groupe des similitudes de R^n

Bonjour,

je me pose quelques questions sur le groupe des similitudes de $\R^n$ :

1) Est-ce toujours un groupe de Lie ?
2) Une similitude étant intuitivement la composée d'une rotation, d'une homothétie et d'une translation, ce groupe est-il isomorphe à $SO(n)\times (\R^*_+},\cdot)\times (\R^n,+)$ (x désigne le produit, je suis sous Linux malheureusement) ?
3) Dans le cas où $\R^n$ peut-être muni d'une structure de corps, une similitude de R^n peut-elle toujours s'écrire sous la forme $f(z)=az+b$ avec $a,z$ et $b$ éléments de ce corps ?
4) Peut-on définir le "groupe des similitudes" d'un espace vectoriel quelconque ? Si oui comment ?

Merci d'avance pour vos réponses.

Réponses

  • Salut Sylvain,

    Je te réponds avec mes connaissances en attendant l'arrivée des spécialistes.
    1) Oui, tu peux le voir par exemple en le plongeant dans $GL_n(\R)$.
    2) Homéomorphe oui, isomorphe non, il faut un produit semi-direct ; car si $\varphi,\varphi'$ sont des applications linéaires et $u,u'$ des translations, on n'a pas en général $(u \circ \varphi) \circ (u' \circ \varphi')=(u \circ u') \circ (\varphi \circ \varphi')$, ce qui serait le cas avec un produit direct.
    3) Je pense qu'il s'agit de structure de corps compatible avec la structure de $\R$-ev (c'est-à-dire qui en fait une $\R$-algèbre). Dans ce cas il n'y a pas 36 solutions popur $n$, tu as dû voir que ça marchait pour $n=1,2$ reste à voir si ça marche pour $n=4$.
    4) Il va d'abord falloir mesurer les distances, on peut le faire un espace préhilbertien (muni d'un produit scalaire) ou pourquoi pas dans un espace normé quelconque. Au passage les similitudes que tu considères sont des similitudes affines, il paraît plus naturel de les définir sur des espaces affines.
  • Merci egoroff. Au passage, c'est quoi au juste un "produit semi-direct" ?
  • Ha ha...

    Bon lorsqu'on parle du groupe produit $(G,*) \times (G',\star)$, il y a deux choses :
    - l'ensemble sous-jacent qui est $G \times G'$, ensemble des couples $(g,g')$ avec $g \in G$ e $g' \in G'$ ;
    - la loi de groupe produit donnée par $(g_1,g'_1) \circ (g_2,g'_2)=(g_1 * g_2,g'_1 \star g'_2)$.
    La loi produit est la loi la plus naturelle qu'on puisse mettre sur $G \times G'$, mais il y en a d'autres.

    Par exemple si $(A,\circ)$ désigne l'ensemble des applications affines non constantes sur $\R$, de la forme $f_{a,b} \, : \, x \mapsto ax+b$ avec $a \neq 0$ (c'est ton groupe des similitudes en dimension 1) on voit que $A$ est en bijection avec $\R^* \times \R$ par $(a,b) \mapsto f_{a,b}$. Mais est-ce un morphisme de groupes de $(\R^*, \times) \times (\R, +)$ ? Pour le savoir on calcule $f_{a,b} \circ f_{a',b'}$ et on regarde si on tombe sur $f_{aa',b+b'}$, OK ?

    Alors $f_{a,b} \circ f_{a',b'}(x)=f_{a,b}(a'x+b')=aa'x+ab'+b=f_{aa',ab'+b}$ donc ça ne marche pas. En revanche si on met sur $\R^* \times \R$ la loi $*$ définie par $(a,b) * (a',b')=(aa',ab'+b)$ ça devrait marcher (reste à vérifier que $*$ est une loi de groupe, mais c'est le cas). Donc $(A,\circ)$ est isomorphe à ce groupe $(\R^* \times \R,*)$. La loi $*$ a bien été construite à partir des deux lois de groupes, non plus indépendamment comme pour le produit direct, mais avec une "interaction" d'une composante sur l'autre : $ab'+b$ ; on dit que la deuxième loi (addition) a été "tordue" par la première "multiplication". Il y a tout un tas de possibilités pour "tordre" les lois de groupe et ça donne une grande variété de produits semi-directs. Pour la théorie générale tu peux consulter les excellentes explications de notre Alain national et d'autres non moins intéressants sur le fil :
    \lien{http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?3,354089,354178}
    et aussi dans d'autres fils que je ne retrouve pas pour l'instant.
  • Sylvain: J'ai Latexifié ton message, explique moi en quoi le fait d'etre sou nunux t'empeche de le faire ? c'est une vraie question :)

    Sinon, rien a ajouter a ce qu'a dit Egoroff, mais intuitivement, un produit semi direct est une generalisation du produit direct, qui fait intervenir un morphisme de groupe dans la loi de composition. Dans ce cas, le produit direct est un produit semi direct ou le morphisme en question est reduit a l'identité, si ma mémoire est bonne....

