L’objet de ce chapitre est de donner des outils pour résoudre des équations différentielles du premier et du second ordre. Vous rencontrerez quotidiennement ces équations en mathématiques mais aussi en physique, en chimie et en sciences de l’ingénieur. Il est donc impératif de bien maîtriser les techniques développées ici. Indirectement, nous réviserons les techniques de primitivation enseignées en terminale. Il est conseillé à ce sujet de se remettre en mémoire les primitives des fonctions usuelles, voir l’annexe [Formulaire_Primitives_usuelles]. Vous pourrez dans une première lecture éviter de vous focaliser sur les démonstrations. Celles-ci s’éclairciront après les premiers rudiments d’algèbre linéaire du chapitre [chapitre_ev] et plus particulièrement le paragraphe [structure_espace_solutions] page [structure_espace_solutions] et le chapitre [chap_integration] d’intégration.
Equations différentielles linéaires du premier et second ordre
In Order to solve a differential equation you look at it
till a solution occurs to you George Pólya - How to solve it.
Quelques rappels
Dans tout le chapitre, \(I\) désigne un intervalle de \(\mathbb{R}\) non réduit à un point. Le symbole \(\mathbb{K}\) représentera indifféremment le corps \(\mathbb{R}\) des réels ou le corps \(\mathbb{C}\) des complexes.
Deux caractérisations de la fonction exponentielle
Caractérisation par une équation différentielle
On se propose d’étudier ici une fonction \(f:\mathbb{R}\longrightarrow \mathbb{C}\) dérivable sur \(\mathbb{R}\) et vérifiant l’équation différentielle \(f'=a f\) où \(a\in \mathbb{C}^*\).
Caractérisation par une équation fonctionnelle
On se propose maintenant d’étudier une fonction \(f:\mathbb{R}\longrightarrow \mathbb{C}\) dérivable sur \(\mathbb{R}\) et vérifiant l’équation fonctionnelle \[\forall (s,t) \in \mathbb{R}^2, ~~ f(s+t)=f(s)f(t)\]
Équation différentielle linéaire du premier ordre
Vocabulaire
Autrement dit, si \(\varphi\) et \(\psi\) sont des solutions de \(\left(E\right)\) alors, pour tout couple de scalaires \((\alpha,\beta)\in\mathbb{R}^2\), la fonction \(\alpha\varphi+ \beta \psi\) est encore solution de \(E\).
Augustin Louis Cauchy, né à Paris le 21 août 1789 et mort à Sceaux le 23 mai 1857Mathématicien français, Cauchy est, après Léonhard Euler (voir page ), et avec près de 800 publications, le mathématicien le plus prolifique de l’histoire des mathématiques. Il fut un pionnier dans diverses branches des mathématiques comme l’étude de la convergence et de la divergence des séries (notions que vous découvrirez en spé), l’étude des groupes de permutations (voir le chapitre , ce travail fut précurseur de la théorie des groupes). Il travailla sur la théorie des équations différentielles et fut le découvreur des fonctions holomorphes. Il ne se comporta pas toujours de manière adroite avec les jeunes mathématiciens. Il sous-estima ainsi le travail d’Abel ou de Galois et égara même un mémoire, pourtant capital, de ce dernier. Il fut enseignant à l’école Polytechnique. Son cours était d’une rigueur inhabituelle pour l’époque et il fut décrié au départ par ses élèves et ses collègues. Il allait néanmoins devenir une référence pour tout travail en analyse au \(19^{ème}\) siècle.
Résolution de l’équation différentielle homogène normalisée
Alors les solutions de l’équation différentielle homogène normalisée : \[\boxed{\forall t\in I, \quad\quad y'\left(t\right)+a\left(t\right)y\left(t\right)=0 \quad (E)}\] sont données par les fonctions \[\boxed{\varphi_\alpha: \left\{ \begin{array}{ccl} I & \longrightarrow & \mathbb{R} \newline t & \longmapsto & \alpha e^{-A\left(t\right)} \end{array} \right. }\] où \(\alpha \in\mathbb{K}\) et où \(A\) est une primitive de \(a\) sur \(I\).
