Intégrale d’une fonction continue sur un segment

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Construction de l’intégrale de Riemann.

Pour bien aborder ce chapitre

Les mathématiciens se sont intéressés très tôt aux problèmes de calcul d’aires et de volumes. Ainsi Eudoxe de Cnide, mathématicien grec du \(4^{\textrm{ e}}\) siècle avant note ère, parvient à calculer le volume d’une pyramide. Cent ans plus tard, Archimède généralise son procédé et invente la méthode d’exhaustion. Il s’agit d’approcher l’aire ou le volume à déterminer par des aires ou des volumes élémentaires, par défaut et par excès. La notion de limite est alors encore bien loin d’être découverte et le calcul est généralement terminé par un raisonnement par l’absurde. La révélation   est venue de Newton et de Leibniz lorsqu’ils inventèrent le calcul infinitésimal : l’opération d’intégration est une opération inverse de celle de la dérivation et, pour calculer une aire, il suffit de calculer une primitive. C’est le théorème fondamental de l’analyse  [thm:fondamental] page [thm:fondamental]. Il faudra attendre néanmoins le \(19^{\textrm{ e}}\) siècle pour que la notion d’intégrale soit bien formalisée grâce aux travaux de Cauchy et surtout à ceux de Riemann. Celui-ci s’intéresse à fonction \(f\) donnée sur un segment \(\left[a,b\right]\) et essaie d’approcher l’aire \(\mathcal A\) sous le graphe de \(f\) par les aires \(\Sigma^-\) et \(\Sigma^+\) de deux familles de rectangles qui approchent par défaut et par excès \(\mathcal A\) comme dans les dessins ci-dessous.

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Somme supérieure : \(\Sigma^+\)

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Somme supérieure : \(\Sigma^+\)

Une fonction est intégrable au sens de Riemann si et seulement la différence des aires \(\Sigma^+\) et \(\Sigma^-\) tend vers \(0\) quand le pas de la subdivision, c’est-à-dire la largeur des rectangles considérés, tend vers \(0\). La méthode d’exhaustion est sous-jacente à ce procédé.

Nous travaillerons dans ce chapitre sur une classe de fonctions beaucoup plus simples que celles étudiée dans l’intégrale de Riemann: les fonctions continues par morceaux. Ce sera amplement suffisant pour pourvoir traiter une large variété de problèmes. Vous généraliserez ces résultats en spé lors de l’étude des intégrales impropres à des fonctions pas forcément continues par morceaux.

En particulier, pour un segment \(\left[a,b\right]\) et une fonction \(f:\left[a,b\right] \rightarrow \mathbb{R}^+\) positive, nous nous attacherons dans ce chapitre à répondre aux deux questions suivantes.

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  1. Quelle condition imposée à \(f\) pour que l’aire délimitée par sa courbe dans un repère orthonormé soit bien définie ?

  2. Comment calculer cette aire ?

Fonctions en escaliers

Subdivision d’un segment

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(Subdivision d’un segment).
On appelle subdivision du segment \(\left[a,b\right]\) toute famille \(\tau=\left(x_k\right)_{1\leqslant k\leqslant n}\) de réels tels que \[a=x_0<x_1<\dots<x_{n-1}<x_n=b\] Le pas de la subdivision \(\tau\) est donné par \(\max_{i\in\llbracket 0,n-1\rrbracket} \left|x_{i+1}-x_i\right|\). Une subdivision de \(\left[a,b\right]\) est régulière si tous les \(x_{i+1}-x_i\) sont égaux.
(Subdivision plus fine qu’une autre).
Considérons \(\tau\) et \(\tau'\) deux subdivisions d’un segment \(\left[a,b\right]\). On dit que \(\tau'\) est plus fine que \(\tau\) si et seulement si tout élément de la famille \(\tau\) est élément de la famille \(\tau'\).

Plus précisément, une subdivision est une famille. Une famille est une application. Il vaut mieux dire que l’image de \(\tau\) est incluse dans l’image de \(\tau'\)

Soient \(\tau\) et \(\tau'\) deux subdivisions d’un segment \(\left[a,b\right]\). Il existe une subdivision de \(\left[a,b\right]\) plus fine que \(\tau\) et \(\tau'\).
Il suffit de considérer la famille \(\tau''=\left(x_k\right)_{1\leqslant k\leqslant N}\) dont les éléments sont ceux de \(\tau\) et ceux de \(\tau'\) ordonnés dans l’ordre croissant et où \(N\) est le cardinal de la famille ainsi construite. \(\tau''\) est plus fine que \(\tau\) et \(\tau'\).

Fonctions en escaliers

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(Fonction en escalier).
  • Une fonction \(\varphi: \left[a,b\right]\to\mathbb{R}\) est une fonction en escalier sur le segment \(\left[a,b\right]\) s’il existe une subdivision \(\tau : a=x_0<\dots<x_n=b\) du segment \(\left[a,b\right]\) telle que \(\varphi\) est constante sur chaque intervalle \(\left]x_k,x_{k+1}\right[\) \[\forall k\in\llbracket 0,n-1\rrbracket, \quad \exists c_k\in\mathbb{R}, \quad \forall x\in\left]x_k,x_{k+1}\right[, \quad \varphi\left(x\right)=c_k\]

  • La subdivision \(\tau\) est dite subordonnée à la fonction \(\varphi\).

  • On notera \(\mathscr E\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right)\) l’ensemble des fonctions en escalier sur \([a,b]\) à valeurs réelles.

  • Si \(\tau\) est une subdivision subordonnée à \(\varphi\) alors toute subdivision plus fine est encore subordonnée à \(\varphi\).

  • Une fonction constante est une fonction en escalier.

Toute fonction \(\varphi\in \mathscr E\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right)\) est bornée sur \(\left[a,b\right]\).
Soient \(\varphi\) une fonction en escalier et \(\tau=x_0<\dots<x_n=b\) une subdivision qui lui est subordonnée. On a donc : \(\forall k\in\llbracket 0,n-1\rrbracket, \quad \exists c_k\in\mathbb{R}, \quad \forall x\in\left]x_k,x_{k+1}\right[, \quad \varphi\left(x\right)=c_k\). En posant \(m = \displaystyle{\max_{0\leqslant k \leqslant n-1} \lvert c_k \rvert }\) puis \(M = \max(m, \lvert f(x_0) \rvert ,\dots, \lvert f(x_n) \rvert )\), on a \(\forall x \in [a, b]\), \(\lvert \varphi(x) \rvert \leqslant M\).
  • L’ensemble des fonctions en escalier \(\mathscr E\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right)\) sur le segment \([a,b]\) est un sous-espace vectoriel de l’espace des fonctions \(\left(\mathscr{F}\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right),+,.\right)\).

  • L’ensemble \(\mathscr E\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right)\) est aussi un sous-anneau de l’anneau des fonctions \(\left(\mathscr{F}\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right),+,\times\right)\).

La fonction constante égale à \(0\) sur \(\left[a,b\right]\) est élément de \(\mathscr E\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right)\) . On montre facilement (en utilisant une subdivision plus fine que les deux subdivisions subordonnées aux deux fonctions) que \(\mathscr E\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right)\) est stable par combinaison linéaire. C’est donc un sous-espace vectoriel de \(\mathscr{F}\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right)\). On montre de même qu’un produit de fonctions en escalier est encore une fonction en escalier, ce qui prouve que \(\mathscr E\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right)\) est un sous-anneau de \(\mathscr{F}\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right)\).

Intégrale d’une fonction en escaliers

(Intégrale d’une fonction en escaliers).
Supposons que \(a<b\). Soit une fonction en escalier \(\varphi\in \mathscr E\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right)\) et \(\tau : a=x_0<\dots<x_n=b\) une subdivision subordonnée à \(\varphi\). Soient \(c_0,\ldots,c_{n-1}\in\mathbb{R}\) tels que : \(\forall k\in\llbracket 0,n-1\rrbracket \quad \forall x\in\left]x_k,x_{k+1}\right[ \quad \varphi\left(x\right)=c_k\). On définit l’intégrale de la fonction en escalier \(\varphi\) entre \(a\) et \(b\) comme étant le nombre réel \[\int_{\left[a,b\right]}\varphi=\displaystyle{\sum_{k=0}^{n-1} c_k\left(x_{k+1}-x_k\right)}.\] Ce nombre ne dépend pas du choix de la subdivision \(\tau\) subordonnée à \(\varphi\).
Prouvons que cette définition ne dépend pas de la subdivision choisie. Soient \(\tau_1\) et \(\tau_2\) deux subdivisions subordonnées à \(\varphi\). Notons \(I_\tau\) l’intégrale calculée avec la formule donnée dans la proposition pour une subdivision \(\tau\) de \(\left[a,b\right]\).
  • Supposons que \(\tau_1\) est plus fine que \(\tau_2\). Si \(\tau_1\) et \(\tau_2\) ne diffèrent qu’en un point, \(\tau_2=a=x_0<x_1<\dots<x_i<x_{i+1}<\dots<x_n=b\) et \(\tau_1=a=x_0<x_1<\dots<x_i<\alpha<x_{i+1}<\dots<x_n=b\). On a : \(\varphi_{|\left]x_i,x_{i+1}\right[}=c_i\) par conséquent \(\varphi_{|\left]x_i,\alpha\right[}=c_i\), \(\varphi_{|\left]\alpha,x_{i+1}\right[}=c_i\) et \[\begin{aligned} \begin{split} I_{\tau_1}&=c_0\left(x_1-x_0\right)+c_1\left(x_2-x_1\right)+\dots+c_{i-1}\left(x_{i}-x_{i-1}\right)+\\ &\underbrace{c_i\left(\alpha- x_i\right)+c_i\left(x_{i+1}-\alpha\right)}_{=c_i\left(x_{i+1}-x_i\right)} +c_{i+1}\left(x_{i+2}-x_{i+1}\right)+\newline &\dots+c_{n-1}\left(x_n-x_{n-1}\right) = I_{\tau_2} \end{split} \end{aligned}\] Le cas où \(\tau_1\) et \(\tau_2\) ne diffèrent que d’un nombre fini de points se traite de même.

  • Étudions maintenant le cas général. Considérons la subdivision \(\tau=\tau_1\cup \tau_2\) qui est plus fine que \(\tau_1\) et \(\tau_2\). En appliquant le point précédent, on a \(I_{\tau}=I_{\tau_1}\) et \(I_{\tau}=I_{\tau_2}\) et par conséquent \(I_{\tau_1}=I_{\tau_2}\).

Propriétés de l’intégrale d’une fonction en escaliers

(L’intégrale est une forme linéaire sur \(\mathscr E\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right)\)).
Soient \(\varphi_1,\varphi_2\in \mathscr E\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right)\) deux fonctions en escalier sur le segment \(\left[a,b\right]\). Pour tout \(\alpha,\beta\in\mathbb{R}\), on a \[\int_{\left[a,b\right]}{\alpha\varphi_1+\beta\varphi_2}= \alpha\int_{\left[a,b\right]}{\varphi_1}+\beta\int_{\left[a,b\right]}{\varphi_2}\] Autrement dit, si \[\theta: \left\{ \begin{array}{ccl} \mathscr E\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right) & \longrightarrow & \mathbb{R} \newline \varphi & \longmapsto & \int_{\left[a,b\right]}\varphi \end{array} \right.\] alors on a \[\theta\left(\alpha\varphi_1+\beta\varphi_2\right) = \alpha\theta\left(\varphi_1\right)+\beta\theta\left(\varphi_2\right)\] On dit aussi que \(\theta\) est une forme linéaire sur \(\mathscr E\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right)\).
Soient \(\tau_1\) une subdivision subordonnée à \(\varphi_1\) et \(\tau_2\) une subdivision subordonnée à \(\varphi_2\). Soit \(\tau\) une subdivision plus fine que \(\tau_1\) et \(\tau_2\). Elle est donc subordonnée à la fois à \(\varphi_1\) et à \(\varphi_2\). Supposons que \(\tau:a=x_0<x_1<\dots<x_n=b\) et que \[\forall i\in\llbracket 0,n-1\rrbracket,\quad {\varphi_1}_{|\left]x_i,x_{i+1}\right[}=c_i \quad \textrm{ et} \quad {\varphi_2}_{|\left]x_i,x_{i+1}\right[}=d_i.\] On a alors \[\begin{aligned} \int_{\left[a,b\right]}{\alpha\varphi_1+\beta\varphi_2}&= &\sum_{i=0}^{n-1} \left(\alpha c_i + \beta d_i\right) \left(x_{i+1}-x_i\right)\\ &=& \alpha\sum_{i=0}^{n-1} c_i \left(x_{i+1}-x_i\right) + \beta\sum_{i=0}^{n-1} d_i \left(x_{i+1}-x_i\right)\newline &=&\alpha \int_{\left[a,b\right]}{\varphi_1}+\beta\int_{\left[a,b\right]}{\varphi_2} \end{aligned}\]
(L’intégrale d’une fonction en escalier positive est positive).
Soit \(\varphi\in \mathscr E\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right)\) une fonction en escalier sur le segment \(\left[a,b\right]\). Si \(\varphi\) est positive sur \(\left[a,b\right]\) alors \(\int_{\left[a,b\right]}{\varphi}\geqslant 0\).
Soit \(\tau:a=x_0<x_1<\dots<x_n=b\) une subdivision subordonnée à \(\varphi\) : \(\forall i\in\llbracket 0,n-1\rrbracket,\quad {\varphi_1}_{|\left]x_i,x_{i+1}\right[}=c_i\in\mathbb{R}\). Comme \(\varphi\) est positive, pour tout \(i\in\llbracket 0,n-1\rrbracket\), on a \(c_i\geqslant 0\). Par conséquent, \(\int_{\left[a,b\right]}{\varphi}=\sum_{i=0}^{n-1} c_i \left(x_{i+1}-x_i\right)\geqslant 0\).
Soit \(\left(\varphi_1,\varphi_2\right) \in \left(\mathscr E\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right)\right)^2\). On a \[\varphi_1 \leqslant\varphi_2 \Rightarrow \int_{\left[a,b\right]}{\varphi_1 }\leqslant\int_{\left[a,b\right]}{\varphi_2 }\]
Il suffit d’appliquer le résultat précédent à la fonction en escalier \(\varphi= \varphi_2-\varphi_1\) et d’utiliser la linéarité de l’intégrale.
(Relation de Chasles).
Soit \(\varphi\) une fonction en escalier sur le segment \(\left[a,b\right]\) et \(c\in \left]a,b\right[\). Alors \[\int_{\left[a,b\right]}{\varphi} = \int_{\left[a,c\right]}{\varphi} + \int_{\left[c,b\right]}{\varphi}\]
Soit \(\tau:a=x_0<x_1<\dots<x_n=b\) une subdivision subordonnée à \(\varphi\). On peut supposer, quitte à considérer la subdivision \(\tau'=\tau\cup\left\{c\right\}\) qui est plus fine que \(\tau\) que \(c\) est un point de \(\tau\). On suppose de plus que \(c\) est le m-ième élément de \(\tau\). Si pour tout \(i\in\llbracket 0,n-1\rrbracket\), \({\varphi_1}_{|\left]x_i,x_{i+1}\right[}=c_i\) alors \[\begin{aligned} \int_{\left[a,b\right]}{\varphi} &=& \sum_{i=0}^{n-1} c_i \left(x_{i+1}-x_i\right)\\ &=& \sum_{i=0}^{m-1} c_i \left(x_{i+1}-x_i\right) + \sum_{i=m}^{n-1} c_i \left(x_{i+1}-x_i\right)\\ &=&\int_{\left[a,c\right]}{\varphi} + \int_{\left[c,b\right]}{\varphi} \end{aligned}\]

Fonctions continues par morceaux

Définition et propriétés

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(Fonction continue par morceaux sur un segment).
  • Soit \(\left[a,b\right]\) un segment. On dit qu’une fonction \(\varphi : \left[a,b\right]\to\mathbb{R}\) est une fonction continue par morceaux sur \(\left[a,b\right]\) lorsqu’il existe une subdivision du segment \(\left[a,b\right]\) telle que

    1. Pour tout \(k\in\llbracket 0,n-1\rrbracket\), la restriction de \(\varphi\) à \(\left]x_k,x_{k+1}\right[\) est continue.