    Au fait, tu es toujours sur la piste de RH ?
  • Sylvain : à propos de ta question 3.

    On peut se poser la question pour le corps des quaternions $\mathbb{H}$ (de dimension 4 comme $\mathbb{R}$-espace vectoriel, avec une structure euclidienne canonique donnée par la norme des quaternions). Pour simplifier sans changer fondamentalement les choses, on peut se demander si les $z \mapsto az$ avec $a\neq 0$ font toutes les similitudes qui conservent l'origine (similitudes linéaires). Or le groupe des similitudes d'un espace euclidien de dimension 4 est de dimension 7 : dimension 6 pour $\mathrm{SO}(4)$ (la dimension de $\mathrm{SO}(n)$ est $n(n-1)/2$), plus 1 pour les homothéties. Or tu vois que les $a$ se promènent dans un espace de dimension 4. Il n'y en a pas assez!

    Par contre, si on considère les $z \mapsto azb$, alors là, oui, ça marche. En fait, toute rotation peut s'écrire $z \mapsto azb$ avec $a$ et $b$ quaternions de norme 1, et ceci de manière essentiellement unique (on a seulement le choix entre $(a,b)$ et $(-a,-b)$). Référence : Berger, Géométrie ou Perrin, Cours d'algèbre. Petite remarque sur les dimensions : couple de quaternions de norme 1, ça fait bien dimension 6, comme $\mathrm{SO}(4)$.

    Cordialement,

    MC
  • En fait jobherzt, Linux ne m'empêche pas de faire du Latex, mais d'utiliser les raccourcis comme Alt+158 pour la croix, Alt+128 pour le "c cédille" and so on...
    Pour RH, j'ai provisoirement mis de côté car je suis un peu bloqué (j'en suis à me demander s'il y a un lien entre les morphismes de groupe du groupe des caractères de Dirichlet modulo q, et le groupe de symétrie du domaine de définition des séries L de Dirichlet, qui semble être {Id,z->conjugué(z)} dans les deux cas. Mais si ça t'inspire, n'hésite pas à creuser la question et à me tenir au courant ! :-))
    Merci Michel pour ces précisions. Mais pourquoi tu te limites aux similitudes qui conservent l'origine ? Dans le cas général, on a z->azb+c, avec a de norme 1, b et c quelconques non ?
  • Sylvain a écrit:
    Mais pourquoi tu te limites aux similitudes qui conservent l'origine ? Dans le cas général, on a z->azb+c, avec a de norme 1, b et c quelconques non ?

    Oui bien sûr. J'enlevais juste la partie translation parce qu'elle n'a aucune incidence sur le problème.

    MC
  • Sylvain a écrit:
    (x désigne le produit, je suis sous Linux malheureusement) ?

    Pour la croix, tape AltGr Shift ; (ou sans Shift, je suis malheureusement au boulot sous Windows) et ç pour le ç ou AltGr Shift ç pour le même en capitale.
    Renseigne-toi aussi sur la touche Compose, très amusante.
    Algebraic symbols are used when you do not know what you are talking about.
            -- Schnoebelen, Philippe
  • A propos de corps, j'ai une question simple pour algébristes (Michel par exemple): comment s'appelle une structure où $(K,+)$ est groupe commutatif, $(K\backslash {0},\times)$ est un groupe multiplicatif, où $\times$ est distributive sur $+$ (i.e. jusqu'ici c'est un corps), mais où on a une troisième loi $\diamondsuit$ telle que $(K\backslash\{0,1\},\diamondsuit )$ soit un groupe et qui vérifie une propriété de compatibilité avec les autres lois: $a\diamondsuit (b+c)=(a\diamondsuit b)+(a\diamondsuit c)$ (idem à droite) et $a\diamondsuit (b\times c)=(a\diamondsuit b)\times (a\diamondsuit c)$, idem à droite. En fait est-ce que ça existe seulement, éventuellement avec d'autres conditions de compatibilité? Plus généralement y a-t-il des obstructions à rajouter des lois? Merci d'éclairer ma lanterne...
  • Je ne suis pas expert, mais a mon avis ca peut toujours se faire "ad hoc", il y a toujours des trucs bizzare (genre les lois auto distributives, qui verifient $x\star (y\star z)=(x\star y)\star (x\star z)$)

    La vraie question n'est pas tellement de savoir si c'est possible, mais plutot de savoir si ce genre de choses peut arriver "naturellement", ie existe t il un ensemble qui possede 3 lois qui ont un "sens" ?
  • Note : ca n'est pas exactement ce que tu cherches, mais il existe des stuctures avec 3 lois "naturelles", meme si la 3e est bizzare : ce sont les bialgèbres, munies d'une addition, d'une multiplication, et d'une comultiplication, qui est une sorte de multiplication "a l'envers" (ie qui prend un element et en renvoie 2), et qui verifient des relations de compatibilité, avec une notion de coassociativité.

