Abscisse curviligne et longueur d'arc

Ce fil se situe quelque part entre géométrie presque différentielle, analyse, mesure/intégration... je pense que la section "Analyse" est la meilleure ?

Important : dans tout ce qui suit, sauf mention explicite du contraire, aucune application n'est supposée dérivable. C'est fait exprès.

J'ai voulu voir comment définir "proprement" les intégrales curvilignes dans le cadre de l'intégration au sens de Lebesgue. C'est quelque chose que je n'ai jamais vu à l'université, et qui n'est pas traité dans mes bouquins non plus. J'ai commencé par cette définition. Ici, on définit l'intégrale curviligne comme l'intégrale d'une fonction par rapport à une mesure donnée, c'est exactement ce que je cherchais. Je travaillerai proprement l'aspect "intégrale de Stieltjes" dans mon coin à l'aide de ceci et de ceci, ça je pense que ça ira.

Cependant, la mesure en question est définie à l'aide de l'abscisse curviligne. Et là, je commence à avoir quelques questions. Quand j'étais à l'université, en géométrie différentielle, on avait assez rapidement introduit l'abscisse curviligne et on avait ensuite paramétré le plus possible les courbes par la "longueur d'arc" (donc l'abscisse curviligne, si j'ai bien suivi) pour rendre les calculs plus simples. En particulier, apparemment, c'est un paramétrage qui se fait "à vitesse constante". Je vais revenir là-dessus.

Les arcs le long desquels il y a un intérêt à définir une intégrale curviligne sont les arcs dits rectifiables, associés à un paramétrage à variation bornée (si j'ai bien compris, en tout cas : le long d'une courbe de longueur infinie, les intégrales seraient toutes infinies). Par rapport à cette définition de fonction à variation bornée : lorsque $T$ est en particulier un intervalle $[a;b] \subseteq \R$, comme c'est le cas dans l'article sur les intégrales curvilignes, j'ose admettre (surtout parce qu'une preuve, ça m'a l'air chiant à écrire, pour pas grand-chose) qu'il est évident que le $\sup$ est atteint en tendant vers des subdivisions qui incluent les bornes $a$ et $b$.

On peut maintenant définir la longueur d'un arc à l'aide de cette notion de variation totale. Notons qu'un arc est donc un couple $\Gamma = ([a;b],\gamma)$ où $\gamma$ est une fonction continue définie sur $[a;b]$. Je sais que tout est censé se simplifier quand $\gamma$ est suffisamment régulière, c'est un truc auquel je veux donner le statut de théorème et démontrer dans mes papiers, mais je veux que mes définitions soient les plus générales possibles, c'est pour ça que je ne suppose pas $\gamma$ "plus que continue". Je note $L([a;b];\gamma)$ la longueur d'un arc $\Gamma = ([a;b],\gamma)$. On sait qu'elle peut être infinie.

Bon. Maintenant, toujours en faisant comme dans l'article sur les intégrales curvilignes, je me donne un arc $\Gamma \subseteq \R^n$ paramétré par $\gamma : [a;b] \longrightarrow \R^n$, continue et à variation bornée. D'après eux, l'abscisse curviligne $s_{\gamma}(t)$ est la "longueur de l'arc $\gamma$ restreint à $[a;t]$". Donc en gros, ils définissent une application $s_{\gamma} : [a;b] \longrightarrow [0;\infty]$, $t \longmapsto L([a;t],\gamma|_{[a;t]})$, si je ne me trompe toujours pas.

Mais du coup, j'ai un problème avec ça. La longueur d'un arc géométrique devrait être indépendante du paramétrage. Ici, l'abscisse curviligne (qui est censée être une longueur d'arc algébrique, dont le signe dépend du sens de parcours de la courbe) a l'air de dépendre du paramétrage $\gamma$, au point où ils ont gardé le paramétrage en indice : ils ont noté ça $s_{\gamma}$ et pas juste $s$, il y a probablement une raison. Un même arc peut être paramétré de différentes façons, mais la longueur de l'arc doit toujours être la même (donc, indépendante du paramétrage).