    2. Pour tout \(k\in\llbracket 0,n-1\rrbracket\), \(\varphi\) restreinte à \(\left]x_k,x_{k+1}\right[\) admet une limite finie strictement à droite en \(x_k\) et strictement à gauche en \(x_{k+1}\). Autrement dit, la restriction de \(\varphi\) à \(\left]x_k,x_{k+1}\right[\) est prolongeable par continuité sur \(\left[x_k,x_{k+1}\right]\).

  • Une telle subdivision est dite adaptée ou subordonnée à \(\varphi\).

  • Toute fonction en escalier sur \(\left[a,b\right]\) est continue par morceaux sur \(\left[a,b\right]\).

  • Comme pour les fonctions en escaliers, si \(\tau\) est une subdivision de \(\left[a,b\right]\) subordonnée à \(\varphi\) continue par morceaux sur \(\left[a,b\right]\) et si \(\tau'\) est une autre subdivision de \(\varphi\) de \(\left[a,b\right]\) plus fine que \(\tau\) alors \(\tau'\) est aussi subordonnée à \(\varphi\).

Si \(\varphi\) est une fonction continue par morceaux sur un segment \(\left[a,b\right]\) alors \(\varphi\) est bornée sur \(\left[a,b\right]\).
Soit \(\varphi\) une fonction continue par morceaux sur \(\left[a,b\right]\) et soit \(\tau: a=x_0<\dots<x_n=b\) une subdivision subordonnée à \(\varphi\). Pour tout \(i\in\llbracket 0,n-1\rrbracket\), la fonction \(f_{|\left]x_i,x_{i+1}\right[}\) est continue et se prolonge en une fonction \(\widetilde f_i\) continue sur le segment \(\left[x_i,x_{i+1}\right]\). En appliquant le théorème [continue_sur_un_segment], \(\widetilde f_i\) est bornée sur le segment \([x_i, x_{i+1}]\). Posons \(M=\max_{i\in\llbracket 0,n-1\rrbracket} \left\{M_i,\lvert f\left(x_i\right) \rvert \right\} \cup \{\lvert f(b) \rvert \}\). Alors \(\forall x \in [a, b]\), \(\lvert f(x) \rvert \leqslant M\).
Soit \(I\) un intervalle.
  • L’ensemble des fonctions réelles continues par morceaux sur \(\left[a,b\right]\) est un sous-espace vectoriel de \(\left(\mathcal{F}\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right),+,.\right)\).

  • L’ensemble des fonctions réelles continues par morceaux sur \(\left[a,b\right]\) est un sous-anneau de \(\left(\mathcal{F}\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right),+,\times\right)\).

Montrons le premier point, le second se prouve de même. Il est tout d’abord clair que l’ensemble des fonctions réelles continues par morceaux sur \(\left[a,b\right]\) est non vide. Soient \(\alpha\), \(\beta\) deux scalaires réels et soient \(\varphi_1\) et \(\varphi_2\) deux fonctions continues par morceaux sur \(\left[a,b\right]\). Soient \(\tau_1\) une subdivision de \(\left[a,b\right]\) subordonnée à \(\varphi_1\) et soit \(\tau_2\) une subdivision de \(\left[a,b\right]\) subordonnée à \(\varphi_2\). Soit \(\tau: a=x_0<\dots<x_n=b\) une subdivision plus fine que \(\varphi_1\) et \(\varphi_2\). \(\tau\) est donc subordonnée à la fois à \(\varphi_1\) et à \(\varphi_2\). De plus, pour tout \(i\in\llbracket 0,n-1\rrbracket\), \(\left(\alpha \varphi_1+\beta \varphi_2\right)_{|\left]x_i,x_{i+1}\right[}=\alpha {\varphi_1}_{|\left]x_i,x_{i+1}\right[}+\beta {\varphi_2}_{|\left]x_i,x_{i+1}\right[}\) qui est continue sur \(\left]x_i,x_{i+1}\right[\) comme combinaison linéaire d’applications continues sur \(\left]x_i,x_{i+1}\right[\). De plus, par opérations sur les limites, \(\left(\alpha \varphi_1+\beta \varphi_2\right)_{|\left]x_i,x_{i+1}\right[}\) admet une limite stricte à droite de \(x_i\) et une limite stricte à gauche de \(x_{i+1}\). \(\alpha \varphi_1+\beta \varphi_2\) est donc bien une fonction continue par morceaux sur \(\left[a,b\right]\).

Approximation des fonctions continues par morceaux par les fonctions en escalier

(Approximation d’une fonction continue par une fonction en escalier).
Soit \(f\) une fonction continue sur le segment \(\left[a,b\right]\) et \(\varepsilon>0\). Alors, il existe une fonction en escalier \(\varphi\) telle que \[\lVert f-\varphi \rVert_{\infty} = \displaystyle{\sup_{x \in [a,b]} \lvert f(x)-\varphi(x) \rvert } \leqslant\varepsilon.\]
Puisque la fonction \(f\) est continue sur le segment \([a, b]\), elle est uniformément continue sur ce segment (théorème de Heine, [thm:heine]). Il existe donc \(\eta > 0\) tel que \(\forall (x,y) \in [a, b]^2\), \(\lvert x-y \rvert \leqslant\eta \Rightarrow \lvert f(x)-f(y) \rvert \leqslant\varepsilon\). Considérons alors un entier \(n\) suffisamment grand pour que \((b-a)/n \leqslant\eta\) et définissons la subdivision de pas constant \(h = (b-a)/n \leqslant\eta\), \(x_i = a + ih\) pour \(i \in [\kern-0.127em[ 0, n-1 ]\kern-0.127em]\). Définissons ensuite la fonction en escalier \(\varphi\) en posant \(\forall i \in [\kern-0.127em[ 0, n-1 ]\kern-0.127em]\), \(\forall x \in [x_i, x_{i+1}[\), \(\varphi(x) = f(x_i)\) et \(\varphi(b) = f(b)\). Soit \(x \in [a, b[\), il existe \(i \in [\kern-0.127em[ 0, n-1 ]\kern-0.127em]\) tel que \(x_i \leqslant x < x_{i+1}\) et comme \(\lvert x-x_i \rvert \leqslant\eta\), \(\lvert f(x)-\varphi(x) \rvert = \lvert f(x)-f(x_i) \rvert \leqslant\varepsilon\). Si \(x = b\), on a également \(\lvert f(b)-\varphi(b) \rvert = 0 \leqslant\varepsilon\). En passant à la borne supérieure, on a bien \(\lVert f-\varphi \rVert_{\infty} \leqslant\varepsilon\).

Multimédia: animation, \(n\) augmente et les aires des rectangles sous le graphe de \(f\) se rapprochent de l’intégrale

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Une approximation plus fine avec \(\varepsilon\) plus petit

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Une approximation plus fine avec \(\varepsilon\) plus petit

(Une fonction continue par morceaux est la somme d’une fonction continue et d’une fonction en escalier).
Soit \(f\) une fonction continue par morceaux sur le segment \([a,b]\). Il existe une fonction \(g\) continue sur \([a,b]\) et une fonction \(\psi\) en escalier sur \([a,b]\) telles que \(f = g + \psi\).
Considérons une subdivision \(a = x_0 < \dots < x_{n} = b\) subordonnée à la fonction en escalier \(f\). Comme \(f\) est continue par morceaux, sa restriction à \(]x_0, x_1[\) possède une limite finie à droite en \(x_0\) et une limite finie à gauche en \(x_1\), \(f(x) \xrightarrow[x \rightarrow x_0^+]{} l\) et \(f(x) \xrightarrow[x \rightarrow x_1-]{} L\). Posons \(\forall x \in ]x_0, x_1[\), \(g(x) = f(x)\), \(g(x_0) = l\) et \(g(x_1) = L\) et \(\psi(x_0) = f(x_0)-l\), \(\forall x \in ]x_0, x_1[\), \(\psi(x) = 0\) et \(\psi(x_1) = f(x_1) - L\). On a bien \(g\) continue sur \([x_0,x_1]\), \(\psi\) en escalier sur \([x_0,x_1]\) et \(\forall x \in [x_0, x_1]\), \(f(x) = g(x) + \psi(x)\). On recommence ce procédé sur \([x_1,x_2]\) …  pour définir les fonctions \(g\) et \(\psi\) sur \([a,b]\).

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(Approximation uniforme d’une fonction continue par morceaux par une fonction en escalier).
Soit \(f\) une fonction continue par morceaux sur le segment \([a,b]\) et \(\varepsilon> 0\). Il existe une fonction \(\varphi\) en escalier sur \([a,b]\) telle que \(\lVert f-\varphi \rVert_{\infty} \leqslant \varepsilon\).
D’après le lemme précédent, il existe une fonction \(g\) continue sur \([a,b]\) et une fonction \(\psi\) en escalier sur \([a,b]\) telles que \(f = g + \psi\). D’après le théorème précédent, il existe une fonction en escalier \(\chi\) sur \([a,b]\) telle que \(\lVert g-\chi \rVert_{\infty} \leqslant\varepsilon\). Posons alors \(\varphi= \psi + \chi\). C’est une fonction en escalier et on a bien \(\lVert f-\varphi \rVert_{\infty} = \lVert g-\chi \rVert_{\infty} \leqslant\varepsilon\).
(Encadrement d’une fonction continue par morceaux par deux fonctions en escalier).
Soit \(f\) une fonction continue par morceaux sur le segment \([a,b]\) et \(\varepsilon> 0\). Il existe deux fonctions en escalier, \(\varphi, \psi \in \mathscr E\left(\left[a,b\right],\mathbb{R}\right)\) vérifiant \[\boxed{\varphi\leqslant f \leqslant\psi} \quad \textrm{ et} \quad\boxed{\psi - \varphi\leqslant\varepsilon}.\]
D’après le corollaire [thm:0729201125], il existe une fonction en escalier \(\chi\) sur \([a,b]\) vérifiant \(\forall x \in [a,b]\), \(-\varepsilon/2 \leqslant f(x)-\chi(x) \leqslant\varepsilon/2\). Définissons les fonctions en escalier \(\varphi= \chi - \varepsilon/2\) et \(\psi = \chi + \varepsilon/2\). Elles vérifient bien \(\varphi\leqslant f \leqslant\psi\) et \(\psi-\varphi= \varepsilon\).

Intégrale d’une fonction continue par morceaux

(Intégrale de Riemann d’une fonction continue par morceaux).
Soit une fonction \(f\) continue par morceaux sur un segment \([a,b]\). On considère les ensembles \[\mathscr I_{<f}=\left\{\int_{\left[a,b\right]}\varphi~|~\textrm{ $\varphi$ est en escalier sur $\left[a,b\right]$ et $\varphi\leqslant f$}\right\}\] \[\mathscr I_{>f}=\left\{\int_{\left[a,b\right]}\varphi~|~\textrm{ $\varphi$ est en escalier sur $\left[a,b\right]$ et $f\leqslant\varphi$}\right\}\] On a les propriétés suivantes,
  • \(\mathscr I_{<f}\) admet une borne supérieure.

  • \(\mathscr I_{>f}\) admet une borne inférieure.

  • \(\sup \mathscr I_{<f}=\inf \mathscr I_{>f}\).

On définit alors l’intégrale de Riemann de la fonction continue par morceaux \(f\) sur \([a,b]\) par \[\boxed{\int_{\left[a,b\right]}f=\sup \mathscr I_{<f}=\inf \mathscr I_{>f}}\]
On définit les ensembles \(\mathscr E_{<f}\) et \(\mathscr E_{>f}\) par \[\mathscr E_{<f}=\left\{\textrm{ $\varphi$ est en escalier sur $\left[a,b\right]$ et $\varphi\leqslant f$}\right\}\] et \[\mathscr E_{>f}=\left\{\textrm{ $\varphi$ est en escalier sur $\left[a,b\right]$ et $f\leqslant\varphi$}\right\}\]
  • On a prouvé que si \(f\) est une fonction continue par morceaux sur \(\left[a,b\right]\) alors elle est minorée par un réel \(m\) et majorée par un réel \(M\) sur \(\left[a,b\right]\). Par conséquent, les fonctions en escalier sur \(\left[a,b\right]\) définies par \(x \mapsto m\) et \(x \mapsto M\) sont éléments respectivement de \(\mathscr E_{<f}\) et de \(\mathscr E_{>f}\). \(\mathscr E_{<f}\) et \(\mathscr E_{>f}\) sont donc non vides.

  • Montrons que \(\mathscr I_{<f}\) est majorée. Soit \(\varphi\in \mathscr E_{<f}\). On a \(\varphi\leqslant f \leqslant M\). Par conséquent, \(\int_{\left[a,b\right]}\varphi\leqslant\int_{\left[a,b\right]} M =M\left(b-a\right)\). Cette majoration étant valable pour toute fonction en escalier \(\varphi\in\mathscr E_{<f}\), on en déduit que \(\mathscr I_{<f}\) est majorée.

  • D’après l’axiome de la borne supérieure, on en déduit que \(\mathscr I_{<f}\) possède une borne supérieure \(\beta\).

  • De même, on prouve que \(\mathscr I_{>f}\) est non vide minorée et possède une borne inférieure \(\alpha\).

  • On a \(\alpha\leqslant\beta\). Montrons que \(\alpha=\beta\). Soit \(\varepsilon>0\). Appliquant le théorème précédent, il existe des fonctions en escalier \(\varphi\) et \(\psi\) définies sur \(\left[a,b\right]\) telles que \[\varphi\leqslant f \leqslant\psi \quad \textrm{ et} \quad\psi - \varphi\leqslant\varepsilon\] On a donc : \(\varphi\in \mathscr E_{<f}\) et \(\psi \in \mathscr E_{>f}\) ce qui donne \[\int_{\left[a,b\right]}\varphi\leqslant\alpha \leqslant\beta \leqslant \int_{\left[a,b\right]}\psi\] ce qui s’écrit aussi : \[\beta - \alpha \leqslant\int_{\left[a,b\right]}\psi - \int_{\left[a,b\right]} \varphi= \int_{\left[a,b\right]} \psi - \varphi\leqslant\varepsilon \left(b-a\right)\] Cette inégalité étant valable pour tout \(\varepsilon>0\), on en déduit que : \(\alpha=\beta\).

Cette définition généralise la définition de l’intégrale d’une fonction en escalier. Si \(f\) est une fonction en escalier, son intégrale de Riemann est égale à l’intégrale de la fonction en escalier précédemment définie.
(Pour montrer qu’une fonction \(f\) est intégrable sur un segment).
Il suffit de montrer que \(f\) est continue par morceaux sur ce segment.

Bernhard Riemann, né le 17 septembre 1826 à Breselenz(Allemagne), mort le 20 juillet 1866 à Selasca, Italie

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Mathématicien Allemand. Bernhard Riemann est le deuxième enfant d’une famille de six. Il reçoit de son père, pauvre pasteur luthérien, une éducation stricte et rigoureuse. Bien que très tôt il montre des talents intellectuels exceptionnels, il souffre d’une grande timidité, de dépression nerveuse et hypocondrie. Ses problèmes d’expression le poursuivront toute sa vie et l’empêcheront d’être reconnu à sa juste valeur de son vivant. Á \(19\) ans, il s’établit à Hanovre pour étudier la théologie et la philosophie, mais ses goût s’orientent vite vers les mathématiques. Il rencontre Gauss à l’université de Göttingen qui sera son directeur de thèse. Celle-ci porte sur les fonctions complexes et il y introduit les surfaces qui portent maintenant son nom et qui sont d’une grande importance dans la recherche mathématique actuelle. Quelques années plus tard, il jette les bases de la géométrie différentielle. C’est aussi lui qui a finalisé le travail de Cauchy sur les fonctions intégrables et qui a, le premier, produit une théorie rigoureuse de l’intégration. Il est le découvreur de la fonction \(\zeta\) qui est au carrefour de nombreuses théories mathématiques modernes. La position des zéros de cette fonction est l’objet d’une célèbre conjecture qui n’a toujours pas été prouvée et qui permettrait de mieux comprendre la répartition des nombres premiers. Bernhard Riemann est mort à \(40\) ans de la tuberculose.

