Une équation sur les nombres premiers

Marco8
Modifié (26 Mar) dans Arithmétique
Bonjour
Je cherche à démontrer qu'il n'existe pas de nombre premiers $p$ tel que $y^2-2=p^{3\alpha}$ avec $y,\alpha$ entiers avec une méthode "élémentaire" ie accessible niveau licence. J'ai réussi à montrer que nécessairement $\alpha$ était impair. Je me suis ensuite axé vers la division euclidienne de $y$  par $p$ mais je n'arrive pas à obtenir des contradictions.

En vous remerciant d'avance,
Marco.
Mots clés:

Réponses

  • DZE
    DZE
    Modifié (26 Mar)
    Bonjour,
    peut-être chercher du côté de $ (y-1)*(y+1) = p^{3\alpha} +1 = (p^{\alpha} +1)*(p^{2\alpha}  -p^{\alpha} +1)  $
    Certains sont doués sur le site pour faire ce genre de calcul (moi, pas tellement ;-) )
    DZE
  • Je pense qu'on peut travailler dans $\Z[\sqrt{2}]$ mais je ne sais pas si tu autorises cet outil.
  • gebrane
    Modifié (27 Mar)
    Je crois qu'il y a un lien avec le problème de Pell-Fermat généralisé. Considérons l'équation suivante : \[y^2 - 2 = p^n,\]
    où \(p\) est un nombre premier et \(n\) est un entier naturel supérieur ou égal à 3. Il a été remarqué que \(n\) est nécessairement impair. Écrivons \(n = 2k + 1\). Alors l'équation peut être réécrite comme suit : \[y^2 - px^2 = 2,\]
    avec \(x = p^k\).
     Mais je doute qu'il recherche une preuve dans cette direction.
    Lorsque notre cher Nico, le professeur, intervient dans une question d'analyse, c'est une véritable joie pour les lecteurs..


  • Marco8
    Modifié (27 Mar)
    JLT a dit :
    Je pense qu'on peut travailler dans $\Z[\sqrt{2}]$ mais je ne sais pas si tu autorises cet outil.
    Oui je l'autorise ! Je n'ai rien trouvé en passant par cette direction du fait que cet anneau possède une infinité d'inversibles !
    La factorialité est donc compliquée à gérer car elle se fait à inversible près !
  • Je vous remercie pour vos suggestions ! Je vais essayer d'utiliser l'égalité de DZE. Concernant l'équation de Pell-Fermat je ne vois pas de moyens "simples" de la résoudre.
  • Chaurien
    Modifié (29 Mar)
    On pourrait regarder vers l'équation $y^2-2=x^3$, qui est une équation de Bachet-Mordell, du type $y^2=x^3+k$, à résoudre dans $\mathbb Z$, avec  $k \in \mathbb Z$\$\{0\}$. Il y a un grand nombre de références sur ce type d'équation, articles ou passages d'ouvrages de théorie des nombres, mais j'ai du mal à trouver quelque chose de vraiment synthétique, et j'ai l’impression qu'il reste des questions ouvertes. On trouve des publications de solutions pour telle valeur de $k$ ou tel ensemble de valeurs de $k$, et cette équation a été résolue pour un grand nombre de valeurs de $k$. Un cas des plus célèbres c'est $k=-2$, résolu par Fermat, qui se traite au moyen de l'anneau euclidien $\mathbb Z[i\sqrt 2]$, pour qui j'ai un intérêt personnel car je l'ai présenté à mon oral d'agreg il y a environ cinquante ans, dans un exposé sur « étude d'anneaux sur quelques exemples » ; aujourd'hui c'est bateau mais à l'époque ça a plu.
    Il y a pas mal de renseignements dans : W. Sierpinski, Elementary Theory of Numbers, Warszawa 1964, pp. 99-106, ouvrage d'une extraordinaire richesse. On y lit en p. 102 que cette équation $y^2=x^3+k$ a toujours un nombre fini de solutions en entiers (parfois aucune). que dans le cas qui nous occupe, l'équation $y^2=x^3+2$ n'a d'autres solutions que $y= \pm 1,x=-1$, que c'est difficile à prouver, et que la preuve est dans : 
    BRAUER, A., Uber einige spezielle diophantische Gleichungen, Math. Z. 25 (1926), pp. 499-504 (Sur quelques équations diophantiennes particulières).
    Je n'ai pas vérifié.
     Mais il y a peut-être une solution plus élémentaire au problème plus particulier posé ici.
    Bonne journée.
    Fr. Ch.


