Soit \((\lambda_n)_n\) une suite strictement croissante de réels positifs vérifiant

\[\begin{cases} \lambda_0=0\\ \lim_{n\to\infty} \lambda_n=+\infty,\\ \sum_{n\geq 1}\lambda_n^{-1}=+\infty.\end{cases}\]

On considère \(E=\text{vect}\{x^{\lambda_k},\ k\in\mathbb N\}\) le sous espace vectoriel de \(\mathscr C^0([0,1])\), l’objectif est ici de montrer le théorème de Müntz : sous ces hypothèses, \(E\) est dense dans \(\mathscr C^0([0,1])\) pour la topologie de la convergence uniforme sur \([0,1]\).

Pour cela, à tout \(m\in\mathbb N^\star\) distinct de tous les \(\lambda_n,\ n\geq 1\) on associe la suite \((R_n)_n\)

dans \(\mathscr C^0([0,1])\) définie par :

\[\begin{cases} R_0(x)=x^m,\ x\in[0,1]\\ R_n(x)=(\lambda_n-m)x^{\lambda_n}\int_x^1R_{n-1}(t)t^ {-1-\lambda_n}dt,\quad n\geq 1,\ x\in[0,1]. \end{cases}\]

  1. Montrer que pour tout \(n\in\mathbb N\), il existe une suite \((a_{n,k})_{k=0}^n\) de réels telle que

    \[R_n(x)=x^m-\sum_{k=0}^na_{n,k}x^{\lambda_k},\quad x\in[0,1].\]

  2. Montrer que pour tout \(n\geq 1\) : \[\Vert R_n\Vert_\infty\leq\delta_n := \prod_{k=1}^n\left\vert1-{m\over\lambda_k}\right\vert\]

  3. Montrer que la suite de fonctions \(\left ( \sum_{k=0}^na_{n,k}x^{\lambda_k}\right)_n\) converge uniformément sur \([0,1]\) vers \(e_m(x)=x^m\).

  4. Conclure.


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[ID: 3005] [Date de publication: 9 novembre 2022 23:12] [Catégorie(s): Analyse fonctionnelle ] [ Nombre commentaires: 1] [nombre d'éditeurs: 1 ] [Editeur(s): Emmanuel Vieillard-Baron ] [nombre d'auteurs: 1 ] [Auteur(s): Patrice Lassère ]




Solution(s)

Solution(s)

Forme faible du théorème de Müntz
Par Patrice Lassère le 9 novembre 2022 23:12
  1. On procède par récurrence sur \(n\in\mathbb N\) : si \(n=0 : R_0(x)=x^m-a_{0,0}x^{\lambda_0}\) avec \(a_{0,0}=0\). Supposons le résultat acquis au rang \(n-1\geq 0\), on a alors

    \[\begin{aligned} R_n(x)&=(\lambda_n- m)x^{\lambda_n}\int_x^1R_{n-1}(t)t^{-1-\lambda_n}dt\\ &=(\lambda_n- m)x^{\lambda_n}\int_x^1\left(t^m-\sum_{k=0}^{n-1}a_{n-1,k}\,t^{\lambda_k}\right) t^{-1-\lambda_n}dt\\ &=(\lambda_n-m)x^{\lambda_n}\int_x^1\left(t^{m-1-\lambda_n}- \sum_{k=0}^{n-1}a_{n-1,k}\,t^{\lambda_k-1-\lambda_n}\right)dt\\ &=x^m-\sum_{k=0}^na_{n,k}x^{\lambda_k}\ \text{avec }\ \begin{cases} a_{n,n}=1-\sum_{k=0}^{n-1}{m-\lambda_n\over \lambda_k-\lambda_n}\,a_{n-1,k},\\ a_{n,k}={m-\lambda_n\over \lambda_k-\lambda_n}\,a_{n-1,k},\quad 0\leq k\leq n-1. \end{cases} \end{aligned}\]

    D’ou le résultat.

  2. Pour \(x \geq 1\) et \(x\in[0,1]\)

    \[\begin{aligned} \left\vert R_n(x)\right\vert&\leq\vert\lambda_n- m\vert\,x^{\lambda_n}\int_x^1\Vert R_{n-1}\Vert_\infty\,t^{-1-\lambda_m}dt\\ &\leq{\vert \lambda_n-m\vert\over\lambda_n}\Vert R_{n-1}\Vert_\infty\,x^{\lambda_n}(-1-x^{-\lambda_n})\\ &\leq \left\vert 1-{m\over\lambda_n}\right\vert\Vert R_{n-1}\Vert_\infty \end{aligned}\]

    soit

    \[\Vert R_{n}\Vert_\infty\leq \left\vert 1-{m\over\lambda_n}\right\vert\Vert R_{n-1}\Vert_\infty \leq\prod_{k=1}^n\left\vert 1-{m\over\lambda_k}\right\vert\Vert R_{0}\Vert_\infty= \prod_{k=1}^n\left\vert 1-{m\over\lambda_k}\right\vert.\]

  3. Vu les deux premières questions, il suffit de montrer que \(\lim_{n\to+\infty}\delta_n=0\), or pour \(n\geq 1\), on a :

    \[\log(\delta_n)=\sum_{k=1}^n\log\left\vert 1-{m\over\lambda_k}\right\vert\]

    et \(\displaystyle\lim_k {m\over\lambda_k}=0\) assure que pour \(k\) tendant vers \(+\infty\) : \(\displaystyle \log\left\vert 1-{m\over\lambda_k}\right\vert\sim-{m\over\lambda_k}\) soit, vu les hypothèses \(\displaystyle\lim_n\log(\delta_n)=-\infty\) i.e. \(\displaystyle\lim_n\,\delta_n=0.\)

  4. Vu la question précédente, \(\mathbb R[X]\) est inclus dans l’adhérence de \(E\) pour la norme sup ; le résultat suit avec Weierstrass et la transitivité de la densité.

     -Il y a en fait équivalence i.e. le sous-espace \(E\) est dense si, et seulement si la série \(\sum_{n\geq 1}\lambda_n^{-1}\) diverge. C’est le théorème de Müntz-Szatz.

    -Il existe de nombreuses démonstrations de ce théorème la plus fréquente (W.Rudin, Analyse Réelle et Complexe, Dunod (2002), pages ????) reponsant sur la théorie des fonctions holomorphes et les outils d’analyse fonctionnelle (théorème de Hahn-Banach) ; une autre consiste à commencer par établir le résultat dans \(L^2(\mathbb [0,1])\) qui a le bon gout de posséder une structure hilbertienne (Chamber-Loir et Fermigier) le passage aux fonctions continues ne pose alors pas de problèmes.

    -Il est intéressant de remarquer qu’à ce jour, on ne connait pas de démonstration de ce résultat qui ne s’appuie pas sur le théorème de Weierstrass.

    -Il existe de nombreuses généralisations de ce théorème, on pourra consulter à ce sujet le remarquable ouvrage de J.Borwein et T.Eyderly Polynomials inequalities, Springer 19??.


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