    C'est ce type d'objet qui se retrouvent souvent appelés "groupes quantques".
  • Merci jobherzt. Oui je cherche bien sûr des lois et des compatibilités naturelles. Je vais de ce pas voir du côté des bialgèbres.
  • Gaspard : je n'ai jamais rencontré le genre de structure que tu évoques.
    Pour poursuivre ce que suggère jobhertz, tu peux aller voir l'article "algèbre de Hopf" du Wikipedia en anglais.

    Cordialement,

    MC
  • Gaspar : En fait est-ce que ça existe seulement ?

    Jobhertz : Je ne suis pas expert, mais a mon avis ca peut toujours se faire "ad hoc"

    Eh bien non, ça ne risque pas d'exister !

    Remarquons que $(K,+,\times)$ est un corps, on a donc
    $a+b=a \Rightarrow b=0$
    $b\times a=a \Rightarrow b=1$
    et $1 \neq 0$ sinon $K\setminus\{0\}$ serait vide et ne pourrait donc être un groupe comme demandé.

    On voudrait maintenant que $(K\setminus\{0,1\},\diamondsuit )$ soit un groupe (mais supposons simplement qu'il s'agisse d'un magma bien quelconque, ça ne marchera pas non plus) tel que, sans restriction sur les arguments, $\diamondsuit$ se distribue à gauche et à droite sur $+$ et sur $\times$.

    Prenons $x$ quelconque, on a $x \diamondsuit 0 + x \diamondsuit 0 = x \diamondsuit (0+0) = x \diamondsuit 0$ d'où $x \diamondsuit 0 = 0$ (remarque prélimiaire) : en conclusion $0$ est absorbant (à droite, parce que j'ai utilisé la distributivité à droite).

    De même, prenons $x$ quelconque, on a $1 \diamondsuit x \times 1 \diamondsuit x = (1\times 1) \diamondsuit x = 1 \diamondsuit x$ d'où $1 \diamondsuit x = 1$ (remarque préliminaire) : en conclusion $1$ est absorbant (à gauche, parce que j'ai utilisé la distributivité à gauche).

    Et donc, $1 \diamondsuit 0 = 0 = 1$, et ça, comme on a dit, c'est pas possible ma bonne dame.


    [La case Latex :)]
  • Merci à Michel, c'est bien élégant ces histoires co-algébriques. MArci aussi au barbant raseur, c'est limpide. Très contraignant la distributivité à la fois sur $+$ et $\times$ donc. Hmm, et avec une interaction plus soft entre $\times$ et $\diamondsuit$ mais qui soit toujours naturelle, il y a des choses qui existent?
  • Il y a l'exponentiation, parfois, mais c'est une application partielle...
  • A la limite, le crochet d'une algebre de Lie est une sorte de loi aditionnelle..
  • Sylvain, si cela peut t'aider ou alors te donner un peu de lecture dans le métro :

    parmi les groupes de Lie classiques, il y a le groupe euclidien ( le groupe des isométries affines de $\R^n$ préservant l'orientation). Bon, ce n'est pas le groupe des similitudes, mais on s'en rapproche. On peut noter le groupe euclidien $E(n)$ et le représenter comme un sous-groupe de $GL(n+1)$ de la façon suivante :

    $E(n)=\left \{ \left. X=\begin{pmatrix} Y & b\\ 0&1 \end{pmatrix}\ \right|\ Y \in SO(n),\ b\in \R^n \right \}$
  • Merci Kamel. Qu'y a-t-il de plus dans le groupe euclidien par rapport à celui des similitudes ? Si je ne m'abuse, les réflexions ne conservent pas l'orientation, si ?
    Autre chose : je vois pas bien comment tu peux écrire ta matrice $X$ :
    si on pose $n=2$, $Y$ est une matrice $2\times 2$, a-t-on alors :
    $$X=\begin{pmatrix} \cos(\theta) & -\sin(\theta)&b_1\\ \sin(\theta)&\cos(\theta) & b_2\\ 0&0&1 \end{pmatrix}$$
  • Je crois bien que j'ai raconté n'importe quoi : l'implication $ab=a \Rightarrow b=1$ n'a lieu que pour $a \neq 0$, et je l'exploite justement pour un $a$ nul.

    Toutes mes excuses.

