Soit \(f\ :\ \mathbb R^n\to\mathbb R^n\) une application de classe \(\mathscr C^1\) vérifiant :

\(\vartriangleright\quad\) \(\{\,a\in\mathbb R^n\ :\ df(a)\not\in GL_n(\mathbb R)\,\}\) est fini.

\(\vartriangleright\quad\) L’image réciproque par \(f\) de tout compact \(K\) de \(\mathbb R^n\) est compacte.

Alors \(f\) est surjective si \(n\geq 2\).

En déduire le théorème de d’Alembert-Gauss.


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[ID: 2943] [Date de publication: 9 novembre 2022 22:38] [Catégorie(s): Calcul différentiel ] [ Nombre commentaires: 1] [nombre d'éditeurs: 1 ] [Editeur(s): Emmanuel Vieillard-Baron ] [nombre d'auteurs: 1 ] [Auteur(s): Patrice Lassère ]




Solution(s)

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Théorème de d’Alembert-Gauss, topologie, calcul différentiel
Par Patrice Lassère le 9 novembre 2022 22:38
  1. Supposons \(n\geq 2\) et notons \[A=\{a\in\mathbb R^n\ :\ df(a)\not\in GL_n(\mathbb R^n)\},\quad \Omega_2=\mathbb R^n\setminus f(A)\quad \text{ et }\quad \Omega_1=f^{-1}(\Omega_2).\] -Par hypothése \(A\) est fini, donc \(f(A)\) aussi et par suite \(\Omega_2\) est ouvert ; \(f\) étant continue, il en est de même pour \(\Omega_1\)

    On vérifie facilement que \(\Omega_1\subset \mathbb R^n\setminus f(A),\quad f(\Omega_1)\subset\Omega_2\) si bien que l’on peut encore considérer la restriction \(\ f\ :\ \Omega_1\to\Omega_2\) que l’on notera toujours \(f\).

    -Avec la seconde hypothèse, l’image réciproque \(f^{-1}(K)\) de tout compact \(K\) dans \(\Omega_2\) est (\(\Omega_2\) est ouvert, donc \(K\) est aussi un compact de \(\mathbb R^n\)) un compact de \(\Omega_1\) ; par un résultat standart1 \(f\) est fermée (ie l’image de tout fermé de \(\Omega_1\) est un fermé de \(\Omega_2\)) : en particulier \(f(\Omega_1)\) est fermé dans \(\Omega_2\).

    Montrons que \(f(\Omega_1)\) est ouvert dans \(\Omega_2\) : soit donc \(y\in f(\Omega_1)\) et \(x\in\Omega_1\) tel que \(f(x)=y\). Par construction, \(df(x)\in GL_n(\mathbb R)\), étant en dimension finie c’est un homéomorphisme linéaire de \(\mathbb R^n\) dans \(\mathbb R^n\) ; par le théorème d’inversion locale, il existe donc deux ouverts \(U,V\) de \(\mathbb R^n\) avec \(x\in U\subset\Omega_1,\ y\in V\) tels que \(f\) induise un difféomorphisme de classe \(\mathscr C^1\) de \(U\) sur \(V\). Donc \(V=f(U)\subset\Omega_2\) et \(f(\Omega_1)\) est ouvert.

    -\(\Omega_2\) est \(\mathbb R^n\) privé d’un nombre fini de points : il est2 connexe par arcs et donc connexe. Ainsi, \(f(\Omega_1)\) est à la fois ouvert, fermé et non vide dans \(\Omega_2\) connexe : \(f(\Omega_1)=\Omega_2\).

