analyse/synthèse

Bonsoir,

Il semble qu'en maths, et généralement dans les sciences, c'est important d'avoir cette qualité qu'on appelle "l'esprit d'analyse", (même si, tant qu'à faire, il faut aussi avoir l'esprit de synthèse pour synthétiser ce qu'on a analysé).
J'ai regardé sur internet ce que recouvrent les concepts un peu fumeux d'"esprit d'analyse" et "esprit de synthèse", et j'ai par exemple trouvé cet article sur un blog de maths qui va un peu dans le sens de ma question.
En utilisant préférentiellement l'esprit de synthèse, on peut voir les choses de façon trop globale et brouillonne, en ignorant les détails, résumer la situation tellement rapidement qu'on peut rester à la surface des problèmes.

En maths c'est vite embarrassant, car chaque mot est important dans une définition, un énoncé.
Peut-être que les gens trop portés sur la synthèse ont du mal à décomposer les problèmes, ils n'ont pas la patience, car pas l'habitude.

Je me demandais si l'époque n'aggravait pas cette utilisation préférentielle de l'esprit de synthèse, mais après j'ai vu cette citation de Conan Doyle qui explique déjà dans l'épilogue de "Une étude en rouge", par la voix de Sherlock Holmes :

" Pour cinquante personnes capable de raisonner de façon synthétique, il n'y en a qu'une capable de raisonner de façon analytique."
\ a écrit:

"En résolvant un problème de ce genre, l'important c'est d'être capable de raisonner à rebours. C'est un art très utile, et très facile, mais les gens ne le pratiquent pas beaucoup.
Dans les affaires du quotidien, il est plus utile de raisonner "en avant", et ainsi l'autre façon de raisonner se retrouve négligée. Pour cinquante personnes capable de raisonner de façon synthétique, il n'y en a qu'une capable de raisonner de façon analytique. (...)
La plupart des gens, quand on leur décrit une succession d'évènements, vous diront quel sera le résultat. Ils peuvent agencer ensemble ces évènements dans leur esprit pour trouver ce qu'il en résulte. Il y a peu de gens, cependant, qui si vous leur donnez un résultat, seront capable de reconstituer dans leur esprit quelles étaient les étapes qui ont conduit à ce résultat.
C'est cette opération que j'appelle raisonner à rebours, ou de façon analytique."

Je ne sais pas si c'est valable aussi pour les sciences.

Réponses

  • Je me pose des questions à ce sujet, parce que c'est peut-être un de mes soucis, quand j'essaye de faire des maths (et aussi quand j'essaye de suivre n'importe quelle explication un peu scientifique).
    J'ai du mal à analyser les données d'un problème en premier, ça ne m'est pas naturel.
    En général, quand je lis un texte, je lis d'abord en diagonale, un mot sur dix, et après, une fois que j'ai saisi l'idée générale, j'arrive à lire comme il faut, des fois même je peux lire mot par mot, et plusieurs fois (je ne reste pas toujours à la surface des choses, quand même).
    Cette méthode est valable quand on lit un roman, ou qu'on aborde par exemple un cours d'histoire, ou de sciences humaines pas trop rigoureuses, mais en maths ou en sciences, ça ne semble pas marcher si on n'a jamais abordé le sujet.

    Du coup quand j'essaye de comprendre une explication, je suis arrêtée tout de suite, c'est peut-être l'obligation d'aborder le problème par les détails qui me rebute, malgré l'intérêt que j'y porte.

    C'est comme cette gêne que je ressens souvent, de ne pas saisir le sens général d'un chapitre de maths : c'est quelque chose qu'on comprend probablement à la fin, avec le recul, et moi je voudrais le savoir avant d'avoir commencé.
    Malgré l'intérêt des introductions historiques et culturelles que les auteurs peuvent faire, à la première explication, je recommence à me demander à quoi ce petit bout d'explication mène.
  • bonsoir nunuche

    un philosophe-mathématicien qui s'est penché sur cette dualité analyse-synthèse n'est autre que Descartes
    est-ce le premier historiquement ? ce n'est pas sûr.

    en fait cette dualité se rencontre d'abord en philosophie, elle oppose les holistes aux individualistes méthodologiques

    les holistes considèrent que l'homme n'est rien en lui-même, il n'est quelqu'un que membre d'un groupe d'individus réunis suivant
    le sexe, l'âge, la couleur de la peau, la profession, le mode d'habitat, la religion, les intérêts économiques, l'ethnie d'origine ou la langue maternelle

    les individualistes méthodologiques considèrent que l'homme est une entité en elle-même
    et que chaque homme ou femme est distinct même s'il fait partie d'un ou plusieurs groupes naturels ou culturels

    les premiers n'ont pas l'esprit analytique, ils raisonnent d'une façon synthétique en termes de rapports de groupes (voire de classes)
    les seconds ont l'esprit d'analyse sur l'individu et s'efforcent de dégager de leurs études une synthèse compréhensible et acceptable
    synthèse indispensable à l'avancée de la science

    pour en revenir à la recherche scientifique elle a besoin bien-sûr de l'esprit analytique et de l'esprit synthétique
    (Conan Doyle exagère grossièrement l'écart entre les personnes d'esprit synthétique de celles d'esprit analytique)
    les matheux ont l'habitude de l'analyse mais oublient parfois la synthèse (ou la conclusion)
    les physiciens ou les économistes sont préoccupés par la synthèse et escamotent parfois une véritable analyse
    les sociologues ont volontiers l'esprit holiste (Guizot, Durkheim, Marx, Bourdieu)
    même si on peut citer aussi parmi eux des individualistes méthodologiques (Montesquieu, Tocqueville, Weber, Aron)

    dans ton second message tu exposes ta façon intellectuelle d'aborder un ouvrage scientifique
    d'abord une lecture en diagonale pour en tirer l'essentiel avant une étude détaillée et analytique du fond
    je pense que nous sommes tous sans doute dans le même état d'esprit que toi

    lire le journal ou internet peut se faire d'un seul jet et d'un seul trait
    un dossier juridique ou scientifique mérite un va et vient intellectuel pour pouvoir le maîtriser

    cordialement
  • Merci pour ta réponse, Jean.

    En fait, je n'ai jamais rien lu de Descartes, mais l'autre jour, j'étais tombée sur ses "Règles pour la direction de l’esprit", j'avais commencé à en lire un morceau, et ça répondait un peu au genre de questions que je me pose. Je vais peut-être me remettre à le lire, ça et le "Discours de la méthode", peut-être que ça m'éclairera sur comment je pourrais devenir un peu plus cartésienne et méthodique... ;)
  • C'est aussi une question sur le travail de l'auteur. L'auteur d'un article de mathématiques, ou d'un ouvrage, peut et doit épargner certains efforts au lecteur. Notamment il doit commencer par bien présenter le "problème", et au cours du texte toujours indiquer le "où nous en sommes ?" et le "où allons-nous maintenant ?", ou plutôt écrire de sorte à inviter le lecteur à se poser ces questions durant la lecture. Mais certes le lecteur a toujours des efforts à fournir et n'atteindra pas du recul à la 1ère lecture.
  • Le rebours dont parle Conan Doyle, sous entend la condition nécessaire, est que la déduction mathématique est différente de la causalité événementielle, et on arrive à des amusements du genre: "pour qu'il ait pluie, il faut qu'il y ait des nuages", et ainsi cette déduction ressemble à un rebours événementiel!
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