Équation fonctionnelle f(x+y)=f(x)+f(y)+etc.

Bonjour.
Je m'intéresse aujourd'hui à l'équation fonctionnelle : $f(x+y)=f(x)+f(y)+f(xy)-f(x)f(y)$, où $f$ est une application de $\R$ dans $\R$. En supposant $f$ continue en $0$, j'ai démontré qu'il y a exactement trois fonctions-solutions, pas vraiment inattendues.
J'ai trois questions.
1. Ma solution est quelque peu laborieuse, alors j'aimerais savoir si quelqu'un a une solution courte.
2. Peut-on s'affranchir de l'hypothèse "$f$ continue en 0" ?
3. Y a-t-il une référence pour cette équation, que j'ai retrouvée telle quelle dans de vieux papiers ?
Bonne soirée.
Ch.

Réponses

  • Il me semble avoir vu un poly sur les équations fonctionnelles
    Sur le site animath olympiade mathématiques française.
    Ça pourrait peut être t éclairer
  • Bonjour Chaurien,

    J'ai un petit doute sur le nombre de fonctions solution.

    Peux-tu nous exposer l'essence de ta solution. Si l'utilisation de la continuité en $0$ est essentielle, cela se verra de suite. Il sera alors temps de chercher d'autres solutions qui ne satisfont pas cette hypothèse.
  • @ zephir

    Ma méthode n'a rien d'original.

    D'abord, il est clair que la continuité en $0$ implique la continuité partout.
    Alors j'applique la méthode de "renforcement des propriétés". En intégrant, je montre que la fonction $f$ est nécessairement de classe $C^{1}$. On pourrait montrer à volonté $ C^{2}$, ..., $C^{\infty }$, mais c'est inutile ici.
    Un os : la présence du terme $f(xy)$ ne permet d'établir d'abord cette classe $C^{1}$ que sur $\R^{*}$, mais on arrive à prouver aussi ceci en $0$ aussi. C'est la seule "astuce" de ma démonstration.
    On peut alors transformer l'équation fonctionnelle en équation différentielle linéaire du premier ordre, que l'on résout selon les procédés bien connus, mais comme on a avancé par implications, il faut sélectionner, parmi les solutions de l'équation différentielle, les solutions de l'équation fonctionnelle, ce que je ne fais qu'avec des calculs laborieux et pas jolis.
    Les trois solutions sont : $f(x)=0$, $f(x)=2$, $f(x)=x$. Seule $f(x)=2$ n'est pas trop triviale, et encore...

    Maintenant, je ne suis pas d'accord avec toi sur un point : trouver les solutions supposant la continuité ne saurait nous montrer en quoi cette hypothèse est essentielle, et ne nous dit rien sur les possibilités d'autres solutions.

    @ etanche
    Il existe effectivement un excellent polycop de Pierre Bornsztein et Mounibool Omarjee sur les équations fonctionnelles, qu'on ne saurait trop conseiller à ceux qui s'intéressent à cette question. Mais je n'y ai pas trouvé celle-ci. Peut-être ai-je mal cherché ...

    Bonne soirée.
    Ch.
    12/09/2015
  • Précisions.

    J'ai oublié de préciser que je commence, hors continuité, par noter que les solutions constantes sont : $f(x)=0$ et $f(x)=2$, et je suppose $f$ non constante dans la suite. Dans ce cas forcément $f(0)=0$ et $f(1)\neq 2$.

    Etant donné que $f(0)=0$, il est immédiat que la continuité en $0$ implique la continuité partout. On peut poser : $F(x)=\int_{0}^{x}f(t)$, qui est $C^{1}$. Et l'on peut intégrer l'équation fonctionnelle proposée entre $0$ et $z$, avec $y$ variable et $x$ constant, ce qui donne : $F(x+z)-F(x)=zf(x)+F(z)+\frac{1}{x}Ff(xz)-f(x)F(z)$,
    malheureusement pour $x \neq 0$ seulement, mais comme j'ai dit, on y arrive.

    Mais le fait que tout ça accouche de $f(x)=x$ - tout ça pour ça ! - me fait penser qu'il doit exister quelque chose de plus simple, et pourquoi pas, sans continuité. Voire.

    Bonne journée, et une pensée pour nos compatriotes du Sud victimes des inondations.
    Ch.
    13/09/2015
  • Voici quelques idées pour avancer sur la question. Soit $f$ une fonction satisfaisant l'équation fonctionnelle.

    En prenant $x=y=0$, on trouve que $f(0)=0$ ou $f(0)=2$. Si $f(0)=2$ alors en prenant $y=0$ on obtient $f(x)=2$ pour tout $x$. Supposons dorénavant $f(0)=0$.

    Soit $a=f(1)$. On a $f(x+1)=(2-a)f(x)+a$.

    Si $a=1$ alors $f(x+1)=f(x)+1$ pour tout $x$, donc $f(n)=n$ pour tout $n\in \Z$. De plus, on a $f(x+n)=f(x)+n$ pour tout $n$ entier, donc en prenant $y=n$ on trouve $f(nx)=nf(x)$, ce qui permet de conclure que $f(x)=x$ pour tout $x\in \Q$.

    Si $a\ne 1$ alors la relation de récurrence $f(x+1)=(2-a)f(x)+a$ permet d'obtenir $f(n)=\frac{a}{1-a}((2-a)^n-1)$ pour tout $n$ entier. L'équation fonctionnelle pour $x,y$ entiers impose que $a=0$ ou $a=3$.