Propriétés de l’intégrale

(L’intégrale est une forme linéaire sur l’espace vectoriel des fonctions continues par morceaux).
Soient \(f\) et \(g\) deux fonctions continues par morceaux sur le segment \(\left[a,b\right]\) et \(\alpha,\beta\in\mathbb{R}\). Alors \[\boxed{\int_{\left[a,b\right]}{(\alpha f+\beta g)}= \alpha\int_{\left[a,b\right]}{f}+\beta\int_{\left[a,b\right]}{g}}\]
Comme \(f\) et \(g\) sont des fonctions continues par morceaux sur le segment \(\left[a,b\right]\), il en est de même de \(\alpha f+\beta g\) et cette fonction est donc intégrable sur le segment \(\left[a,b\right]\). Posons \(I=\int_{\left[a,b\right]}{\alpha f+\beta g}\), \(I_1=\int_{\left[a,b\right]}{f}\) et \(I_2=\int_{\left[a,b\right]}{g}\). On veut donc prouver que \(I=\alpha I_1 + \beta I_2\), ce qui revient à montrer que pour tout \(\varepsilon>0\), on a \(-\varepsilon \leqslant I -\left( \alpha I_1 + \beta I_2\right) \leqslant\varepsilon\). Soit \(\varepsilon>0\). D’après le théorème [approx_escalier], il existe des fonctions en escalier \(\varphi_1,\varphi_2\), \(\psi_1,\psi_2\) définies sur \(\left[a,b\right]\) telles que \[\varphi_1 \leqslant f \leqslant\psi_1 ,\quad \psi_1 - \varphi_1 \leqslant\varepsilon \quad \textrm{ et} \quad\varphi_2 \leqslant g \leqslant\psi_2 ,\quad \psi_2 - \varphi_2 \leqslant\varepsilon\] On a donc \[\alpha\varphi_1 + \beta \varphi_2 \leqslant\alpha f+\beta g \leqslant\alpha\psi_1 + \beta\psi_2 \quad \textrm{ et} \quad\alpha\psi_1 + \beta\psi_2 - \left(\alpha\varphi_1 + \beta \varphi_2\right) \leqslant\varepsilon\] Il vient alors \[\begin{aligned} &&\int_{\left[a,b\right]}{\alpha \varphi_1+\beta \varphi_2} -\alpha \int_{\left[a,b\right]}{\psi_1}-\beta \int_{\left[a,b\right]}{\psi_2} \leqslant I -\left( \alpha I_1 + \beta I_2\right) \leqslant \int_{\left[a,b\right]}{\alpha \psi_1+\beta \psi_2} -\alpha \int_{\left[a,b\right]}{\varphi_1}-\beta\int _{\left[a,b\right]}{\varphi_2}\\ &\textrm{ donc}&\int_{\left[a,b\right]}{\alpha \left(\varphi_1-\psi_1\right)+\beta \left(\varphi_2-\psi_2\right) } \leqslant I -\left( \alpha I_1 + \beta I_2\right) \leqslant\int_{\left[a,b\right]}{\alpha \left(\psi_1-\varphi_1\right)+\beta \left(\psi_2-\varphi_2\right) }\textrm{ par linéarité de l'intégrale des fonctions en escalier}\\ &\textrm{ donc}&\int_{\left[a,b\right]}{-\varepsilon\left(\alpha +\beta\right)} \leqslant I -\left( \alpha I_1 + \beta I_2\right) \leqslant\int_{\left[a,b\right]}{\varepsilon\left(\alpha +\beta\right)} \textrm{ car $\psi_1 - \varphi_1 \leqslant\varepsilon$ et $\psi_2 - \varphi_2 \leqslant\varepsilon$ et par application du théorème ref@ineg\_fct\_escalier@finref}\newline &\textrm{ donc}&-\varepsilon\left(\alpha +\beta\right)\left(b-a\right) \leqslant I -\left( \alpha I_1 + \beta I_2\right) \leqslant\varepsilon\left(\alpha +\beta\right)\left(b-a\right) \end{aligned}\] ce qui prouve le théorème.
(L’intégrale d’une fonction continue par morceaux positive est positive).
Soit \(\varphi\) une fonction continue par morceaux sur le segment \(\left[a,b\right]\). On a \[\boxed{\forall x\in\left[a,b\right], \quad \varphi\left(x\right)\geqslant 0 \Rightarrow \int_{\left[a,b\right]}{\varphi}\geqslant 0}\]
La fonction nulle sur \(\left[a,b\right]\) est en escalier et vérifie \(0\leqslant f\). Elle est donc élément de \(\mathscr E_{<f}\) et par définition de l’intégrale d’une fonction continue par morceaux, on a \(\int_{\left[a,b\right]}{f}\geqslant\int_{\left[a,b\right]}{0}=0\).
Soient \(\varphi_1\) et \(\varphi_2\) deux fonctions continues par morceaux sur le segment \(\left[a,b\right]\). On a \[\boxed{\varphi_1 \leqslant\varphi_2 \Rightarrow \int_{\left[a,b\right]}{\varphi_1 }\leqslant\int_{\left[a,b\right]}{\varphi_2 }}\]
En appliquant le théorème précédent à la fonction positive \(g-f\), on obtient \(\int_{\left[a,b\right]}{g-f}\geqslant 0\) et on conclut en utilisant la linéarité de l’intégrale d’une fonction continue par morceaux.
(Relation de Chasles).
Soit \(\varphi\) une fonction continue par morceaux sur le segment \(\left[a,b\right]\). Soit \(c \in \left]a,b\right[\). Alors : \[\boxed{\int_{\left[a,b\right]}{\varphi} = \int_{\left[a,c\right]}{\varphi} + \int_{\left[c,b\right]}{\varphi}}\]
Soit \(\varphi\in\mathscr E_{<f}\). On a \(\varphi_{|\left[a,c\right]}\leqslant f_{|\left[a,c\right]}\) et \(\varphi_{|\left[c,b\right]}\leqslant f_{|\left[c,b\right]}\). Par conséquent, \[\begin{aligned} \int_{\left[a,b\right]}{\varphi}&=&\int_{\left[a,c\right]}{\varphi} + \int_{\left[c,a\right]}{\varphi} \textrm{ par application de la relation de Chasles pour les fonctions en escalier}\newline &\leqslant& \int_{\left[a,c\right]}{f} + \int_{\left[c,a\right]}{f} \textrm{ par application du théorème ref@comparaison\_fonctions\_int@finref} \end{aligned}\] Notons \(\gamma\) cette dernière quantité. \(\gamma\) est donc un majorant de \(\mathscr I_{<f}=\left\{\int_{\left[a,b\right]}{\varphi} ~|~ \varphi\in \mathscr E_{<f} \right\}\). Par conséquent, \(\gamma \geqslant \int_{\left[a,b\right]}{f}\). On peut faire le même raisonnement avec une fonction \(\varphi\in \mathscr E_{>f}\) et on aura alors \(\gamma \leqslant \int_{\left[a,b\right]}{f}\). Donc \(\gamma = \int_{\left[a,b\right]}{f}\) et la relation de Chasles est démontrée.

Fonctions continues par morceaux sur un intervalle

\(I\) désigne ici un intervalle de \(\mathbb{R}\).

(Fonction continue par morceaux sur un intervalle).
On dit qu’une fonction définie sur un intervalle \(I\) est continue par morceaux sur \(I\) si et seulement si elle est continue par morceaux sur tout segment de \(I\).
Soit \(f\) une fonction continue par morceaux sur \(I\). Soit \(\left(a,b\right)\in I^2\). On note
  • Si \(a\leqslant b\), \(\int_{a}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x=\int_{\left[a,b\right]}{f }\)

  • Si \(b\leqslant a\), \(\int_{a}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x=-\int_{\left[a,b\right]}{f }\)

  • Si \(a=b\), \(\int_{a}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x=0\)

Dans cette notation (comme dans les calculs de sommes), la variable \(x\) est muette, on a défini l’intégrale d’une fonction. \(\displaystyle{\int_{a}^{b}} f(x)\mathrm{ \;d}x = \displaystyle{\int_{a}^{b}} f(t)\mathrm{ \;d}t = \dots\).
(Relation de Chasles).
Soit une fonction \(f\) continue par morceaux sur l’intervalle \(I\) et trois réels \(a,b,c\in I\). Alors \[\boxed{\int_{a}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x=\int_{a}^{c} f\left(x\right)\,\textrm{d}x+\int_{c}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x}\]
  • Si \(a<c<b\), par application du théorème [chasles1], \[\int_{a}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x = \int_{\left[a,b\right]}f = \int_{\left[a,b\right]}f + \int_{\left[c,b\right]}f = \int_{a}^{c} f\left(x\right)\,\textrm{d}x + \int_{c}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x\]

  • Si \(a<b<c\), par application du point précédent, \[\int_{a}^{c} f\left(x\right)\,\textrm{d}x + \int_{c}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x = \int_{a}^{c} f\left(x\right)\,\textrm{d}x - \int_{b}^{c} f\left(x\right)\,\textrm{d}x =\int_{a}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x\]

  • Les autres cas se démontrent de même.

Nullité de l’intégrale d’une fonction continue

(Si l’intégrale d’une fonction continue positive est nulle alors cette fonction est nulle).
Soient \(\left[a,b\right]\) un segment et une fonction \(f:\left[a,b\right] \rightarrow \mathbb{R}\) vérifiant
  1. la fonction \(f\) est continue sur le segment \(\left[a,b\right]\),

  2. elle est positive : \(\forall x\in\left[a,b\right], \quad f\left(x\right) \geqslant 0\).

  3. son intégrale est nulle : \(\int_{a}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x=0\).

Alors la fonction est nulle : \(\boxed{\forall x\in\left[a,b\right], \quad f\left(x\right)=0}\)
Par l’absurde, supposons que la fonction \(f\) n’est pas nulle. Alors il existe \(c\in\left[a,b\right]\) tel que \(f\left(c\right)\neq 0\). Pour simplifier la rédaction, supposons que \(c\in\left]a,b\right[\) et \(f(c) > 0\) (les autres cas se traitent de la même façon). Posons \(\varepsilon= f(c)/2\). Puisque la fonction \(f\) est continue au point \(c\), on peut trouver un voisinage \(\left]c-\eta,c+\eta\right[\) de \(c\) avec \(\eta>0\) inclus dans \(\left[a,b\right]\) tel que \(\forall x\in \left]c-\eta,c+\eta\right[\), \(-\varepsilon \leqslant f\left(x\right)-f\left(c\right) \leqslant \varepsilon\) c’est-à-dire \(\forall x\in \left]c-\eta,c+\eta\right[\) \(f\left(x\right) \geqslant\varepsilon\). On a donc par la relation de Chasles, \[\begin{aligned} \int_{a}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x&=& \int_{a}^{c-\eta} f\left(x\right)\,\textrm{d}x + \int_{c-\eta}^{c+\eta} f\left(x\right)\,\textrm{d}x + \int_{c+\eta}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x \\ &\geqslant& \int_{c-\eta}^{c+\eta} f\left(x\right)\,\textrm{d}x \textrm{ car $f\geqslant 0$}\newline &>& \int_{c-\eta}^{c+\eta} \varepsilon\,\textrm{d}x = 2\eta\varepsilon>0 \end{aligned}\] ce qui est en contradiction avec la troisième hypothèse. \(f\) est donc nulle sur \(\left[a,b\right]\).
  • La réciproque de cette propriété est clairement vraie : \(\left[\forall x\in\left[a,b\right], \quad f\left(x\right)=0 \right]\Rightarrow \int_{a}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x=0\).

  • Ce théorème est bien entendu faux si l’on ne suppose pas \(f\geqslant 0\) sur \(\left[a,b\right]\) ou si la fonction \(f\) est uniquement continue par morceaux : une fonction nulle partout sauf en un point est d’intégrale nulle.

Majorations fondamentales

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Soient \(f\) une fonction réelle continue par morceaux sur le segment \(\left[a,b\right]\). En appliquant la proposition [continue_par_morceaux_implique_bornee], il existe des réels \(m\) et \(M\) tels que \(\forall x\in \left[a,b\right], \quad m \leqslant f\left(x\right) \leqslant M\). On a alors \[\boxed{ m\left(b-a\right) \leqslant\int_{a}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x \leqslant M\left(b-a\right)}\]
En appliquant la proposition [comparaison\_fonctions\_int], on obtient \[\int_{a}^{b} m\,\textrm{d}x \leqslant\int_{a}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x \leqslant \int_{a}^{b} M\,\textrm{d}x\] ce qui donne le résultat.
Soit \(f\) une fonction continue par morceaux sur le segment \(\left[a,b\right]\) alors \(f\) est bornée sur \(\left[a,b\right]\) et \[\boxed{\displaystyle{\left|\int_{a}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x\right| \leqslant \int_{a}^{b} \left|f\left(x\right)\right|\,\textrm{d}x \leqslant\left(b-a\right)\sup_{\left[a,b\right]} \left|f\right| }}\]
Remarquons tout d’abord que comme \(f\) est continue par morceaux, utilisant les théorèmes d’opération sur les limites et les fonctions continues, il en est de même de \(\left|f\right|\) et donc \(\left|f\right|\) est intégrable sur \(\left[a,b\right]\). De plus, on a \(-\left|f\right|\leqslant f \leqslant \left|f\right|\). Par conséquent, d’après le théorème [comparaison\_fonctions\_int], \[-\int_{\left[a,b\right]}{\left|f\right|}\leqslant \int_{\left[a,b\right]}{f} \leqslant\int_{\left[a,b\right]}{\left|f\right|}\] ce qui donne le résultat.
(Inégalité de la moyenne).
Soient \(f\) et \(g\) deux fonctions continues par morceaux sur le segment \(\left[a,b\right]\) alors on a l’inégalité de la moyenne \[\boxed{\displaystyle{\left|\int_{\left[a,b\right]}{fg}\right| \leqslant\sup_{\left[a,b\right]} \left|f\right| \int_{\left[a,b\right]}{\left|g\right|} }}\]
Comme \(f\) est continue par morceaux sur le segment \(\left[a,b\right]\), appliquant la proposition [continue_par_morceaux_implique_bornee], \(f\) est bornée sur \(\left[a,b\right]\) et il existe donc un réel \(M>0\) tel que \(\sup_{\left[a,b\right]} \left|f\right|\leqslant M\). On a donc : \(\forall x\in\left[a,b\right], \quad \left|f\left(x\right)g\left(x\right)\right| \leqslant M \left|g\left(x\right)\right|\) et donc, appliquant le théorème [comparaison\_fonctions\_int] et le théorème précédent, \[\left|\int_{\left[a,b\right]}{fg}\right| \leqslant\int_{\left[a,b\right]}{\left|fg\right|} \leqslant\int_{\left[a,b\right]}M\left|g\right|\leqslant M \int_{\left[a,b\right]}\left|g\right|\]
(Inégalité de Cauchy-Schwarz).
Soient \(f\) et \(g\) des fonctions continues par morceaux sur le segment \(\left[a,b\right]\). On a l’inégalité de Cauchy-Schwarz : \[\boxed{ \left| \displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} fg \right| \leqslant \sqrt{\displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} f} \sqrt{\displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} g} }\]
Introduisons la fonction polynomiale \(P\) de la variable \(\alpha\) définie par \[P = \int_{\left[a,b\right]}{\left(f+\alpha g\right)}^2= \alpha^2\int_{\left[a,b\right]}{g^2} + 2\alpha\int_{\left[a,b\right]}{fg} +\int_{\left[a,b\right]}{f^2}\] Remarquons que comme \(\forall \alpha\in\mathbb{R},\quad \left(f+\alpha g\right)^2\geqslant 0\), \(P\) est positive ou nulle.
  • Si \(\int_{\left[a,b\right]}{g^2} =0\) alors \(P\) est une fonction affine. Vu qu’elle est positive ou nulle, il est nécessaire que le coefficient de son terme de degré \(1\) soit nul, c’est-à-dire \(\int_{\left[a,b\right]}{fg}=0\). L’inégalité de Cauchy-Schwarz est alors démontrée dans ce cas particulier.

