Disparité bizarre
Bonsoir,
J'ai une question fort importante :
Est-ce que l'utilisation des sommes de Riemann est adaptée à des exercices sur les suites niveau L1/L2 ?
Et pour parler du CAPES, à propos des théorèmes d'intégration : pourquoi la CV dominée tout à fait dans le programme des prépas est si atrocement hors programme de ce concours de recrutement de profs ??? Il y a comme un malaise entre les programmes de l'université (L1 et L2) et ceux des prépas depuis 96-97...
J'ai une question fort importante :
Est-ce que l'utilisation des sommes de Riemann est adaptée à des exercices sur les suites niveau L1/L2 ?
Et pour parler du CAPES, à propos des théorèmes d'intégration : pourquoi la CV dominée tout à fait dans le programme des prépas est si atrocement hors programme de ce concours de recrutement de profs ??? Il y a comme un malaise entre les programmes de l'université (L1 et L2) et ceux des prépas depuis 96-97...
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Réponses
Quant à dire que l'intégrale de Lebesgue est moins délicate que celle de Riemann, je ne suis pas d'accord : certes sa présentation est élégante et les théorèmes de convergence sont puissants et simples, mais elle ne permet pas dans sa présentation classique de traiter les intégrales semi-convergentes, par exemple. Et la construction de la mesure de Lebesgue sur R n'est pas une trivialité. Pour "réhabiliter un peu" l'intégrale de Riemann, je dirai aussi qu'elle fournit rapidement et à peu de frais un procédé d'intégration de fonctions continues de R à valeurs dans un espace de Banach, ce qui peut etre utile dans certains cas.
Je n'ai jamais vraiment compris cette phrase (assez classique pourtant). Si quelqu'un pouvait me l'expliquer...
En (un peu plus) clair (mais pas trop), les intégrales semi-convergentes sont-elles plus que des choses du style << c'est intégrable sur les compacts et ça converge vers un truc quand on fait "tendre" le compact vers tout l'intervalle >> ?
- c'est une intégrale définie par un "processus-limite" de sommation (sommes de Riemann), aspect très important dans les diverses applications en physique et autres mais aussi pédagogique : il n'est donc pas besoin d'aborder la théorie de la mesure avant d'aborder l'intégrale.
- le fameux théorème $\int_a^b\,f=F(b)-F(a)$ y est valable sans {\bf aucune } hypothèse sur $f$ (sauf, évidemment, qu'il existe $F$ dérivable sur $[a;b]$ -sauf peut-être sur une partie au plus dénombrable- telle que $F'(x)=f(x)$ là où $F'$ est définie).
- c'est une intégrale qui contient celle de Lebesgue (donc aussi celle de Riemann) : $f$ est L-intégrable si $|f|$ est HK-intégrable.
- dans cette théorie, il n'y a donc plus "d'intégrales semi-convergentes" : une fct est (HK)-intégrable ou elle ne l'est pas. Parmi les fct HK-intégrables, il y a celles telles que $|f|$ soit intégrable (L-intégrables), et les autres : on se retrouve un peu dans la situation des séries numériques (parmi les séries CV, il y a les ACV et les autres).
En particulier, la HK-intégrabilité sur $[a;+\infty [$ (par exemple) {\bf équivaut} à l'existence de la limite des intégrales sur $[a;X]$ quand $X\to +\infty$ (ce qui n'est pas le cas, on le sait pour l'intégrale de Riemann ou celle de Lebesgue).
- les théorèmes de convergence (CV dominée etc..) s'obtiennent très rapidement dans le déroulement de la théorie.
Enfin, pour les résultats plus avancés (dimension > à 1, intégrale des fcts à valeurs dans un Banach, etc..), cette théorie a connu des développements très importants dans les années 1980-1990. Un exemple : c'est grâce à cette théorie que P. Muldowney a fourni, en 1987, et pour la première fois, un cadre mathématique rigoureux à l'intégrale de Feynman.
> - c'est une intégrale qui contient celle de
> Lebesgue (donc aussi celle de Riemann) : $f$ est
> L-intégrable si $|f|$ est HK-intégrable.
Il existe des fonctions Riemann intégrable mais non Lebesgue intégrable.