    -Il est maintenant temps de conclure : soit \(y\in\mathbb R^n\) il y a alors deux alternatives

    \(\vartriangleright\quad\) ou bien \(y\in f(A)\),

    \(\vartriangleright\quad\) ou bien \(y\in \Omega_2=f(\Omega_1)\),

    dans tous les cas, \(y\) admet un antécédent : \(f\) est bien surjective.

    remarque : Si \(n=1\), \(f\) peut ne pas être surjective comme le montrer l’exemple de \(f\ :\ \mathbb R\to\mathbb R\) définie par \(f(x)=x^2\). On a \(A=\{0\}\) et (exercice classique) \(\left(\lim_{\vert x\vert\to+\infty}\vert f(x)\vert=+\infty\right)\iff\left(\forall\,K\text{ compact },\ f^{-1}(K) \text{ est compact }\right)\) ; les deux hypothèses sont donc bien vérifiées mais \(f\) n’est pas surjective.

  2. Observons comment le théorème de d’Alembert-Gauss en découle : associons à tout polynôme de degré supérieur ou égal à \(1\) \[P(z=x+iy)=Q(x,y)+iR(x,y)\in\mathbb C[z] \quad\text{avec}\quad Q=\text{re}(P)\ \text{ et }\ R=\text{im}(P)\] l’application \[\varphi \quad :\ (x,y)\in\mathbb R^2\ \longmapsto\ \varphi(x,y)=(Q(x,y),R(x,y))\in\mathbb R^2\] on va montrer que \(\varphi\) satisfait deux aux hypothèses de la première question, si bien quelle sera surjective et l’origine admettra un antécédent i.e. \(\exists\, (a,b)\in\mathbb R^2\) tel que \(\varphi(a,b)=0\) soit \(P(a+ib)=R(a,b)+iQ(a,b)=0\) ; \(P\) admet donc au moins un zéro dans \(\mathbb C\) et le théorème de d’Alembert-Gauss est donc démontré.

    -Commencons par remarquer \(\vert \varphi(x,y)\vert=\vert P(z)\vert\) et par conséquent \[\lim_{\Vert(x,y)\Vert\to+\infty}\vert\varphi(x,y)\vert=\lim_{\vert z\vert\to+ \infty}\vert P(z)\vert=+\infty\] \(\varphi\) étant continue sur \(\mathbb R^2\), un exercice classique3 nous assure que la seconde propriété est satisfaite par \(\varphi\).

    -Pour la première, la matrice jacobienne de \(\varphi\) est (avec les équations de Cauchy-Riemann \(\partial_xQ=\partial_yR,\ \partial_yQ=-\partial_xR\) qui, rappelons-le sont faciles – i.e. ne nécessitent aucun recours à la \(\mathbb C\)-dérivabilité – à établir pour un polynôme ) nous avons \[J_\varphi(x,y)=\begin{pmatrix} \partial_xQ&\partial_yQ\\\partial_xR&\partial_yR\end{pmatrix}= \begin{pmatrix} \partial_xQ&-\partial_xR\\\partial_xR&\partial_xQ\end{pmatrix}\] soit4 \[\vert J_\varphi(x,y)\vert =\vert\partial_xQ(x,y)\vert^2+\vert\partial_xR(x,y)\vert^2=\vert P'(z)\vert^2,\] si bien que \[\{\,X\in\mathbb R^2\ :\ d\varphi(X)\not\in GL_2(\mathbb R)\,\}=\{(a,b)\in\mathbb R^2\ :\ P'(a+ib)=0\}\] et finalement \[\text{card}\{\,X\in\mathbb R^2\ :\ d\varphi(X)\not\in GL_2(\mathbb R)\,\}=\text{card}\{(a,b)\in\mathbb R^2\ :\ P'(a+ib)=0\} \leq \text{degr\'e}(P)-1<+\infty\] soit (1)


  1. 1  Monier ??
  2. 2  c’est ici qu’on utilise le fait que \(n\geq 2\) !
  3. 3  exercice 1-24, Analyse MP (exercices) J.M.Monier - Dunod - 1997, Monier le fait pour une application de \(\mathbb R\) dans \(\mathbb R\) mais le résultat et la preuve subsistent pour une application de \(\mathbb R^n\) dans \(\mathbb R\).↩︎

  4. voir la formule \((\bigstar)\) page trois


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