  • Sinon, \(P\) est un trinôme du second degré. Comme \(P\geqslant 0\), ses deux racines sont ou confondues ou complexes. Par conséquent son discriminant réduit \(\Delta\) est négatif ou nul \[\Delta = \left(\int_{\left[a,b\right]}{fg}\right)^2-\int_{\left[a,b\right]}{f^2} \int_{\left[a,b\right]}{g^2}\] On en déduit alors l’inégalité souhaitée. Dans le cas où \(f\) et \(g\) sont continues (et plus seulement continues par morceaux), remarquons qu’il y a égalité dans cette inégalité lorsque \(g = 0\) ou alors lorsque le trinôme \(P\) possède une racine double. C’est-à-dire qu’il existe \(\alpha \in \mathbb{R}\) tel que \(\displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} (f + \alpha g)^2 = 0\). D’après le théorème [thm:integrale_nulle] page [thm:integrale_nulle], on doit avoir \(f+\alpha g = 0\), c’est-à-dire que les deux fonctions \(f\) et \(g\) sont proportionnelles. Réciproquement, si les deux fonctions sont proportionnelles, on vérifie qu’il y a égalité dans la majoration de Cauchy-Schwarz.

(Inégalité de Minkowski).
Soient deux fonctions continues \(f\) et \(g\) sur le segment \([a, b]\). En notant \(\left\| f \right\|_2 = \sqrt{ \int_a^b f^2(x)\mathrm{ \;d}x }\), on a l’inégalité suivante \[\boxed{ \left\| f+g\right\|_2 \leqslant\left\| f \right\|_2 + \left\| g\right\|_2 }\]
Développons et utilisons Cauchy-Schwarz \[\begin{aligned} \displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} (f+g)^2 &= \displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} f^2 + 2\displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} fg + \displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} g^2 \\ &\leqslant\displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} f^2 + 2\sqrt{\displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} f^2}\sqrt{\displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} g^2} + \displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} g^2 \\ &= \left( \sqrt{\displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} f^2} + \sqrt{\displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} g^2} \right)^2 \newline &= \left(\lVert f \rVert_{2} + \lVert g \rVert_{2}\right)^2 \end{aligned}\] On en déduit l’inégalité souhaitée. Remarquons qu’il y a égalité dans cette majoration si et seulement si \(\displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} fg = \left| \displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} fg \right| = \sqrt{\displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} f^2}\sqrt{\displaystyle{\int_{[a,b]}^{ }} g^2}\). D’une part, il y a égalité dans Cauchy-Schwarz donc les deux fonctions \(f\) et \(g\) sont proportionnelles et d’autre part, puisque \(\int fg \geqslant 0\), le coefficient de proportionnalité doit être positif ou nul. On vérifie facilement la réciproque.

Valeur moyenne d’une fonction

(Valeur moyenne d’une fonction).
Soient \(\left[a,b\right]\) un segment et \(f\) une fonction continue par morceaux sur \(\left[a,b\right]\) à valeurs réelles. On appelle valeur moyenne de \(f\) sur le segment \(\left[a,b\right]\) la quantité \[\dfrac{1}{b-a} \int_{a}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x\]

Invariance de l’intégrale par translation

(Invariance de l’intégrale par translation).
Soient \(f\) une fonction continue par morceaux sur le segment \(\left[a,b\right]\) à valeurs réelles et \(T\in \mathbb{R}\). Soit \(f_T: \left\{ \begin{array}{ccl} \left[a+T,b+T\right] & \longrightarrow & \mathbb{R} \newline x & \longmapsto & f\left(x-T\right) \end{array} \right.\). Alors \(f_T\) est continue par morceaux sur le segment \(\left[a+T,b+T\right]\) et \[\boxed{\int_{a+T}^{b+T} f_T\left(x\right)\,\textrm{d}x=\int_{a}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x}\]
  • Supposons que \(f\) est une fonction en escalier sur \(\left[a,b\right]\). Soit \(\tau:a=x_0<x_1<\dots<x_n=b\) une subdivision subordonnée à \(f\). Il existe donc \(c_1,\dots,c_n\in\mathbb{R}\) tels que \(f_{|\left]x_i,x_{i+1}\right[}=c_i\). Posons \(\tau_T:a+T=x_0+T<x_1+T<\dots<x_n+T=b+T\). \(\tau_T\) est une subdivision subordonnée à \(f_T\). De plus : \({f_T}_{|\left]x_i+T,x_{i+1}+T\right[}=c_i\). Par conséquent : \[\int_{\left[a+T,b+T\right]}{f_T} = \sum_{k=1}^{n} c_k \left(x_{k+1}+T - \left(x_k + T\right)\right) = \sum_{k=1}^{n} c_k \left(x_{k+1}-x_k\right)= \int_{\left[a,b\right]}{f}\] Le théorème est alors démontré pour les fonctions en escalier.

  • Supposons que \(f\) est une fonction continue par morceaux sur le segment \(\left[a,b\right]\). Par définition de l’intégrale, on a : \[\begin{aligned} \int_{a+T}^{b+T} f_T\left(x\right)\,\textrm{d}x&=&\sup\left\{\int_{\left[a+T,b+T\right]}{\varphi} ~|~ \varphi \textrm{ est en escalier sur $\left[a+T,b+T\right]$ et } \varphi \leqslant f_T\right\}\\ &=&\sup\left\{\int_{\left[a,b\right]}{\varphi_{-T}} ~|~ \varphi \textrm{ est en escalier sur $\left[a+T,b+T\right]$ et } \varphi \leqslant f_T\right\}\\ &=&\sup\left\{\int_{\left[a,b\right]}{\varphi} ~|~ \varphi \textrm{ est en escalier sur $\left[a,b\right]$ et } \varphi \leqslant f\right\}\newline &=&\int_{a}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x\end{aligned}\]

Primitive et intégrale d’une fonction continue

Dans toute cette section, \(I\) désigne un intervalle de \(\mathbb{R}\) non trivial.

(Primitive).
Soit \(:I\rightarrow \mathbb{R}\). On dit qu’une fonction \(F:I \rightarrow \mathbb{R}\) est une primitive de \(f\) sur l’intervalle \(I\) si et seulement si
  1. la fonction \(F\) est dérivable sur \(I\),

  2. sa dérivée est égale à \(f\) : \(\forall x\in I, \quad F'\left(x\right) = f\left(x\right)\)

(Deux primitives d’une même fonction diffèrent d’une constante).
Soit une fonction \(f: I \rightarrow \mathbb{R}\) définie sur un intervalle \(I\). Si \(F\) et \(G\) sont deux primitives de \(f\) sur \(I\) alors il existe \(c\in\mathbb{R}\) tel que : \(G=F+c\).
Comme \(F\) et \(G\) sont des primitives de \(f\) sur \(I\), on a \(\left(G-F\right)'=f-f=0\). Par conséquent \(G-F\) est une fonction constante sur \(I\), c’est une conséquence du théorème des accroissements finis (). Il existe donc \(c\in \mathbb{R}\) tel que \(G=F+c\).
Le fait que \(I\) est un intervalle est fondamental. Si par exemple \(I = [0,1] \cup [2,3]\) la fonction \(G\) définie par \(G(x)=0\) sur \([1, 2]\), \(G(x) = 1\) sur \([2,3]\) est une primitive de la fonction \(f\) sur \(I\). La fonction \(F\) nulle est également une primitive de \(f\) sur \(I\) et ces deux fonctions ne diffèrent pas d’une constante.

Considérons une fonction \(f\) continue par morceaux sur un intervalle \(I\) et un point \(a \in I\). Alors, pour tout réel \(x \in I\), le segment \([a,x]\) est inclu dans l’intervalle \(I\) ce qui nous permet de définir la fonction suivante : \[F : \left\{ \begin{array}{ccl} I & \longrightarrow & \mathbb{R} \\ x & \longmapsto & \displaystyle{\int_{a}^{x}} f(t) \mathrm{ \;d}t \end{array} \right.\]

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(La fonction \(F\) est continue sur \(I\)).
Si la fonction \(f\) est continue par morceaux sur l’intervalle \(I\), alors la fonction \(F\) est continue sur \(I\).
Considérons un segment \([a,b]\) inclus dans l’intervalle \(I\). Comme la fonction \(f\) est continue par morceaux sur le segment \([a,b]\), elle est bornée sur ce segment. Notons \(M_{[a,b]} = \displaystyle{\sup_{x\in[a,b]} \lvert f(x) \rvert }\). Soient \((x, y) \in [a,b]^2\), avec \(x < y\). En utilisant Chasles et la majoration classique [thm:majoration_classique] page [thm:majoration_classique], \[\lvert F(y)-F(x) \rvert = \left|\displaystyle{\int_{a}^{y}} f(t)\mathrm{ \;d}t - \displaystyle{\int_{a}^{x}} f(t)\mathrm{ \;d}t\right| = \left| \displaystyle{\int_{x}^{y}} f(t)\mathrm{ \;d}t \right| \leqslant\displaystyle{\int_{x}^{y}} \lvert f(t) \rvert \mathrm{ \;d}t \leqslant M_{[a,b]} \lvert y-x \rvert\] Nous avons montré que la restriction de \(F\) au segment \([a,b]\) était lipschitzienne, donc continue. La fonction \(F\) est donc continue en tout point de tout segment inclus dans \(I\) ce qui montre qu’elle est continue sur l’intervalle \(I\).

Le théorème suivant permet de relier calcul différentiel et calcul intégral. Les anglo-saxons lui ont donné le nom de Fundamental Theorem of Calculus que nous traduisons par :

(Théorème fondamental de l’analyse).
  1. Soit \(I\) un intervalle de \(\mathbb{R}\).

  2. Soit \(f\) une fonction continue sur \(I\).

Soit \(a\in I\) alors la fonction \[\boxed{F: \left\{ \begin{array}{ccl} I & \longrightarrow & \mathbb{R} \newline x & \longmapsto & \int_{a}^{x} f(t)\,\textrm{d}t \end{array} \right. }\] est de classe \(\mathcal{C}^{1}\) sur \(I\) et est \(\boxed{\textrm{ la seule primitive de $f$ qui s'annule en $a$}\quad F'=f \quad \textrm{ et} \quad F\left(a\right)=0}\)
Soit \(x_0 \in I\). Pour simplifier la preuve, supposons que \(x_0\) n’est pas l’extrémité droite de l’intervalle \(I\). Nous allons montrer que la fonction \(F\) est dérivable au point \(x_0\). Soit \(h > 0\) tel que \(x_0 + h \in I\). Puisque la fonction \(f\) est continue au point \(x_0\), lorsque \(h\) est petit, pour \(t \in [x_0, x_0+h]\), \(f(t)\) est proche de \(f(x_0)\). Effectuons cette approximation : \[F(x_0+h) = \displaystyle{\int_{a}^{x_0+h}} f(t) \mathrm{ \;d}t = \displaystyle{\int_{a}^{x_0}} f(t)\mathrm{ \;d}t + \displaystyle{\int_{x_0}^{x_0+h}} f(t)\mathrm{ \;d}t = F(x_0) + \displaystyle{\int_{x_0}^{x_0+h}} \left(f(x_0) + [f(t)-f(x_0)] \right) \mathrm{ \;d}t = F(x_0) + hf(x_0) + \displaystyle{\int_{x_0}^{x_0+h}} \left[f(t)-f(x_0)\right] \mathrm{ \;d}t\] Nous avons fait apparaître un reste de notre approximation \[R(h) = \displaystyle{\int_{x_0}^{x_0+h}} \left[f(t)-f(x_0)\right] \mathrm{ \;d}t\] Soit \(\varepsilon> 0\). Puisque la fonction \(f\) est continue au point \(x_0\), il existe \(\eta > 0\) tel que \(\forall t \in [x_0, x_0+\eta]\), \(\lvert f(t)-f(x_0) \rvert \leqslant\varepsilon\). Soit \(h \in ]0, \eta]\), \[\lvert R(h) \rvert = \left| \displaystyle{\int_{x_0}^{x_0+h}} \left[f(t)-f(x_0)\right] \mathrm{ \;d}t \right| \leqslant \displaystyle{\int_{x_0}^{x_0+h}} \left|f(t)-f(x_0)\right| \mathrm{ \;d}t \leqslant\varepsilon h\] Par conséquent, \(\lvert R(h) \rvert / h \leqslant\varepsilon\). Nous avons montré que \(R(h)/h \xrightarrow[h \rightarrow 0]{} 0\), donc que \(R(h) = \underset{ }{\mathrm{o}}(h)\). La fonction \(F\) admet un développement limité à l’ordre \(1\) au point \(x_0\) et d’après le théorème , elle est dérivable à droite au point \(x_0\) avec \(F_d'(x_0) = f(x_0)\). On montre de la même façon (en prenant \(h < 0\)) que \(F\) est dérivable à gauche en \(x_0\) avec \(F_g'(x_0) = f(x_0)\). Puisque \(F' = f\) est continue par hypothèse, la fonction \(F\) est de classe \(\mathcal{C}^{1}\) sur l’intervalle \(I\).

Le théorème fondamental garantit l’existence de primitives d’une fonction continue sur un intervalle.

(Une fonction continue sur un intervalle possède une primitive).
  1. Soit \(I\) un intervalle de \(\mathbb{R}\).

  2. Soit \(f\) une fonction continue sur \(I\)

alors \(\boxed{\textrm{ $f$ possède une primitive $F$ sur $I$}}\).

Jusqu’à présent, nous avons construit de façon théorique l’intégrale d’une fonction continue par morceaux, mais nous sommes pour l’instant incapables de calculer la moindre intégrale (si ce n’est pour les fonctions en escalier) ! Le théorème fondamental permet d’effectuer ce calcul si l’on connaît une primitive de notre fonction sur le segment \([a,b]\).

(Calcul d’intégrale).
Soit \(f:I \rightarrow \mathbb{R}\) une application continue sur le segment \(\left[a,b\right]\subset I\). Soit \(G\) une primitive de \(f\) sur \(\left[a,b\right]\) alors l’intégrale de \(f\) sur \(\left[a,b\right]\) est donnée par \[\boxed{\int_{a}^{b} f(t)\,\textrm{d}t=G(b)-G(a)}\]
Comme la fonction \(f\) est continue sur l’intervalle \(I\), elle admet comme primitive sur \(I\) la fonction \(F\) du théorème fondamental. Soit \(G\) une primitive quelconque de \(f\) sur \(I\). Il existe \(c\in\mathbb{R}\) tel que \(G=F+c\). Par conséquent \[\int_{a}^{b} f(t)\,\textrm{d}t = F\left(b\right)-F\left(a\right) = [G\left(b\right) + c] - [G\left(a\right)+c]=G(b)-G(a)\]
(Théorème fondamental (deuxième forme)).
Soit \(f\) une fonction de classe \(\mathcal{C}^{1}\) sur un intervalle \(I\) de \(\mathbb{R}\). Soit \(a\in I\). On a \[\boxed{ f(b)-f(a)=\int_{a}^{b} f'(t)\,\textrm{d}t}\]
Comme \(f\) est de classe \(\mathcal{C}^{1}\) sur \(I\), \(f'\) est continue et est donc bien intégrable sur tout segment \(\left[a,b\right]\) de \(I\). De plus \(f\) est une primitive de \(f'\) sur \(I\). Appliquant le résultat précédent, on a bien \(\int_{a}^{x} f'(t)\,\textrm{d}t= f(b)-f(a)\).
Pensez à utiliser cette formule lorsque vous avez une hypothèse sur \(f'\) et vous voulez obtenir une propriété sur la fonction \(f\).
On note \(E = \{f \in {\mathcal{C}}^[(1) ]{[a,b]} \mid f(a) = 0\}\). Nous allons montrer qu’il existe une constante \(C \geqslant 0\) telle que \(\forall f \in E\), \(\lVert f \rVert_{2} \leqslant C\lVert f' \rVert_{2}\) (c’est l’inégalité de Poincaré).

