Lemme de Zorn et boréliens

Bonjour

J'ai un exercice de théorie de la mesure qui me pose quelques problèmes.
1) On considère 2 boréliens A et B de mesure finie non nulle tels que $\lambda(A)=\lambda(B)$. Il s'agit de montrer qu'il existe des boréliens disjoints $C_{k} \subset A$ et des points $x_{k} \in \mathbb{R}^{n}$ tels que:
$x_{k}+C_{k}$ sont disjoints inclus dans B; $\lambda(A \setminus \bigcup_{k=1}^{\infty}{C_{k}})=0$ et $\lambda(B \setminus \bigcup_{k=1}^{\infty}{x_{k}+C_{k}})=0$. Il est indiqué d'utiliser le lemme de Zorn.

Pour l'instant je suis parvenu à montrer qu'il existe un borélien C de mesure non nulle tels que $C\subset A$ et un point x vérifiant $x+C\subset B$.

Puis j'ai voulu considérer l'ensemble E constitué des couples $(C=\bigcup_{k=1}^{\infty}{C_{k}};x=(x_{k}))$ tels que $C_{k} \subset A$ disjoints , $x_{k}+C_{k}\subset B$ disjoints, les $C_{k}$ de mesure non nulle.
Je prends pour relation d'ordre (C,x)<(C',x') si et seulement si $C_{k}\subset C'_{k}$ pour tout k et x=x'.

Ce que j'ai montré me permet d'affirmer que E est non vide.
Ensuite je prends une chaine et il faut trouver un majorant. Par contre en prenant l'union des parties je ne parviendrais pas nécessairement à l'écrire comme union dénombrable de $C_{k}$ car il n'y a pas un nombre dénombrable de couples dans cette chaine. (peut-être que je n'ai pas pris le bon ensemble ou la bonne relation d'ordre).

2) Il faut ensuite généraliser le résultat au cas où les deux boréliens sont de mesures nulles.
J'ai affirmé qu'on pouvait écrire A et B comme union dénombrable de boréliens disjoints de mesure finie non nulle et dont les mesures sont égales 2 à 2 : $\lambda(A_{n})=\lambda(B_{n})$. Puis j'ai montré le résultat en appliquant la question précédente. Mais je n'arrive pas à montrer cette affirmation (qui semble évidente aux premiers abords).

Merci d'avance pour vos réponses.

Réponses

  • Aucune idée ...
  • Quelques réflexions pour la 1) :
    J'ai l'impression que ce n'est pas vraiment la relation d'ordre "naturelle" que l'on utiliserait pour le lemme de Zorn. En général je crois que c'est plutôt une relation du type $(C_i)_{i\in I}\leq (D_j)_{j\in J}$ si $I\subset J$ et $C_i= D_i$ pour tout $i\in I$. Le majorant serait alors obtenu en prenant l'union de tous les éléments de la chaîne.
    Si l'on veut rester proche de ta relation d'ordre on peut peut-être faire marcher la preuve en remplaçant le $C_i \subset C'_i $ par $( C_i = C'_i$ ou $\lambda(C'_i\backslash C_i )>0)$. En faisant cela on limite la longueur de la chaîne parce que la somme non dénombrable de quantités strictement positives est infinie et que $A$ est de mesure finie. On aboutit donc à la conclusion que les chaînes sont au plus dénombrable et on peut donc conserver la dénombrabilité. Cet argument intervient aussi dans l'utilisation de la première relation d'ordre que j'ai donné.

    Pour la 2) il y a une faute de frappe dans ton message je pense. Tu parles d'étendre le résultat aux boréliens de mesure nulle mais je pense que tu voulais en fait l'étendre au boréliens de mesure infinie. En tout cas il n'est pas difficile de trouver tes $A_n$ et $B_n$. Il existe un plus petit $r_1$ tel que $\lambda(A\cap ]-r_1,r_1[) = 1$ et un plus petit $s_1$ tel que $\lambda(B\cap]-s_1,s_1[) = 1$. On recommence avec les ensembles $A\cap(]-r_2;r_2[\backslash]-r_1;r_1[)$ et $B\cap(]-s_2;s_2[\backslash]-s_1;s_1[)$ etc...

    D'où vient cet exercice ?

    PS : Quelle est ta démonstration pour l'existence d'un borélien $C$ tel que ... ? J'ai une idée de démonstration en tête à base de convolution mais je me demande quelles sont les autres démonstrations possibles.
  • Bonjour

    Merci pour ta réponse. Je vois bien le fait que la "longueur" de la chaine doit être au plus dénombrable. Par contre pour l'argument de la somme non dénombrable, formellement comment l'écrire car les sommes ne sont définies que sur des ensembles dénombrables.
    Pour la deuxième question je voulais en fait dire infinie.
    Cet exercice vient du site de l'université d'Oslo (il était originellement en anglais).