Résolution de l’équation différentielle normalisée avec second membre
alors les solutions de \(\left(E\right)\) sont les fonctions de la forme \(\varphi_0+\varphi\) où \(\varphi\) est une solution de l’équation différentielle homogène associée \[\forall t\in I, \quad y'\left(t\right)+a y\left(t\right)=0 \quad (H).\]
Autrement dit: toute solution de \((E)\) est somme d’une solution \(\varphi\) de l’équation homogène \((H)\) associée à \((E)\) et d’une solution particulière \(\varphi_0\) de \((E)\)
Détermination de solutions particulières
Superposition des solutions
Trois cas particuliers
Soit \(\varphi_0:t\mapsto \mu_1 \cos\left(\omega t\right) + \mu_2 \sin \left(\omega t\right)\). On a la série d’implications : \[\begin{aligned} & &\varphi_0 \textrm{ ~est solution de $\left(E\right)$}\\ &\Rightarrow & \forall t\in I, \quad \varphi_0'\left(t\right)+\alpha ~\varphi_0\left(t\right)=\eta_1 \cos\left(\omega t\right) + \eta_2 \sin \left(\omega t\right)\\ &\Rightarrow & \forall t\in I, \quad \left(\mu_1 + \omega \mu_2\right) \cos\left(\omega t\right) + \left(\mu_2-\omega \mu_1\right) \sin\left(\omega t\right) = \eta_1 \cos\left(\omega t\right) + \eta_2 \sin \left(\omega t\right)\\ &\Rightarrow & \begin{cases}\mu_1 + \omega \mu_2 &= \eta_1 \\ -\omega \mu_1 + \mu_2 &= \eta_2\end{cases}\\ &\Rightarrow & \left(\mu_1,\mu_2\right) \textrm{ est solution de } \begin{cases}x + \omega y &= \eta_1 \newline -\omega x + y &= \eta_2\end{cases}\end{aligned}\] Réciproquement, si ce système admet un couple solution \(\left(\mu_1,\mu_2\right)\) alors \(\varphi_0:t\mapsto \mu_1 \cos\left(\omega t\right) + \mu_2 \sin \left(\omega t\right)\) est solution de \(\left(E\right)\).
Mais le déterminant de ce système est \(1+\omega^2 \neq 0\) et le système possède toujours un couple solution (voir proposition [systeme_cramer_2] page [systeme_cramer_2]). L’équation \(\left(E\right)\) admet donc toujours une solution de la forme indiquée.
Par application du théorème [tred1], l’équation homogène \(y'+y=0\) admet comme solutions les fonctions \(\varphi_\alpha : \mathbb{R} \rightarrow \mathbb{R}, x \mapsto \alpha e^{-x}\) avec \(\alpha\in\mathbb{R}\).
Une solution évidente de \(y'+y=2e^x\) est \(y:x\mapsto e^x\).
Méthode de variation de la constante
Soient \(a,b\) deux fonctions continues définies sur \(I\) et à valeurs dans \(\mathbb{K}\). Considérons l’équation différentielle : \(\forall t\in I, \quad y'\left(t\right)+a y\left(t\right)=b\left(t\right) \quad (E).\) Pour déterminer une solution particulière de \((E)\) :
Utilisons la méthode de variation de la constante pour déterminer une solution particulière de \(\left(E\right)\). Cette solution est de la forme \(t \mapsto c~ e^{-t^2}\) où \(c\) est une primitive de \(t \mapsto b\left(t\right) ~ e^{A\left(t\right)}=e^{t-t^2}e^{t^2}=e^t\) sur \(\mathbb{R}\). Une telle primitive est \(t\mapsto e^t\). Par conséquent \(t\mapsto e^t e^{-t^2}=e^{t-t^2}\) est une solution particulière de \(\left(E\right)\) et les solutions de \(\left(E\right)\) sont de la forme : \[t\mapsto \left(e^t+\alpha\right)e^{-t^2}\] où \(\alpha\in\mathbb{R}\).
Cas général
On suppose ici que \(I=]\alpha,\beta[\) où \(\alpha\) et \(\beta\) sont des éléments de \(\overline{\mathbb{R}}\) tels que \(\alpha<\beta\) ( on peut avoir \(\alpha=-\infty\) ou \(\beta=+\infty\)). Soient \(a\), \(b\) et \(c\) trois fonctions continues sur \(I\), à valeurs dans \(\mathbb{K}\) et soit \(J\) un sous intervalle de \(I\) sur lequel \(a\) ne s’annule pas.