Nous voulons majorer une quantité faisant intervenir \(f\) (\(\lVert f \rVert_{2}\)) en fonction d’une quantité faisant intervenir \(f'\) (\(\lVert f' \rVert_{2}\)). Il n’y a pas à hésiter sur l’outil à utiliser : c’est le théorème fondamental.

Soit \(f \in E\). Puisque \(f\) est de classe \(\mathcal{C}^{1}\) sur l’intervalle \([a,b]\), d’après le théorème fondamental deuxième forme, pour \(x \in [a,b]\), \[f(x) = f(a) + \displaystyle{\int_{a}^{x}} f'(t)\mathrm{ \;d}t = \displaystyle{\int_{a}^{x}} f'(t)\mathrm{ \;d}t\] Alors en utilisant Cauchy-Schwarz, \[f^2(x) = \left( \displaystyle{\int_{a}^{x}} 1 \times f'(t)\mathrm{ \;d}t \right)^2 \leqslant \displaystyle{\int_{a}^{x}} 1^2 \mathrm{ \;d}t \displaystyle{\int_{a}^{x}} f'^2(t) \mathrm{ \;d}t \leqslant (x-a) \displaystyle{\int_{a}^{b}} f'^2(t)\mathrm{ \;d}t\] Avec la majoration classique [thm:majoration_classique] page [thm:majoration_classique], \[\displaystyle{\int_{a}^{b}} f^2(t) \mathrm{ \;d}t \leqslant\displaystyle{\int_{a}^{b}} f'^2(t)\mathrm{ \;d}t \displaystyle{\int_{a}^{b}} (x-a) \mathrm{ \;d}x = \dfrac{(b-a)^2}{2} \displaystyle{\int_{a}^{b}} f'^2(t)\mathrm{ \;d}t\] Il suffit de prendre \(C = (b-a)/\sqrt{2}\).
  • On note \([F\left(x\right)]_a^b=F(b)-F(a)\).

  • Si \(f\) est une fonction continue, la notation \(\int_{ }^{ } f\left(x\right)\,\textrm{d}x\) est utilisée pour représenter une primitive quelconque de la fonction \(f\). Avec les notations précédentes : \[\int_{ }^{ } f\left(x\right)\,\textrm{d}x= \int_{a}^{x} f\left(t\right)\,\textrm{d}t + C^{te}\]

(Dérivée d’une fonction définie par une intégrale).
  1. Soit une fonction \(f\) continue sur un intervalle \(I\),

  2. Soient \(u,v: J \mapsto I\) deux fonctions dérivables sur l’intervalle \(J\).

Alors la fonction \[G : \left\{ \begin{array}{ccl} J & \longrightarrow & \mathbb{R} \newline x & \longmapsto & \displaystyle{\int_{u(x)}^{v(x)}} f(t)\mathrm{ \;d}t \end{array} \right.\] est dérivable sur l’intervalle \(J\) et \[\forall x\in J, \quad\boxed{G'(x)= v'(x)f[ v(x) ] - u'(x)f[ u(x) ] }\]
Soit un réel \(a \in I\) et \(F\) la fonction du théorème fondamental. Il suffit de remarquer que pour \(x \in J\), avec la relation de Chasles, \[G(x) = \displaystyle{\int_{a}^{v(x)}} - \displaystyle{\int_{a}^{u(x)}} = F\left(v(x)\right) - F\left(u(x)\right)\] Puisque \(G = F\circ v - F\circ u\) et que la fonction \(F\) est dérivable sur \(I\) (théorème fondamental), que \(u\) et \(v\) sont dérivables sur \(J\) à valeurs dans \(I\), d’après le théorème [thm:derivation_composee] page [thm:derivation_composee], la fonction \(G\) est dérivable sur \(J\) et \(\forall x \in J\), \(G'(x) = F'\left(v(x)\right)\times v'(x) - F'\left(u(x)\right) \times u'(x)\) d’où la formule du théorème puisque \(F' = f\).
Étudions les variations de la fonction \[g:\left\{ \begin{array}{ccl} ]1,+\infty[ & \longrightarrow & \mathbb{R} \\ x & \longmapsto & \displaystyle{\int_{x}^{x^2}} \dfrac{\mathrm{ \;d}t}{t^2-1} \end{array} \right.\] La fonction \(g\) est définie et dérivable sur l’intervalle \(I = ]1, +\infty[\). Notons \(J = ]1, +\infty[\) et définissons les fonctions \[u : \left\{ \begin{array}{ccl} J & \longrightarrow & I \\ x & \longmapsto & x \end{array} \right. \quad v : \left\{ \begin{array}{ccl} J & \longrightarrow & I \\ x & \longmapsto & x^2 \end{array} \right. \quad f : \left\{ \begin{array}{ccl} I & \longrightarrow & \mathbb{R} \newline x & \longmapsto & \dfrac{1}{x^2-1} \end{array} \right.\] Les fonctions \(u,v\) sont dérivables de \(J\) vers \(I\) et la fonction \(f\) est continue sur l’intervalle \(I\). D’après le théorème précédent, \(g\) est dérivable sur l’intervalle \(J\) et pour \(x \in J\), \[g'(x) = 2xf(x^2) - f(x) = - \dfrac{x^2-2x-1}{(x^2-1)(x^2+1)}\] Le trinôme \(x^2-2x-1\) s’annule sur \(I\) en \(x_0 = 1+\sqrt{2}\) et on en déduit que \(g\) est croissante sur \(]1, x_0]\) puis décroissante sur \([x_0,+\infty[\).

Calcul de primitives et d’intégrales

Intégration par parties

(Méthode d’intégration par parties).
Soit \(I\) un intervalle de \(\mathbb{R}\). On suppose que :
  1. \(u\) et \(v\) des fonctions de classe \(\mathcal{C}^{1}\) sur \(I\).

alors \[\boxed{\int_{a}^{b} u'\left(t\right)v\left(t\right)\,\textrm{d}t=\left[{u\left(t\right)v\left(t\right)}\right]_{a}^{b}- \int_{a}^{b} u\left(t\right)v'\left(t\right)\,\textrm{d}t}\]
Par opérations sur les fonctions de classe \(\mathcal{C}^{1}\) sur \(I\), la fonction \(uv\) est de classe \(\mathcal{C}^{1}\) sur \(I\). D’après le théorème fondamental deuxième forme, \[\begin{aligned} \left(uv\right)\left(b\right)-\left(uv\right)\left(a\right)=\int_{a}^{b} \left(uv\right)'(t)\,\textrm{d}t =\int_{a}^{b} \left(u'v\right)(t) + \left(uv'\right)(t)\,\textrm{d}t =\int_{a}^{b} \left(u'v\right)(t) \,\textrm{d}t + \int_{a}^{b} \left(uv'\right)(t)\,\textrm{d}t \end{aligned}\]
Application au calcul de primitive. Dans un calcul de primitive, la formule d’intégration par parties s’écrit \[\int_{ }^{ } u'\left(t\right)v\left(t\right)\,\textrm{d}t=u\left(t\right)v\left(t\right)- \int_{ }^{ } u\left(t\right)v'\left(t\right)\,\textrm{d}t\]
On consultera la partie [AnnexeB_int_par_parties] page [AnnexeB_int_par_parties] pour apprendre à utiliser cette technique.

Changement de variables

(Changement de variable).
Soient \(I\) un intervalle de \(\mathbb{R}\) et \(f:I\rightarrow \mathbb{R}\) une application continue sur \(I\). Soient \(\left(\alpha,\beta\right) \in \mathbb{R}^2\) tel que \(\alpha <\beta\) et \(\varphi:\left[\alpha,\beta\right] \rightarrow I\) de classe \(\mathcal{C}^{1}\) sur le segment \(\left[\alpha,\beta\right]\) alors \[\boxed{\int_{\varphi\left(\alpha\right)}^{\varphi\left(\beta\right)} f\left(t\right)\,\textrm{d}t = \int_{\alpha}^{\beta} f\left(\varphi\left(u\right)\right)\varphi'\left(u\right)\,\textrm{d}u}\]
Comme \(f\) est continue sur \(I\), elle possède une primitive \(F\) sur \(I\) et pour tout \(x_0,x_1\in I\), on a \(\int_{x_0}^{x_1} f\left(t\right)\,\textrm{d}t=F\left(x_1\right)-F\left(x_0\right)\). En particulier, comme \(\varphi\left(\alpha\right), \varphi\left(\beta\right) \in I\), on a \(\int_{\varphi\left(\alpha\right)}^{\varphi\left(\beta\right)} f\left(t\right)\,\textrm{d}t=F\left(\varphi\left(\beta\right)\right)-F\left(\varphi\left(\alpha\right)\right)\). Par ailleurs, \(F\circ \varphi\) est de classe \(\mathcal{C}^{1}\) sur \(\left[\alpha,\beta\right]\) comme composée d’applications de classes \(\mathcal{C}^{1}\) sur \(\left[\alpha,\beta\right]\). En appliquant le théorème fondamental deuxième forme, on obtient \[\begin{aligned} \int_{\varphi\left(\alpha\right)}^{\varphi\left(\beta\right)} f\left(t\right)\,\textrm{d}t=F\left(\varphi\left(\beta\right)\right)-F\left(\varphi\left(\alpha\right)\right)=\int_{\alpha}^{\beta} \left(F\circ \varphi\right)'\left(u\right)\,\textrm{d}u=\int_{\alpha}^{\beta} \varphi'\left(u\right)F'\left( \varphi\left(u\right)\right)\,\textrm{d}u = \int_{\alpha}^{\beta} \varphi'\left(u\right)f\left( \varphi\left(u\right)\right)\,\textrm{d}u \end{aligned}\]
(Changement de variable dans un calcul d’intégrale).
  1. On vérifie que \(\varphi:\left[\alpha,\beta\right] \rightarrow I\) est de classe \(\mathcal{C}^{1}\) sur le segment \(\left[\alpha,\beta\right]\) et que \(\varphi\left(\alpha\right)=a\), \(\varphi\left(\beta\right)=b\).

  2. On pose \(\begin{cases} x=\varphi\left(t\right)\newlinedx=\varphi'\left(t\right)dt \end{cases}\)

  3. On écrit \(\int_{a}^{b} f\left(u\right)\,\textrm{d}u = \int_{\alpha}^{\beta} f\left(\varphi\left(t\right)\right)\varphi'\left(t\right)\,\textrm{d}t\)

  • Calculons \(I=\int_{0}^{1} \sqrt{1-t^2}\,\textrm{d}t\) en utilisant le changement de variable \(t=\sin u\) : \[\begin{aligned} I=\int_{0}^{1} \sqrt{1-t^2}\,\textrm{d}t&=& \int_{0}^{{\scriptstyle\pi\over\scriptstyle 2}} \sqrt{1-\sin^2 u \cos u}\,\textrm{d}u\\ &=& \int_{0}^{{\scriptstyle\pi\over\scriptstyle 2}} \cos^2 u\,\textrm{d}u \textrm{ car $\cos$ est positif sur $\left[0,\dfrac{\pi}{2}\right]$}\\ &=& \int_{0}^{{\scriptstyle\pi\over\scriptstyle 2}} \dfrac{1+\cos 2u}{2}\,\textrm{d}u=\left[\dfrac{u}{2}+\dfrac{\sin 2u}{4}\right]_0^{{\scriptstyle\pi\over\scriptstyle 2}}=\dfrac{\pi}{4} \end{aligned}\] N’aurions-nous pas pu obtenir ce résultat sans calcul ? (Représenter la courbe d’équation \(y = \sqrt{1-x^2}\) …)

  • Calculons \(J=\int_{0}^{\ln \sqrt{3}} \dfrac{e^x}{1+e^{2x}}\,\textrm{d}x\) en utilisant le changement de variable \(u=e^x\) (on a donc \(x=\ln u\)). \[\begin{aligned} J=\int_{0}^{\ln \sqrt{3}} \dfrac{e^x}{1+e^{2x}}\,\textrm{d}x&=&\int_{1}^{e^{\sqrt 3}} \dfrac{u}{1+u^2}\dfrac{1}{u}\,\textrm{d}u\\ &=&\int_{1}^{e^{\sqrt 3}} \dfrac{1}{1+u^2}\,\textrm{d}u\newline &=&\left[\operatorname{arctan} u\right]_1^{\sqrt 3}=\dfrac{\pi}{3}-\dfrac{\pi}{4}=\dfrac{\pi}{12} \end{aligned}\]

Pour calculer une intégrale du type \(\int_a^bf(x^n)\dfrac{\mathrm{ \;d}x}{x}\), effectuer le changement de variables \(y=x^n\).

Changement de variable affine

L’utilisation d’un changement de variable affine permet souvent sans calcul d’intégrale, de prouver des propriétés graphiquement évidentes.

(Intégrale d’une fonction périodique).
Soit \(f\) une fonction continue par morceaux sur \(\mathbb{R}\), \(T\)-périodique. Soit \(\left(a,b\right)\in \mathbb{R}^2\) tel que \(a<b\). Alors : \[\boxed{\int_{a}^{a+T} f\left(x\right)\,\textrm{d}x= \int_{b}^{b+T} f\left(x\right)\,\textrm{d}x}\] \[\boxed{\int_{a}^{b} f\left(x\right)\,\textrm{d}x= \int_{a+T}^{b+T} f\left(x\right)\,\textrm{d}x}\]
  • Avec le changement de variables \(\begin{cases} t&=u-T\\ du&=dt \end{cases}\), on obtient \(\int_{a+T}^{b+T} f\left(t\right)\,\textrm{d}t= \int_{a}^{b} f\left(u-T\right)\,\textrm{d}u= \int_{a}^{b} f\left(t\right)\,\textrm{d}t\) car \(f\) est \(T\) périodique.

  • Avec la relation de Chasles, \(\int_{a}^{a+T} f\left(t\right)\,\textrm{d}t= \int_{a}^{b} f\left(t\right)\,\textrm{d}t+\int_{b}^{b+T} f\left(t\right)\,\textrm{d}t+\int_{b+T}^{a+T} f\left(t\right)\,\textrm{d}t\). En appliquant l’égalité précédente, on obtient \(\int_{a}^{b} f\left(t\right)\,\textrm{d}t + \int_{b+T}^{a+T} f\left(t\right)\,\textrm{d}t=0\) d’où le résultat.

