Surface libre en mécanique des fluides

Bonjour,

En mécanique des fluides, dans le cas "gentil" d'un écoulement non-visqueux (donc irrotationnel), homogène et incompressible, on peut montrer que le domaine fluide est régi par une équation de Laplace, qui porte sur un potentiel $\phi$ dont le gradient est égal au champ de vitesse.

Cette équation est généralement complétée (entre autres) par deux équations au niveau de la surface libre: une condition cinématique et une condition dynamique. La condition cinématique est généralement présentée comme suit, avec les notations suivantes en 3D:
$x,y$: coordonnées horizontales,
$\eta(x,y,t)$ : équation de la surface libre.
Une particule à la surface libre reste à la surface libre, donc la dérivée totale de $z-\eta(x,y,y)=0$, ce qui fournit :
$$ \partial_t\eta + \partial_x \phi \partial_x\eta + \partial_y\phi \partial_y\eta - \partial_z \phi = 0$$

Je ne comprends pas bien le statut de "une particule à la surface libre reste à la surface libre": est-ce une hypothèse supplémentaire, ou une conséquence du fait que la divergence du champ de vitesse $\mathrm{div}\, \vec{u}$ est nul ? C'est généralement présenté comme si ça ne pouvait être autrement. J'ai en effet du mal à imaginer une écoulement potentiel (i.e. de Laplacien nul) dont une particule de la surface viendrait s'enfoncer pour être remplacée par une autre, mais c'est très confus.

Pour réduire un peu le problème, on peut supposer que $\eta = 0$. Est-il possible d'avoir un champ de vitesse $\vec{u}$ a divergence nulle, telle qu'une particule en $z=0$ ne reste pas tout le temps en $z=0$ ?

Réponses

  • Bonjour,

    Je trouve difficile d'expliquer des concepts physiques... les livres sont bien faits et prennent le temps de décrire. Ici, je tente avec la différence entre les méthode de Lagrange et d'Euler.
    Lagrange : on isole (par la pensée ou avec du colorant) une partie restreinte du fluide appelée particule et on la suit au cours du temps : on connaît sa position à chaque instant.
    Euler : on connaît la vitesse des particules au cours du temps à un endroit donné déterminé par ses coordonnées. Euler est la méthode la plus employée.

    Dans un repère cartésien, on note les coordonnées d'un point $\displaystyle M(x,y,z).$ On considère un point $M$ à la surface libre du fluide. Au cours du temps, son altitude varie, on note $\displaystyle \eta(x,y,t)$ l'altitude à l'instant $t$ du point à la surface, de coordonnées $\displaystyle (x,y).$ Les $\displaystyle (x,y)$ sont fixes : on imagine une tige verticale plantée au point $\displaystyle (x,y,0)$ et cette tige rencontre la surface libre au point $\displaystyle (x,y,\eta).$

    Comme le point de rencontre entre la tige et la surface libre change au cours du temps puisqu'il monte et descent le long de la tige quand la surface fait des vagues, son altitude notée $z$ varie selon $t.$ Lorsqu'on écrit $\displaystyle z = \eta(x,y,t)$ on écrit que ce point $M$ est le point de rencontre entre la tige et la surface. Si on autorise $\displaystyle z <\eta(x,y,t)$ alors le point est submergé par le fluide qui passe au-dessus : il n'est plus à la surface. De même pour $z > \eta(x,y,t)$ : on autorise que le point saute au-dessus de la surface du fluide. La notation $z$ désigne l'altitude à l'instant $t$ du point à la surface, point qui est repéré par $(x,y)$ (fixes). Ainsi, en bon physicien, on note un $z$ générique, mais il faut noter $z\mid_{(x,y),t}$ : l'altitude à l'instant $t$ du point dont les coordonnées projetées sur le plan $z=0$ sont $(x,y).$

    Il suffit d'écrire $\displaystyle dz = d\eta(x,y,t) = \partial_x \eta dx + \partial_y \eta dy + \partial_t \eta dt$ et de combiner avec $\displaystyle \partial_x \phi = dx/dt, \partial_y \phi = dy/dt, \partial_z \phi = dz/dt$ pour conclure $\displaystyle \partial_x \eta \partial_x \phi +\partial_y \eta \partial_y \phi + \partial_t \eta=\partial_z \phi .$
  • Bonjour et merci pour votre réponse. J'ai lu un tas de descriptions de cette "condition cinématique de surface libre". Mais quand j'y lis "une particule à la surface reste à la surface donc ...", je ne comprends pas si ça c'est une hypothèse, ou un fait qui découle des hypothèses précédentes.

    Vous écrivez "Il suffit d'écrire $dz = d\eta(x,y,t) = \dots$". Tel que je le comprends, cette égalité est une hypothèse supplémentaire. Êtes-vous d'accord ? Qu'est-ce qui empêcherait sinon que toutes les particules de la surface libre soient interverties avec toutes les particules qui se trouvent exactement un mètre dessous à un instant donné ? Évidemment ça violerait l'hypothèse de régularité des positions, c'est juste un exemple où une particule à la surface n'y resterait pas.
  • Bonjour,

    Tu confonds Lagrange et Euler. Lis sur le net ces deux méthodes en mécanique des fluides. Dans la description d’Euler, la question que tu poses n’a aucun sens. Relis mon message et essaie de comprendre ce qui est écrit.
    L’équation $z=\eta(x,y,t)$ traduit que le point de la surface possède l’altitude $\eta$ qui est par définition l’altitude de la surface : ce n’est pas une équation supplémentaire, c’est la définition de $\eta.$ Je croyais que la tige te donnerait une visualisation limpide de ce dont on parle. Il s’agit de l’altitude de la surface le long de la tige. Le long de la tige fixe, les particules de fluide qui sont à la surface à l’instant $t_1$ ne sont pas forcément celles qui y sont à l’instant $t_2$, mais on s’en moque totalement ! Si tu veux t’y intéresser, tu dois passer par la méthode de Lagrange...