Pour des arcs paramétrés de classe $\mathcal{C}^1$, ils donnent des définitions pratiques ici et montrent que la longueur d'arc est indépendante du paramétrage, mais évidemment, chez eux, tout le monde est dérivable, donc ça marche assez facilement. Mais moi, j'ai besoin d'une démonstration avec des arcs simplement continus. On peut peut-être donner un sens à leurs définitions quand $p=0$ : les difféomorphismes de classe $\mathcal{C}^p$ deviendraient des homéomorphismes, et le truc de la dérivée première qui ne s'annule jamais marche peut-être encore puisqu'une fonction à variation bornée d'un segment vers $\R$ est dérivable presque partout, à voir si ça se généralise pour celles d'un segment vers $\R^n$.

Du coup, moi j'en suis là... j'ai un $\sup$ pris sur des subdivisions de l'ensemble de départ de mon paramétrage, et je dois démontrer qu'il ne dépend pas du paramétrage. Je ne vais pas vous mentir que j'ai du mal à voir comment commencer une tentative de démonstration.

Merci à ceux qui voudront bien m'aider à dépatouiller tout ça.

Réponses

  • Bonjour,
    $s_\gamma(t)$ c'est la longueur parcourue par le chemin au temps $t$. Si tu change le paramétrage, tu change $s_\gamma$. Par exemple, si $\gamma ':t\mapsto \gamma(t-10)$ (tu pars 10 minutes plus tard), alors $\forall t, s_{\gamma'}(t) = s_\gamma(t-10) <s_\gamma(t)$ (à condition que le chemin ne stationne pas). Mais $s$ tout seul, c'est une variable (de même que la lettre "$t$", mais ce n'est pas une fonction) qui indique une position sur la courbe, indépendamment de la paramétrisation. Genre, $s$ c'est le kilométrage de la route et $s_\gamma(t)$ c'est le kilométrage auquel tu es à l'instant $t$.

    PS: C'est à mon avis trop long comme message. Si tu ne synthétises pas un peu tu risques de ne pas être lu.
  • J’ajoute qu’avec seulement la continuité, on peut avoir des « arcs » (bien merdiques !) qui n’ont pas de longueur (elle est infinie).
    Par exemple avec un morceau du flocon de Von Koch.
  • Calli : Je vois mal comment raccourcir le message sans enlever quelque chose qui pourrait s'avérer être important. Et puisque d'autres (comme christophe c) et même certains shtameurs ont le luxe d'être lus même quand ils font de gros pavés, vu que mes pavés à moi ont la gentillesse d'être construits pour être compréhensibles et pas remplis d'erreurs, je me sentirai un poil vexé...

    Je sais bien que la fonction abscisse curviligne change avec le paramétrage, mais c'est bien ça le problème ! La longueur de la courbe est censée ne pas dépendre du paramétrage, c'est comment le démontrer que j'essaie de comprendre.

    Dom : la longueur infinie n'est pas un problème avec la définition de Jordan, j'en parle et ça justifie d'appeler certains arcs "rectifiables".
  • Du coup, pour les non rectifiables, c’est démontré :-D
    Il reste le cas des rectifiables.
  • Ben oui, mais rectifiable n'implique pas de classe $\mathcal{C}^1$.
  • Moi je ne lis les gros messages ni de christophe c ni des shtameurs.

    Du coup, la question habituelle, qu'est-ce que tu as essayé et où tu bloques pour montrer que la longueur de la courbe ne dépend pas du paramétrage ? Je précise que le chemin doit être injectif, car sinon ça ne marche pas.
  • Avant d'écrire les choses dans les détails (ça va me prendre un peu de temps de retrouver le bazar dans mes brouillons, et il faut encore que je fasse à manger :-D), je vais juste rebondir sur l'histoire du chemin injectif. Pour autant que je sache, un paramétrage qui parcourt le cercle $n$ fois, ça existe, la longueur de la courbe devrait être $2n\pi$, mais évidemment, l'image géométrique est juste un cercle. D'un côté, on peut dire que le cercle parcouru $n$ fois, et le cercle parcouru $m$ fois, avec $n \neq m$, ça ne définit pas le même arc et donc les longueurs changent de paramétrage en paramétrage. De l'autre, vu que l'ensemble image est le même, on peut dire que la longueur de l'arc est définie par les paramétrages injectifs, auquel cas on est quand même confronté aux problèmes du type "j'ai parcouru le premier demi-cercle très vite, puis le deuxième demi-cercle très lentement" ou vice-versa où on se repose la question de la longueur indépendante du paramétrage. Hm...
  • Une façon intrinsèque de définir la longueur d'un chemin sans référence à la paramétrisation est la mesure de Hausdorff ${\cal H}^1$. Elle a une certaine définition (voir internet) et on peut montrer que pour toute paramétrisation $\gamma$, $L([a,b],\gamma) = {\cal H}^1(\gamma([a,b]))$. Tu vois que la mesure de Hausdorff ne s'intéresse qu'à l'image du chemin et pas à sa paramétrisation. Bon, en fait les mesures de Hausdorff c'est beauuco[size=medium]ouuu[/size][size=large]up[/size] plus général que mesurer la longueur de segments chemins.
  • La mesure de Hausdorff, c'est pour une autre fois. Je ne suis pas censé en avoir besoin ici.