  • Chaurien
    Modifié (28 Mar)
    J'ai trouvé l'article d'Alfred Brauer (1894 – 1985), pour les germanistes de ce forum, dont le ne suis malheureusement pas.
  • Chaurien
    Modifié (29 Mar)
    Dans le but de résoudre l'équation $y^3=x^2-2$ dans $\mathbb Z$, effectivement on est tenté de factoriser le second membre dans l'anneau $\mathbb Z[\sqrt 2]$, qui est euclidien (Hardy & Wright, An introduction to the theory of numbers, Oxford 1975, p. 214). Cet anneau est donc factoriel.
    Par ailleurs, il apparaît que $x$ est nécessairement impair, d'où il suit que $x+\sqrt 2$ et $x- \sqrt 2$ sont premiers entre eux dans l'anneau $\mathbb Z[\sqrt 2]$.
    Mais ici, on tombe sur l'objection de @Marco8.
    Dans un anneau factoriel, si le produit de deux éléments premiers entre eux est un cube, il ne s'ensuit pas que chacun d'eux soit un cube.  Il s'ensuit que chacun d'eux est associé à un cube, autrement dit est égal à un cube multiplié par une unité (un élément inversible) de l'anneau. C'est ce que dit @Marco8.
    Dans l'anneau $\mathbb Z[i\sqrt 2]$, qui sert pour l'équation $y^3=x^2+2$, les unités sont $\pm 1$ qui sont des cubes. Dans cet anneau, si le produit de deux éléments premiers entre eux est un cube, alors chacun est un cube, et ça roule.
    À côté de l’équation $y^3=x^2+2$, Fermat proposait $y^3=x^2+4$, qui se résout en factorisant $x^2+4$ dans l'anneau $\mathbb G= \mathbb Z [i]$ des entiers de Gauss, qui est euclidien et dont les unités sont $ \pm 1, \pm i$. Veine, toutes les quatre sont des cubes...
    Mais dans notre anneau $\mathbb Z[\sqrt 2]$, qui sert pour l'équation $y^3=x^2-2$, les unités sont  $\pm (1+\sqrt 2)^n, n \in \mathbb Z$, qui ne sont pas toutes des cubes, à commencer par l'unité fondamentale $ 1+\sqrt 2$. Peut-être peut-on continuer, mais ça n'a pas l'air simple.
  • LOU16
    Modifié (1 Apr)
    Bonjour
    Il est vrai que la gestion de l'abondance des unités présentes dans $\Z[\sqrt 2]$ n'est pas de tout repos. Je pense néanmoins être parvenu (très laborieusement) à surmonter ces difficultés, en utilisant quelques rudiments de la "théorie algébrique des nombres"
    Supposons donc qu'il existe $(y,a,p)\in \N\times\N\times \mathbb P $ tel que :$\:\:y^2-2 =p^{3a},\: $ et notons $\:\:\alpha =\sqrt 2$
    Alors $p>2,\:y\equiv 1 \mod 2.\:\: \quad \Z[\sqrt 2 ] $ est un anneau factoriel dans lequel $y+\alpha$ et $y-\alpha$ sont premiers entre eux. 
    Ainsi, l'égalité  $(y+\alpha)(y-\alpha) =\left(p^{a}\right)^3 $ entraîne l'existence d'une unité $\eta $ de $\Z[\sqrt 2]$ et d'entiers $u,v $ tels que: $\:y+\alpha =\eta(u+v\alpha)^3.$