    Dans la méthode d’Euler, on ne suit pas une particule avec du colorant (on se fout de savoir si le point à la surface accompagne les mouvements de la surface ou pas)...
  • Je crois que tu ne comprends pas ce que je ne comprends pas... Je prends un exemple.
    Fluid particles on the free surface always remain part of the free surface, therefore we must have ...
    source, Eq. (4.4)

    Le fait que les particules à la surface y restent n'a rien à voir avec le choix que l'on fait de la description de l'écoulement (eulérien ou lagrangien, qui sont d'ailleurs des descriptions équivalentes). Ici, il est affirmé que c'est comme ça, ce qui implique la condition cinématique.

    Autre exemple.
    On the free surface we have at all times to ensure that [...] the material particles on the fluid belonging to the free surface remain on this at all times (kinematic condition)
    source (page 176)

    Pourquoi "we have to ensure" ?! Quoiqu'il en soit, on dirait qu'on ne s'en moque pas complètement, que les particules restent à la surface ou non.

    Sinon, tu dis que $z=\eta$ est la définition de la surface libre. Je suis d'accord. Ce $z$, c'est la coordonnée verticale. Maintenant j'appelle $Z$ l'altitude d'un point matériel (que tu appelais $z$ dans le 3ème paragraphe de ton premier message). Écrire $Z=\eta$, ce n'est plus quelque chose de trivial, c'est attacher les points matériels à la surface libre. Non ?
  • Bonjour.

    Ces deux phrases ma surprennent, moi qui croyais que l'état de la surface est à l'équilibre une dynamique entre les molécules qui s'évaporent et celles qui se condensent.

    Cordialement.
  • Bonjour,

    Oui bien sûr on peut regarder plus finement. Mais si on s'intéresse à la forme de la surface libre, ou à l'effet de la mer sur une coque de bateau, il n'y a pas besoin d'adopter un modèle si fin.
  • Bonjour,

    Si on prend la phrase ´toute particule de la surface reste à la surface’ cela veut dire que, si on colore la surface, disons une fine couche, alors la coloration reste à la surface au cours du temps. Aucune particule non colorée n’arrive à la surface. Aucune particule colorée ne rentre dans le volume du fluide.
    C’est une cinématique possible : mouvement laminaire, uniforme, etc.
    Quand on définit une fonction $\eta(x,y,t)$ c’est qu’on espére déterminer comment la surface monte et descend au cours du temps, et je ne crois pas qu’on adopte cette cinématique particulière.

    Donc, en clair, la phrase ne doit pas être interprétée comme tu le fais. Elle est sans doute maladroite, mais, en bon physicien, je la comprends. Dans la méthode d’Euler, une particule à la surface reste, par définition, à la surface, mais ceci ne signifie pas que, si l’on suit une particule, elle reste à la surface.

    Un peu comme une roue de vélo qui roule sur une route horizontale. Si on demande, quel est la hauteur du point le plus haut de la roue ? On répond : ‘le point le plus haut de la roue reste en haut de la roue’ et donc à une hauteur égale au diamètre. Et il faut être peu perspicace pour comprendre que c’est le même point au cours du temps...
  • Bonjour

    > Si on prend la phrase ´toute particule de la
    > surface reste à la surface’ cela veut dire que,
    > si on colore la surface, disons une fine couche,
    > alors la coloration reste à la surface au cours
    > du temps. Aucune particule non colorée n’arrive
    > à la surface. Aucune particule colorée ne rentre
    > dans le volume du fluide.
    > C’est une cinématique possible : mouvement
    > laminaire, uniforme, etc.

    parfaitement d'accord

    > Quand on définit une fonction $\eta(x,y,t)$
    > c’est qu’on espère déterminer comment la
    > surface monte et descend au cours du temps,

    encore d'accord

    >et je
    > ne crois pas qu’on adopte cette cinématique
    > particulière.

    c'est là le cœur du problème. Quand je lis "the material particles on the fluid belonging to the free surface remain on this at all times", je ne vois pas d'autre interprétation possible que "toute particule de la surface reste à la surface". D'autant qu'il est précisé "particule matérielle", terminologie typique du fait de s'attacher et suivre une particule.

    Mais je vais me laisser un peu de temps pour digérer...
  • Bonjour,

    Si ça peut t’aider...
    Quand tu auras fini les calculs et trouvé $\eta, \phi$ et autres grandeurs, tu peux passer à la méthode de Lagrange et calculer la trajectoire d’une particule quelconque du fluide. Puis tu peux trouver les trajectoires à la surface. Et pour les petites déformations de surface, tu trouveras que les trajectoires sont des ellipses en phase avec l’onde de surface... et miracle : les particules à la surface reste sur la surface.
    Mais ce n’est valide que pour les petites déformations...
    Pour les déformations plus grandes, par exemple quand tu fouettes des œufs pour une omelette, les particules de la surface ne restent pas en surface...

    Donc, dans ton exercice, la donnée ‘les particules de surface restent en surface’ revient à dire qu’on considère de petites déformations : dans ce sens c’est une hypothèse supplémentaire, est-ce que c’est ce que tu voulais dire ?
    Si oui, alors c’est assez évident car la contraposée revient à dire que, dans un mouvement fluide quelconque, les particules de surface ne peuvent que rester en surface, et il suffit de préparer une omelette pour savoir que c’est faux.
Connectez-vous ou Inscrivez-vous pour répondre.