[rms]-2005.

Soit \(P\in\mathbb C[x]\), un polynôme non constant. L’objectif est de déterminer les points isolés de \(\mathscr E:=\{\,A\in M_n(\mathbb C)\ :\ P(A)=0\,\}\)

  1. Soit \(A\in\mathscr E\), montrer qu’il existe une voisinage \(V\) de l’origine dans \(M_n(\mathbb C)\) tel que \((I_n+H)A(I_n+H)^{-1}=A\) pour tout \(H\in V\).

  2. Si de plus \(A\) est isolée, montrer que \(AM=MA\) pour toute matrice \(M\in M_n(\mathbb C)\), en déduire que \(A=\lambda I_n,\ \lambda\in\mathbb C\).

  3. Soit \(\lambda\) une racine de \(P\) de multiplicité supérieure ou égale à 2 ; à l’aide des matrices \(M_k=\lambda I_n+k^{-1}E_{12}\), montrer que \(\lambda I_n\not\in \rm{Iso}(\mathscr E)\). Enfin, montrer que \(\rm{Iso}(\mathscr E)\) est l’ensemble des matrices scalaires \(\lambda I_n\)\(\lambda\) est racine de \(P\) de multiplicité 1.


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[ID: 3101] [Date de publication: 9 novembre 2022 23:18] [Catégorie(s): En cours... ] [ Nombre commentaires: 1] [nombre d'éditeurs: 1 ] [Editeur(s): Emmanuel Vieillard-Baron ] [nombre d'auteurs: 1 ] [Auteur(s): Patrice Lassère ]




Solution(s)

Solution(s)

A la recherche des points isolés de \(\{\,A\in M_n(\mathbb C)\ :\ P(A)=0\,\},\ P\in\mathbb C[x]\)
Par Patrice Lassère le 9 novembre 2022 23:18

Il est essentiel de se souvenir qu’un point isolé est toujours dans l’ensemble. Remarquons aussi qu’ici \(\mathscr E\) est fermé comme image réciproque du fermé \(\{0\}\) par l’application continue \(A\mapsto P(A)\). On peut enfin observer que \(A\in\mathscr E\) implique que les valeurs propres de \(A\) sont des racines de \(P\) et que la classe de conjugaison \(\mathscr S_A=\{\,P^{-1}AP,\ P\in GL_n(\mathbb C)\,\}\) de \(A\) est aussi dans \(\mathscr E\). Comme \(\mathscr S_A\) est non bornée dès que1 \(A\not=\lambda I_n\) il en sera de même pour \(\mathscr E\) dès que \(P\) admet au moins deux racines distinctes.

  1. L’ensemble \(\Omega=\{\, H\in M_n(\mathbb C)\ :\ I_n+H\in GL_n(\mathbb C)\,\}\) est bien entendu ouvert et pour \(H\in\Omega, A\in\mathscr E\) nous avons \[P\left( (I_n+H)A(I_n+H)^{-1}\right) =(I_n+H)P(A)(I_n+H)^{-1}=0.\] Par conséquent l’application continue \(\varphi\ :\ \Omega\ni H\mapsto \ \varphi(H)=(I_n+H)A(I_n+H)^{-1}\in M_n(\mathbb C)\) est à valeurs dans \(\mathscr E\) (i.e. \(\varphi(\Omega)\subset\mathscr E\)). En outre,vu que \(\varphi(0)=A\), pour tout voisinage \(V\) de \(A\), \(\varphi^{-1}(V)\) est un voisinage de l’origine dans \(\Omega\).

    Supposons maintenant que \(A\in\rm{Iso}(\mathscr E)\), il existe un voisinage \(V_A\) de \(A\) dans \(M_n(\mathbb C)\) tel que \(V_A\cap\mathscr E=\{A\}\), et, vu ce qui précède, un voisinage \(V_0\) de l’origine tel que \(V_0\subset\varphi^{-1}(V_A)\). Ainsi, comme \(\varphi(\Omega)\subset\mathscr E\) nous aurons \(\varphi(V_0)\subset V_A\cap\mathscr E=\{A\}\) soit \((I_n+H)A(I_n+H)^{-1}=A\) pour tout \(H\in V_0\).

