Action de groupe
Bonsoir, des petites questions concernant les actions de groupes, leçon que j'ai tentée de mettre au clair pour l'agreg interne mais certains points restent obscurs...
Je pense avoir digéré la fidélité et la transitivité d'une action mais le lien avec le côté simplement transitif je suis moins sûr...
a) Si j'ai bien compris, dire qu'une action est simplement transitive cela implique qu'elle est fidèle et transitive, mais la réciproque est fausse c'est ça ?
b) Dire qu'une action est "libre" est synonyme de "simplement transitive" ou ces deux notions sont distinctes ? (je n'ai pas trouvé ça clair dans la littérature...)
c) Pour définir un espace affine comme étant un ensemble sur lequel agit le sous-groupe (E,+) d'un Kev, il faut que l'action soit "simplement transitive" ou peut-on se contenter d'une action "fidèle et transitive" ?
d) On utilise souvent le fait qu'une action de G sur E soit fidèle (pour avoir un morphisme injectif de G dans S(E)), mais si on imagine une action non fidèle mais par contre transitive, quel est l'intérêt ?
Cette dernière question fait écho à une question que j'ai posée à ma prof de Spé au siècle dernier lorsqu'elle nous exposait les actions de groupes : on montrait que R-(0) opère sur C naturellement via x*z=(def) xz et que cette action était fidèle mais non transitive…
J’ai alors demandé « peut-on construire une action transitive mais non fidèle ?» et ma prof est revenue le lendemain avec une solution, mais bon, celle là, il fallait la trouver…
Depuis je sais qu'il faut bien "choisir" l'action puisqu'elle peut être fidèle sans être transitive ou transitive sans être fidèle, mais est-ce utile d'avoir un tel type d'action ?
Si une bonne âme veut bien m'éclairer, en échange je vous livre l'action transitive mais non fidèle de R-(0) dans C, mais d'abord, il faut chercher un peu (:P)
Je pense avoir digéré la fidélité et la transitivité d'une action mais le lien avec le côté simplement transitif je suis moins sûr...
a) Si j'ai bien compris, dire qu'une action est simplement transitive cela implique qu'elle est fidèle et transitive, mais la réciproque est fausse c'est ça ?
b) Dire qu'une action est "libre" est synonyme de "simplement transitive" ou ces deux notions sont distinctes ? (je n'ai pas trouvé ça clair dans la littérature...)
c) Pour définir un espace affine comme étant un ensemble sur lequel agit le sous-groupe (E,+) d'un Kev, il faut que l'action soit "simplement transitive" ou peut-on se contenter d'une action "fidèle et transitive" ?
d) On utilise souvent le fait qu'une action de G sur E soit fidèle (pour avoir un morphisme injectif de G dans S(E)), mais si on imagine une action non fidèle mais par contre transitive, quel est l'intérêt ?
Cette dernière question fait écho à une question que j'ai posée à ma prof de Spé au siècle dernier lorsqu'elle nous exposait les actions de groupes : on montrait que R-(0) opère sur C naturellement via x*z=(def) xz et que cette action était fidèle mais non transitive…
J’ai alors demandé « peut-on construire une action transitive mais non fidèle ?» et ma prof est revenue le lendemain avec une solution, mais bon, celle là, il fallait la trouver…
Depuis je sais qu'il faut bien "choisir" l'action puisqu'elle peut être fidèle sans être transitive ou transitive sans être fidèle, mais est-ce utile d'avoir un tel type d'action ?
Si une bonne âme veut bien m'éclairer, en échange je vous livre l'action transitive mais non fidèle de R-(0) dans C, mais d'abord, il faut chercher un peu (:P)
Réponses
-
a) Selon wikipedia, une action "simplement transitive", c'est une action libre et transitive (voir ici). Libre implique fidèle, donc libre et transitive implique fidèle et transitive, mais effectivement la réciproque est fausse (on pensera à l'action naturelle de $\mathfrak S_n$ sur $\{1,\ldots,n\}$, ou celle de $GL_n$ sur $k^n\setminus\{0\}$).
