Assertions indémontrables

Bonjour,

Dans la revue "Tangente" (hors-série n°15, consacré à la logique), un passage est consacré à la démonstration de l'existence d'assertions indémontrables.
Voici leur raisonnement :


"On suppose d'une part que l'on a numéroté de $1$ à l'infini toutes les assertions $A_{1},A_{2},....$, que d'autre part on a numéroté de $1$ à l'infini certaines parties distinctes de $\N^{*}$ ($\N$ privé de $0$) $P_{1},P_{2},....$. On les appelle les parties répertoriées. Un entier $n$ est dit remarquable quand $n\in P_{n}$.
Si $A_{m}$ est l'assertion : "$n$ est remarquable", $m$ est dit le conjugué de $n$. Tout ceci de façon que :

(i) Les numéros des assertions démontrables forment une partie répertoriée.
(ii) Les numéros des assertions réfutables forment une partie répertoriées.
(iii) Le complémentaire dans $\N^{*}$ d'une partie répertoriée est une partie répertoriée.
(iv) Pour toute partie répertoriée $X$, il existe une partie répertoriée $Y$ telle que tout $n$ dans $Y$ a son conjugué dans $X$, et tout $n$ hors de $Y$ a son conjugué hors de $X$.

Considérons alors la partie répertoriée $P$ des assertions démontrables et $X$ son complémentaire (un entier $k$ est dans $X$ quand $A_{k}$ n'est pas prouvable).
Soit $Y$ associée à $X$ ( qui est une partie répertoriée d'après (iii)) par (iv) : soit $n$ le numéro de $Y$, et désignons par $m$ le conjugué de $n$.
Si $n$ est hors de $Y$, alors $n$ n'est pas remarquable, $m$ est hors de $X$ et donc dans $P$, et $A_{m}$="$n$ est remarquable" est donc prouvable alors qu'elle est fausse ! Cela ne se peut pas.
Par conséquent, $n$ est dans $Y$. Alors, $n$ est remarquable, $m$ est dans $X$ et $A_{m}$="$n$ est remarquable" n'est donc pas prouvable et cependant elle est vraie."


Plusieurs choses m'embêtent... Avant toute chose, la "taille" de la "preuve" est très courte. Elle est présentée par l'auteur de l'article comme un "aperçu d'une démonstration de ce fameux théorème d'incomplétude de Gödel"... Comme la preuve initale de Gödel prend de nombreuses pages, j'ai du mal à saisir que l'on puisse en donner ne serait-ce qu'un aperçu qui tienne en quelques lignes.
Passons.
L'autre problème est la justification de (i),(ii),(iii) et (iv). Après tout, rien ne me dit que ces conditions puissent être toutes verifiées. Est-ce que je dois comprendre que derrière cette justification, passée ici sous silence, se cache la véritable difficulté de la preuve initiale ?
Enfin, last but not least, la conclusion : " $A_{m}$="$n$ est remarquable" n'est donc pas prouvable et cependant elle est vraie."
Pourtant, on vient juste de prouver, quelques mots avant, que $n$ est remarquable ! Je me doute bien qu'il doit y a voir une subtilité que je ne perçois pas, probablement la nuance entre "vrai" et "prouvable"... Alors si une âme charitable pouvait m'aiguiller un peu...

Merci d'avance !

Amicalement.
Olivier.

Réponses

  • Tout d'abord, la preuve de Gödel n'est pas si longue que ça !

    Ensuite, effectivment, la difficulté repose dans la fabrications desdits ensembles d'entiers et dans leur répertoriage (ça se dit ?). Ainsi, les points i. à iv. ne sont pas vraiment évidents.

    Quant à ta dernière question, je n'arrive pas à exprimer clairement ma pensée...
  • Par ailleurs, je conseille à quiconque est intéressé par la preuve de ce théorème de Gödel de lire "Le livre qui rend fou" de Raymond Smullyan dont la dernière partie guide pas-à-pas vers la compréhension parfaite de celui-ci.

