Un vieil exo suspect

Bonsoir.
J'ai exhumé un petit recueil d'exercices : C. Dufetrelle, V. Gaggioli, Intégration, Vuibert Prépa, 1992. J'y trouve en p. 45 l'exercice suivant.
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Déterminer la limite de la suite : $u_n=\displaystyle \sum_{k=0}^{n-1} \frac{1}{\sqrt{n^{2}-k^{2}}}$.
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C'est un exercice que je pose de temps en temps, aussi ai-je regardé avec curiosité la solution proposée.
Naturellement, les auteurs donnent $u_n$ sous forme d'une somme de Riemann : $u_n= \frac{1}{n}\displaystyle \sum_{k=0}^{n-1}f( \frac{k}{n})$, avec : $f(x)=\frac{1}{\sqrt{1-x^{2}}}$.
Et alors, surprise, ils écrivent : << Puisque la fonction $f$ est intégrable sur $[0,1]$, on a : $\displaystyle \lim u_n= \int_{0}^{1}f(t)dt=\frac{\pi }{2}$.>>

Bizarre ... En 1992, il n'y avait pas au programme de Math Spé de notion de fonction intégrable sur un segment ni sur tout autre intervalle. Il y en avait eu dans le précédent programme, sur un segment, et cela signifiait : intégrable au sens de Riemann. Il est bien vrai que, pour une telle fonction, la somme de Riemann a pour limite l'intégrale, mais voilà, la fonction $f$ ici mentionnée n'est pas intégrable au sens de Riemann sur $[0,1]$, puisqu'elle n'y est pas bornée.

Si maintenant les auteurs évoquent par anticipation l'intégrabilité qui apparaîtra au programme de 1996, et qui est la convergence absolue de l'intégrale, alors notre fonction $f$ est bien intégrable sur $[0,1]$, mais mon petit doigt me dit que le théorème invoqué n'est plus valide.

Qu'en pensez-vous ?

Moi, plus simplement, j'utilise la monotonie de la fonction.
Et pour épicer la chose, je demande ensuite la limite de la suite : $v_n=\displaystyle \sum_{k=0}^{n-1} \sin \frac{\pi}{\sqrt{n^{2}-k^{2}}}$.

Réponses

  • Quels commentaires voulais-tu faire sur la solution ou sur l'exercice lui-même ?
  • Mille excuses, j'ai envoyé trop tôt le message, avant qu'il ne soit terminé. Voir mes commentaires dans sa version actuelle.
  • @Rouletabille : J'imagine que dans ta solution par monotonie tu fais tout de même une comparaison avec une l'intégrale, non ? Il me semble que mathématiquement, c'est l'essentiel à dire sur cet exercice. Pour le reste je dois t'avouer que je ne trouve pas ça très palpitant de savoir si oui ou non un livre donné utilise des résultats qui n'étaient pas au programme de 1992.
  • Ne palpite donc pas ...
  • Bonsoir,

    ce résultat (intégrale de Riemann généralisée = limite de la somme de Riemann) est peut-être considéré comme un exo classique. Quel est le niveau des exos du bouquin ?

    > Et alors, surprise, ils écrivent : << Puisque la fonction $f$ est intégrable sur $[0,1]$, on a :
    > $\displaystyle \lim u_n= \int_{0}^{1}f(t)dt=\frac{\pi }{2}$.>>