b) Libre et transitive, cf. a) ;-)
c) Il faut bien libre, et pas uniquement fidèle. Cela dit, pour $E$, ça coïncide. En fait si $G$ est abélien, et agit sur $X$ transitivement et fidèlement, alors il agit librement. En effet, si $gx= x$, alors $ghx = hx$ pour tout $h$, et donc par transitivité, $gy = y$. En particulier, par fidélité, $g = 1$, donc l'action est libre. Comme $(E,+)$ est abélien, la fidélité suffit.
d) Si $G$ est un groupe quelconque, une action transitive est toujours isomorphe à $G/H$, $H$ un sous-groupe de $G$. Elles sont souvent non fidèles : si par exemple $H$ est normal, alors tout $h\in H$ agit trivialement.
Il y a donc plein plein d'actions transitives non fidèles: toutes celles dont "le" stabilisateur est normal (les guillemets sur "le" peuvent s'enlever a posteriori) - en particulier, pour des groupes abéliens, ça se trouve souvent. -
(une action transitive non fidèle de $\R\setminus\{0\}$ sur $\C$, ça se trouve facilement selon ce qu'on entend par là... Par exemple, $\C$ est en bijection avec $\R^+_*$, donc il suffit d'agir transitivement et non fidèlement là dessus, et ça c'est facile ;-)
Un petit aparté : les actions non fidèles sont super importantes parce que ce sont souvent les "building blocks" d'actions plus intéressantes. Par exemple, en théorie des représentations, toute représentation d'un groupe fini $G$ sur un $\C$-espace vectoriel se décompose en somme directe de représentations irréductibles - ces dernières sont rarement toutes fidèles.
La transitivité est une "fausse propriété", c'est comme la surjectivité, au sens où on peut toujours restreindre l'action pour l'avoir. Par contre c'est super intéressant si on sait la prouver - à nouveau, comme la surjectivité, où la prouver veut dire résoudre une équation). -
Quelques remarques complémentaires. Sur la transitivité, je trouve le point de vue de Maxtimax un peu exagéré quand il dit qu'on peut restreindre (à une orbite) pour obtenir une action transitive. C'est en effet une question typique de classer les orbites, elle peut être difficile ou pire, ce n'est pas en l'évacuant qu'on la fait disparaître (car elle reviendra te hanter la nuit !).
Par exemple, on fait agir :- $\newcommand{\GL}{\mathrm{GL}}\GL_m(\C)\times\GL_n(\C)$ sur $\mathcal{M}_{m,n}(\C)$ par équivalence, i.e. $(P,Q)\cdot A=PAQ^{-1}$ ; les orbites sont classées par le rang, c'est facile ;
- $\GL_n(\C)$ sur $\mathcal{M}_n(\C)$ par similitude, i.e. $P\cdot A=PAP^{-1}$ ; les orbites sont classées par les invariants de similitude, c'est déjà moins facile ;
- $\GL_n(\C)$ sur $\mathcal{M}_n(\C)^2$ par similitude, i.e. $P\cdot(A,B)=(PAP^{-1},PBP^{-1})$ ; personne ne sait classer les orbites de façon uniforme en $n$ et c'est irrémédiable – le problème est « de type sauvage ».
J'en rajoute une couche dans une autre direction. Après « simplement transitif », on peut s'intéresser aux orbites des couples. Par exemple, on fait agir le groupe des translations sur les points du plan (resp. le groupe des rotations sur les points du cercle) ; c'est une action simplement transitive ; on définit alors un vecteur (resp. un angle) comme l'orbite d'un couple de points ; c'est un objet géométrique très intéressant. (Il est amusant de voir que la commutativité du groupe qui agit permet, via la relation de Chasles, de mettre une structure de groupe sur cet ensemble d'orbites.)
Autre exemple : le groupe $\mathrm{PGL}_2(\C)$ agit trois fois simplement transitivement sur $\mathbf{P}^1=\C\cup\{\infty\}$ (i.e. étant donné deux triplets de points distincts $(a,b,c)$ et $(a',b',c')$, il existe une unique homographie $h$ telle que $h(a)=a'$, $h(b)=b'$ et $h(c)=c'$. On s'intéresse alors aux orbites de quatre points distincts $(a,b,c,d)$. On définit le birapport de ces quatre points comme l'image $h(d)$ de $d$ par l'unique homographie $h$ telle que $h(a)=\infty$, $h(b)=0$, $h(c)=1$. Il est à peu près évident que les orbites de quadruplets sont classées par $\mathbf{P}^1\setminus\{\infty,0,1\}$ (si si, on s'habitue). Nombreuses applications en géométrie (critère de cocyclicité pour commencer).
