Convexe mesurable et rectifiable

Domi
Modifié (15 Feb) dans Topologie

Bonjour à tous :) Une question sans doute classique vue sur un autre site.

Un ensemble convexe et borné du plan euclidien est-il toujours mesurable et sa frontière toujours rectifiable ?

Domi

Réponses

  • Calli
    Modifié (16 Feb)
    Edit: Remplacer mesurable par borélien dans ce que j'ai dit.

    Bonjour,
    Il n'est pas forcément mesurable. Soit $E$ un sous-ensemble non mesurable de $\Bbb R$ inclus dans $[0,1]$. Soit $C$ l'union du disque unité ouvert $D(0,1)$ et de $\{(\cos t,\sin t)\mid t\in E\}$. Alors $C$ est convexe mais il n'est pas mesurable car $C\setminus D(0,1)$ n'est pas mesurable.

    En revanche si le convexe est fermé, alors il est mesurable. Sans perte de généralité, supposons $0\in C$. Pour tous $\theta\in[0,2\pi[$ et $r>0$, soit $P_{\theta,r}$ l'ensemble $]-\infty,r]\times\Bbb R$ tourné d'un angle $\theta$. Alors $$C=\bigcap_{\theta\in [0,2\pi[\cap\Bbb Q, r\in\Bbb Q_+^*, C\subset P_{\theta,r}}P_{\theta,r}$$ qui est une union dénombrable de fermés, donc mesurable. Pour montrer l'égalité ci-dessous j'utilise le lemme de séparation d'un convexe et d'un point hors du convexe par une droite (aka Hahn-Banach géométrique).
    Ça se généralise à des convexes non bornés, et même à des evn séparables de dual séparable je crois.
  • Calli
    Modifié (15 Feb)
    Pour le caractère rectifiable de la frontière, la réponse est oui.

    Cas 1 : Si le sous-espace affine engendré par le convexe $C$ est de dimension 1, alors $C$ est une ligne, donc sa frontière aussi, c'est facile.

    Cas 2 : Sinon, par convexité $C$ est d'intérieur non vide. Supposons sans perte de généralité que le l'origine $O$ du repère est dans $\mathring C$. Soit $A\in\partial C$. Montrons que $\partial C$ est rectifiable au voisinage de $A$ (ce qui suffit pour conclure que $\partial C$ est globalement rectifiable). Soit $(x,y)$ le système de coordonnées cartésiennes tel que $(0,0)$ représente $O$ et $(0,1)$ représente $A$. Alors il existe $\varepsilon>0$ et $\eta>0$ petits tel que pour tout $x\in{]-\varepsilon,\varepsilon[}$, il existe un unique $y>1-\eta$ (noté $y(x)$) tel que le point de coordonnées $(x,y)$ est dans $\partial C$ (par flemme je ne détaille pas pourquoi pour l'instant). Autrement dit $\partial C\cap\{x\in{]-\varepsilon,\varepsilon[}\text{ et }y>1-\eta\}$ est le graphe d'une fonction $x\mapsto y(x)$. De plus $C\cap\{x\in{]-\varepsilon,\varepsilon[}\text{ et }y>1-\eta\}$ est l'hypographe de cette fonction (le contraire d'épigraphe, je ne sais pas si ça se dit) et est convexe. Donc la fonction $x\mapsto y(x)$ est concave. Donc elle est lipschitizienne. Donc son image, i.e. $\partial C\cap\{x\in{]-\varepsilon,\varepsilon[}\text{ et }y>1-\eta\}$, est rectifiable.
  • Domi
    Modifié (15 Feb)
    Merci pour les réponses :)