    Je pense néanmoins qu'une telle structure ne peut exister, et qu'on devrait s'en sortir en triturant les distributivités, mais je n'ai pas le courage de reprendre ma preuve. Si ça tente quelqu'un...
  • >Sylvain : Qu'y a-t-il de plus dans le groupe euclidien par rapport à celui des similitudes ?

    Rien. Il y en a même moins car il ne contient pas toutes les homothéties.


    >Sylvain : Si je ne m'abuse, les réflexions ne conservent pas l'orientation, si ?

    Effectivement, les réflexions ne conservent pas l'orientation, mais quel est le rapport avec le reste ?

    >Sylvain : je vois pas bien comment tu peux écrire ta matrice $ X$ :
    >si on pose $ n=2$, $ Y$ est une matrice $ 2\times 2$, a-t-on alors :
    >$\displaystyle X=\begin{pmatrix}\cos(\theta) & -\sin(\theta)&b_1\\ \sin(\theta)&\cos(\theta) & b_2\\ 0&0&1 \end{pmatrix}$

    Oui, c'est cela.
  • En fait j'avais mal lu : je pensais qu'on avait "groupe euclidien=groupe des similitudes plus réflexions"...
    D'ailleurs, est-ce que toute réflexion de R^n peut s'interpréter comme une rotation de R^(n+1) ? Par exemple les ailes d'un papillon sont images l'une de l'autre par une réflexion dans le plan, mais aussi par une rotation dans l'espace R^3.
  • Oui mais le corps du papillon ne sera plus une droite.


    [réflexion faite, ça tient debout ;) AD]
  • Je reviens sur la démonstration du barbant raseur.

    De $(1 \diamondsuit x) \times (1 \diamondsuit x) = (1\times 1) \diamondsuit x = 1 \diamondsuit x$, on déduit $1 \diamondsuit x = 1$ ou $1 \diamondsuit x = 0$.

    S'il existe $x_0 \neq 0$ avec $1 \diamondsuit x_0 = 0$, alors pour tout $y$, avec $z = yx_0^{-1}$,
    $$1 \diamondsuit y = 1 \diamondsuit (z \times x_0) = (1 \diamondsuit z) \times (1 \diamondsuit x_0) = (1 \diamondsuit z) \times 0 = 0,$$
    puis, pour tout $x$ et tout $y$,
    $$x \diamondsuit y = (x \times 1) \diamondsuit y = (x \diamondsuit y) \times (1 \diamondsuit y) = (x \diamondsuit y) \times 0 = 0,$$
    ce qui ne convient pas. On a donc $1 \diamondsuit x = 1$ pour tout $x \neq 0$, et, de même, $x \diamondsuit 1 = 1$.

    De là :
    $$1 + 1 = (1 \diamondsuit 1) + (1 \diamondsuit 1) = 1 \diamondsuit (1+1)$$
    donc $1 \diamondsuit (1+1) \neq 1$ et $1+1 = 0$ : le corps $K$ est de caractéristique 2.
  • Merci gb, super ! Ça m'a donné envie de m'y remettre.

    Finalement, je rachête que $(K^\times \backslash 1,\diamondsuit)$ est un monoide (groupe, pas besoin) : cela va me permettre de montrer qu'il ne peut y avoir d'élément d'ordre fini (pour $\times$) dans $K^\times \backslash \{1\}$.

    Je procède de la façon suivante :

    $\cdot$ Si $K^\times$ a un autre élément d'ordre fini que $1$, alors il est fini

    $\cdot$ Si $K^\times$ est fini, $\diamondsuit$ est totalement déterminé...
    $\cdot$ ...et ne peut convenir.

    J'espère ne pas avoir fait d'erreur cette fois, mais c'est loin d'être dit.