Un problème général : construire des groupes « très transitifs ». Par exemple, $\mathfrak{S}_n$ est $n$ fois transitif sur $\{1,\dots,n\}$ et le groupe alterné $\mathfrak{A}_n$ doit être $n-2$ fois transitif (pour tout couple de $n-2$-listes, il existe un unique élément du groupe alterné qui envoie une liste sur l'autre). Les groupes de Mathieu sont $3$, $4$ ou $5$ fois transitifs et à part les groupes symétriques et alternés, on ne peut pas faire mieux que $5$ il me semble. À l'envers, la recherche d'actions $3$ à $5$ fois transitives conduisent à des groupes (sporadiques souvent) très amusants (je dis ça parce que je ne les connais pas...). Cela dit, ça, ça n'est pas indispensable pour l'agrégation...
Cuistre pour cuistre, note que quand on parle de « la leçon que j'ai tenté de mettre au clair », le participe « tenté » ne s'accorde pas parce que « leçon » est le COD de « mettre » et pas de « tenté ». -
Cuistre fichtre diantre, j'ai raté un accord, bon cet été je bosse les actions de groupes car vos messages vont m'empêcher de dormir, et en même temps je révise la leçon de français sur les accords (:P)
Merci !
@+
[Je dois faire mes excuses à Pozzar, c'est moi qui ai improprement accordé "tentée" suite à une analyse trop rapide de la phrase. :-o AD] -
@Math Coss : Cette affaire de $5$-transitif mais pas mieux, qu'est-ce que ça veut dire exactement (avec tous les quantificateurs) ? C'est pas la première fois que j'entends ça.
@pozzar : Pour aller dans le sens de Maxtimax : disons qu'une action d'un groupe sur un ensemble, ce n'est pas forcément le plus intéressant : si l'action n'est pas fidèle et qu'on n'est pas attaché.e au groupe, il suffit de quotienter par le noyau de l'action pour obtenir une action fidèle. Plus intéressant serait : pour un groupe fixé, décrire toutes les actions possibles sur des ensembles. Ce serait un peu comme analyser le jeu d'un acteur ou d'une actrice en regardant tous ses films. Dans certains films, son/sa personnage n'a pas de réplique ; parfois, il ou elle n'est qu'une voix off, parfois il ou elle joue la tristesse, etc. Un élément du groupe agissant trivialement dans une action peut agir non trivialement dans une autre... Bref. Je pense que pour te former à un concours comme ça, les intuitions viendront une fois que tu auras étudié suffisamment d'actions ! -
@Georges Abitbol et @Math Coss : je n'ai pas été clair dans mon premier message, j'ai obtenu l'agrégation interne cette année, mais cette histoire d'action de groupe, ça va continuer à me travailler, je me connais...
Je veux donc continuer à creuser cette question pour ma culture personnelle (ie pour ma santé mentale 8-))...
Les réponses sur ce fil me montrent que je n'ai pas encore assez de recul sur cette notion, j'ai donc bien fait de ne pas tomber dessus à l'oral (ie j'ai eu du bol :-D), donc pour ma peine (feignant) et pour éviter de faire des cauchemars (genre tu es tout nu devant le jury et tu as une question du genre "et si j'ai juste transitif, ça donne quoi ?"), je préfère me perfectionner (il ne faudrait pas qu'ils reviennent me chercher pour m'interroger à nouveau afin de vérifier si j'ai bien le niveau).
@+ -
MathCoss : ce que je voulais dire c'est que la propriété "transitive" est peu intéressante comme hypothèse théorique, quasi toutes les preuves commencent par "on peut supposer wlog l'action transitive", au même titre que la surjectivité. Ce qui est intéressant c'est de l'obtenir comme conclusion, ou de l'obtenir sur des exemples pratiques.