    En fait pour l'exercice il s'agissait de comparer des périmètres et des aires d'ensembles convexes, il n'y a donc pas besoin de préciser l'existence des uns et des autres. J'ai bien compris ta réponse pour la mesurabilité, un peu moins pour le côté rectifiable mais c'est certainement de ma faute.
    Domi.
  • Renart
    Modifié (16 Feb)
    @Calli : qu'entends-tu par mesurable ?  Le convexe que tu as donné dans ton premier message est parfaitement mesurable dans le sens où il appartient bien à la tribu de Lebesgue. En effet ce convexe s'écrit comme la réunion d'un ouvert et d'un sous-ensemble du cercle unité, qui est négligeable et donc mesurable. Le même raisonnement s'applique pour tout convexe du plan, c'est la réunion d'un ouvert (son intérieur) et d'un sous-ensemble de sa frontière, qui est mesurable car négligeable puisqu'il s'agit effectivement d'une courbe rectifiable.

    J'avais rédigé une fois (sur papier) une démonstration "à la main" du fait que la frontière d'un convexe borné est rectifiable en en revenant à la définition via les lignes brisées et de la géométrie, c'était moins simple qu'attendu...

    Petite amusette, savez-vous démontrer le résultat suivant ? Si l'on a $C$ et $D$ deux convexes plans et compacts tels que $C\subset D$ alors $L(\partial C) \le L(\partial D)$ où $L$ représente la longueur d'une courbe. Cela semble évident mais ce n'est (à ma connaissance) pas si simple à démontrer. Si je ne dis pas de bêtises Archimède utilise cet argument pour encadrer la valeur de $\pi$ en approximant le cercle par des polygones réguliers inscrits/circonscrits. La formule de (Cauchy-)Crofton permet d'en donner une jolie et inattendue preuve.

    Edit : correction d'une erreur, cf le message de raoul.S plus bas.
  • Domi
    Modifié (15 Feb)
    C'est facile quand $C$ est un polygone mais sans doute bien plus malin dans le cas général.
    Domi.
  • raoul.S
    Modifié (15 Feb)
    Renart a dit : 
    et de sa frontière, qui est mesurable car  négligeable puisqu'il s'agit effectivement d'une courbe rectifiable.

    Plus simplement : la frontière est fermée donc mesurable.

    Renart a dit :
    Si je ne dis pas de bêtises Archimède utilise cet argument pour encadrer la valeur de $\pi$ en approximant le cercle par des polygones réguliers inscrits/circonscrits.

    Intéressant, j'ai toujours trouvé cet argument (celui d'Archimède) boiteux mais avec l'inégalité $L(\partial C) \le L(\partial D)$ ça devient rigoureux.

  • Renart
    Modifié (16 Feb)
    Raoul.S : merci de me faire remarquer que j'ai écrit une erreur, un convexe (non nécessairement fermé) est la réunion de son intérieur et d'un sous-ensemble de sa frontière, qui est négligeable donc mesurable. Je vais corriger ça.

    Domi : même pour deux triangles j'ai l'impression que ce n'est pas immédiat. Mais je serais ravi qu'on me prouve le contraire.
  • Domi
    Modifié (16 Feb)

    Considérons par exemple un polygone convexe $P$ contenu dans un autre $Q$. On prolonge un côté $[AB]$ de $P$ qui va couper $Q$ en $[A’B’] $. $\ P$ est dans un demi-plan de frontière $(AB)$ et l’intersection de $Q$ avec ce demi-plan est un polygone convexe contenant $P$ et de périmètre inférieur ou égal à celui de $Q$.  On recommence de même avec chaque côté de $P$, le polygone final n’est rien d’autre que $P$.
    Domi.