Dans le cas où la fonction \(f\) est continue sur \(\mathbb{R}\), on peut retrouver ce résultat à l’aide du théorème fondamental. Considérons la fonction \[g : \left\{ \begin{array}{ccl} \mathbb{R} & \longrightarrow & \mathbb{R} \newline x & \longmapsto & \displaystyle{\int_{x}^{x+T}} f(t)\mathrm{ \;d}t \end{array} \right.\] Elle est dérivable sur \(\mathbb{R}\) et pour \(x \in \mathbb{R}\), \(g'(x) = f(x+T) - f(x) = 0\). La fonction est donc constante et on retrouve le résultat.
(Intégrale d’une fonction paire ou impaire).
Soit \(a> 0\) et \(f\) une fonction continue par morceaux sur le segment \(\left[-a,a\right]\).
  • Si \(f\) est paire, \[\boxed{\int_{-a}^{0} f\left(x\right)\,\textrm{d}x=\int_{0}^{a} f\left(x\right)\,\textrm{d}x}\] En particulier \[\boxed{\int_{-a}^{a} f\left(x\right)\,\textrm{d}x=2\int_{0}^{a} f\left(x\right)\,\textrm{d}x}\]

  • Si \(f\) est impaire, \[\boxed{\int_{-a}^{0} f\left(x\right)\,\textrm{d}x=-\int_{0}^{a} f\left(x\right)\,\textrm{d}x}\] En particulier \[\boxed{\int_{-a}^{a} f\left(x\right)\,\textrm{d}x=0}\]

Par application de la relation de Chasles, on a \(\int_{-a}^{a} f\left(x\right)\,\textrm{d}x = \int_{-a}^{0} f\left(x\right)\,\textrm{d}x+ \int_{0}^{a} f\left(x\right)\,\textrm{d}x\) Par le changement de variable \(\begin{cases} u&=-x\newline du&=-dx \end{cases}\), on obtient \(\int_{-a}^{0} f\left(x\right)\,\textrm{d}x = -\int_{a}^{0} f\left(-u\right)\,\textrm{d}u = \int_{0}^{a} f\left(-u\right)\,\textrm{d}u\)
  • Supposons que \(f\) est paire. On a alors \(\int_{0}^{a} f\left(-u\right)\,\textrm{d}u = \int_{0}^{a} f\left(u\right)\,\textrm{d}u\) et donc \(\int_{-a}^{a} f\left(x\right)\,\textrm{d}x=2\int_{0}^{a} f\left(x\right)\,\textrm{d}x\).

  • Supposons que \(f\) est impaire. On a alors \(\int_{0}^{a} f\left(-u\right)\,\textrm{d}u = -\int_{0}^{a} f\left(u\right)\,\textrm{d}u\) et donc \(\int_{-a}^{a} f\left(x\right)\,\textrm{d}x=0\).

Le changement de variable \(\varphi: \left\{ \begin{array}{ccl} \left[0,1\right] & \longrightarrow & \left[a,b\right] \newline t & \longmapsto & a+\left(b-a\right)t \end{array} \right.\) permet de transformer une intégrale sur le segment \(\left[a,b\right]\) en une intégrale sur le segment \(\left[0,1\right]\) : \[\int_{a}^{b} f\left(u\right)\,\textrm{d}u = \left(b-a\right) \int_{0}^{1} f\left(a+\left(b-a\right)t\right)\,\textrm{d}t\]

Étude d’une fonction définie par une intégrale

Nous allons résoudre l’exercice suivant, très typique des concours :

(2).
Soit \(f\) la fonction donnée par \(x\mapsto \int_{x}^{2x} \dfrac{e^{-t}}{t}\,\textrm{d}t\).
  1. Montrer que \(f\) est définie sur \(\mathbb{R}^*\).

  2. Prouver que : \[\forall x\in \mathbb{R}_+^*,\quad e^{-2x}\ln 2 \leqslant f\left(x\right) \leqslant e^{-x}\ln 2\] Établir une inégalité analogue sur \(\mathbb{R}_-^*\).

  3. En déduire que l’on peut prolonger \(f\) par continuité en \(0\) et étudier le comportement de \(f\) à l’infini. On appelle encore \(f\) la fonction ainsi prolongée.

  4. Montrer que \(f\) est dérivable sur \(\mathbb{R}^*\) et calculer sa dérivée.

  5. Étudier la dérivabilité de \(f\) en \(0\) et déterminer la position de son graphe par rapport à la tangente en ce point.

  6. Étudier les variations de \(f\) et tracer son graphe.

  1. Notons \(h: \left\{ \begin{array}{ccl} \mathbb{R}^* & \longrightarrow & \mathbb{R} \newline t & \longmapsto & \dfrac{e^{-t}}{t} \end{array} \right.\). Soit \(x\in\mathbb{R}^*\). \(h\) est continue sur le segment \(\left[x,2x\right]\) et par conséquent admet une intégrale sur ce segment. On en déduit que \(f\) est bien définie sur \(\mathbb{R}^*\).

  2. Soit \(x\in \mathbb{R}_+^*\). La fonction \(t \mapsto e^{-t}\) est décroissante sur \(\mathbb{R}_+^*\). Par conséquent : \(\forall t\in \left[x,2x\right],\quad e^{-2x}\leqslant e^{-t} \leqslant e^{-x}\) et donc : \[\int_{x}^{2x} \dfrac{e^{-2x}}{t}\,\textrm{d}t \leqslant\int_{x}^{2x} \dfrac{e^{-t}}{t}\,\textrm{d}t \leqslant\int_{x}^{2x} \dfrac{e^{-x}}{t}\,\textrm{d}t\] ce qui s’écrit : \[e^{-2x} \int_{x}^{2x} \dfrac{1}{t}\,\textrm{d}t \leqslant\int_{x}^{2x} \dfrac{e^{-t}}{t}\,\textrm{d}t \leqslant e^{-x}\int_{x}^{2x} \dfrac{1}{t}\,\textrm{d}t\] ou encore : \[e^{-2x} \left[\ln t\right]_{x}^{2x} \leqslant\int_{x}^{2x} \dfrac{e^{-t}}{t}\,\textrm{d}t \leqslant e^{-x}\left[\ln t\right]_{x}^{2x}\] d’où il vient : \[\boxed{ e^{-2x} \ln 2 \leqslant\int_{x}^{2x} \dfrac{e^{-t}}{t}\,\textrm{d}t \leqslant e^{-x}\ln 2}\] On montre de même que si \(x\in\mathbb{R}_-^*\), alors : \[\boxed{ e^{-x} \ln 2 \leqslant\int_{x}^{2x} \dfrac{e^{-t}}{t}\,\textrm{d}t \leqslant e^{-2x}\ln 2}\]

  3. On a : \(\displaystyle{\lim_{x \rightarrow 0}e^{-2x}\ln 2} = \displaystyle{\lim_{x \rightarrow 0}e^{-x}\ln 2} =\ln 2\). Utilisant les deux inégalités précédentes et appliquant le théorème des gendarmes, on en déduit que : \(\boxed{\displaystyle{\lim_{x \rightarrow 0}f\left(x\right)}=\ln 2}\). \(f\) est donc prolongeable par continuité en \(0\). On a de plus :

    • \(\displaystyle{\lim_{x \rightarrow +\infty}e^{-2x}\ln 2} = \displaystyle{\lim_{x \rightarrow 0}e^{-x}\ln 2} =0\), donc, toujours d’après le théorème des gendarmes, \(\boxed{\displaystyle{\lim_{x \rightarrow +\infty}f\left(x\right)} =0}\).

    • \(\displaystyle{\lim_{x \rightarrow -\infty}e^{-x}\ln 2} = +\infty\), donc, d’après le théorème des gendarmes, \(\boxed{\displaystyle{\lim_{x \rightarrow -\infty}f\left(x\right)} =+\infty}\).

  4. La fonction \(h\) est continue sur \(\mathbb{R}_+^*\) et admet donc une primitive \(H\) de classe \(\mathcal{C}^{1}\) sur \(\mathbb{R}_+^*\) . On peut alors écrire,pour tout \(x\in \mathbb{R}_+^*\) : \(f\left(x\right) = H\left(2x\right)-H\left(x\right)\) et on en déduit que \(f\) est de classe \(\mathcal{C}^{1}\) sur \(\mathbb{R}_+^*\) comme différence et composée de fonctions de classes \(\mathcal{C}^{1}\) sur \(\mathbb{R}_+^*\). De plus, si \(x\in\mathbb{R}_+^*\), on a : \(f'\left(x\right)=2H'\left(2x\right)-H'\left(x\right) = 2 h\left(2x\right)-h\left(x\right)\) donc : \[\boxed{f'\left(x\right)= \dfrac{e^{-2x}-e^{-x}}{x}}\] On prouve de même que \(f\) est dérivable sur \(\mathbb{R}_-^*\) et que si \(x\in\mathbb{R}_-^*\) alors \(f'\left(x\right)= \dfrac{e^{-2x}-e^{-x}}{x}\). De plus :

    • si \(x\in\mathbb{R}_+^*\), on a : \(x \leqslant 2x \Rightarrow -2x \leqslant-x \Rightarrow e^{-2x} \leqslant e^{-x} \Rightarrow e^{-2x}- e^{-x} \leqslant 0 \Rightarrow \dfrac{e^{-2x}-e^{-x}}{x} \leqslant 0 \Rightarrow f'\left(x\right)\leqslant 0\).

    • si \(x\in\mathbb{R}^*_-\), on a : \(2x \leqslant x \Rightarrow -x \leqslant-2x \Rightarrow e^{2x} \leqslant e^{-2x} \Rightarrow e^{-2x}- e^{-x} \geqslant 0 \Rightarrow \dfrac{e^{-2x}-e^{-x}}{x} \leqslant 0 \Rightarrow f'\left(x\right)\leqslant 0\).

  5. Montrons maintenant que \(f\) est dérivable en \(0\); Soit \(t\in \mathbb{R}^*\). On a, par produit et quotient d"équivalents : \[f'\left(t\right) =\dfrac{e^{-2t}-e^{-t}}{t}=e^{-t}\dfrac{e^{-t}-1}{t}\underset{t\rightarrow 0}{\sim} -e^{-t}\] par conséquent \(f'\left(t\right) \xrightarrow[t\rightarrow 0]{} -1\). Comme \(f\) est continue sur \(\mathbb{R}\), que \(f\) est dérivable sur \(\mathbb{R}^*\) et que \(f'\left(t\right)\xrightarrow[t\rightarrow 0]{} -1\), on peut appliquer le théorème du prolongement dérivable [prolongement_derivable], et affirmer que \(f\) est dérivable en \(0\). De plus :\(f'\left(0\right)=-1\). Une équation de la tangente au graphe de \(f\) en \(0\) est donc : \(y=-x+\ln 2\). De plus : \[f\left(x\right)-\left(-x+\ln 2\right) = \int_{x}^{2x} \dfrac{e^{-t}+t-1}{t}\,\textrm{d}t\] et une étude rapide montre que \(t\mapsto \dfrac{e^{-t}+t-1}{t}\) est positive si \(t\geqslant 0\) et négative si \(t<0\). Par conséquent, si \(x> 0\), \(f\left(x\right)-\left(-x+\ln 2\right) \geqslant 0\) et la tangente au graphe de \(f\) est en dessous du graphe de \(f\) si \(x>0\). Si \(x<0\), on obtient le même résultat.

  6. On en déduit les variations de \(f\) sur \(\mathbb{R}\) ainsi que son graphe :

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Formules de Taylor

Formule de Taylor avec reste intégral

Soit \(f\) une fonction de classe \(\mathcal{C}^{1}\) sur un intervalle \(I\) et un réel \(a \in I\). Partons du théorème fondamental deuxième forme pour écrire pour \(x \in I\), \[f(x) = f(a) + \displaystyle{\int_{a}^{x}} f'(t)\mathrm{ \;d}t\] Si la fonction \(f\) est de classe \(\mathcal{C}^{2}\) sur \(I\), on peut effectuer une intégration par parties \[\left\{ \begin{array}{ll} u(x) = f'(t) & u'(x) = f''(t) \\[0.3cm] v'(x) = 1 & v(x) = t \end{array} \right. \quad u, v \textrm{ sont de classe } \mathcal{C}^1\] \[f(x) = f(a) + \Bigl[ tf'(t) \Bigr]_{a}^{x} - \displaystyle{\int_{a}^{x}} tf''(t)\mathrm{ \;d}t = f(a) + xf'(x) - a f'(a) - \displaystyle{\int_{a}^{x}} tf''(t)\mathrm{ \;d}t\] On se rend compte qu’il est plus intéressant de considérer la primitive de \(1\) qui s’annule en \(x\) de telle façon à ne faire intervenir que les valeurs de \(f\) en \(a\) : \[\left\{ \begin{array}{ll} u(x) = f'(t) & u'(x) = f''(t) \newline[0.3cm] v'(x) = 1 & v(x) = -(x-t) \end{array} \right. \quad u, v \textrm{ sont de classe } \mathcal{C}^1\] \[f(x) = f(a) + \Bigl[ -(x-t)f'(t) \Bigr]_{a}^{x} + \displaystyle{\int_{a}^{x}} (x-t)f''(t)\mathrm{ \;d}t = f(a) + (x-a)f'(a) + \displaystyle{\int_{a}^{x}} (x-t)f''(t)\mathrm{ \;d}t\]

Si la fonction \(f\) est de classe \(\mathcal{C}^{n+1}\), on peut effectuer \(n\) intégrations par parties successives pour trouver la formule suivante.

(Formule de Taylor avec reste intégral).
Soit \(f\) une fonction de classe \(\mathcal{C}^{n+1}\) sur un intervalle \(I\) de \(\mathbb{R}\). Si \(\left(a,x\right)\in I^2\). Alors : \[\boxed{f\left(x\right)=\sum_{k=0}^n \dfrac{f^{(k)}\left(a\right)}{k!}\left(x-a\right)^k+ \int_{a}^{x} \dfrac{\left(x-t\right)^n}{n!}f^{(n+1)}\left(t\right)\,\textrm{d}t}\]
  • Le polynôme \[T_n\left(x\right) = \sum_{k=0}^n \dfrac{f^{(k)}\left(a\right)}{k!}\left(x-a\right)^k = f\left(a\right) + \dfrac{\left(x-a\right)}{1!}f'\left(a\right) + \ldots +\dfrac{\left(x-a\right)^n}{n!} f^{\left(n\right)}\left(a\right)\] est appelé polynôme de Taylor de \(f\) de degré \(n\).

  • La fonction définie sur \(I\) par \[R_n\left(x\right)=\int_{a}^{x} \dfrac{\left(x-t\right)^n}{n!}f^{(n+1)}\left(t\right)\,\textrm{d}t\] est appelée reste intégral.

C’est une simple récurrence. Pour \(n = 0\), la formule est le théorème fondamental deuxième forme et pour passer de \(n\) à \(n+1\), il suffit d’effectuer une intégration par partie de \(R_{n-1}(x)\) en primitivant \((x-t)^n/n!\) en \(-(x-t)^{n+1}/(n+1)!\).
Lorsque nous demandons à nos étudiants l’idée de la démonstration de la formule de Taylor intégrale, toute la classe s’exclame : par récurrence  ! Une récurrence n’est pas une idée de démonstration, simplement une technique de rédaction. Ici, les idées sont :
  1. Le théorème fondamental deuxième forme.