    Bonne soirée
  • C'est un livre d'exercices de Math Spé de l'époque. Ce qui m'a surpsis, c'est cette utilisation sans précaution de cette notion de "fonction intégrable".
  • J'aimerais bien connaître cette fameuse limite moi. Je conjecture $\frac{\pi^2}{2}$ mais j'ai la flemme de le justifier. :-D
  • On a en effet $v_n\sim\pi u_n \to \pi \times \frac{\pi}{2}$.
  • Quand on pose en colle une somme de Riemann relative à une intégrale impropre, les élèves ont tendance à utiliser spontanément le théorème général sur les sommes de Riemann, ce qui revient à appliquer le prétendu théorème suivant :
    << Soit $f$ une fonction continue par morceaux sur $[a,b[$, $a<b$, avec l'intégrale $\int_{a}^{b}f(t)dt$ convergente (resp. absolument convergente).
    Alors : $ \displaystyle \lim _{n\rightarrow +\infty} \frac{b-a}{n} \displaystyle \sum_{k=0}^{n-1} f(a+k\frac{b-a}{n}) = \int_{a}^{b}f(t)dt$ >>.
    Et j'ai bien l'impression que ce théorème n'en est pas un.
  • @ Poirot
    En effet, comme $k$ varie entre $0$ et $n-1$, on a : $\frac{\pi }{n}\leq \frac{\pi }{\sqrt{n^{2}-k^{2}}}\leq \frac{\pi }{\sqrt{2n-1}}$, donc $\frac{\pi }{\sqrt{n^{2}-k^{2}}}$ reste "petit". On peut alors conjecturer que la limite de la suite : $v_n=\displaystyle \sum_{k=0}^{n-1} \sin \frac{\pi}{\sqrt{n^{2}-k^{2}}}$ est la même que la limite de la suite : $\displaystyle \sum_{k=0}^{n-1} \frac{\pi}{\sqrt{n^{2}-k^{2}}}=\pi u_n$, soit $\frac{\pi ^{2}}{2}$.
    Mais l'équivalent donné par JLT doit être justifié.
    Moi je propose d'étudier la différence $\delta _{n}=\pi u_{n}-v_{n}$ au moyen des encadrements classiques de $x-\sin x$, obtenus avec une formule de Taylor ou autrement, pour prouver que cette différence tend vers 0.
    Maintenant on peut avoir un exercice difficile en posant directement la limite de $v_n$.
    Bonne journée
    25/07/2014
  • @ Siméon
    Bien sûr, quand on utilise la monotonie, on fait intervenir l'intégrale.
    La clé, c'est cette figure si féconde consistant à encadrer l'aire du "trapèze mixtiligne" délimité par l'axe des abscisses, deux ordonnées et la courbe, entre les deux rectangles, soit pour une fonction $f$ croissante et $a<b$ : $(b-a)f(a)\leq \int_{a}^{b}f(t)dt\leq (b-a)f(b)$.
    Pour notre fonction $f(x)=\frac{1}{\sqrt{1-x^{2}}}$, on écrit : $\frac{1}{n}f(\frac{k}{n})\leq \int_{\frac{k}{n}}^{\frac{k+1}{n}}f(t)dt\leq \frac{1}{n}f(\frac{k+1}{n})$. On somme pour $k:=0,1,...,n-2$, on transpose l'encadrement pour avoir la somme au centre, on passe à la limite, et voilà.
    Aucun besoin d'aucun théorème général sur les intégrales impropres, on peut poser ce problème en première année.
  • Voici une justification de mon équivalent.

    Soit $\epsilon>0$. Il existe $\delta>0$ tel que pour tout $x\in [0,\delta]$ on a $1-\epsilon\leqslant \frac{\sin x}{x}\leqslant 1$. Soit $N$ un entier tel que $\frac{\pi}{\sqrt{2N-1}}\leqslant \delta$. Alors pour tout $n\geqslant N$ et tout $k\in \{0,\ldots,n-1\}$, on a $\frac{\pi}{\sqrt{n^2-k^2}}\leqslant \frac{\pi}{\sqrt{n^2-(n-1)^2}}\leqslant \delta$, donc

    $$(1-\epsilon)\frac{\pi}{\sqrt{n^2-k^2}}\leqslant \sin \frac{\pi}{\sqrt{n^2-k^2}}\leqslant \frac{\pi}{\sqrt{n^2-k^2}}.$$

    En sommant pour $k$ allant de $0$ à $n-1$, on obtient $(1-\epsilon)\pi u_n\leqslant v_n\leqslant \pi u_n$.
  • La solution du livre est clairement fausse. Ce n'est pas une fonction intégrable au sens de Riemann puisqu'elle est non bornée. La méthode que je connais est la même que cette de Rouletabille, en encadrant à l'aide de la monotonie.

    Le théorème me semble effectivement faux pour une intégrale de Lebesgue. Considérons la fonction caractéristique des rationnels sur le segment $[0,1]$ qui est mesurable et intégrable sur $[0,1]$, d'intégrale nulle. Ses sommes de Riemann sont toutes égales à $1$, il n'y a donc pas convergence de ses sommes de Riemann vers $\int_0^1 f$.
  • Bonjour.

    Les sommes de Georg Friedrich Bernhard Riemann sont les \ où les points d'évaluation de la fonction peuvent être n'importe où dans le sous-intervalle correspondant. Ce qui est requis est donc \[ a = x_0 < x_1 < x_2 < ... < x_n = b ; \forall i, t=1,\cdots,n ; t_i \in [x_{ i- 1}, x_i] \] avec $\max x_i -x_{i-1} \rightarrow 0$ lorsque $n\rightarrow \infty$. Si l'on considère la fonction caractéristique des rationnels, alors les sommes de Riemann sont presque surement nulles. Quel est le problème ?

    Cordialement, Pierre.
  • Bah, le problème est que le théorème des convergence des sommes de Riemann est faux pour une fonction mesurable et intégrable au sens de Lebesgue, pdlx1.
    Tu dit que les sommes de Riemann sont presque sûrement nulles pour la fonction caractéristique des rationnels sur $[0,1]$. Pourrais-tu donner un sens rigoureux à cette phrase ?
    Es-tu en train de dire qu'il existe une extension du théorème de convergence des sommes de Riemann pour l'intégrale de Lebesgue ? As-tu un énoncé rigoureux à proposer et éventuellement une démonstration ?
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