Mais oui, c'est exagéré :-D (comme pour la surjectivité) -
pozzar a écrit:il ne faudrait pas qu'ils reviennent me chercher pour m'interroger à nouveau afin de vérifier si j'ai bien le niveau
Pour répondre à George, faute de vraiment savoir de quoi il retourne, je cite Permutation groups de Dixon et Mortimer.Dixon-Mortimer a écrit:C'est une conséquence de la classification des groupes finis simples qu'un groupe de permutation fini qui ne contient pas le groupe alterné est au plus 5-transitif. À part les groupes alternés et symétriques, les seuls groupes finis qui sont 4- et 5-transitifs sont les groupes de Mathieu $M_{11}$, $M_{12}$, $M_{23}$ et $M_{24}$. La démonstration de cette propriété difficile repose sur une analyse au cas par cas des groupes finis simples. -
@Math Coss : Ben justement, le mot "$n$-transitif", je ne sais pas ce qu'il veut dire. Dit-on qu'un groupe est $n$-transitif s'il existe une action de ce groupe sur un ensemble qui est $n$-transitive ?Wikipédia a écrit:Un groupe de permutations est dit transitif (resp. n-transitif, resp. strictement n-transitif) si son opération naturelle est transitive
C'est quoi, "un" groupe de permutations ? C'est un sous-groupe d'un $\mathfrak{S}_m$ pour un certain $n$ ? -
Le chat ouvrit les yeux, le soleil y entra. Le chat ferma les yeux, le soleil y resta. Voilà pourquoi le soir, quand le chat se réveille, j'aperçois dans le noir deux morceaux de soleil. (Maurice Carême).
-
Pardon, c'est l'expression "groupe $n$-transitif" que je ne comprends pas, mais "action $n$-transitive", ça, c'est bon. Merci Thierry !
-
Ah pardon Georges (avec s). Un « groupes de permutations » dans le livre de Dixon-Mortimer est « simplement un sous-groupe d'un groupe symétrique ». Pour un groupe abstrait, on peut dire comme tu le proposes qu'il est $n$-transitif s'il admet une action $n$ fois transitive (et fidèle, pour éviter un noyau artificiel).
-
Bon ben dans ce cas c'est incroyable ! Il n'y a aucun sous-groupe de $\mathfrak{S}_{65537}$ qui soit $7$-transitif, à part $\mathfrak{S}_{65537}$ lui-même et $\mathfrak{A}_{65537}$, alors ? Incroyable !
-
C'est ce que je comprends mais tu pourrais feuilleter le livre pour vérifier.
-
Oui, il faudra que je le fasse. J'essaierai de trouver une démonstration pas trop compliquée de $\exists n \in \mathbb{N},\ \forall G,\quad G\mbox{ est }n\mbox{-transitif} \Rightarrow (G \simeq \mathfrak{S}_{n}\ ou \ G\simeq \mathfrak{A}_n)$ et je reviendrai la poster, parce que rien que ça, ça me scotche.
Connectez-vous ou Inscrivez-vous pour répondre.
Bonjour!
Catégories
- 164.5K Toutes les catégories
- 42 Collège/Lycée
- 22K Algèbre
- 37.4K Analyse
- 6.2K Arithmétique
- 56 Catégories et structures
- 1.1K Combinatoire et Graphes
- 13 Sciences des données
- 5.1K Concours et Examens
- 16 CultureMath
- 49 Enseignement à distance
- 2.9K Fondements et Logique
- 10.6K Géométrie
- 79 Géométrie différentielle
- 1.1K Histoire des Mathématiques
- 73 Informatique théorique
- 3.8K LaTeX
- 39K Les-mathématiques
- 3.5K Livres, articles, revues, (...)
- 2.7K Logiciels pour les mathématiques
- 24 Mathématiques et finance
- 329 Mathématiques et Physique
- 4.9K Mathématiques et Société
- 3.3K Pédagogie, enseignement, orientation
- 10.1K Probabilités, théorie de la mesure
- 786 Shtam
- 4.2K Statistiques
- 3.8K Topologie
- 1.4K Vie du Forum et de ses membres