  2. Intégrer par parties en primitivant \(1\) pour que les primitives successives s’annulent en \(x\).

Les examinateurs de concours se plaignent chaque année des candidats qui sont incapables de retrouver cette formule sans se tromper. En cas de doute, faites le calcul de l’introduction en intégrant par parties le théorème fondamental, \[f(x) = f(a) + (x-a)f'(a) + \displaystyle{\int_{a}^{x}} (x-a)f''(t)\mathrm{ \;d}t\] et à partir de là vous retrouvez sans problème la forme générale.
  • Formule de Taylor avec reste intégral pour la fonction cosinus à l’ordre \(2\) en \(0\) \[\forall x\in \mathbb{R}, \quad \cos x = 1 - \dfrac{x^2}{2}+ \int_{0}^{x} \dfrac{\left(x-t\right)^2}{2!}\sin\left(t\right)\,\textrm{d}t\]

  • Formule de Taylor avec reste intégral pour la fonction exponentielle à l’ordre \(n\), \(n\in \mathbb{N}\), en \(0\) : \[\forall x\in \mathbb{R}, \quad \exp x = 1 + x + \dfrac{x^2}{2!}+ \ldots + \dfrac{x^n}{n!} + \int_{0}^{x} \dfrac{\left(x-t\right)^n}{n!}\exp\left(t\right)\,\textrm{d}t\]

Effectuant le changement de variable \(t=a+\left(x-a\right)u\), on peut exprimer le reste intégral de la façon suivante \[\begin{aligned} R_n\left(x\right)&=&\int_{a}^{x} \dfrac{\left(x-t\right)^n}{n!}f^{(n+1)}\left(t\right)\,\textrm{d}t \\ &=& \int_{0}^{1} \left(x-a\right)^{n+1} \dfrac{\left(1-u\right)^n}{n!}f^{\left(n+1\right) }\left(a+\left(x-a\right)u\right)\,\textrm{d}u\newline &=& \left(x-a\right)^{n+1} \int_{0}^{1} \dfrac{\left(1-u\right)^n}{n!}f^{\left(n+1\right) }\left(a+\left(x-a\right)u\right)\,\textrm{d}u \end{aligned}\]

Inégalité de Taylor-Lagrange

(Inégalité de Taylor-Lagrange).
Soit \(f\) une fonction de classe \(\mathcal{C}^{n+1}\) sur un intervalle \(I\) de \(\mathbb{R}\) et soit \(a\in I\). Si \(x\in I\), on peut, d’après le théorème précédent [Formule_de_Taylor], écrire \(f\left(x\right)\) sous la forme \[\begin{aligned} f\left(x\right)&=&\sum_{k=0}^n \dfrac{f^{(k)}\left(a\right)}{k!}\left(x-a\right)^k + \int_{a}^{x} \dfrac{\left(x-t\right)^n}{n!}f^{(n+1)}\left(t\right)\,\textrm{d}t\newline &=&T_n\left(x\right) + R_n\left(x\right) \end{aligned}\] On a alors \[\begin{aligned} \boxed{\left|f\left(x\right)-T_n\left(x\right)\right| = \left|R_n\left(x\right)\right| \leqslant\dfrac{\left|x-a\right|^{n+1}}{\left(n+1\right)!} M_{n+1}} \end{aligned}\]\(M_{n+1}\) est un majorant de \(\left|f^{\left(n+1\right)}\right|\) sur \(\left[a,x\right]\) (qui existe car \(f^{\left(n+1\right)}\) est continue sur le segment \(\left[a,x\right]\))
Par application de la formule de Taylor avec reste intégral [Formule_de_Taylor], on a, pour tout \(a,x\in I\), si \(a\leqslant x\), \[\begin{aligned} \lvert R_n(x) \rvert &=& \left|\int_{a}^{x} \dfrac{\left(x-t\right)^n}{n!}f^{(n+1)}\left(t\right)\,\textrm{d}t\right|\\ &\leqslant& \sup_{t\in\left[a,x\right]} \left|f^{(n+1)}\left(t\right)\right| \int_{a}^{x} \dfrac{\left|x-t\right|^{n}}{n!}\,\textrm{d}t \\ &\leqslant& M_{n+1}\int_{a}^{x} \dfrac{\left(x-t\right)^{n}}{n!}\,\textrm{d}t\\ &\leqslant& M_{n+1}\left[-\dfrac{\left(x-t\right)^{n+1}}{\left(n+1\right)!}\right]_a^x\\ &\leqslant& M_{n+1} \dfrac{\left|x-a\right|^{n+1}}{\left(n+1\right)!} \end{aligned}\] La démonstration est similaire lorsque \(x\leqslant a\) (ne pas oublier d’inverser les bornes).

Brook Taylor, né le 18 août 1685 à Edmonton en Angleterre et mort le 29 décembre 1731 à Londres

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Mathématicien Anglais. Brook Taylor est issu d’une famille aisée. Il reçoit sa première éducation de précepteurs puis intègre l’université de Cambridge dont il ressort diplomé en \(1709\) après des études en mathématiques. C’est à John Machin, dont il fut l’élève, qu’il doit son entrée en \(1712\) à la Royal Society. Son premier travail concernait l’étude de la deuxième loi de Kepler sur le mouvement des planètes. Il devient secrétaire de la Royal Society en \(1714\) et participe au comité chargé de départager Newton et Leibniz à propos de la paternité de l’invention du calcul infinitésimal. On mesurera l’impartialité de ce comité à l’admiration que Taylor portait à Newton ... Il publia deux livres de mathématiques la même année \(1715\) Methodus incrementorum directa and reversedet Linear Perspective. On trouve dans le premier la formule qui porte son nom mais sans mention du reste et sans que ne soit abordé les problèmes de convergence. Bien que Taylor ait découvert cette formule de manière indépendante, d’autres mathématiciens l’avaient mise en évidence auparavant comme Grégory, Newton, Leibniz et Johann Bernouilli. L’importance de cette formule ne fut perçue que bien plus tard, en \(1772\) par Lagrange qui la promulgua comme principe de base du calcul différentiel. Dans ce même livre, Taylor découvre la formule d’intégration par parties et invente le calcul aux différences finies.
La vie de Taylor ne fut pas heureuse. Son premier mariage, désapprouvé par son père, se termine par la mort de son épouse lors de sa grossesse et de l’enfant qu’elle portait. Son second mariage se termine de manière identique si ce n’est que le bébé survivra. Taylor, très ébranlé, ne survécut que deux ans à sa seconde femme. Ces différents problèmes, ajoutés à l’aridité de ces textes mathématiques, ont fait que le génie de Taylor n’a pas été perçu à sa juste valeur par ses contemporains.

Formule de Taylor-Young

(Formule de Taylor-Young).
Soient \(f\) une fonction de classe \(\mathcal{C}^{n}\) sur un intervalle \(I\) de \(\mathbb{R}\) et \(a\in I\). Il existe une fonction \(\varepsilon\) définie sur \(I\) telle que \[\forall x\in I,\quad f\left(x\right) = T_n(x) + \left(x-a\right)^n \varepsilon\left(x\right)\] avec \(\varepsilon\left(x\right) \xrightarrow[x\rightarrow a]{} 0\). Autrement dit, \[\boxed{\forall x\in I,\quad f\left(x\right) = \sum_{k=0}^n \dfrac{f^{(k)}\left(a\right)}{k!}\left(x-a\right)^k + \underset{x \rightarrow a}{o}\left(\left(x-a\right)^n\right)}\]
Supposons dans un premier temps que la fonction \(f\) est de classe \(\mathcal{C}^{n+1}\) sur \(I\). Considérons un segment inclus dans l’intervalle \(I\) contenant le point \(a\), \(a \in [\alpha, \beta]\). La fonction \(f^{(n+1)}\) étant continue sur ce segment, elle est bornée. Notons \(M = \displaystyle{\sup_{x \in [\alpha, \beta]} \lvert f^{(n+1)}(x) \rvert }\). D’après la formule de Taylor-Lagrange, on majore alors \[\lvert R_n(x) \rvert \leqslant\lvert x-a \rvert ^n \underbrace{\dfrac{M\lvert x-a \rvert }{(n+1)!}}_{\varepsilon(x)}\] et on a bien \(\varepsilon(x) \xrightarrow[x \rightarrow a]{} 0\).

Dans le cas où la fonction \(f\) est uniquement de classe \(\mathcal{C}^{n}\), la démonstration est plus technique. Utilisons la formule de Taylor avec reste intégral à l’ordre \(n-1\) : \[f(x) = T_{n-1}(x) + R_{n-1}(x) \textrm{ où } R_{n-1}(x) = \displaystyle{\int_{a}^{x}} \dfrac{(x-t)^{n-1}}{(n-1)!} f^{(n)}(t)\mathrm{ \;d}t\] Lorsque \(x\) est proche de \(a\), pour \(t \in [a,x]\), \(f(t)\) est proche de \(f(a)\). Mettons en évidence cette approximation : \[R_{n-1}(x) = \displaystyle{\int_{a}^{x}} \dfrac{(x-t)^{n-1}}{(n-1)!} f(a) \mathrm{ \;d}t + \displaystyle{\int_{a}^{x}} \dfrac{(x-t)^{n-1}}{(n-1)!} \left[ f(t)-f(a) \right] \mathrm{ \;d}t = \dfrac{(x-a)^n}{n!} f(a) + \theta(x)\] Il ne reste qu’à vérifier que \(\theta(x) = \underset{ }{\mathrm{o}}((x-a)^n)\) au voisinage du point \(a\). Soit \(\varepsilon> 0\). Puisque \(f^{(n)}\) est continue au point \(a\), il existe \(\eta > 0\) tel que pour \(t \in I\), \(\lvert t-a \rvert \leqslant\eta \Rightarrow \lvert f(t)-f(a) \rvert \leqslant\varepsilon\). Soit \(x \in I\) tel que \(\lvert x-a \rvert \leqslant\eta\). Puisque \(\forall t \in [a, x]\), \(\lvert t-a \rvert \leqslant \eta\), on majore l’intégrale (prenons \(x > a\) pour simplifier) \[\lvert \theta(x) \rvert \leqslant\displaystyle{\int_{a}^{x}} \dfrac{(x-t)^{n-1}}{(n-1)!} \lvert f(t)-f(a) \rvert \mathrm{ \;d}t \leqslant\varepsilon\displaystyle{\int_{a}^{x}} \dfrac{(x-t)^{n-1}}{(n-1)!} = \varepsilon\dfrac{(x-a)^n}{n!}\] Nous avons donc montré que \(\lvert \theta(x)/(x-a)^n \rvert \leqslant\varepsilon\) et donc que \(\theta(x)/(x-a)^n \xrightarrow[x \rightarrow a]{} 0\).

Cette formule, appliquée à l’ordre \(5\) en \(0\) pour la fonction \(\sin\) permet d’écrire \[\forall x\in \mathbb{R}, \quad \sin x = x - \dfrac{x^3}{6} + \dfrac{x^5}{120}+ \underset{x \rightarrow 0}{o}\left(x^5\right)\] On approxime ainsi, dans un voisinage de \(0\) la fonction \(\sin\) par un polynôme de degré \(5\). Plus l’ordre utilisé est élevé, meilleure est l’approximation obtenue. On s’en convaincra en étudiant les graphes ci dessous.

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Multimédia: Tracé de \(\sin\), des polynômes de Taylor \(T_n\) en fonction de \(n\) et voir que l’approximation est locale en \(0\).

Utilisation des trois formules de Taylor

Il est important dans les exercices de savoir choisir son outil. Quand utiliser une formule de Taylor-Young ? Une inégalité de Taylor-Lagrange ?

  • La formule de Taylor-Young fournit une approximation locale d’une fonction \(f\) au voisinage d’un point \(a\) par un polynôme \(T_n\), le polynôme de Taylor.

  • L’inégalité de Taylor-Lagrange fournit une majoration globale du reste \(R_n\) de cette approximation sur un segment \([a, x]\), même lorsque \(x\) est éloigné de \(a\).

  • La formule de Taylor-intégrale est la plus précise et donne explicitement le reste \(R_n\) sous forme d’une intégrale. Les deux autres formules en sont une conséquence. En première année, on ne l’utilise pas beaucoup, mais elle est importante en deuxième année.

Déterminer \(\lim_{x \rightarrow 0} \dfrac{\mathop{\mathrm{sh}}(x) - \sin(x)}{x^3}\). Les équivalents usuels ne suffisent pas ici puisque \(\sin x \underset{x \rightarrow 0}{\sim} x\) et \(\mathop{\mathrm{sh}}x \underset{x \rightarrow 0}{\sim} x\) et on ne peut pas sommer ces équivalents. Nous avons besoin du comportement local des fonctions \(\mathop{\mathrm{sh}}\) et \(\sin\) au voisinage du point \(0\). Utilisons la formule de Taylor-Young à l’ordre \(3\). Les dérivées successives de ces fonctions en zéro sont simples à calculer et on obtient \[\mathop{\mathrm{sh}}(x) = x + x^3/3! + \underset{ }{\mathrm{o}}(x^3) \quad \sin(x) = x-x^3/3! + \underset{ }{\mathrm{o}}(x^3)\] Ces formule sont des égalités et on peut les sommer pour trouver que \[\mathop{\mathrm{sh}}(x) - \sin(x) = x^3/3 + \underset{ }{\mathrm{o}}(x^3)\] d’où \([\mathop{\mathrm{sh}}(x)-\sin(x)]/x^3 = 1/3 + \underset{ }{\mathrm{o}}(1) \xrightarrow[x \rightarrow 0]{} 1/3\).
Soit une fonction \(f\) de classe \(\mathcal{C}^{\infty}\) sur \(\mathbb{R}\) telle que \[\forall (x,h) \in \mathbb{R} [2], \quad f(x+h)f(x-h)=(f(x))^2\] Montrons qu’alors \(\forall x\in \mathbb{R}\), \(f''(x)f(x)=(f'(x))^2\). Écrivons la formule de Taylor-Young pour la fonction \(f\) entre \(x\) et \(x+\theta\). \[f(x+\theta)=f(x)+\theta f'(x) + \dfrac{\theta^2}{2}f''(x) + \theta^2\varepsilon(\theta) \quad(\varepsilon(\theta) \xrightarrow[\theta \rightarrow 0]{} 0 )\] Si \(h\neq 0\), en prenant \(\theta = h\) et \(\theta = -h\), on trouve que \[f(x)^2 = f(x+h)f(x-h)=\left[ f(x)+hf'(x) +\dfrac{h^2}{2}f''(x)+h^2\varepsilon(h)\right]\left[ f(x)-hf'(x)+\dfrac{h^2}{2}f''(x)+ h^2\varepsilon(-h) \right]\] En développant et en ordonnant par rapport aux puissances de \(h\), on trouve que \[0 = h^2 \left[ -{(f')}^2(x)+f(x)f''(x) \right] +h^2 \varphi(h)\] avec \(\varphi(h)\xrightarrow[h\rightarrow 0]{} 0\). En divisant par \(h^2\) et en faisant tendre \(h\) vers \(0\), on obtient le résultat. L’idée était d’utiliser la relation de l’énoncé en faisant tendre \(h\) vers \(0\), d’où l’utilisation de la formule de Taylor-Young.
Étudier la limite en \(0\) de la fonction définie par \[F(x) = \dfrac{1}{x}\displaystyle{\int_{x}^{2x}} \dfrac{1-\cos t}{t^2} \mathrm{ \;d}t\] Il nous faut une approximation de la fonction définie par \(f(t) = \cos t\) au voisinage de zéro. Utilisons une formule de Taylor à l’ordre \(2\). \[\cos t = 1 - \dfrac{t^2}{2} + R_2(t)\] On en tire que \((1-\cos t)/t^2 = 1/2 - R_2(t) / t\). Puisque \(R_2(t) = \cos t - 1 + t^2/2\), la fonction \(R_2\) est continue sur \([x, 2x]\) et on peut intégrer : \[F(x) = \underbrace{\dfrac{1}{2x} \displaystyle{\int_{x}^{2x}} \mathrm{ \;d}t}_{=1/2} - \underbrace{\dfrac{1}{x} \displaystyle{\int_{x}^{2x}} \dfrac{ R_2(t)}{t} \mathrm{ \;d}t}_{\theta(x)}\] Il nous faut traiter le reste \(\theta(x)\) de notre approximation. Avec l’inégalité de Taylor-Lagrange, on sait que \[\lvert R_2(t) \rvert \leqslant\dfrac{t^3}{3!} \displaystyle{\sup_{u \in [0, t]} \lvert f^{(3)}(u) \rvert } \leqslant\dfrac{t^3}{6}\] (puisque \(\lvert f^{(3)}(t) \rvert = \lvert \cos t \rvert \leqslant 1\)). Alors, \[\lvert \theta(x) \rvert \leqslant\dfrac{1}{x} \displaystyle{\int_{x}^{2x}} \dfrac{\lvert R_2(t) \rvert }{t^2} \leqslant\dfrac{1}{6x} \displaystyle{\int_{x}^{2x}} t\mathrm{ \;d}t = \dfrac{x}{4} \xrightarrow[x \rightarrow 0]{} 0\] Par conséquent, \(F(x) \xrightarrow[x \rightarrow 0]{} 1/2\).
Trouvons deux réels \((a,b)\in \mathbb{R} [2]\) tels que \[u_n = \displaystyle{\int_{0}^{1}} (1+x^2)^{1/n} \mathrm{ \;d}x = a + \dfrac{b}{n} + \underset{ }{\mathcal{O}}(\dfrac{1}{n^2})\] Écrivons pour \(x \in [0, 1]\), \((1+x^2)^{1/n} = e^{{\scriptstyle 1\over\scriptstyle n} \ln(1+x^2)}\). Lorsque \(n\) devient grand, le terme dans l’exponentielle tend vers \(0\) à \(x\) fixé. On pourrait utiliser une formule de Taylor-Young pour l’exponentielle, mais le reste s’écrirait à l’aide d’une fonction \(\varepsilon\) qui dépendrait à la fois de \(x\) et de \(n\) sur laquelle nous n’avons pas d’information suffisante pour l’intégrer. Utilisons plutôt l’inégalité de Taylor-Lagrange pour l’exponentielle à l’ordre \(1\) entre \(0\) et \(X\) : \[e^X = 1 + X + R_1(X) \textrm{ avec } \lvert R_1(X) \rvert \leqslant\dfrac{X^2}{2} \displaystyle{\sup_{t\in[0,X]} e^t} \leqslant\dfrac{X^2}{2} e^X\] On en tire que \[u_n = \underbrace{\displaystyle{\int_{0}^{1}} \mathrm{ \;d}x}_{a=1} + \dfrac{1}{n} \underbrace{\displaystyle{\int_{0}^{1}} \ln(1+x^2)\mathrm{ \;d}x}_{b} + \underbrace{\displaystyle{\int_{0}^{1}} R_1\left(\dfrac{1}{n}\ln(1+x^2)\right)\mathrm{ \;d}x}_{\theta_n}\] On calcule \(b\) par parties \[b=\int_0^1 \ln(1+x^2)dx = \left[ x\ln(1+x^2)\right]_0^1 -2\int_0^1 \dfrac{x^2}{1+x^2} dx =\ln 2 - 2 +\int_0^1 \dfrac{dx}{1+x^2} = \boxed{ \ln 2 - 2 + \dfrac{\pi}{4} }\] et il nous reste à majorer grossièrement le reste. \[\lvert \theta_n \rvert \leqslant\dfrac{1}{n^2} \displaystyle{\int_{0}^{1}} \dfrac{\ln^2(1+x^2)}{2}e^{\ln(1+x^2)/n} \mathrm{ \;d}x \leqslant\dfrac{1}{n^2} \displaystyle{\int_{0}^{1}} \dfrac{\ln^2 2}{2} e^{\ln(2)} \leqslant\dfrac{C}{n^2}\]
Soit une fonction \(f\) de classe \(\mathcal{C}^{\infty}\) sur \(\mathbb{R}\). On suppose qu’il existe deux constantes \(C, k > 0\) telles que
  1. \(\forall n \in \mathbb N\), \(f^{(n)}(0) = 0\),