    Le fameux théorème est également abordé dans "Quel est le titre de ce livre ?" et traité d'une tout autre manière dans "Ca y est, je suis fou", du même auteur.

    Raymond Smullyan, c'est bon, mangez-en...
  • Bonjour,

    Un petit livre explique tout ça très bien.

    "Le théorème de Gödel", écrit par E. Nagel, J.R Newman, K. Gödel et J-Y Girard aux collections Points dans la catégorie Sciences.

    Environ 7€50

    Cordialement

    Vinz
  • Bonjour,

    voilà ce que je comprends de ton texte :
    «~On suppose d'une part que l'on a [$\ldots$] \emph{\bf Tout ceci de façon que : } [$\ldots$]~»
    Les points (i) à (iv) me semblent faire partie de ce que l'on suppose : on suppose avoir numérotées les formules, et numérotées des parties de $\N$ de sorte que les propriétés (i) à (iv) aient lieu. La difficulté consiste effectivement à montrer l'existence de telles numérotaions conjuguées.

    J'ai moi aussi été un temps perturbé par ces histoires de choses vraies mais non démontrables. Une façon de contourner le problème (pas de le régler) est d'oublier que la propriété donnée est vraie, et de ne garder qyue le reste de la démonstration : $X$ est l'ensemble des numéros des assertions non démontrables. Supposer $n \not\in Y$ conduit à une contradiction ; par conséquent, $n \in Y$, ce qui signifie -- par (iv) et par la définition de $Y$ -- que son conjugué $m$ est dans $X$. Par définition de $X$, cela signifie que l'énoncé $A_m$ n'est pas démontrable : il existe donc une assertion non démontrable.

    Mais par ailleurs, $Y = P_n$ (par définition de $n$) et $A_m$ est (par définintion) l'assertion « $n$ est remarquable », c'est-à-dire, « $n \in P_n$ », ce qui s'écrit encore « $n \in Y$ » : ce qui précède montre donc également que $A_m$ est vraie. Pour peu que l'on prouve l'existence de la famille $(P_n)_{n\in\N}$, cela montrera (même si le sens que cela a n'est pas clair) qu'il y a des choses vraies est non démontrables : ceci est un fait avéré. Reste à comprendre ce que cela signifie.


    Pour sortir de cette incompréhension / de cette apparente contradiction, il faut définir avec précision la notion de démontrable : cela signifie \emph{démontrable dans la théorie que l'on considère}, c'est-à-dire, qu'on peut déduire, par applications des règles de déduction logique, des axiomes de la théorie.

    La proposition «~$n \in Y$~» est vraie (sinon, on aboutirait à une contradiction), mais ne peut pas démontrable au sens où elle ne peut \emph{pas} se déduire, par application des règles logiques, des axiomes de la théorie considérée. Il n'est pas possible de démontrer ce fait en restant \emph{à l'intérieur} de la théorie considérée, et la démonstration donnée est \emph{extérieure} à cette théorie.



    Plus précisément (et plus formellement) : les assertions considérées sont les assertions d'une certaine théorie. Donc :
    -- on se donne au départ une théorie (exemples : théorie des ensembles ; arithmétique de Péano ; géométrie euclidienne) ;
    - on appelle \emph{démonstration} toute suite (finie !) d'assertions de cette théorie, telle que pour toute assertion $A$ figurant dans la suite, l'une au moins des conditions suivantes esté réalisée :
    \begin{enumerate}
    \item $A$ est un axiome de la théorie ;
    \item $A$ est l'une des tautologies usuelles : $(B\text{\bf\ ou }B) \implies B$ ; $B \implies (B\text{\bf\ ou }C)$ ; $(B\text{\bf\ ou }C) \implies (C\text{\bf\ ou }B)$ ; $(B\text{\bf\ ou }C) \implies \bigl((D\text{\bf\ ou }B) \implies (D\text{\bf\ ou }C)\bigr)$ (où $B$, $C$ et $D$ sont des assertions de la théorie) ;
    \item il y a, dans la suite (dans la démonstration), deux assertions $B$, $C$ précédant $A$ telles que $C$ soit identique à l'implication $B \implies A$ \emph{\small(règle du sylllogisme)}.
    \end{enumerate}
    En termes moins abstraits, une démonstration est une suite finie formée d'axiomes de la théorie, et d'applications des règles logiques de déduction.