    Pour l'existence du C (si ça marche) j'ai défini la fonction $f(t) = \int{\chi_{A}(x+t)\chi_{B}(x) dx} = \lambda((A-t)\bigcap B)$ puis on remarque que l'intégrale de cette fonction est le produit de la mesure de A avec celle de B donc est strictement positive. Ainsi la fonction ne s'annule pas presque partout et j'ai posé $C=\lambda((A-t)\bigcap B)$ pour t tel que $f(t)\neq 0$. (On peut aussi remarquer que la fonction f est continue (par continuité de l'opérateur de translation dans L1) mais je ne crois pas que ça soit utile).
  • Je prend ma première relation d'ordre, la démo est à peu près la même pour ta relation d'ordre modifiée. Si la chaîne était non dénombrable alors le majorant contiendrait une quantité non dénombrable de boréliens $C_i$ de mesure non nulle, inclus dans $A$ et tous disjoints. On regarde tous les $C_i$ de mesure comprise entre $2^{-k} $ et $2^{-k-1}$, pour chaque entier $k\in \Z$. Puisque $\Z$ est dénombrable et que les $C_i$ sont en quantité non dénombrable il existe au moins un entier $k$ telle qu'on ait une infinité (non dénombrable en fait) de $C_i$ de mesure comprise entre $2^{-k}$ et $2^{-k-1}$. La mesure de $A$ est alors plus grande que $\sum_{j=1}^\infty 2^{-k-1} = +\infty$, ce qui est absurde.

    Ok pour l'existence du $C$, c'est la même démonstration que j'avais en tête.

    C'est un exercice d'un sacré niveau tout de même.
  • Merci beaucoup. C'est très clair.

    Je trouvais aussi qu'il était dur (il était proposé à des étudiants de master 1) surtout qu'en on n'a pas l'habitude d'utiliser le lemme de Zorn.
  • Suite à une autre discussion sur le forum :

    On peut supposer $A$ et $B$ bornés (quitte à les découper et traiter morceau par morceau si besoin) et de mesure $1$. Comme les translater ne change rien on peut supposer $A, B \subset [-n;n]$. On regarde alors la fonction $\chi_{-A} * \chi_B$, elle est à support dans $[-2n;2n]$, continue, positive et d'intégrale $1$, on sait donc qu'il existe un point $x$ tel que $\chi_{-A} * \chi_B (x) = 1/4n$ et donc un borélien $C_1$ de mesure $m_1= 1/4n$ tel que $C_1\subset A$ et $C_1 + x_1 \subset B$. On recommence avec $A\backslash C_1$ et $B\backslash (C_1+x_1)$, cette fois ci on peut trouver un borélien satisfaisant aux mêmes propriétés et de mesure $m_2 = (1-m_1)^2/4n$. On recommence comme ça pour tout entier $n$ et on obtient une suite de Boréliens $C_n$ de mesure $m_n$ avec
    \[
    m_n = \frac{1}{4n}\left(1 - \sum_{k=1}^{n-1} m_k\right)^2.
    \]
    On peut donc se passer du lemme de Zorn à condition de démontrer que l'on a $\sum_{k=1}^\infty m_k = 1$ ce qui montre qu'on arrive bien à exhaustion de $A$. La suite $S_n = \sum_{k=1}^n m_k$ est croissante, notons $l$ sa limite et $a=1/4n$ pour simplifier. On a alors $S_{n+1} = S_n + a(1-S_n)^2$, par récurrence on voit facilement que $S_n\leq 1$ pour tout entier $n$. Supposons que $l$ soit strictement inférieur à $1$, pour $n$ assez grand on a $S_n$ proche de $l$ et $S_n+a(1-S_n)^2>l$ ce qui est absurde. C'est donc que $S_n$ tend vers $1$ et cela termine l'exercice.

    Pour ce qui est de l'utilisation ou non de Zorn je n'ai pas de préférence. Les deux solutions me semblent d'une complexité similaire, celle utilisant le lemme de Zorn a le mérite de faire bosser les étudiants sur l'utilisation de ce lemme, l'autre démo à le mérite de montrer que Zorn n'est pas nécessaire ce qui est toujours une gymnastique amusante/instructive mais pas forcément d'utilité "pratique" dans un cadre ou on admet sans sourciller l'axiome du choix dans toute sa généralité.
  • Merci. Vraiment instructive cette démonstration. Je me posais justement la question de savoir si ce résultat dépendait de l'axiome du choix ou non.
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