Je pense que chaque théorie a ses avantages et inconvénients.
il faut faire la théorie de Riemann en 5ième, puis celle ce Lebesgue en 4ième et celle de Henstock en 3ième. Comme cela nos élèves seront tous de vrais génies en intégration... Ne riez pas, c'est exactement ce qui s'est produit dans les années 70, on s'est dit (et on l'a fait!): on traite les groupes en 4ième, les relations d'équivalence, les quotients, l'algèbre linéaire en seconde ..etc comme ça on aura des génies au bac.
Plus sérieusement, je trouve le système actuel en prépa pas si mal que cela. Théorie de Riemann en première année. Notion de fonction intégrable (continues par morceaux) en deuxième année, énoncé du théorème de convergence dominée avec ses conséquences, et on aborde les techniques qui vont avec.
Puis pour ceux qui approfondiront la question en L3: théorie de la mesure, mesure de Lebesgue etc...
Cela me parait bien plus sérieux sur le plan pédagogique.
c'est une intégrale qui contient celle de Lebesgue
>>
Je ne connais pas cette intégrale, mais il me semble qu'elle est très liée à l'espace de départ, contrairement à celle de Lebesgue. Déliré-je ?
Cela mis à part, je maintiens ma question sur les intégrales semi-convergentes.
Ta question montre que je me suis mal exprimé en disant brutalement "c'est une intégrale qui contient celle de Lebesgue" : je voulais simplement dire que (sur $\R$, ou plus généralement sur $\R^n$) l'espace des fcts HK-intégrables (qui n'est pas un Banach !) contient strictement le sous-espace des fcts L-intégrables.
En particulier, il n'y a pas d'intégrale "semi-convergente" dans cette théorie : cette notion (à mon sens très vaseuse..) disparaît au profit de fcts HK-intégrables mais qui ne sont pas absolument intégrables (=L-intégrables), et il y a donc là un peu "{\it plus que des choses du style << c'est intégrable sur les compacts et ça converge vers un truc quand on fait "tendre" le compact vers tout l'intervalle >>}" puisqu'il y a, en gros, un "processus-limite de sommation des valeurs d'une fct" qui aboutit.
Au niveau L1/L2 (puisque c'était le sujet de la discussion) la théorie de Henstock-Kurzweil fournit une intégrale simple et robuste où l'on dispose rapidement et à peu de frais d'outils solides (théorèmes de convergence notamment). Voir à ce sujet le début du poly de Demailly ici :
\lien{http://www-fourier.ujf-grenoble.fr/\~{}demailly/books.html}.
C'est une théorie de l'intégration "non absolue" (par opposition à la théorie de Lebesgue qui est une théorie de l'intégrale "absolue") et, en ce sens, elle a initié un certain "renouveau" dans l'étude des intégrales "non absolues" comme le sont souvent celles qu'on rencontre dans les applications : intégrales de Pettis, de Wiener, d'Itô, de Feynman, etc..
Je reviens à ta question : tu as entièrement raison.
Ce n'est pas parce que l'intégrale de KH a de nombreux atouts, surtout au niveau élémentaire, qu'elle n'a pas d'inévitables inconvénients, surtout pour les utilisations avancées.
De toute façon, je ne pense pas qu'on puisse se passer, à partir d'un certain niveau, du cadre universel de la théorie de la mesure et de l'intégrale de Lebesgue..
Mais, plutôt que de dire ce que je pense (ce qui n'a pas grand intérêt), laissons parler (beaucoup) plus compétent que moi en la personne de M.M. Rao (Measure theory & integration, 2ème édition, chez Marcel Dekker - lecture chaudement recommandée : tout le chapitre 7 est consacré à l'intégration "non absolue").
Je cite la page 452, qui confirme que :
"In the Lebesgue integration, the domain space is abstract and no topological or geometric properties, even when present, play significant roles whereas in the nonabsolute case these are utilized more fully from the start".
Autre référence utile : l'excellent traité de D.H. Fremlin, où l'intégrale de HK, encore appelée intégrale de jauge, est étudiée ici : \lien{http://www.essex.ac.uk/maths/staff/fremlin/cont48.htm}
[Pour avoir le \~{} il faut écrire \verb*/ \~{}/ AD]
[ajout à 23 h 10 : merci, Alain, encore une chose que j'ignorais.. ]
-- Schnoebelen, Philippe