    Je reviens plus tard.
  • La mesure de Hausdorff (de dimension 1), comme expliqué par Calli, permet de parler de longueur d'une courbe sans avoir recours à une quelconque paramétrisation. Cette théorie permet aussi d'expliquer que si le flocon de Koch a une longueur infinie c'est parce qu'en fait il ne s'agit pas vraiment d'une courbe mais (en un certain sens) d'un objet de dimension quelque part entre 1 et 2.

    Petite remarque, pour moi la mesure de Hausdorff n'est pas intrinsèque mais plutôt extrinsèque à la courbe au sens où il faut la plonger dans $\R^n$ pour pouvoir l'utiliser, mais c'est un détail qui ne change rien au message de Calli.

    Bon pour ce qui est des paramétrisation $C^1$ il suffit de faire un changement de variable pour démontrer que la longueur de l'arc ne dépend pas de la paramétrisation. Je n'écris pas la démo car si j'ai bien compris tu souhaites le faire toi même. Dans le cas où le chemin n'est pas paramétrisé de façon $C^1$ ta longueur est définie, si j'ai bien compris les définitions que tu adoptes, par une intégrale de Riemann-Stieltjes. Pour montrer que la longueur ne dépend pas du paramétrage on utilise une formule de changement de variable pour l'intégrale de Riemann-Stieltjes.

    Bon et sinon on peut tout de même regarder des intégrales curvilignes sur certaines courbes de longueur infinies, de la même façon qu'on peut intégrer des fonctions non nulles sur $\R$, qui est de longueur infinie. Là où ça pose problème c'est quand on s'attaque à des courbes comme le flocon de Koch. Si je note $K$ l'ensemble du flocon de Koch alors pour tout $x \in K$ et tout $r>0$ la longueur de $K\cap B(x,r)$ est infinie. De sorte que si l'on veut intégrer une fonction $f$ sur $K$ avec une intégrale curviligne seule la fonction nulle (presque partout) sera intégrable. Pour palier à ce problème on utilise pas une intégrale curviligne mais la mesure de Hausdorff associée à la dimension du flocon.
  • Renart a écrit:
    Cette théorie permet aussi d'expliquer que si le flocon de Koch a une longueur infinie c'est parce qu'en fait il ne s'agit pas vraiment d'une courbe mais (en un certain sens) d'un objet de dimension quelque part entre 1 et 2.

    C'est quand même une courbe continue puisque qu'il est paramétrisable par une fonction continue partant d'un intervalle de $\Bbb R$. Prendre comme synonymes "courbe" et "objet de dimension 1" c'est intuitif, mais ça s'avère ne pas être vrai (aucune des deux notions n'est incluse dans l'autre).
    Renart a écrit:
    Petite remarque, pour moi la mesure de Hausdorff n'est pas intrinsèque mais plutôt extrinsèque à la courbe au sens où il faut la plonger dans $\R^n$ pour pouvoir l'utiliser, mais c'est un détail qui ne change rien au message de Calli.

    Les mesures de Hausdorff de $\gamma([a,b])$ en tant que partie de l'espace métrique $\Bbb R^n$ et en tant que partie de l'espace métrique $\gamma([a,b])$ (a.k.a. lui-même) sont égales. Donc c'est vraiment intrinsèque. Bon après, il faudrait être tordu pour vouloir oublier le $\Bbb R^n$, donc on pinaille.
  • Non, je ne veux rien faire du tout pour une paramétrisation $\mathcal{C}^1$. Je veux démontrer les choses dans le cas simplement continu.