    \begin{enumerate}
    \item Je suppose donc que $K^\times \backslash \{1\}$ contient des \'elements d'ordre fini.\\
    Par ailleurs, $(K^\times \backslash \{1\},\diamondsuit)$ étant un monoide, je note $e$ son élément neutre.\\\\
    \item Je considère $u \in K^\times \backslash \{1\}$ d'ordre fini et minimal $p$.\\
    Je remarque alors que $1 = 1 \diamondsuit e = u^p \diamondsuit e = (u \diamondsuit e)^p = u \diamondsuit e^p$\\
    Je rappelle que si $u$ et $e^p$ sont tous deux dans $K^\times \backslash \{1\}$, leur "hyperproduit" (par $\diamondsuit$) l'est aussi par hypothèse ($(K^\times \backslash \{1\},\diamondsuit)$ est un monoide), or ici l'hyperproduit vaut $1$, et $u$ est bien dans $K^\times \backslash \{1\}$ par hypothèse, c'est donc $e^p$ qui ne l'est pas et qui vaut $1$. Donc l'ordre de $e$ divise $p$, mais comme $p$ est minimal, l'ordre de $e$ est $p$.\\
    En conclusion, s'il existe des éléments d'ordre fini, $e$ est d'ordre fini et minimal.\\\\
    \item Je considère maintenant un élément $x \in K^\times \backslash \{1\}$ quelconque. On a $x^p = x^p \diamondsuit e = x \diamondsuit e^p = x \diamondsuit 1 = 1$. Ainsi, tout élément de $K^\times$ est d'ordre $p$, sauf $1$ qui est d'ordre $1$.\\\\
    \item Remarquons que dans $K^\times$, on a au moins $p$ éléments : $1,e,e^2,...,e^{p-1}$.\\
    Mais on voit maintenant que $\forall x \in K^\times, x^p=1$, or dans un corps une équation polynômiale de degré $p$ a au plus $p$ solutions, donc, finalement, $K^\times$ a exactement $p$ éléments, et $p=2^r-1$ avec $2^r$ le cardinal de $K$.\\
    Donc $|K^\times| \in \{3,7,31,...\}$\\\\
    \item Comme on vient de le voir, $(K^\times, \times) \simeq (\Z/p\Z,\overline{+})$. Or il existe une seule structure d'anneau sur $(\Z/p\Z,\overline{+})$ (encore une fois, merci la distributivité). D'où $(K^\times, \times,\diamondsuit) \simeq (\Z/p\Z,\overline{+},.)$.\\
    A posteriori, $(K^\times, \times,\diamondsuit)$ est donc un corps, et le monoide $(K^\times \backslash \{1\},\diamondsuit)$ un groupe.\\\\
    Arrivé là on se dit que l'unique "hyperproduit" convenable a peu de chance de se distribuer sur $+$. Et effectivement, il me semble que ça ne marche pas.\\\\
    \item Comme $e$ engendre multiplicativement $K^\times$, on a, pour tous entiers $k$ et $l$, l'existence d'un entier $q$ tel que $e^k+e^l=e^q$.\\
    Mon idée est d'hyermultiplier cette égalité par un $e^s$ convenable, pour un $(k,l)$ convenable, et d'utiliser la distributivité pour aboutir à une contradiction.\\
    Je réécris donc de deux façons différentes $e^3 \diamondsuit (e+e^2)$.\\
    D'une part, $e^3 \diamondsuit (e+e^2) = (e \diamondsuit (e+e^2))^3 = (e+e^2)^3= e^3+e^4+e^5+e^6$.\\
    D'autre part, $e^3 \diamondsuit (e+e^2) = e^3 \diamondsuit e + e^3 \diamondsuit e^2 = e^3 + e^6$.\\
    En conclusion, $e^4+e^5=0$\\
    Caractéristique $2$ oblige, cela donne $e^4=e^5$ donc $e=1$, impossible.\\\\
    \item En résumé, si $K^\times$ a un autre élément d'ordre fini, alors c'est un $\Z/p\Z$ et un unique $\diamondsuit$ distribue sur $\times$, et il ne distribue pas sur $+$. Notre $K$ ne peut donc avoir d'élément d'ordre (multiplicatif) fini (sauf $1$).
    \end{enumerate}


    Il me semble maintenant que cela implique que $K$ soit une extension transcendante "pure" (j'entends par là sans élément algébrique de degré $>1$) de $\Z/2\Z$ (sinon il y a des éléments d'ordre fini).


    Me tompe-je ?

    Si tout est correct, peut-on dire mieux ?
  • Joli, le barbant raseur.

    Il me semble que tes deux évaluations de $e^3 \diamondsuit (e+e^2)$ ne supposent aucun renseignement sur l'ordre de $e$. La caractéristique 2 suffit obtenir $e=1$ et à conclure sur l'impossibilité d'une telle structure.

    Ai-je raté quelque chose ?
  • Non, non, c'est moi qui ai conçu la preuve en direct et me suis donc perdu dans des détours bien inutiles ! Bien vu !

    La question est donc réglée !! Bravo !!!
  • Cher gb,

    Tu m'as fait une remarque fort pertinente :
    - dans mon point 6, j'exploite uniquement le fait que la caractéristique est 2

    Mais il me semble qu'on peut aussi faire la remarque renversée :
    - j'exploite le fait que la caractéristique est 2 uniquement dans mon point 6

    J'exploite par contre dans les points précédents que $1 \diamondsuit x = 1$ pour tout $x \neq 0$, mais tu l'as prouvé sans encore utiliser la distributivité de $\diamondsuit$ sur $+$ (que tu as seulement exploitée pour conclure sur la caractéristique).