    $1+\alpha $ est l'unité fondamentale de $\Z[\sqrt 2].\qquad \exists n \in \Z\:$ tel que $\:\eta =\pm(1+\alpha)^n.$
    $\exists m\in\Z,  \:\:\exists k \in \{0,1,-1\}\:\: $ tels  que $\:y+\alpha=\pm(1+\alpha)^{3m+k}(u+v\alpha)^3=(1+\alpha)^k \Big(\pm(1+\alpha)^m(u+ v\alpha) \Big) ^3.$
    $\exists U, V \in\Z, \:\:\exists k\in\{0,1,-1\}\: $ tels que $\:\:y+\alpha =(1+\alpha)^k(U+V\alpha)^3.$
    $\bullet\:\:$ Si $k=0,\: $ alors $1=3U^2V+2V^3=V(3U^2+2V^2).\:\:$ C'est impossible.
    $\bullet\:\: $ Si $k=1,\: $ alors $ 1=U^3+3U^2V+6UV^2+2V^3.\qquad\bullet\:\: $ Si $k=-1,\: $ alors $ 1=U^3-3U^2V+6UV^2-2V^3.$
    Il reste à prouver que l'équation $\boxed{(\bigstar) \quad u^3+3u^2v+6uv^2+2v^3 = 1 } $ n'a pas, en dehors de $(u,v)=(1,0),$ de solution dans $ \Z^2.$
    Le membre de gauche de $(\bigstar)$ est la norme d'un élément d'une extension cubique de $\Q.\:\:\:$ Plus précisément:
    Soit $\omega $ l'unique zéro réel du polynôme irréductible sur $\Q,\:\:\boxed{P(X)=X^3-3X^2+6X-2.}\quad$ Alors $(\bigstar)$ s'écrit $\boxed{\mathcal N(u+v\omega) =1},$
    où $\mathcal N$ désigne la norme de l'extension cubique réelle  $\Q(\omega)/\Q.$
    Au terme de calculs assez pénibles (que je pourrai détailler pour ceux que cela intéresse), je me suis convaincu que $\theta =-1+3\omega -\omega^2$ est l'unité fondamentale de $\Z[\omega],\:\: $c'est-à-dire que: $\forall \xi \in \Z[\omega],\:\:\mathcal N(\xi )=1 \implies \exists n \in\Z \text { tel que }\xi =\theta^n.\quad$Ainsi:
    $u+v\omega =(-1+3\omega-\omega^2)^n =u_n+v_n\omega +w_n\omega^2, \quad u_n,v_n, w_n \in\Z.$
    Il faut désormais rechercher les entiers $n$ tels que $w_n= 0,\:\:$ce que l'on  va  faire en utilisant un argument $3-$ adique.
    Soient $A =\begin{pmatrix} -1&-2&0\\3&5&-2\\-1&0&5\end{pmatrix},\quad B =\begin{pmatrix}-8&-10&12\\ 21&22&-46\\ 5&6&40\end{pmatrix}\quad $Alors $\quad A^3=\mathrm I_3+3B,\quad\begin{pmatrix}u_n\\v_n\\w_n\end{pmatrix} =A^n\begin{pmatrix}1\\0\\0\end{pmatrix},\quad  w_n =\Phi(A^n),$
    où $\Phi$  désigne l'application $\Z$ -linéaire $\mathcal M_3(\Z) \to \Z, $ qui à $M$ associe son coefficient $M_{31}.\quad$ 
    En utilisant $w_{3n+k}=\displaystyle\sum_{s=0}^n\binom ns 3^s\Phi(B^sA^k), \: $ j'ai trouvé que: $\forall n \in \Z,\quad\begin{cases}w_{3n}=3n(\Phi(B)+3q)=3n(5+3q),\:\:q\in\Q, \: \mathcal V_3(q)\geqslant 0.\\ w_{3n+1}\equiv \Phi(A)\equiv -1 \mod 3.\\w_{3n+2}\equiv \Phi(A^2)\equiv -4 .\mod 3\end{cases}$
    Ainsi: $w_n =0 \implies n=0, \quad (u,v) =(1,0),\quad y=1,\:\:$ ce qui est impossible $\:\:\square$
  • Marco8
    Modifié (28 Mar)
    Merci pour vos réponses !!