    Le problème est donc le suivant. Je dispose de deux applications continues $\gamma : [a;b] \longrightarrow \mathbb{R}^n$ et $\delta : [c;d] \longrightarrow \mathbb{R}^n$ qui "définissent la même courbe". Justement, il y a déjà un problème de définition ici... est-ce que le cercle parcouru $5$ fois, c'est la même chose que le cercle parcouru $1$ fois, ou non ? Je ne sais pas trop quelle est la bonne définition.

    En tout cas, j'ai deux arcs $([a;b],\gamma)$ et $([c;d],\delta)$, que je suppose "égaux". Je peux donc calculer leurs variations totales. Mais d'une part, je dois calculer le $\sup$ des $V(\gamma,\sigma)$ où $\sigma$ parcourt les subdivisions de sous-intervalles de $[a;b]$, et d'autre part celui des $V(\delta,\tau)$ où $\tau$ parcourt les subdivisions de sous-intervalles de $[c;d]$. Si les deux arcs sont "égaux", les deux $\sup$ doivent être égaux aussi, puisque deux arcs égaux devraient avoir la gentillesse d'avoir la même longueur. Je ne sais absolument pas comment démarrer.

    Par rapport à la remarque de Calli sur l'injectivité : j'ai beaucoup de mal à me décider sur la bonne définition. Techniquement, le cercle parcouru $5$ fois, ce n'est pas la même chose que le cercle parcouru $1$ fois, le trajet n'a pas la même longueur. Mais le "tracé" du trajet reste juste un cercle. Si l'on demande l'injectivité, effectivement, on parcourt la courbe une seule fois et sans faire d'allers-retours, peut-être que ça aide à la classification de ces courbes mais je ne sais pas si ça m'avance sur quelque chose pour mes deux calculs de $\sup$.

    Puisque de toute façon, ces calculs de $\sup$ ici sont entièrement théoriques, je pense que le bon angle d'attaque pour ce problème est effectivement de d'abord clarifier ce que sont deux arcs "égaux" (cercle parcouru $1$ fois, $5$ fois...). Donc : quelle est la bonne définition (et peut-on se passer de dimension de Hausdorff pour le moment) ?
  • Je ne comprends pas pourquoi tu te tortures l'esprit. Tu as la définition de la longueur d'un chemin et tu sais que deux chemins injectifs de même image ont même longueur mais que c'est faux sans l'injectivité (contre-exemple avec le cercle parcouru plusieurs fois). Donc tu peux essayer de montrer ce théorème sur les chemins injectifs parce qu'il est intéressant. Mais pour les chemins non injectifs, ça ne marche pas, donc laisse tomber.
    Homo Topi a écrit:
    je pense que le bon angle d'attaque pour ce problème est effectivement de d'abord clarifier ce que sont deux arcs "égaux" (cercle parcouru 1 fois, 5 fois...). Donc : quelle est la bonne définition (et peut-on se passer de dimension de Hausdorff pour le moment) ?

    Les chemins $\gamma$ et $\delta$ sont "égaux" ssi $\gamma =\delta$ (égalité de fonctions)*. Les courbes qu'ils décrivent sont égales ssi ${\rm Im}( \gamma)={\rm Im}(\delta)$. Je ne vois pas d'autre définition. Ces deux notions coïncident à changement de variable près si on a l'injectivité, mais pas sans. Plus précisément, si $\gamma$ et $\delta$ (définis d'un segment vers un espace métrique) sont injectifs et ${\rm Im}( \gamma)={\rm Im}(\delta)$, alors il existe un changement de variables $t\rightsquigarrow u$ tel que $\gamma(t)=\delta(u)$ (i.e. un homéomorphisme $u:t\mapsto u(t)$ entre les segments de définition de $\gamma$ et $\delta$ tel que $\forall t, \gamma(t) = \delta(u(t))$). Bref, regarde les chemins injectifs.

    Et on a pas besoin de la mesure de Hausdorff pour ce que tu veux faire là.