    La preuve ci-dessus que $n \in Y$ est une démonstration \emph{extérieure} à la théorie : «~$n \in Y$~» est vraie (sinon, le raisonnement fait montre qu'on aboutirait à une contradiction), mais ce raisonnement est extérieur à la théorie (n'est pas basé sur les axiomes de cette théorie). Et il n'est pas possible de démontrer que $n \in Y$ en restant à l'intérieur de la théorie considérée (c'est ce que signifie >) : il n'existe donc aucune démonstration de «~$n \in Y$~» qu'on puisse déduire, par application des règles logiques, des axiomes de la théorie. Et ce bien que la propriété soit vraie.


    Je crois que j'ai été un peu long, là. J'espère touefois avoir éclairci les choses,

    Daniel
  • Bonjour Olivier.

    Le principe de la démonstration du théorème d'incomplétude est simple dans son principe, c'est la technique qui est relativement compliquée.

    Grâce à un codage ad-hoc des formules, on rentre dans un langage auto-référent qui permet à une théorie de porter des jugements de démonstrabilité sur ses propres énoncés, c'est à dire que, grâce au codage, on peut construire une formule $P(x)$ qui dit "la formule $x$ est démontrable". A partir de là, Gödel a fabriqué une formule qui dit "Je suis une formule non démontrable". Typiquement, si la théorie n'est pas contradictoire, la formule est vraie, donc non démontrable. Dans ses notes historiques (me semble-t-il) Bourbaki attire l'attention du lecteurs sur la parenté entre l'énoncé fabriqué par Gödel et le paradoxe du barbier.

    Quand aux points I, II, III et IV de l'article de Tangente, ils me paraissent loin d'êtres évidents.

    Bruno
  • <!--latex-->Moi ça me faisait plutôt penser au paradoxe d'Épimédine : « cette phrase est fausse ». La logique a tout fait pour éviter ce genre d'auto-références destructrices ; et Gödel a réussi à réintroduire l'autoréférence, par ses histoires de « nombre de Gödel » d'une formule.
    <BR>
    <BR>Évidemment, le paradoxe de Russel me fait aussi penser à celui d'Épimédine...
    <BR>
    <BR>
    <BR>Daniel<BR>
  • Je n'ai fait que citer Bourbaki... De toutes façons, une fois qu'on a saisi la notion d'auto référence, tous ces pardoxes ont un air de famille.

    Bruno
  • Bonsoir,

    Merci à tous pour vos réponses !

    Pour Daniel : ta réponse est très complète et très claire. Reste pour moi une question : si j'ai bien compris, il y a deux niveaux de "langage" (dans le langage de niveau le plus élevé, les objets étudiés sont des assertions concernant des objets du langage du niveau le plus bas). Quand on dit qu'une assertion $A$ d'une théorie $T$ n'est pas démontrable, cela signifie qu'elle ne peut se déduire des axiomes de la théorie $T$ à l'aide des règles de logique usuelles. L'affirmation "l'assertion $A$ de la théorie $T$ n'est pas démontrable" fait elle-même partie du langage de niveau élevé (un métalangage en quelques sortes, n'est-ce-pas ?).
    Voilà ma question, sans doute très bête : lorsque, dans notre exemple, on dit " $n$ est remarquable", dans quelle théorie situer cette assertion ? Je serais tenté de dire dans la théorie arithmétique de Péano, car elle énonce une propriété sur un entier, mais est-ce bien ça ?
    Quant à l'assertion "$A_{m}$ n'est pas prouvable", je suppose qu'elle est à situer à l'extérieur de notre théorie de base, à un niveau plus élevé de "langage" . Mais cette "métathéorie" doit bien elle-même possèder un système d'axiomes... lequel ? s'agit-il des assertions (i),(ii),(iii) et (iv) ?