On considère l’équation \[\forall t\in I, \quad a\left(t \right) y'\left(t\right)+ b\left(t\right)y\left(t\right)=c\left(t\right) ~~ (E).\] Pour tout \(t\in J\), on peut normaliser \((E)\) en l’équation \[\forall t\in J \quad y'\left(t\right)+ {\scriptstyle b\left(t\right)\over\scriptstyle a\left(t \right)}y\left(t\right)={\scriptstyle c\left(t\right)\over\scriptstyle a\left(t \right)} ~~ (N)\]
Normalisons \(\left(E\right)\). Nous obtenons l’équation : \[\left(N\right)~:\quad \forall t\in I_1\cup I_2, \quad y'\left(t\right)-{\scriptstyle 1\over\scriptstyle 1-t}y\left(t\right)={\scriptstyle t\over\scriptstyle t-1}\] où \(I_1=\left]-\infty,1\right[\) et \(I_2=\left]1,+\infty\right[\). L’équation homogène associée à \(\left(N\right)\) est : \[\left(H\right)~: \quad \forall t\in I_1\cup I_2, \quad y'\left(t\right)-{\scriptstyle 1\over\scriptstyle 1-t}y\left(t\right)=0\]
Méthode d’Euler
On considère le problème de Cauchy pour une équation différentielle du premier ordre explicite : \[\begin{cases} y' &= f(t, y) \newline y(t_0) &= y_0 \end{cases}\]
Même si l’équation différentielle est linéaire, sa résolution passe par un calcul de primitives, or on ne sait calculer que très peu de primitives. Lorsque l’équation différentielle est non-linéaire, il est en général impossible de déterminer la solution explicite du problème de Cauchy. On a recours à des méthodes numériques de calcul approché de solutions. La plus simple de ces méthodes est la méthode d’Euler qui se base sur une idée géométrique simple.
L’idée est d’approximer la dérivée de \(y\) au point \(t\) par un taux d’accroissement : \[y'(t) \approx \dfrac{y(t+h)-y(t)}{h}\] ou de manière équivalente, d’approximer la courbe de \(y\) par sa tangente en \(t_0\). Comme \(\dfrac{y(t_0+h) - y(t_0)}{h} \approx f(t_0, y_0)\), on en déduit que \(y(t_0 + h) \approx y_0 + f(t_0, y_0)\). Connaissant la valeur de \(y\) en \(t_0 + h\), on peut recommencer pour obtenir une approximation de \(y(t_0 + kh)\). \[y_{n+1} = y_n + h f(t_0 + nh, y_n)\] Le réel \(y_n\) est une approximation de \(y(t_0 + nh)\). On peut travailler entre les temps \(t_0\) et \(t_1\) et subdiviser l’intervalle \(\left[t_0,t_1\right]\) en \(m\) subdivisions régulières de pas \(h=(t_1-t_0)/m\)
> ##La procédure Euler: Euler:=proc(t0,t1,y0,m,f) local y,h,t,n,liste; #Calcul de la subdivision. h:=(t1-t0)/m; #On fixe les conditions initiales. y[0]:=y0; t[0]:=t0; liste:=[t[0],y[0]]; #Boucle. for n from 1 to m do t[n]:=t[n-1]+h; y[n]:=f(t[n-1],y[n-1])*h+y[n-1]; liste:=liste,[t[n],y[n]]; od; #On renvoie la liste construite dans la boucle. [liste]; end; > ##Solution approchée avec la méthode d’Euler. liste:=Euler(0,1,1,10,(t,y)-> t*(y+1)); > d1:=plot(liste,color=red,linestyle=DOT); > ##Solution exacte avec la commande dsolve. dsolve(diff(y(t),t)-t*y(t)-t=0,y(0)=1); /1 2 y(t) = -1 + 2 exp- t 2 / > d2:=plot(-1+2*exp(\(t^2\)/2),t=0..1,color=blue); >##Tracés. display(d1,d2);
Équations différentielles linéaires du second ordre
Vocabulaire
Résolution de l’équation différentielle homogène du second ordre dans \(\mathbb{C}\)
Ce système possède bien une et une seule solution car son déterminant
Résolution de l’équation différentielle homogène du second ordre dans \(\mathbb{R}\)
Équation différentielle du second ordre avec second membre
On considère dans toute la suite une équation différentielle du second ordre à coefficients complexes \[\forall t\in I\quad ay''+by'\left(t\right)+cy\left(t\right)=d\left(t\right) \quad \left(E\right)\] où \(a,b,c\in\mathbb{C}\), \(a\neq 0\) et \(d:I\rightarrow \mathbb{C}\). On admettra les résultats suivants :
Le déterminant de ce système est \(\left(1-\omega^2\right)+\omega^2 \neq 0\) et le système possède toujours un couple solution. L’équation \(\left(E\right)\) admet donc toujours une solution de la forme indiquée.
En résumé
Les quatre points principaux de ce chapitres, à connaître parfaitement, sont :
Ce chapitre utilise de nombreux résultats du cours d’analyse. Le diagramme suivant explique la filiation du théorème fondamental donnant les solutions d’une équation différentielle linéaire du premier ordre.
On peut encore faire le lien avec les différents chapitres du programme:
Bibliographie
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[ID: 60] [Date de publication: 31 octobre 2021 20:30] [Catégorie(s): Le cours de SUP ] [ Nombre commentaires: 0] [nombre d'éditeurs: 1 ] [Editeur(s): Emmanuel Vieillard-Baron ] [nombre d'auteurs: 3 ] [Auteur(s): Emmanuel Vieillard-Baron Alain Soyeur François Capaces ]Documents à télécharger
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