    * 4 ans d'études en mathématiques pour dire ça. Attention, ça déconne pas.
  • Mmmmh, je pense que la bonne chose à considérer, c'est la suivante : soit $X$ un ensemble d'homéomorphismes croissants $\mathbb{R}\rightarrow \mathbb{R}$. Deux courbes $\gamma_1 : [a,b] \rightarrow E$ et $\gamma_2 : [c,d] \rightarrow E$ sont dites $X$-équivalentes si $\exists h \in X$ tel que $h(a) = c$, $h(b) = d$ et, pour tout $t \in [a,b]$, $\gamma_1(t) = \gamma_2(h(t))$.

    On a, dans ce cas, bien évidemment, que $L(\gamma_1) = L(\gamma_2)$, non (le $\sup$ de l'un est le $\sup$ de l'autre avec les subdivisions transportées par $h$, n'est-ce pas ?) ? D'ailleurs il n'y a pas besoin de supposer que l'une ou l'autre de ces longueurs est finie.

    En tout cas, je ne comprends pas trop pourquoi il faudrait ne considérer que des courbes injectives : le slogan que j'ai en tête est que la longueur ne se mesure pas "entre points de la courbe" (auquel cas problème si pas d'injectivité) mais "entre instants".

    Sinon, Homo Topi, ta question précise, c'est quoi ? C'est "qu'est-ce que l'abscisse curviligne" ? Si oui, je dirais que "abscisse curviligne tout court", c'est ambigü, mais que "abscisse curviligne à partir d'un instant", ça ne l'est plus.

    EDIT : Oups, plusieurs idées se sont mélangées dans ma tête. J'ai parlé de $X$-équivalence parce que j'avais un doute au début : si on reparamètre par un homéomorphisme pas à variation bornée, ou je ne sais pas quoi, est-ce que la longueur est quand même la même ? Mais après j'ai regardé la définition de "longueur" sur wiki (je l'avais oubliée :-D) et je me suis rendu compte qu'il n'y avait peut-être pas besoin de couper les cheveux en quatre et que tous les homéomorphismes étaient gentils, à cet égard-là.
  • Georges : L'injectivité permet que l'égalité des images entraine l'égalité des longueurs. Je crois que c'est ce qu'Homo Topi voulait faire (mais je me perds dans ses gros messages). Pour ton autre vision des choses, pas besoin d'injectivité effectivement.
  • Calli : Oui, le flocon est topologiquement un cercle (donc de dimension topologique 1), c'est pour ça que j'ai précisé "en un certain sens". La notion de dimension étant évidemment floue puisque je n'ai jamais précisé de quelle définition je prenais, mais je restait volontairement vague parce qu'Homo topi ne souhaite pas regarder les mesures de Hausdorff tout de suite.

    Pour ce qui est du mot intrinsèque : Ok je vois ce que tu veux dire, pour moi la distance que tu mets sur $\gamma([a;b])$ est celle héritée de $\R^2$ même si tu oublies l'espace qui l'entoure, donc extrinsèque. Mais je répète que ce n'est pas très important (:D


    Homo topi :
    Premier problème : injectif ou non ?
    Tout dépend de quoi on parle, de ce qu'on vaut faire. Si tu veux juste décrire un cercle alors tu prends autant que possible un paramétrage injectif. À noter que ce n'est pas toujours possible, un cercle n'est pas paramétré de façon continue et injective par $[0;1]$, un $\alpha$ n'est paramétré continument et injectivement par aucun intervalle de $\R$... Ce n'est pas étonnant puisque topologiquement parlant, un cercle, le glyphe $\alpha$ et un segment ce n'est pas la même chose. Ce genre de problèmes mène entre autre à la notion de sous-variété et de variété : on ne peut pas avoir de paramétrisation globale convenable, on fait donc des paramétrisations locales avec des recollements qui vont bien... En revanche si tu veux calculer une intégrale curviligne alors tu ne peux pas te passer de paramétrisation, l'image seule de ton lacet ou de ta courbe n'est pas suffisante. Par exemple l'indice d'un lacet qui parcours 5 fois le cercle unité est différent de l'indice d'un lacet parcourant une seule fois le cercle unité. Si tu intègres la fonctions constante $1$ le long de ces lacets tu trouveras respectivement $2\pi$ et $10\pi$.
    Deuxième problème : la paramétrisation.
    Comme je l'ai expliqué, c'est juste un changement de variable. Ta longueur est l'intégrale de la fonction constante valant $1$ selon ta mesure de Stieltjes, tu passes d'une mesure à l'autre par un changement de variable. Évidemment du point de vue technique c'est plus compliqué, ton changement de variable ne va plus faire intervenir la dérivée d'une quantité $u$ par rapport à une quantité $t$ mais la dérivée d'une mesure par rapport à une autre. Mais du point de vue théorique ça reste exactement la même chose que dans le cas $C^1$.
  • Je précise au passage une façon de faire si on souhaite intégrer des fonctions holomorphes alors on n'a pas besoin de s'embêter avec tout ça. On développe la théorie des fonctions holomorphes et des intégrales curvilignes sur les chemins $C^1$ puis on utilise l'invariance par homotopie ((:D) pour calculer l'intégrale d'une fonction holomorphe sur à peu près n'importe quel lacet. On peut même donner un sens à l'intégrale de fonctions holomorphes sur un bout de flocon de Koch de cette manière.