    Voilà, mes questions paraissent certainement très naïves, voire mal formulées, mais je suis complétement ignare en matière de logique...

    Merci !

    Amicalement.
    Olivier.
  • J'ai déjà posé cette question ailleurs, j'espère que vous ne m'en voudrez pas de la reposer ici, où il y a plus de monde.

    Est-ce que toutes les assertions qui exemplifient le théorème d'incomplétude de Gödel sont auto-référentes? Ou existent-ils d'autres types d'exemples (non auto-référents)?

    PS : à propos du théorème d'incomplétude de Gödel, ne faut-il pas plutôt parler "d'assertions indécidables" que "d'assertions (vraies) indémontrables"? Quelle est la différence entre ces deux éléments?
  • J'ai pas compris quelque chose : pourquoi n hors de Y implique que n n'est pas remarquable (càd n hors de Pn) ?
  • Parce que $Y:=P_{n}$ ;)

    Il est dit "Soit $Y$ associée à $X$ [...] par iv)" (donc $Y$ est une partie répertoriée) et "soit $n$ le numéro de $Y$".
  • Si, techniquement, la preuve de Godel est quand-même assez longue... Parce qu'il a absolument voulu exprimer ses arguments dans l'arithmétique.

    Mais le principe est le suivant: prends juste conscience qu'une fois précisée la notion de phrases (de manière que toutes les phrases qui ont un sens mathématiques soient correctement écrites) et de démonstrations, tu n'as plus qu'à "psychanalyser" les choses suivantes:

    1) la phrase "je suis indémontrable" est une phrase mathématique assez simple
    2) elle ne devrait pas, en principe, être démontrable par un système formel scientifiquement acceptable.

    L'effort de Godel a consisté à trouver une tournure mathématique expriment le "je" de "je suis..."

    Faute de mieux, il s'est tourné vers une approche "informatique":

    "a(b,f):=f(b(b,f))" pour tout (b,c) (exécution récursive)

    Du coup, l'exécution de a(a,f) termine (si elle termine) comme celle de f(a(a,f)). Et concrêtement, ça te donne un moyen uniforme pour obtenir un "point fixe" pour chaque f.

    J'ai compliqué les choses pour l'uniformité:

    Informatiquement: l'instruction a:=f(a) te donne gratuitement un point fixe de f, mais tu payes un certain prix.

    Pour la phrase "je suis indémontrable", voici le test, je te l'écris en pascal:

    function P(q:^phrase): boolean;
    var z:phrase;
    begin
    z:=q^;
    P:=not(isdemontrable(z));
    end;

    var r:^phrase;
    reponse:phrase;

    begin
    p:=@P;
    reponse:=P(p);
    end;


    J'ai distingué majuscules et minuscules.

    L'étude arithmétique de ce programme te donne un "indécidable" respectable
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • La démontrabilité est toujours relative à un système particulier.
    Lorsqu'on dit qu'une assertion est indécidable c'est par rapport à un système particulier.
    Mais la question de savoir s'il existe des assertions indémontrables ''dans l'absolu'' est une question non résolue à ce jour. On ne sait pas aujourd'hui s'il peut exister des assertions vraiment indémontrables.


    Par exemple le problème d'arret d'une machine de Turing est indécidable dans le cas général, mais pourtant on n'ignore s'il existe une MT telle qu'il soit impossible de d'établir si elle s'arete ou pas...
  • Bonjour
    chat d'eau a écrit:
    Mais la question de savoir s'il existe des assertions indémontrables ''dans l'absolu'' est une question non résolue à ce jour.

    Béotien en logique, je croyais qu'il suffisait d'ajouter à un système d'axiomes donné, l'assertion en question comme axiome. Et ce nouveau système est soit contradictoire (mais l'assertion est alors décidable) soit dans le nouveau système, l'assertion est prouvée, puisqu'axiome.

    Alain
  • AD

    Une traduction de ton propos serait :
    Mon algorithme qui décide de l'arrêt des machines de Turing (MT) ne peut pas trouver la réponse dans tout les cas (problème indécidable). Alors lorsque je tombe sur un cas que mon algo n'arrive pas à résoudre, j'ajoute la réponse dans l'algo d'arrêt pour cette MT.