  2. \(\forall x \in \mathbb{R}\)\(\forall n \in \mathbb N\)\(\lvert f^{(n)}(x) \rvert \leqslant Ck^n n!\).

Montrons que \(f\) est la fonction nulle.

  • Nous pouvons écrire une formule de Taylor à tout ordre \(n\) : \(f(x) = R_n(x)\). Notre hypothèse permet de majorer \(\lvert f^{n+1} \rvert\), utilisons donc l’inégalité de Taylor-Lagrange : \[\lvert f(x) \rvert = \lvert R_n(x) \rvert \leqslant\dfrac{\lvert x \rvert ^{n+1}}{(n+1)!} \displaystyle{\sup_{t\in[0, x]} \lvert f^{(n+1)}(t) \rvert } \leqslant C\lvert xk \rvert ^{n+1}\]

  • Si \(x \in ]-1/k, 1/k[\), en notant \(K = \lvert xk \rvert\), \(\lvert K \rvert < 1\) et \(\forall n \in \mathbb N\), \(\lvert f(x) \rvert \leqslant CK^n \xrightarrow[n \rightarrow +\infty]{}0\). On en déduit que \(f\) est nulle sur l’intervalle \(]-1/k, 1/k[\).

  • Considérons la fonction translatée, définie sur \(\mathbb{R}\) par \(g(x) = f(x-1/k)\). Puisque \(f\) ainsi que toutes ses dérivées s’annulent en \(1/k\), pour tout \(n\), \(f^{(n)}(0) = 0\) et comme \(g^{(n)}(x) = f^{(n)}(x-1/k)\), la fonction \(g\) vérifie les mêmes hypothèses que \(f\). Elle est nulle sur \(]-1/k,1/k[\) ce qui montre que \(f\) est nulle sur \(]-1/k,2/k[\). On recommence avec d’autres translatées pour prouver que \(f\) est nulle sur \(\mathbb{R}\) en entier.

Méthode des rectangles, Sommes de Riemann

( Méthode des rectangles).
Soit une fonction \(f\) de classe \(\mathcal{C}^{1}\) sur le segment \([a, b]\). On effectue une subdivision du segment \([a,b]\) de pas constant \(h = (b-a)/n\). On pose pour un entier \(k \in [0, n]\), \(x_k=a+k\dfrac{b-a}{n} = a + kh\). Posons pour un entier \(n\in \mathbb N\), \[R_n= \dfrac{b-a}{n}\sum_{k=0}^{n-1} f(x_k)\] On obtient une majoration de l’erreur commise en approximant l’intégrale \(I\) de la fonction \(f\) sur \([a,b]\) par \(R_n\) : \[\lvert I-R_n \rvert \leqslant\dfrac{(b-a)^2}{2n} M_1\]\(M_1 = \lVert f' \rVert_{\infty} = \displaystyle{\sup_{x \in [a,b]} \lvert f'(t) \rvert }\) (la fonction \(f'\) étant continue sur un segment, elle est bornée).

Commençons par estimer l’erreur sur un petit segment \([x_k, x_{k+1}]\) : \[\varepsilon_{n,k} = \left| \displaystyle{\int_{x_k}^{x_{k+1}}} f(t)\mathrm{ \;d}t - \dfrac{b-a}{n} f(x_k)\right| = \left| \displaystyle{\int_{x_k}^{x_{k+1}}} \left[f(t) - f(x_k)\right]\mathrm{ \;d}t \right| \leqslant \displaystyle{\int_{x_k}^{x_{k+1}}} \lvert f(t)-f(x_k) \rvert \mathrm{ \;d}t\] Puisque la fonction \(f\) est de classe \(\mathcal{C}^{1}\), on peut utiliser le théorème fondamental deuxième forme. Pour \(t \in [x_k, x_{k+1}]\), \[\lvert f(t)-f(x_k) \rvert = \left|\displaystyle{\int_{x_k}^{t}} f'(t)\mathrm{ \;d}t \right| \leqslant\displaystyle{\int_{x_k}^{t}} \lvert f'(t) \rvert \mathrm{ \;d}t \leqslant M_1 (t-x_k)\] En intégrant cette inégalité, on trouve que \[\lvert \varepsilon_{n,k} \rvert \leqslant M_1\displaystyle{\int_{x_k}^{x_{k+1}}} (t-x_k)\mathrm{ \;d}t = M_1 \dfrac{(x_{k+1}-x_k)^2}{2} = M_1 \dfrac{(b-a)^2}{2n^2}\] On en déduit une majoration de l’erreur globale en sommant ces erreurs \(\varepsilon_{n,k}\) \[\lvert I-R_n \rvert = \left| \displaystyle{\sum_{k=0}^{n-1}} \displaystyle{\int_{x_k}^{x_{k+1}}} [f(t)-f(x_k)] \right| \leqslant\displaystyle{\sum_{k=0}^{n-1}} \displaystyle{\int_{x_k}^{x_{k+1}}} \lvert f(t)-f(x_k) \rvert = \displaystyle{\sum_{k=0}^{n-1}} \varepsilon_k \leqslant\dfrac{(b-a)^2}{2n}\]

Dans le cas du segment \([0, 1]\), on obtient le résultat suivant, intéressant pour étudier certaines suites.

( Convergence d’une somme de Riemann).
Soit une fonction \(f\) continue sur le segment \([0,1]\). On définit les suites de termes généraux \[R_n= \dfrac{1}{n} \sum_{k=0}^{n-1} f\left( \dfrac{k}{n} \right) \textrm{ et } T_n= \dfrac{1}{n}\sum_{k=1}^n f\left( \dfrac{k}{n} \right)\] \[R_n \xrightarrow[n \rightarrow +\infty]{}\int_0^1 f(x) \mathrm{ \;d}x \textrm{ et } T_n \xrightarrow[n \rightarrow +\infty]{}\int_0^1 f(x) \mathrm{ \;d}x\]

  • Si la fonction est de classe \(\mathcal{C}^{1}\), le théorème précédent donne le résultat.

  • Supposons que la fonction \(f\) est uniquement continue. On remarque que \(R_n\) représente l’intégrale de la fonction en escalier \(\varphi_n\) définie par \(\forall x \in [k/n, (k+1)/n[\), \(\varphi_n(x) = f(k/n)\) et \(\varphi(1) = f(1)\). Le terme \(T_n\) représente l’intégrale d’une autre fonction en escalier \(\psi_n\) définie par \(\psi_n(x) = (k+1)/n\) lorsque \(x \in [k/n, (k+1)/n[\) et \(\psi_n(1) = f(1)\).

  • Montrons que \(\lVert f-\varphi_n \rVert_{\infty} \xrightarrow[n \rightarrow +\infty]{}0\). Soit \(\varepsilon> 0\). Puisque la fonction \(f\) est continue sur le segment \([0, 1]\), elle est uniformément continue (théorème de Heine). Il existe donc \(\eta > 0\) tel que \(\forall (x,y) \in [0, 1]^2\), \(\lvert x-y \rvert \leqslant\eta \Rightarrow \lvert f(x)-f(y) \rvert \leqslant\varepsilon\). Posons \(N = E(1/\eta) + 1\). Alors pour \(n \geqslant N\), si \(x \in [0, 1[\), il existe \(k \in [\kern-0.127em[ 0, n-1 ]\kern-0.127em]\) tel que \(k/n \leqslant x < (k+1)/n\) et alors \(\lvert f(x)-\varphi_n(x) \rvert = \lvert f(x)-f(k/n) \rvert \leqslant\varepsilon\) puisque \(\lvert x-k/n \rvert \leqslant 1/n \leqslant\eta\). De même, on montre que \(\lVert f-\psi_n \rVert_{\infty} \xrightarrow[n \rightarrow +\infty]{}0\).

  • Alors, \(\lvert I-R_n \rvert = \left| \displaystyle{\int_{0}^{1}} \left[f(t)-\varphi_n(t)\right]\mathrm{ \;d}t \right| \leqslant\displaystyle{\int_{0}^{1}} \lvert f(t)-\varphi_n(t) \rvert \mathrm{ \;d}t \leqslant\lVert f-\varphi_n \rVert_{\infty} \xrightarrow[n \rightarrow +\infty]{}0\). La même majoration montre que \(\lvert I-T_n \rvert \xrightarrow[n \rightarrow +\infty]{}0\).

Plus généralement, si \(f\) est une fonction continue sur le segment \([a, b]\), et si \[u_n = \dfrac{(b-a)}{n} \sum_{k=0}^{n-1} f(\xi_k)\] où les points \(\xi_k\) sont dans l’intervalle \([a + kh, a + (k+1)h]\), avec \(h = \dfrac{b-a}{n}\), on a \[u_n \xrightarrow[n \rightarrow +\infty]{}\int_a^b f(x) \mathrm{ \;d}x\] On se sert en pratique uniquement des sommes de Riemann du théorème précédent pour une fonction \(f\) continue sur le segment \([0, 1]\) pour étudier la limite de certaines suites.
(Pour étudier la limite d’une suite \((u_n)\) faisant intervenir une somme et le groupement \(k/n\)).
Essayer d’écrire \(u_n\) sous la forme \(u_n = \dfrac{1}{n} \displaystyle{\sum_{k=0}^{n-1}} f(k/n)\) et utiliser les sommes de Riemann.
Considérons la suite de terme général \(u_n = \sum{p=0}{n-1} \dfrac{\sqrt{n^2+p^2}}{n^2}\). On peut faire apparaître le groupement \(p/n\) dans \(u_n\) en factorisant par \(n^2\) dans la racine : \[u_n = \dfrac{1}{n} \displaystyle{\sum_{p=0}^{n-1}} \sqrt{1+(p/n)^2} = \dfrac{1}{n} \displaystyle{\sum_{p=0}^{n-1}} f(p/n)\] où la fonction \(f : \left\{ \begin{array}{ccl} [0,1] & \longrightarrow & \mathbb{R} \newline x & \longmapsto & \sqrt{1+x^2} \end{array} \right.\) est continue sur le segment \([0, 1]\). D’après le théorème précédent, \(u_n~\xrightarrow[n \rightarrow +\infty]{}I=\displaystyle{\int_{0}^{1}} \sqrt{1+x^2}\mathrm{ \;d}x\). Le plus rapide pour calculer cette intégrale consiste à intégrer par parties. \[I = \Bigl[ x\sqrt{1+x^2} \Bigr]_{0}^{1} - \displaystyle{\int_{0}^{1}} \dfrac{x^2+1-1}{\sqrt{x^2+1}} \mathrm{ \;d}x = \sqrt{2} - I + \Bigl[ \mathop{\mathrm{argsh}}(x) \Bigr]_{0}^{1}\] d’où l’on tire \(I = \sqrt{2}/2 + \ln(\sqrt{2}+1)/2\).
Considérons la suite de terme général \(u_n = \displaystyle{\sum_{p=n}^{2n-1}}\dfrac{1}{2p+1}\). Avec le changement d’indice \(k = p-n\), \[u_n = \displaystyle{\sum_{k=0}^{n-1}} \dfrac{1}{2(k+n)+1} = \dfrac{1}{2n} \displaystyle{\sum_{k=0}^{n-1}} \dfrac{1}{1+(k/n) + 1/(2n)}\] On n’obtient pas exactement une somme de Riemann, mais cela y ressemble fort ! Lorsque \(n\) est grand, on se dit que le terme \(1/(2n)\) devient négligeable. Encadrons \(u_n\) par deux sommes de Riemann : \[\alpha_n = \dfrac{1}{n} \displaystyle{\sum_{p=1}^{n}} \dfrac{1}{1+p/n} = \displaystyle{\sum_{k=0}^{n-1}} \dfrac{1}{1+(k+1)/n} \leqslant 2u_n \leqslant\dfrac{1}{n} \displaystyle{\sum_{k=0}^{n-1}} \dfrac{1}{1+k/n} = \beta_n\] Les deux suites \((\alpha_n)\) et \((\beta_n)\) sont des sommes de Riemann qui convergent vers la même limite, \(I = \displaystyle{\int_{0}^{1}} \dfrac{\mathrm{ \;d}x}{x+1} = \ln(2)\). D’après le théorème des gendarmes, on en déduit que \(u_n \xrightarrow[n \rightarrow +\infty]{}\ln(2)/2\).

En résumé

Ce chapitre doit être bien maîtrisé et il sera important de faire un maximum d’exercices pour assimiler les différentes techniques nouvellement introduites. Plus particulièrement :

  1. vous devez être à l’aise avec le calcul de primitives. Vous pourrez consulter les sections

  2. Les majorations fondamentales du paragraphe [integration_majorations_fondamentales] page [integration_majorations_fondamentales] seront d’un usage constant aussi il faudra s’entraîner à les utiliser. Les exercices des sections [exo_majorations_d_integrales] page [exo_majorations_d_integrales], [exo_limite_de_fonctions_def_par_int] page [exo_limite_de_fonctions_def_par_int] et [exo_suites_et_integration] page [exo_suites_et_integration] constitueront un excellent terrain d’entraînement.

  3. Il faudra avoir bien compris le pourquoi des formules et inégalité de Taylor et savoir utiliser, pour un problème global , la formule de Taylor avec reste intégrale et pour un problème local , la formule de Taylor-Young.

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    [ID: 68] [Date de publication: 12 décembre 2021 22:27] [Catégorie(s): Le cours de SUP ] [ Nombre commentaires: 0] [nombre d'éditeurs: 1 ] [Editeur(s): Emmanuel Vieillard-Baron ] [nombre d'auteurs: 3 ] [Auteur(s): Emmanuel Vieillard-Baron Alain Soyeur François Capaces ]




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