    Alors, oublions cette distributivité sur $+$ (se distribuer à la fois sur $+$ et sur $\times$, ça n'était guère raisonnable) et posons la définition suivante :
    {\it On appelle {\bf siamois} un quadruplet $(K,+,\times,\diamondsuit)$ tel que $(K,+,\times)$ soit un corps et $(K^\times,\times,\diamondsuit)$ un anneau}.

    Peut-on convenir que j'ai prouvé que :
    si
    un siamois $(K,+,\times,\diamondsuit)$ a un élément d'ordre (multiplicatif, mieux vaut préciser avec cette inflation de lois) fini différent de $1$
    alors
    $(K,+,\times) \simeq (\mathbb{F}_{p^r},+,\times)$ où $n=p^r-1$ est un nombre premier
    et $(K^\times,\times,\diamondsuit) \simeq (\Z/n\Z,+,\times)$

    Et qu'en particulier la "caractéristique" d'un siamois ne peut être nulle (car alors (-1) est d'ordre 2).


    Si nous pouvons en convenir, y a-t-il d'autres siamois (sans élément d'ordre fini donc) ?

    J'ai l'impression (je délire ?) que si la caractéristique d'un siamois est impaire il y a nécessairement un élément d'ordre fini (2, pour le pas le nommer) et que les seuls candidats sont donc... des extensions transcendantes "pures" de $\mathbb{Z}/2\mathbb{Z}$ (décidément, je tiens à les caser).


    Qu'en penses-tu ?
  • J'ai l'impression (je délire ?) que si la caractéristique d'un siamois est impaire il y a nécessairement un élément d'ordre fini (2, pour le pas le nommer)

    Je crois bien que c'est encore plus clair si on prend -1...
    Il est grand temps pour moi d'aller au lit !

    Bonne nuit.
  • Cher barbant raseur,

    Effectivement, si la caractéristique n'est pas 2, -1 est un élément d'ordre multiplicatif 2, donc tout élément de $K\setminus\{0,1\}$ est d'ordre multiplicatif 2, solution de $x^2-1=0$ etc...

    Le seul candidat possible est $\Z/3\Z$ avec la loi définie par :
    pour tout x : $0 \diamondsuit x = x \diamondsuit 0 = 0$
    pour tout $x$ non nul : $1 \diamondsuit x = x \diamondsuit 1 = 1$
    et $-1 \diamondsuit -1 = -1$
    Alors $(K\setminus\{0,1\},\diamondsuit)$ est un groupe d'ordre 1.

    Si la caractéristique est 2, aucun élément n'est d'ordre fini, et tu places les extensions transcendantes pures de $\Z/2\Z$ auxquelles tu tiens tant.
  • Merci beaucoup, gb.

    Ca reste donc vraiment très limité même sans la distributivité sur +...
  • {\it Ca reste donc vraiment très limité même sans la distributivité sur +...}

    Bin, en fait, pas aussi limité que je l'espérais.


    Je reviens donc aux extensions transcendantes pures de $\Z/2\Z$ auquelles je tenais tant.
    Mais bon, je n'y comprends pas grand chose à ces gars-là, comme quoi l'amour est aveugle.


    Alors je prends le plus simple de tous : $(\Z/2\Z(X),+,\times)$.
    Objectif : munir son groupe multiplicatif $(\Z/2\Z(X)^\times,\times)$ d'une loi $\diamondsuit$ lui conférant une structure d'anneau. Voire de corps si possible.


    Alors, voilà, le groupe $(\Z/2\Z(X)^\times,\times)$, bon, écrit comme ça, j'y comprends pas grand-chose, alors je vais essayer de lui trouver un groupe isomorphe que je connaîtrais mieux.
    Déjà, c'est un groupe abélien, c'est à dire un $\Z$-module. Je vais plutôt le voir comme ça car cela m'est plus agréable.


    La première question que je me pose en voyant un $\Z$-module, c'est : est-ce qu'il est libre ?
    Donc, question : est-ce que $(\Z/2\Z(X)^\times,\times)$ serait libre ?


    Et alors là, miracle : réponse oui.


    En effet, l'anneau $(\Z/2\Z[X],+,\times)$ est factoriel, donc tout élément de $\Z/2\Z(X)^\times$ peut s'écrire comme un produit fini de $P_i^{\alpha_i}$ avec $P_i$ irréductibles et $\alpha_i$ dans $\Z$. En général, cette décomposition n'est pas unique, seulement unique à produit par un inversible près, mais comme ici le seul inversible est $1$, cette décomposition {\bf est} unique.


    Et donc la famille des polynômes irréductibles forme une base. En l'occurrence, on peut les indexer par $\N$ et donc notre $\Z$-module est isomorphe au $\Z$-module $\Z^{(\N)}$ des suites à support fini dans $\Z$ ! Alias, alias, trois fois alias, notre vieille connaissance $\Z[T]$.