    Lorsqu'on ajoute des axiomes ''à l'aveugle'' on a une chance sur deux de se tromper et d'aboutir à l'inconsistance. La ''bon'' axiome est celui qui n'engendre pas d'inconsistance.
    La question est de savoir si on peut toujours parvenir à trouver la bon axiome en connaissance de cause. Rien ne permet d'affirmer qu'on ne peut pas toujours trouver la bonne réponse, d'une manière ou d'une autre. Mais aujourd'hui on n'en sait rien...
    La seule chose qui est certaine est que l'on ne peut pas y arriver de façon algorithmique.

    [Inutile de répéter le message précédent. :) AD]
  • Bonjour

    Comme Reï-Vi-Lhô, j'ai des problèmes pour distinguer "vrai", "démontrable" et "indécidable".

    Par exemple, l'étude des suites de Goodstein nous apprend que le problème de la "limite" de ces suites ne peut être résolu au sein de l'arithmétique mais l'est au sein de ZF (ou ZFC je ne sais plus trop mais peu importe).

    Si on considère donc l'assertion G : "toute suite de Goodstein finit par retomber sur 1", cet énoncé est indémontrable dans l'arithmétique, et on peut légitimement le considérer comme vrai puisque prouvé dans ZF(C).

    Peut-on en déduire que l'arithmétique de Peano à laquelle on adjoint non(G) est un système non consistant ? (i.e. G n'est pas un énoncé indécidable dans l'arithmétique, au sens où je crois comprendre "indécidable")
  • detourre:

    "P est démontrable dans une théorie T" signifie il existe un "texte" (objet formel précis) qui est une preuve de P (notion formelle précise), dont les axiomes sont dans T. Une théorie est un ensemble de phrases, dites "les axiomes de la théorie"

    "P indécidable dans T" signifie. ni P ni non(P) ne sont démontrables dans T

    "P est vraie" ne veut rien dire

    "P est vraie dans le monde (le modèle! en termes savants) M" signifie juste que M déclare que P est vraie.

    Un modèle M est une application de l'ensemble des phrases dans {vrai, faux} (un ensemble à 2 éléments), vérifiant quelques conditions naturelles (je te laisse les deviner). Si P est une phrase et M un modèle, pour mettre de la poésie, on exprime "M(P)=vrai" par "M déclare que P est vraie" ou encore que "P est vraie dans M"

    Les théorèmes de complétude disent, à quelques nuances (formelles!) près: si P n'est pas démontrable dans T alors il existe un modèle tel que:
    1) pour toute Q appartenant à T, M(Q)=vrai
    2) M(P)=faux

    Edit: merci à Bruno qui m'a signalé une erreur de frappe (A noter que les erreurs de frappe ne sont pas toujours de petites erreurs car ça peut plonger les lecteurs dans une perplexité inutile pendant de longues minutes)

    Pour l'étude de quelques théories particulières (Péano, ZF, etc), voire littérature (ce forum contient des fils la-dessus)

    Le mieux est de réfléchir seul concernant les sempiternelles questions du genre "si Fermat est indécidable alors Fermat est vrai" car elles n'ont pas beaucoup de sens tant qu'elles ne sont pas formalisées, et quand elles sont formalisées elles devienent triviales, donc l'effort est dans la formalisation

    Dans le vague, il n'y a rien d'évident dans les préjugés suivants:

    1) ce qui est prouvé est vrai
    2) ce qui est vrai est prouvable
    3) l'absurde n'est pas prouvable

    etc

    Essentiellement, l'enseignement des découvertes logiques du 20e siècle est simple: les 3 préjugés sont faux (je dis bien "faux!", y compris pour le (1) et le (3), pas "indécidables). Il reste à faire avec
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Pour le 1) et le 3) : la phrase "j'implique tout" permet de le voir

    Pour le 2) la phrase "je suis indémontrable" permet de le voir
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Bonjour,