    @Chaurien je suis aussi passé sur ce développement pour l'agrégation ! Le fait qu'il y ait un nombre fini d'unité qui de plus étaient toutes des cubes facilitaient grandement le résultat !

    @LOU16 Merci pour ces compléments je serai intéressé de connaitre pourquoi $\theta$ est nécessairement de cette forme là !
  • LOU16
    Modifié (19 Apr)
    Bonjour @Marco8.
    Peut-être est-il possible de déterminer directement l'unité fondamentale de $\Z[\omega]$ avec un outil informatique adéquat.
    J'ai pour ma part procédé ainsi: il faut naturellement disposer de l'expression de la norme d'un élément de $\Z[\omega].$
    $$\forall (a,b,c) \in \Z^3,\quad \mathcal N(a+b\omega+c\omega^2) =a^3+2b^3+4c^3+3a^2b-3a^2c+6ab^2+6b^2c+24ac^2+12bc^2+12abc.$$
    A l'aide d'un petit programme recherchant les $\theta$ tels que $\mathcal N(\theta) =1$ pour de petites valeurs de $a,b,c$, j'ai mis la main sur $\theta =-1+3\omega-\omega^2, \:\:N(\theta)=1,\quad \omega=0,4039...\quad 0,04<\theta<0,05.$
    Si $\theta$ n'est pas un générateur du groupe des unités positives de $\Z[\omega]$, alors $\exists \xi=a+b\omega +c\omega^2 \in \Z[\omega], \: \exists  n\in \N_{>1}$ tels que $\xi^n =\theta.$
    $n\neq 2$ car le coefficient de $\omega$ dans $\xi^2$ est pair. Donc $n\geqslant 3, \quad 1>\xi\geqslant\theta^{1/3}>0,341.$
    Soient $\xi_1,\xi_2 $ les conjugués de $\xi \:\:(\xi_2 =\overline{\xi_1}),\quad \mathcal N(\xi)=\xi\xi_1\xi_2 =1,\quad |\xi_i| =\dfrac1{\sqrt{\xi}}\leqslant 1,72.\:\:$ D'autre part:$\begin{bmatrix}\xi\\ \xi_1\\ \xi_2 \end{bmatrix} =M\begin{bmatrix}a\\ b\\c \end{bmatrix}\: $ où
    $M =\begin{bmatrix}1&\omega&\omega^2\\  1&\omega_1&\omega_1^2\\1&\omega_2&\omega_2^2\end{bmatrix}$ et les $\omega_i $ sont les conjugués de $\omega.\quad |\omega_i|^2 =\dfrac{\mathcal N(\omega)}{\omega}=\dfrac 2{\omega}<5.\quad \|M^{-1}\|_{\infty}\leqslant \dfrac{2\times 5\sqrt 5}{6\sqrt 6},$
    $\max\left(|a|,|b|,|c|\right) \leqslant \|M^{-1}\|_{\infty}(\xi+|\xi_1|+|\xi_2|)\leqslant \|M^{-1}\|_{\infty} (1+2\times 1,72) <7.$
    J'ai vérifié que les seuls $\:\xi=a+b\omega +c\omega^2\:$ tels que $\:\mathcal N(\xi) =1\:$ et $\:-6\leqslant a, b,c \leqslant 6 \:$ sont  $\:\xi =1\:$ et $\:\xi =\theta.$
    Cela nous mène à $n\in\{0,1\}$ et une contradiction. $$\:\boxed{\theta \text{ est le générateur appartenant à } ]0;1[\text{ du groupe multiplicatif } \Big\{ z\in \Z[\omega] \mid \mathcal N(z)=1\Big\}.}$$
  • Marco8
    Modifié (29 Mar)
    Bonjour @LOU16
    J'aurai quelques petites questions, comment obtiens-tu la formule de $w_{3n}$ je n'arrive pas à obtenir la factorisation par $n$.
    Concernant l'unité fondamentale de $\mathbb{Z}[\omega]$ comment as-tu obtenu la borne sur $\|M^{-1}\|_{\infty}$ ?
    Je te remercie pour tous ces détails !!
  • LOU16
    Modifié (31 Mar)
    Bonjour @Marco8
    Tes questions  sont  tout-à-fait justifiées et nullement petites.
    $\bullet\:$ Pour $w_{3n} $ , c'est en effet le point crucial de cette "méthode $p$-adique", et bien entendu, c'est le moment où j'ai trouvé astucieux de prendre un raccourci, en y glissant une très fâcheuse coquille, rendant mon propos incompréhensible. Désolé.
    Ce n'est pas $\boxed{q\in\Z}$ qu'il faut lire, mais $\boxed{q \in \Z_3,}\: $ ( $q\in\Q, \:\mathcal V_3(q)\geqslant 0$ )

    $w_{3n} =\displaystyle \sum_{s=0} ^n \binom ns \Phi(B^s)=3n\left(\Phi (B)+\sum_{s=2}^n \dfrac {3^{s-1}}{s!}\Phi (B^s)\prod_{i=1}^{s-1} (n-i) \right).\quad \forall s \in \N_{\geqslant 2}, \dfrac {3^{s-1}}{s!} \in 3 \Z_3, \quad q= \dfrac {3^{s-2}}{s!}\Phi (B^s)\prod_{i=1}^{s-1} (n-i) \in\Z_3.$
    $$w_{3n} =3n\left(5+3q\right).$$
    Je viens aussi  de voir que j'ai oublié de justifier le cas $n<0,$ mais l'argument est identique car $A^{-3} =\mathrm I_3+3B'$ avec $\Phi(B') \not\equiv 0 \mod 3.$
    $\bullet \:$Pour $\|M^{-1}\|_{\infty}, $ les coefficients de $M^{-1}$ sont tous de la forme $\dfrac{\omega _i^{r}\omega _j^s-\omega_i^s\omega_j^{r}}{\det M}$ avec $i,j,r,s \in\{0,1,2\},\:\: r+s\leqslant 3,\quad|\det M| =\sqrt{|\mathrm{Disc} (P)|} =6\sqrt 6, \:\:|\omega _i |< \sqrt 5.$
    Merci pour ta lecture attentive qui met en lumière mes imprécisions et mes erreurs, et me permet de les corriger.


Connectez-vous ou Inscrivez-vous pour répondre.