    Je résume : $(\Z/2\Z(X)^\times,\times) \simeq (\Z[T],+)$.


    Et je repose la question : peut-on munir ce gars-là d'une structure d'anneau (voire de corps) ?


    Pour la structure de corps, il me semble que la réponse est non. J'y reviendrai.


    Mais pour la structure d'anneau (pour laquelle j'espérais aussi que la réponse fût non), là, force est de le constater : sauf erreur dans ce qui précède, la réponse est oui. Car $(\Z[T],+,\times)$ avec le produit habituel des polynômes, est bien un anneau.


    Mais la situation est bien pire : notons $\star$ notre produit quand on regarde notre groupe comme $\Z^{(\N)}$ plutôt que $\Z[T]$. C'est à dire $(\Z^{(\N)},+,\star) \simeq (\Z[T],+,\times)$. Une bijection de $\N$ induit un isomorphisme de $(\Z^{(\N)},+)$. Par la suite je désignerai ces isomorphismes en les appelant simplement "bijections de $\N$".
    Si on fait précéder l'application du produit par une bijection de $\N$ (la même sur chaque argument), et qu'on la fait suivre par une bijection de $\N$, il me semble qu'on obtient... un autre produit qui confère aussi à $(\Z^{(\N)},+)$ une structure d'anneau. Si bien qu'il y en a quand même pas mal, de tels produits!


    Mais soit. Je me pose alors deux questions :

    1) N'y a-t-il bien aucune erreur dans ce qui précède, notament la dernière assertion ?

    2) Y a-t-il d'autres produits sur $(\Z[T],+)$ ?
    Attention, je veux obtenir une vraie structure d'anneau (unitaire donc).
    Je vote non mais je n'y connais rien : c'est peut-être "bien connu" ?


    A défaut, je crois pouvoir affirmer qu'une structure de corps est impossible. J'y reviens donc en développant cette fois mon argument.
    Supposons avoir un produit $*$ sur $(\Z[T],+)$. Notons $E$ son élément neutre.
    La distributivité du produit fait que sa restriction $\Z.E \times \Z[T] \rightarrow \Z[T]$ est complêtement déterminée (car les éléments de $\ZE$ sont des sommes de $E$): $n.E*P=n.P$. Par suite, $2E$ n'a aucune chance d'être inversible.

    3) Toujours pas d'erreur ?


    Je résume : dans le cas de $(\Z/2\Z(X),+,\times)$, il semble qu'on puisse effectivement définir un hyperproduit afin d'obtenir un siamois, mais pas un siamois strict (où les deux dernières lois donnent un corps). Mieux : j'ai apparemment déterminé une famille (de cardinal $2^\N$) d'hyperproduits convenables, et je pense qu'ils sont les seuls possibles (pour ça j'en appelle à vot' bon coeur).




    Je vais généraliser un chouia.


    Donnons-nous cette fois un ensemble $I$ quelconque (fini/infini, dénombrable/non-dénombrable, comme vous voulez) et regardons le corps $(\Z/2\Z(X_i,~i\in I),+,\times)$.


    Je remarque juste que tout marche pareil.
    $(\Z/2\Z(X_i,~i\in I),+,\times)$ est toujours le corps des fractions de $(\Z/2\Z[X_i,~i\in I],+,\times)$ qui est toujours factoriel, on peut indexer ses irréductibles par $\breve{I}$ (que je définis comme $max(card(I),\N)$) et $(\Z/2\Z(X_i,~i\in I)^\times,\times)$ est isomorphe à $(\Z^{(\breve{I})},+)$ et à $(\Z[T_i,~i\in \breve{I}],+)$, sur lesquelles on n'a pas de structure de corps, mais on a clairement une famille (de cardinal $2^\breve{I}$) de structures d'anneau possibles, que je conjecture être les seules structures d'anneau possibles.

    4) Toujours pas de délire de ma part ?




    Venons-en au point qui m'intéresse :

    5) Est-ce qu'on peut utiliser l'analyse précédente pour déduire quelque chose dans le cas de n'importe quelle extension trancendante pure de $\Z/2\Z$ (je rappelle que j'entends par là sans élément algébriques à part $0$ et $1$, je ne sais pas si c'est standard comme terminologie) ?

    Par exemple :

    6) Est-ce que toute extension trancendante pure de $\Z/2\Z$ est isomorphe à un $(\Z/2\Z(X_i,~i\in I),+,\times)$ ?
    (Je sais, c'est complêtement débile comme question, ce serait quand même beaucoup trop fort de café que la réponse soit oui, mais je n'arrive pas à trouver de contre-exemple.)


    Merci à tous ceux qui auront eu la patience de me lire jusqu'au bout.
  • Aloooors, en ce qui concerne 6) la réponse est oui. C'est la définition même d'une extension transcendante pure (:P)
  • Sans doute mais pas la mienne (désolé, chavais pas :-(), que j'ai précisée.