    Je dois être constructiviste sans le savoir car cette discussion m'évoque la citation approximative de Leibniz suivant laquelle les systèmes seraient vrais par ce qu'ils affirment et faux par ce qu'ils nient. Je me souviens avoir compris dans le contexte où je l'ai lu qu'il entendait par là signifier la prévalence de l'énonciation, au moins non contredite, sur le fait que, ce qui de toute évidence existe, ne trouve pas d'énoncé qui le concerne, et échappe complètement. Dans le contexte d'un système et aux fins qu'on lui attribue, vouloir se limiter à une vision axiomatique, en nous condamnant à enfermer les mathématiques dans ses techniques, nous priverait de la source fondamentale de l'inspiration qu'est le cadre philosophique.

    Cet argument m'inciterait à considérer les résultats dont vous parlez comme des études confirmant le soucis de "dépasser" par la construction les problèmes posés par la démonstration. Celà n'a rien de révolutionnaire si l'on admet que c'est une conséquence du travail précédent.

    Cordialement.
  • Salut,

    je rebondis (tardivement) sur le sous-débat (entre matheux, on voit bien que ce n'est pas du tout un jugement! ;-) ) entre AD et Chat d'eau (j'en connais peu, le félin européen standard détestant tout ce qui mouille).

    Ce que je dis ne vient que de ma façon de comprendre les notions et si je suis dans le faux, je fais confiance aux intervenants (CC en tête) pour m'éclairer.

    Si on a un indémontrable on peut espérer l'ajouter comme nouvel axiome mais la théorie obtenue n'est consistante que si notre indémontrable est INDEPENDANT des axiomes (ex: ZFC + HC / ZFC + non-HC, deux théories consistantes mais qui ne démontrent pas les mêmes théorèmes, je pense en particulier à un th. d'Erdös sur les liens mesurabilité / continuité qui utilise HC).

    Je reviens sur le mot espérer. Pour cela je reprend la métaphore algorithmique de Chat d'eau.

    L'idée d'ajouter toute "nouvelle" réponse de l'algo à l'algo ne tient pas la route. C'est le problème des logiques épistémiques où l'on décide que ne pas savoir serait déjà savoir que non. Ces logiques sont paraconsistantes et ne vérifient pas le théorème de Gödel.

    Exemple pratique:
    j'attends le bus à la Concorde, il n'y a pas de banc, j'ai marché 3h. Ma patience est très limitée mais je n'aime pas le métro. Que fais-je? Quand décidé-je de cesser d'attendre et de prendre le métro?
    La logique épistémique va jeter l'éponge un peu tôt.
    Bref, si mon algo ne conclut pas en un temps raisonnable je sais que... mon algo ne conclut pas en un temps raisonnable. En déduire quoi que ce puisse être d'autre me semble un tantinet joueur, non?

    A vos correctifs car je suis sûr d'avoir mal compris deux ou trois trucs.

    Amicalement,

    F.D.
  • Francois> Je ne suis pas hyper calé non plus, mais il me semble que :

    - deja etre indemontrable dans un systeme et etre independant de ce systeme c'est strictement la meme chose.
    - ensuite il ne faut pas oublier qu'on ne sait pas et qu'on ne saura sans doute jamais si ZF est consistante :) donc ZF+HC et ZF+ non HC sont consistante seulement si ZF l'est, ou autrement dit il existe un modele de ZF+HC si et seulement si il existe un modele de ZF+Non HC.
  • Salut,

    aurais-je du préférer le mot cohérente? je crois qu'il y a une nuance entre cohérence et consistance...

    sinon, 1 point pour jobherzt... il est vrai.

    F.D.
  • Non, je crois que c'est synonyme :) ca veut juste dire "non-contradictoire".

