme des forces= etc.) te dit que la gravitation est une accélération. C'est une vieille idée qu'en fixant un système d'unités (masse=1, vitesse de la lumière=1), on identifie des quantités de nature physique très différentes.

    Bonne journée à tous,
    Mauricio
  • Docteur Huxtable écrivait:

    Pourquoi en est-on arrivé a
    dire que la masse courbe l'espace temps et que les
    corps suivent les géodésiques de cet espace-temps
    ? S'agit-il d'une idée miraculeuse ? D'une
    déduction ? D'un éclair de génie ?

    Quel a été le cheminement intellectuel pour
    arriver a cette conclusion ?
    Bonsoir Docteur Huxtable en fait je suis un peu comme vous
    alors à ma manière et de façon schématique je vous répond:
    si je ne me trompe pas tout est partie de deux constats
    1)deux objets jetés dans le vide (donc sans frottements avec l'air) subissent la même accélération (celle de la gravitation)
    2)un corps accélère sous l'effet d'une force qui agit sur lui constamment
    et il suffit que cette force disparaisse alors son mouvement possèdera une vitesse constante

    Première Conclusion:
    la masse de la terre est génératrice d'une force
    en fait tout masse est génératrice d'une force du simple et unique fait que cette masse existe

    Deuxième Conclusion

    un référenciel d'un espace adéquat dans lequel le temps est l'une des coordonnées suffit pour décrire le mouvement d'un objet
    ce référenciel sera orthonormé et euclidien si le corps est en mouvement uniforme et rectiligne
    ce qui n'est pas le cas si ce corps est en mouvement rectiligne avec une vitesse non constante

    voilà en fait une explication sans l'utilisation de termes techniques(à l'économie)
    bonne nuit Docteur
  • chamath a écrit:
    1)deux objets jetés dans le vide (donc sans frottements avec l'air) subissent la même accélération (celle de l'apesanteur)

    Aïe !
    Vous vouliez peut-être écrire "pesanteur" ?
    De toute façon, c'est tout aussi incorrect, le champ de pesanteur n 'étant défini que sur la Terre et il tient compte de sa rotation (il inclue les force d'inertie qui apparaissent dans tout référentiel non inertiel).

    Il s'agit de gravitation.

    Vous faites jouer à la Terre un rôle particulier. Il n'y a aucune raison à cela, la relativité générale est valable partout dans l'univers à ce qu'on sait.

    La suite comporte aussi des choses au pire fausses, au mieux très imprécises et donc inutilisables pour comprendre quoi que ce soit.

    A vouloir trop vulgariser on finit par dire des choses qui n'ont plus de sens et qui trahissent même l'idée de base.
  • bonjour Albanv
    excusez "gravitation" je me suis trompé(j'ai corrigé)

    oui c'est vrai ce que vous dites
    je voulais faire un truc dans mes cordes
    l'auteur du fil étant un peu comme moi(je suis pas Docteur évidemment)

    peut être un jour ...en attendant j'en suis à la mécanique classique (les trucs de base)
    le maxi c'est la terminale pour moi en physique

    Bonne journée Albanv
    PS: je vous serai reconnaissant de me vouvoyer c'est plus correct pour moi mais bon ...
  • Sur les forums tout le monde se tutoie.

    Mieux vaut dire médecin que docteur, cela porte moins à confusion.

    D'autre part, pourquoi répondre à un sujet que l'on ne maîtrise pas ?
  • en fait évidemment je maitrise pas mais j'avais cette idée
    que en fait c'était à cause de deux constats
    en fait en dehors de ma bourde(que j'ai corrigé)
    je suis sûr que mon idée est assez pas mal non?mais bon je comprend que je m'avance trop
    la relativitée générale expliquée sans rien d'autre que la loi fondamentale de l'inertie:

    un objet en mouvement circulaire ou en mouvement rectiligne avec une vitesse variable subit une force

    un objet qui subit la gravitation est équivallent à celui-ci même s'il est au repos
  • je viens de penser un truc tout bête

    un objet posé sur une table(mécanique classique)
    tout bêtement il subit deux forces
    la gravitation et la réaction de la table: au final il est immobile

    mais au fond quand on y pense imaginons
    l'idéal d'un laboratoire (on oublie toute les autres forces et on s'interresse qu'à celles là)
    il n'existe alors aucun instrument de mesure capable de les détecter vu qu'elles s'annulent de façon parfaites

    or elles existent (la mecanique classique les explique) et la geometrie espace-temps peut les faire apparaitre
    le corps en question sera definie selon un referentiel different que celui qu'on aurait pris pour decrire ce même corps dans un mouvement rectiligne uniforme
  • Si la résultante des forces est nulle, cela n'implique pas immobilité mais vitesse rectiligne uniforme (éventuellement nulle).

    Bonne journée.
  • D'autre part ce n'est pas parce que la résultante est nulle que la force n'est pas mesurable : un objet immobile sur le plateau d'une balance a un poids bien déterminé.
  • oui exact!!!
    je ne dit pas le contraire Felix...
    la Mecanique Classique décrit ces deux forces
    un observateur objectif peut très bien dire que l'objet en question est en Mouvement uniforme rectiligne
    avec un referentiel adapté on peut faire la difference entre ces deux situations
    c'est ce que fait la relativitée générale
    en décrivant les deux situations elle peut faire le distingo

    j'en conclue que dans le fondement de la mécanique classique se trouve les deux constats qui amène la suite

    bon après moi je suis trop faible(comme je l'ai dit)
    des fois un truc tout "bête" amène une idée pour trouver des moyens
    après tout je suis qu'un chat rien d'autre...:)
    Bonne soirée Félix
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