    Par exemple, pour moi, un $\Z/2\Z(\frac{X^7+X+1}{X^3+X+1},\frac{X^6+X}{X^2+1})$ convient. Est-il clairement isomorphe à $\Z/2\Z(X)$ ou un de ses pairs, peut-être (j'ai randomisé mes deux fractions rationnelles donc je ne sais pas trop en l'occurrence), mais en tout cas il me semble que dans le cas général il y a quelque chose à dire.
  • Je le remonte, au cas où l'âme charitable qui accepterait d'y réfléchir l'aurait non-vu.
  • Bon, juste un petit message pour dire que la réponse à ta question (6) est NON.

    Ce que tu appelles une extension transcendante pure, s'appelle en fait une extension transcendante (tout cours), ie une extension $K/k$ telle que $K$ ne contienne pas d'éléments algébriques sur $k$ autres que ceux de $k$.

    Une extension transcendante pure est une extension $K/k$ telle que l'on ait un $k$-isomorphisme $K\simeq k(X_i,i\in I)$.

    Voici maintenant un exemple d'extension transcendante qui n'est pas transcendante pure:

    $K=k(X,\sqrt{X+1})$. Tous les éléments de $K$ sont transcendants sur $k$, mais $K$ n'est pas transcendante pure. En effet, $\sqrt{X+1}$ est algébrique sur le sous-corps $k(X)$; ceci ne peut pas arriver dans une extension transcendante pure.
  • Merci Greg, c'est très clair.

    Merci aussi pour la terminologie : mais alors, $\mathbb{F}_4(X)$ n'est pas une extension transcendante de $\mathbb{F}_2$ ??? Comment s'appelle une extension où il y a des éléments transcendants (et aussi éventuellement des éléments algébriques) ?

    Peut-on dire que toute extension transcendante (c'est à dire, donc, avec uniquement des éléments transcendants exceptés ceux du corps de base) est nécessairement une extension algébrique d'une extension transcendante pure, comme dans l'exemple que tu m'as montré ? Ou un énoncé plus faible mais analogue ?
  • Pour la terminologie, je ne suis pas bien sûr d'avoir utilisé la bonne...je préfère que tu te réfères à un bouquin pour ça :D.


    En fait, on peut décomposer toute extension $K/k$ comme suit: on prend $M$ la plus grande extension algébrique de $k$ contenue dans $K$.

    Ensuite $K/M$ ne contient plus que des éléments transcendants. On prend alors une base de transcendance de $K$ sur $M$ (i.e. une famille d'éléments de $K$ algébriquement ind^épendants de cardinal maximal), qui engendre un sous-corps $K'$ tel que $K'/M$ est transcendante pure. Alors $K/K'$ est algébrique.

    On a donc une tour $K/K'/M/k$, avec $M/k$ algébrique, $K'/M$ transcendante pure et $K/K'$ algébrique.
  • Il y a peut-être malentendu sur la question de la terminologie : je n'y connais rien !!! Je ne peux donc pas te proposer de référence, j'ai simplement eu envie d'appeller "extension transcendante" une extension avec des éléments transcendants, et autrement une extension avec uniquement des éléments transcendants. Je profitais seulement que tu me corrige très justement pour demander des informations sur le sujet.
    [Edit : le malentendu était à sens unique : je viens de comprendre que tu me proposais justement d'aller vérifier dans un livre ^_^]

    Pour le reste, tes explications sont lumineuses : je vais sans doute me repencher sur le problème initial à la lumière de ce résultat.
  • Dans la dernière ligne de mon message il fallait lire $K/K'$ bien sûr...j'ai corrigé.

    Pour info, une bonne réf. serait le Lang.
  • Oui, je viens de me plonger dans le Lang (ainsi que le Perrin de géométrie algébrique et le Eisenbud, car par miracle mon collègue du bureau d'à côté avait les trois). J'ai trouvé la (bonne ^_^) définition d'une extension transcendante pure, mais pas d'une extension transcendante (j'ai peut-être mal cherché).

    Merci encore, Greg.
  • J'ai eu la curiosité de regarder sur le site de archives de l'association des collaborateurs de Nicolas Bourbaki (dont Thierry Poma nous donnait l'adresse dans ce fil) et s'il n'y a pas eu de modifications par rapport à cette version, Bourbaki appelle extension transcendante une extension qui n'est pas algébrique.

    Mais finalement je trouve ça dommage. Appeler ça extension quelconque et garder sous le coude transcendante pour les extensions sans éléments algébriques m'avait convaincu.

    En même temps ça n'est "que" la terminologie de Bourbaki... (si PB est dans le coin, j'y passe)
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