    Cela ne contredit pas ce qui a été dit précédemment car l'intégration des fonctions holomorphes utilise une formule du type $\displaystyle \int_a^b f(\gamma(t)) \gamma'(t) dt $ au lieu de $\displaystyle \int_a^b f(\gamma(t)) \|\gamma'(t)\| dt$.
  • J'ai besoin de faire table rase et de reprendre la problématique du début. Ne vous inquiétez pas, j'ai lu tout ce que vous avez écrit, il y a de fortes chances que tout serve, donc ce n'est pas parce que je n'y réponds pas directement maintenant que je l'ignore. Cependant, si personne ne comprend mon problème, ça va devenir un bordel illisible, alors il faut que je clarifie les choses pour que vous puissiez m'aider efficacement (sinon, vous risquez de gaspiller votre énergie, ce que je ne veux pas). Je vais faire aussi court que je peux.

    Je m'intéresse donc aux intégrales curvilignes. On introduit ici un objet abstrait noté $\displaystyle \int_{\Gamma}f~ds$. Pour que ce truc puisse être compris comme une intégrale, il faut le définir proprement comme une vraie intégrale au sens de Lebesgue. Donc on le définit comme $\displaystyle \int_{\Gamma}f~ds = \int_{[a,b]}(f\circ \gamma)~ds_{\gamma}$. On sait faire de $[a,b]$ un espace mesuré et il semblerait que $s_{\gamma}$ est une mesure dessus (j'en fais mon affaire).

    Maintenant, je ne sais pas pour vous, mais même en connaissant $s_{\gamma}$, l'intégrale $\displaystyle \int_{[a,b]}(f\circ \gamma)~ds_{\gamma}$ n'est pas encore quelque chose que je sais calculer. Ils précisent que si $\gamma$ est de classe $\mathcal{C}^1$, alors $\displaystyle \int_{[a,b]}(f\circ \gamma)~ds_{\gamma} = \int_a^b f \circ \gamma(t) \|\gamma'(t)\|dt$. Voilà, là j'ai un truc que je sais calculer.

    Cependant, l'objet qu'ils notent $\displaystyle \int_{\Gamma}f~ds = \int_{[a,b]}(f\circ \gamma)~ds_{\gamma}$ peut a priori exister même quand $\gamma$ est simplement continue. Donc ma question est :
    est-ce que ça se calcule, et si oui, comment ? C'est pour ça que je me suis intéressé à cette abscisse curviligne dans le cas particulier d'un arc simplement continu.
  • Wikipedia ne détaille pas trop mais moi je comprends ça comme ça :

    $\displaystyle \int_{[a,b]}(f\circ \gamma)~ds_{\gamma}$ est l'intégrale de la fonction $f\circ \gamma$ par rapport à la mesure $ds_{\gamma}$.

    La mesure $ds_{\gamma}$ est une mesure sur l'intervalle $[a,b]$ "définie par" $ds_{\gamma}([x,y])=s_{\gamma}(y)-s_{\gamma}(x)$ pour tout $x,y\in [a,b]$ avec $x<y$.