    Si $a=0$ alors on a immédiatement $f(n)=0$ pour tout $n\in \Z$ et $f(x+1)=2f(x)$ pour tout $x$.
    Prenons $x=q+1$ et $y=\frac{q+1}{q}$ avec $q\in \Z^*$. On a $xy=x+y$ donc $f(x)+f(y)=f(x)f(y)$. Comme $f(x)=0$, on en déduit que $f(y)=0$, et comme $f(t+1)=2f(t)$ pour tout $t$ il vient $f(n+\frac{1}{q})=0$ pour tout $n\in \Z$. En prenant $x=\frac{1}{q}$ et $y=n$, il vient $f(n/q)=0$, donc $f(x)=0$ pour tout $x\in \Q$.

    Si $a=3$ alors il vient immédiatement par récurrence que $f(x)=0$ pour $x$ entier pair et $f(x)=3$ pour $x$ impair. En prenant $x=1/2$ et $y=-1$, on trouve que $f(1/2)=3/2$, puis par récurrence $f(x)=3/2$ pour tout $x$ demi-entier. Or, en prenant $x=1/2$ et $y=2$ on aboutit à une contradiction.

    Conclusion :

    1) Si $f(0)=2$ alors $f(x)=2$ pour tout $x\in \Q$.

    2) Si $f(0)\ne 2$ alors $f(x)=0$ pour tout $x\in \Q$ ou $f(x)=x$ pour tout $x\in \Q$.
  • P.S. Montrons directement que si $f(1)=0$ alors $f(x)=0$ pour tout $x\in \R$.

    Comme $f(x+1)=2f(x)$, on a $f(x+n)=2^nf(x)$ pour tout $n$ entier donc en particulier $f(n)=0$ pour tout $n$ entier.

    Comme $f(x+n)=f(x)+f(n)+f(nx)-f(x)f(n)=f(x)+f(nx)$, on en déduit que $f(nx)=(2^n-1)f(x)$. En particulier, $f(2x)=3f(x)$ et $f(4x)=15 f(x)$. Or, $f(4x)=f(2(2x))=3f(2x)=9f(x)$, donc $15f(x)=9f(x)$ pour tout $x$, ce qui conclut.
  • Pour finir, supposons $f(x)=x$ pour tout $x\in \Q$. En prenant $y=1$, il vient $f(x+1)=f(x)+1$ pour tout $x$, donc par récurrence $f(x+n)=f(x)+n$.

    En prenant $y=n$, on obtient alors $f(nx)=nf(x)$.

    Remplaçons $x$ et $y$ par $2x$ et $2y$ dans l'équation fonctionnelle, il vient $2f(x+y)=2f(x)+2f(y)+4f(xy)-4f(x)f(y)$, donc $f(x+y)-f(x)-f(y)=2(f(xy)-f(x)f(y))$. Comme $f(x+y)-f(x)-f(y)=f(xy)-f(x)f(y)$, on en déduit que $f$ est un morphisme de $\Q$-algèbres de $\R$ dans $\R$.

    En particulier, $f(x^2)=f(x)^2\geqslant 0$, donc $f$ est positive sur $\R^+$.

    Comme $f(x+y)-f(x)=f(y)$, on en déduit que $f$ est croissante. Comme $f(x)=x$ pour tout $x\in Q$, on en déduit facilement que $f$ est la fonction identité.

    Conclusion : les seules fonctions satisfaisant l'équation fonctionnelle sont $f(x)=x$, $f(x)=0$ et $f(x)=2$.
  • Bravo pour cette remarquable solution.
    Bonne soirée.
    Ch.
  • (tu) JLT : effectivement, on peut se passer de la continuité de $f$.Comme d'habitude, $\N,\ \Z,\ \Q$, avec beaucoup de patience, puis morphisme de $\Q$-algèbre, enfin la monotonie. Pas trivial du tout.
  • Un passage m'a échappé, JLT. Comment justifies-tu que $a\neq 1\Rightarrow(a=0 \vee a=3)$ ?
  • Bonsoir,

    on a
    $f(4)=f(2)+f(2)+f(4)-f^2(2)$, d'où
    $f(2)= 0 $ ou $2$;

    on a
    $f(2)=f(1)+f(1)+f(1)-f^2(1)$, d'où
    $0$ ou $2 =f(1)(3-f(1))$, d'où

    $(f(1),f(2)) \in\{(0,0), (0,3) (3,0) ,(1,2),(2,2)\}$

    Correction étourderie
  • @bisam : en réinjectant $f(x)=\frac{a}{1-a}[(2-a)^n-1]$ dans l'équation fonctionnelle, si $a\ne 0$ on obtient après simplification, pour tous $x,y$ entiers :
    $$(2-a)^{x+y}=(2-a)^x+(2-a)^y+(1-a)(2-a)^{xy}+(a-2).$$

    Pour $x=y$, on a en particulier
    $$(2-a)^{2x}=2(2-a)^x+(1-a)(2-a)^{x^2}+(a-2).$$
    On a $a\ne 2$, sinon $f(0)=2$. Si $2-a$ est de module $\ne 1$, on a une contradiction en faisant tendre $x$ vers $+\infty$. Donc $|2-a|=1$, ce qui donne $a=1$ ou $a=3$.
  • Merci à tous les deux.
Connectez-vous ou Inscrivez-vous pour répondre.