  • Bien vu Domi, c'est effectivement tout simple, merci ! :)
  • Calli
    Modifié (16 Feb)
    Renart a dit :
    @Calli : qu'entends-tu par mesurable ?  Le convexe que tu as donné dans ton premier message est parfaitement mesurable dans le sens où il appartient bien à la tribu de Lebesgue. En effet ce convexe s'écrit comme la réunion d'un ouvert et d'un sous-ensemble du cercle unité, qui est négligeable et donc mesurable. Le même raisonnement s'applique pour tout convexe du plan, c'est la réunion d'un ouvert (son intérieur) et d'un sous-ensemble de sa frontière, qui est mesurable car négligeable puisqu'il s'agit effectivement d'une courbe rectifiable.
    En effet, j'ai été très approximatif ! Il faut remplacer mesurable par borélien dans ce que j'ai dit. Merci de le faire remarquer.
  • Georges Abitbol
    Modifié (16 Feb)
    Si l'on a $C$ et $D$ deux convexes plans et compacts tels que $C\subset D$ alors $L(\partial C)\leq L(\partial D)$ où $L$ représente la longueur d'une courbe. Cela semble évident mais ce n'est (à ma connaissance) pas si simple à démontrer.

    Si $C$ est dans l'intérieur de $D$, alors en intercalant un polygone entre les deux, ça doit aller, non ?

  • Ben314159
    Modifié (16 Feb)
    Salut,
    Est-ce qu'il n'y a pas moyen de s'en sortir avec le truc dont j'ai oublié le nom consistant à considérer les ensembles $C\!+\!B(0,r]$ (=l'ensemble des points à une distance $\leqslant r$ de $C$) et $D\!+\!B(0,r]$ ?
    Il me semble qu'on montre (facilement ?) que, pour un convexe $C$, on a $\lambda\big(C\!+\!B(0,r]\big)=\lambda(C)+\mbox{long}(\partial C)\,r+\pi r^2$ (où $\lambda$ est la mesure de dimension 2).  Ce qui permet de conclure en partant du fait que $C\!+\!B(0,r]\subset D\!+\!B(0,r]$ et en faisant tendre $r$ vers $+\infty$.
  • @Ben314159 : Mince, je suis trop dégoûté de pas y avoir pensé. Une fois, un type a résolu en dix secondes le problème de démontrer que la somme des dimensions des parallélépipèdes rectangles était croissante pour l'inclusion avec ce truc, et je m'étais juré de ne jamais oublier cette technique. Et là, c'est presque le même problème !
  • Domi
    Modifié (16 Feb)
    En effet, c'est très astucieux, bravo Ben :)
    Domi.
  • @Ben314159 : Il s'agit de la somme de Minkowski, la formule dont tu parles est celle de Steiner-Minkowski, il y a d'ailleurs une démonstration de cette formule et du fait que la frontière d'un convexe compact est rectifiable sur la page wikipédia en lien. À voir si tu trouves que c'est simple  :)

    @Georges Abitbol : je ne suis pas sûr d'avoir compris, de quel problème tu parles pour les parallélépipèdes rectangles ? Pour l'histoire d'intercaler des polygones entre les deux avec l'argument de Domi effectivement ça marche bien.
  • Domi
    Modifié (17 Feb)
    Je pense que Georges Abitbol voulait dire qu'un pavé droit ne peut pas en contenir un autre donc la longueur totale des arêtes serait supérieure à la sienne.
    Domi.
  • Ben314159
    Modifié (17 Feb)
    Je viens de regarder la preuve de Wiki. pour voir s'ils procèdent comme je l'aurais fait et je la trouve un peu compliquée pour la première partie consistant à montrer que la frontière est rectifiable avec des histoire de compacité et de borne sup. qui est atteinte.

    Perso. "ma" preuve, ça consiste à commencer par montrer la relation $\lambda\big(C\!+\!B(0,r]\big)=\lambda(C)+\mbox{long}(\partial C)\,r+\pi r^2$ pour les polygones convexes (vu que c'est trivial) pour en déduire que $\mbox{long}(\partial C)\leqslant\mbox{long}(\partial D)$ pour des polygones convexes contenus l'un dans l'autre, puis j'en déduit comme sur Wiki. que, pour un convexe $C$ quelconque,  "toute ligne polygonale approximant $C$ est majoré ".
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