    Attention : ici la mesure $ds_{\gamma}$ n'est pas la mesure de Hausdorff dont parlait Calli qui elle est une mesure sur l'image de $\gamma$.
  • Jusque-là, on est parfaitement d'accord. Mais... et après ? Comment se fait le calcul de l'intégrale ?
  • Soit $\gamma$ est dérivable et on a la formule simplifiée qu'on "sait" calculer, soit il faut se taper les sommes de Riemann comme indiqué par Wikipedia.
  • Je ne comprend pas ce que tu dis ou demandes homo topi. Ce n'est pas parce que la courbe est $C^1$ qu'on sait calculer sa longueur. Tu dois savoir que qu'on n'a pas de formule "close" pour des quantité comme $\int_0^t e^{-x^2} dx$, de la même façon on n'a pas de formule close pour la longueur d'un arc d'ellipse cf. wikipédia et la page intégrales elliptiques.

    C'est exactement comme la réponse de Poirot dans le fil sur la fonction gamma d'Euler. On n'a pas de formule qui permette un calcul numérique exact ou direct mais ce n'est vraiment pas très important, l'important c'est d'avoir une bonne théorie des intégrales avec de bonnes propriétés : linéarité, positivité, monotonie, changement de variables, théorèmes de convergence etc.
  • HT semble faire une fixette sur "savoir calculer des choses". Dans l'immense majorité des cas, on ne sait pas faire, et on s'y est fait, c'est comme ça ! Beaucoup d'objets sont définis "de manière indirecte", par exemple comme des limites ou des solutions d'équations implicites. D'un point de vue calculatoire on peut au mieux donner des approximations numériques, mais ce n'est en général pas ce qui est important à propos de ces objets.
  • Je comprends plutôt qu’il veut « une définition dans le cas continu (et non chaotique) ».
    Comme la formule pour les courbes $C^1$ utilise la dérivée, je comprends qu’il se demande quelle formule peut exister pour les courbes $C^0$.
    Je suis presque convaincu par l’approche Riemannienne.

    Une remarque : avec Von Koch, sauf erreur, on ne se retrouve jamais dans un cas où l’on peut considérer la courbe comme une courbe de fonction.
    Qu’en est-il avec une fonction de Weierstrass ?
    Est-ce une fonction rectifiable ?
  • Dom a écrit:
    Une remarque : avec Von Koch, sauf erreur, on ne se retrouve jamais dans un cas où l’on peut considérer la courbe comme une courbe de fonction.

    Si, la courbe de Von Koch est l'image d'une fonction continue $[0,1]\to\Bbb R^2$. Cette fonction est assez naturelle : elle envoie $\frac12$ sur le point au milieu de la courbe, $\frac14$ sur le dernier point du quart de la courbe (qui est une copie 4 fois plus petite de la courbe entière), etc.

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    Dom a écrit:
    Qu’en est-il avec une fonction de Weierstrass ?
    Est-ce une fonction rectifiable ?

    À ma connaissance, ce sont les ensembles qui sont "rectifiables", pas les fonctions. L'équivalent pour une fonction, c'est "lipschitzien" (par définition, un ensemble rectifiable est grosso modo l'union d'un nombre dénombrable d'images de fonctions lipschitziennes). Comme les fonctions lipschitziennes sont p.p. différentiables mais que la fonction de Weierstrass est partout non dérivable, la fonction de Weierstrass n'est pas lipschitzienne.
  • Dom : une fonction croissante est dérivable presque partout, une fonction à variations bornées est différence de deux fonctions croissantes donc dérivable presque partout. Par contraposition une fonction de Weierstrass qui n'est dérivable nulle part n'est pas à variation bornées (sur aucun intervalle d'intérieur non vide), son graphe n'est donc pas rectifiable.
  • Ok pour Weierstrass.
    Ok aussi pour dire que ce n’est pas la fonction qui est rectifiable mais son graphe.

    Calli : l’image que tu proposes (Von Koch) n’est pas la courbe d’une fonction (j’entendais $\mathbb R \rightarrow \mathbb R$), on voit des « retours en arrière ».

    Tiens j’y pense :
    Une fonction (même régulière) avec une infinité d’oscillations par exemple au voisinage de $0$, ça n’aura pas une « longueur » sur n’importe quel $[0,a]$. Mais la continuité en $0$ en prend un coup… je n’ai rien dit…
  • Ben moi, la définition que j'ai de «rectifiable» c'est pour une application d'un segment vers un espace métrique, et elle l'est si le sup des longueurs sur les subdivisions est fini.