    Et je precise un peu : si tu es dans une theorie que tu suppose consistante, dire que tu as une proposition indemontrable, ca revient a dire que tu ne peux prouver ni cette proposition a partir des axiomes, ni sa negation. Donc l'ajouter comme axiome n'amene pas de contradiction (sinon sa negation serait demontrable), et ajouter sa negation comme axiome meme histoire. Donc indemontrable et independant, autant que je sache c'est Kif-Kif.
  • cohérence et consistance sont effectivement deux mots pour désigner une même propriété : $T \not\vdash \bot$

    Cependant, jobherzt, non-contradictoire signifie $T$ a un modèle.

    Le théorème de complétude de Gödel démontre "Si $T$ s'exprime en logique du 1er ordre, $T$ consistante ssi $T$ non-contradictoire".

    Ces deux notions ne sont donc pas synonymes. Je ne sais pas exactement ce qu'il en est de la logique d'ordre supérieure.
  • Désolé FrancoisD, je ne viens que seulement de voir ton post.

    Bin, je trouve ton opinion tout à fait raisonnable (attends, je la relis)... Bin oui...
    Rappel (pas pour toi): P indépendant="P consitant et nonP consistant"

    oups après relecture, tu ne les confonds d'ailleurs pas lol,

    en gros tu sembles dire: "si on n'arrive pas à prouver P, mais qu'on "a envie" que P soit vrai, on peut espérer l'admettre" (mais à condition que nonP soit aussi non démontrable)"

    Je nuancerai juste un peu en disant que tout ceci n'est pas très grave, en ce sens qu'on peut bien admettre tout ce qu'on veut (que ce soit consistant ou non), parce que de toute façon, on n'avance vraiment que quand on a prouvé un truc (et on est donc bien content de s'aperevoir que quelque chose est contradictiore: c'est très exactement la même chose que de terminer une démonstration

    Il n'y a strictement AUCUNE différence entre prouver des théorèmes et trouver des contradictions dans des théories.

    C'est un peu un "faux problème" ou "un préjugé" que de d'attribuer à l'histoire de la recherche scientifique une intention de construire des théories consistantes. Nous cherchons très exactement le contraire: des théories contradictoires (autrement dit des théorèmes). Simplement, il existe des "axiomes" dont la tradition est de les considérer comme tacitement admis dans les articles de maths, pour éviter à chacun de devoir réécrire à chaque fois la longue liste d'hypothèses qu'il fait.

    Et par ailleurs, il existe une mémoire affective scientifique consistant à préférer les conclusions plutôt que les négations des hypothèses (celles qui sont des axiomes) utilisées explicitement ou tacitement dans les preuves enregistrées à l'académie des sciences.

    Mais en gros c'est tout. Les espoirs que tu évoques sont peut-être moins fondationnels que psychologiques. On ne se gène généralement pas pour supposer les "P" souhaitables qu'on conjecture ou espèrent démontrer un jour (et parfois quelqu'un prouve nonP

    J'ai un peu l'impression que derrière ton "espoir" se cache une croyance en une vérité absolue qu'on chasse et que ton "choix" de P plutot que nonP est dû à l'espoir que P "serait" vraie en ce sens-là.

    Mathématiquement, ça n'a pas de sens. La vérité est donnée et non poursuivie: un modèle de ZF est une application de l'ens des énoncés dans {vrai;faux} attribuant "vrai" à chaque axiome de ZF et vérifiant 2 ou 3 propriétés algébriques simples. Idem pour toute autre théorie. Les théorèmes de complétude closent plus ou moins l'affaire

    Quant aux entiers, c'est marrant, parce que c'est la notion la moins "absolue" qui soit. Les modèles de ZF n'ont pas tous les mêmes (au sens profond***), et le "délire" consistant à dire (prenons un modèle de ZF qui contient les vrais) est assez édifiant et proche de la même crise qu'ont les philosophes quant ils disent un mot qui leur semblent clé et s'évanouissent de bonheur

    *** pas d'isomorphisme: un entier est un élément qui appartient à tous les ensembles inductifs, un ensemble inductif étant un ensemble contenant 0 (l'ens vide) et stable par passage de x à x union {x] (=:"x+1").

    Rechercher les énoncés arithmétiques vraiment vrais à propos des vrais de vrais entiers... Tu vois la trajet...
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
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