  2. \((I_n+H)A(I_n+H)^{-1}=A\) pour tout \(H\in V_0\) implique \(HA=AH\) pour tout \(H\in V_0\). \(A\) commute déja avec le voisinage de l’origine \(V_0\) ; soit \(B\in M_n(\mathbb C)\) une matrice arbitraire, il existe \(\varepsilon>0\) tel que (ici, le fait que \(\Omega\) soit ouvert dans \(M_n(\mathbb C)\) est fondamental puisqu’il assure l’existence d’une vraie boule \(B(0,\varepsilon)\subset\Omega\)...voisinage relatif ne suffit pas...) \(\varepsilon B\in V_0\) si bien que \(\varepsilon (BA)=(\varepsilon B)A=A(\varepsilon B)=\varepsilon (AB)\) soit \(BA=AB\). Ainsi tout point isolé \(A\) de \(\mathscr E\) commute avec tout \(M_n(\mathbb C)\), par un exercice classique d’algèbre linéaire ([monier]) \(A=\lambda I_n,\ \lambda\in\mathbb C\).

    Il est bon de remarquer à ce niveau de l’exercice que \(A=\lambda I_n\in M_n(\mathbb C)\cap\mathscr E\) implique \(0=P(A)=P(\lambda)I_n\), soit \(P(\lambda)=0\) et \(\lambda\) est un zéro de \(P\). Les éventuels points isolés de \(\mathscr E\) sont donc dans l’ensemble fini \(\{\,\lambda I_n,\ P(\lambda)=0\,\}\).

  3. \(\Lambda\) désignant l’ensemble (éventuellement vide) des racines simples de \(P\), montrons que l’ensemble des points isolés de \(\mathscr E\) est \(\mathscr A:=\{\,\lambda I_n,\ \lambda\in\Lambda\,\}\).

    -Si \(\lambda\) est une racine multiple de \(P\), alors \((X-\lambda)^2\) divise \(P\). Considérons la suite de matrices \(M_k=\lambda I_n+k^{-1}E_{12},\ k\in\mathbb N^\star\), elle converge vers \(\lambda I_n\) et on a \((M_k-\lambda I_n)^2=(k^{-1}E_{12})^2=0\), si bien que \[P(M_k)=\prod_{\mu\ :\ P(\mu)=0}(M_k-\mu I_n)=(M_k-\lambda I_n)^2Q(M_k)=0.\] (comme polynômes en \(M_k\) les endomorphismes du produit commutent justifiant les deux égalités) La suite \((M_k)_k\) est donc bien dans \(\mathscr E\) et \(\lambda I_n\) n’est pas isolé dans \(\mathscr E\).

    -Si \(P\) admet au moins une racine simple \(\lambda(\in\Lambda)\) montrons que \(\lambda I_n\) est isolée dans \(\mathscr E\). Sinon, il existe dans \(\mathscr E\setminus\{\lambda I_n\}\) une suite \((N_k)_k\) convergente vers \(\lambda I_n\) et par continuité de l’application \(A\mapsto \chi_A\), la suite de polynômes \(\chi_{N_k}\) converge vers \(\chi_{\lambda I_n}=(\lambda-X)^n\). Mais cette suite convergente est inclue dans l’ensemble fini \(\{\,\chi_A,\ A\in\mathscr E\}\) (fini car les valeurs propres d’un élément de \(\mathscr E\) sont forcément des racines de \(P\)) elle est donc stationnaire i.e. \(\chi_{N_k}=(\lambda-X)^n\) à partir d’un certain rang. On a alors : \[\begin{cases} &\chi_{N_k}=(\lambda-X)^n\\ & P(N_k)=0\\ & \lambda\ \text{racine simple de }P, \end{cases}\] et dans ce cas, la seule alternative est que le polynome minimal de \(N_k\) soit égal à \(X-\lambda I_n\) i.e. \(N_k=\lambda I_n\) à partir d’un certain rang et le point \(\lambda I_n\) est bien isolé dans \(\mathscr E\).


  1. Voir l’exercice ??? sur les classes de conjugaison.↩︎


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