    Donc ce n'est pas l'ensemble, mais bien sa paramétrisation, qui est susceptible d'être rectifiable.
  • Dom : Ok, je t'avais mal compris.

    Renart : J'ajouterais que, si le graphe de $f:[a,b]\to\Bbb R$ est de mesure ${\cal H}^1$ finie, alors $f$ est à variation bornée, car ${\rm var}(f) \leqslant {\cal H}^1({\rm Graphe}(f))$. On en a besoin dans ton raisonnement, car on pourrait imaginer a priori qu'il peut exister $g:[c,d]\to\Bbb R^2$ à variation bornée telle que ${\rm Im}(g) = {\rm Graphe}(f)$ même si $f$ n'est pas à variation bornée. Sauf si ton but est juste de montrer que la paramétrisation $x\mapsto (x,f(x))$ de ${\rm Graphe}(f)$ n'est pas une paramétrisation de courbe rectifiable.

    Georges : La définition générale d'un ensemble rectifiable, c'est avec des images d'applications lipschitziennes (ou ${\cal C}^1$ ; ça revient au même). Les courbes rectifiables sont un cas particulier en quelque sorte (même si pas tout à fait).
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Ensemble_rectifiable
  • Poirot : merci au passage pour tes messages sur la fonction zêta de Riemann, c'est instructif :-)

    Dom : le graphe de la fonction $x\mapsto x \sin(1/x)$ définie sur $[0;a]$ et prolongée en $0$ par $0$ possède une longueur infinie et tout est continu.

    Calli : Je ne suis pas sûr de comprendre ta remarque, ce que j'ai en tête est la chose suivante. Soit $f : I \to \R$ une fonction à variations non bornées, alors $G$, le graphe de $f$, n'est pas rectifiable. La démo est assez rapide, soit $A>0$ un réel, il existe une subdivision $x_0 < \ldots < x_n $ de $I$ telle que
    \[
    \sum_{i=1}^n |f(x_{i})-f(x_{i-1})| >A.
    \]
    On prend ensuite une paramétrisation quelconque (enfin... il faut qu'elle soit continue) $\gamma : J \to \R^2$ de $G$, il existe des points $y_0 < \ldots < y_n$ de $J$ tels que $\gamma(y_i ) = (x_i,f(x_i))$ et donc
    \[
    \sum_{i=1}^n |\gamma(y_{i})-\gamma(y_{i-1})| \geq \sum_{i=1}^n |f(x_{i})-f(x_{i-1})| >A .
    \]
    Comme $A$ est arbitraire cela termine la démonstration. J'ai un tout petit peu triché ici parce que on pourrait avoir seulement $y_0>\ldots >y_n$ si la paramétrisation est prise "dans le mauvais sens" mais c'est sans gravité.

    Bon, j'ai quand même l'impression qu'on raconte la même chose.
  • Renart : Là on est d'accord.
  • Dom a écrit:
    Je comprends plutôt qu’il veut « une définition dans le cas continu (et non chaotique) ». Comme la formule pour les courbes $C^1$ utilise la dérivée, je comprends qu’il se demande quelle formule peut exister pour les courbes $C^0$. Je suis presque convaincu par l’approche Riemannienne.

    Voilà, c'est ça. Je sais qu'une intégrale de la forme $\displaystyle \int_{\Gamma}f~ds$ est définissable avec $\Gamma$ de paramétrage $\mathcal{C}^0$, mais la question est si c'est voué à rester un objet théorique ou si c'est un objet "utilisable en pratique", auquel cas il faudrait une méthode pour calculer de telles intégrales.
  • Ça peut être utilisable en pratique ; ça dépend des cas... En toute généralité, que dire de plus ?
  • Pas grand-chose, visiblement. S'il n'y a rien de mieux à faire que de passer par la limite de sommes de Riemann, à part les cas où les sommes sont simples ou simplifiables, ça s'arrête là, je pense.

    Il ne me resterait alors qu'à démontrer la formule $\displaystyle \int_{[a,b]}f(x)~ds_{\gamma}(x) = \int_a^b (f \circ \gamma)(x) \|\gamma'(x)\|dx$ quand $\gamma$ est $\mathcal{C}^1$.
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