Modules de présentation finie

Bonjour,

Soit $M$ un $A$-module. On appelle présentation de $M$ une suite exacte de $A$-modules : $L_1 \rightarrow L_0 \rightarrow M \rightarrow 0$ où $L_0$ et $L_1$ sont libres.

Proposition : Tout $A$-module $M$ admet une présentation. En effet, il existe un morphisme surjectif $u$ d'un $A$-module libre $L_0$ dans $M$.

(alors on aura aussi qu'il existe un morphisme surjectif d'un $A$-module libre $L_1$ dans le noyau de $u$, donc une suite exacte comme dans la définition).

Comment se démontre cette proposition ? On peut partir de l'intersection de toutes les familles qui engendrent $M$, il me semble que cela donne une famille qui engendre $M$, mais est-ce suffisant pour donner une famille libre, donc une base ?

Merci d'avance.

Réponses

  • Je ne comprends pas, tu as écrit la proposition et sa preuve, tu veux peut-être une explication sur un point particulier de la preuve ? Si oui, lequel ?

    L'intersection des familles génératrices n'est plus génératrice, tu as des contre-exemples déjà sur $\mathbb Z, \mathbb Q$
  • Merci Maxtimax. Oui, ce n'est pas clair. J'ai élargi la question car je comptais faire suivre cette question, éventuellement par une autre.

    Ma question porte précisément sur la démonstration de ce qui suit.

    Soit $M$ un $A$-module (quelconque). Alors il existe un $A$-module libre $L$ et un morphisme surjectif de $L$ dans $M$.
  • Ah, dans ce cas, tu peux prendre n'importe quelle famille génératrice de $M$ (par exemple $M$ tout entier si tu n'en as pas une que tu préfères), et prendre le module libre sur cette famille. Il s'envoie sur $M$ de manière canonique, et son image contient ta famille génératrice, donc tout $M$.
  • D'accord pour une famille génératrice $F$ de $M$, (à la limite, $M$ tout entier) : $(x_i)_{i \in I}, x_i \in F$. Alors, $\forall x \in M, x= \sum_i a_i x_i$, $a_i \in A$, somme finie.
    Alors le module libre sur $F$, c'est quoi ? En effet, la somme $\sum_i A x_i$ n'est pas forcément libre.

    En fait, je ne sais pas si le théorème vu dans les espaces vectoriels de dimension finie : de toute famille génératrice d'un espace vectoriel $E$, on peut en extraire une famille libre et génératrice, est valable dans les espaces vectoriels de dimension infinie (EDIT : oui, je viens de le voir), et dans les modules quelconques (EDIT : non, certains modules n'ont pas de base).

    Ah, je crois que tu veux parler du $A$-module libre $\oplus_i A x_i$ (qui n'est pas un sous-module de $M$ car cette écriture serait fausse) ?

    Super, ça marche. Merci beaucoup.
  • Le $A$-module libre $A^{(M)}$ se surjecte trivialement sur $M$ (pour $m \in M$, envoyer l'élément de base $e_m = (m \mapsto 1)$ sur $m$).
  • C'est un peu compliqué.

    Si je ne dis pas de bêtises (merci de me reprendre sinon) :

    $A^M$ est l'ensemble des familles d'éléments de $A$ indexées par $M$ (i.e. l'ensemble des applications $M \rightarrow A$).
    $e_m = (m \mapsto 1, n \mapsto 0,$ si $n \ne m$) en est une ; $(e_m)_{m \in M}$ est une base de $A^M$ sur $A$.
    $A^{(M)}$ est l'ensemble des familles à support fini ; de même base $(e_m)_{m \in M}$ sur $A$. Donc $A^{(M)}$ est un $A$-module libre. La surjection est évidente.

    Alors pourquoi ne pas prendre $A^M$, qui est un $A$-module libre aussi ?

    On remarque au passage que $A^{(M)} \not \cong A^M$ (si $M$ est infini), et ont même base ?
  • Hello,

    Comment écris-tu la fonction constante égal à $1$ comme combinaison linéaire d'éléments de " ta base " $(e_m)_m$ de $A^M$ ?
  • Une famille $(a_m)_{m \in M}$ de $A^{(M)}$ s'écrit $\sum_{m \in M} a_m e_m$ (somme finie) (les deux applications coïncident sur $M$).

    Une famille $(a_m)_{m \in M}$ de $A^M$ ne s'écrit pas en général (la fonction constante égale à $1$ s'écrirait $\sum_{m \in M} e_m$, cela ne veut rien dire).

    Cela veut dire que $(e_m)_{m \in M}$ n'est pas une base de $A^M$, ou bien simplement qu'on ne peut pas écrire ses éléments sous forme d'une somme ?

    J'ai du mal avec ça, je suis obligée à chaque fois de refaire le raisonnement.
  • Oui $(e_m)_m$ n'est pas une base de $A^M$, c'est une famille libre mais pas génératrice en général !
  • Merci flipflop.

    Ah, parce que par définition, un $A$-module est dit libre s'il possède une partie libre et génératrice $(x_i)_{i \in I}$ (i.e. une base), i.e. telle que tout élément du module s'écrit de manière unique sous forme d'une somme $\sum_i a_i x_i$, combinaison linéaire des $x_i$ pondérée par les $a_i \in A$, les $a_i$ étant presque tous nuls. Donc en effet $(e_m)_{m \in M}$ n'est pas une base de $A^M$, car la somme fait partie intégrante de la définition d'une base.
  • Attention, $A^M$ est un produit et $A^{(M)}$ est une somme directe, et les deux se comportent très différemment dès que $M$ est infini. Par exemple il est bien connu que $\mathbb Z^{\mathbb N}$ n'est pas libre.
  • (A vrai dire, voilà un théorème amusant qui montre à quel poitn $\mathbb Z^\mathbb N$ n'est pas libre : les projections sur la $i$-ème coordonnée induisent un isomorphisme $\hom(\mathbb Z^\mathbb N,\mathbb Z)\cong \mathbb Z^{(\mathbb N)}$)
  • Dans tous les cas, pour $M$ un $A$-module, le $A$-module $M^I$ n'est pas libre dès que $I$ est infini ?
  • Il peut l'être, par exemple si $A$ est un corps. Tout ce qu'on prétend ici c'est qu'il ne l'est pas en général, et que si $A$ est non nul et $I$ infini, alors $A^I \neq A^{(I)}$
  • Tu veux dire que par exemple $\mathbb Q ^ {\mathbb N}$ a une base ?

    Peux-tu être plus clair ?
  • Avec l'axiome du choix, tout espace vectoriel admet une base (appliquer Zorn à l'ensemble inductif des familles libres dudit espace vectoriel). Donc oui $\mathbb Q^{\mathbb N}$ et même $\mathbb R$ admettent des $\mathbb Q$-bases si tu crois en l'axiome du choix, mais tu ne risques pas de les voir de tes propres yeux.
  • Merci Poirot. Oui, je m'en suis rendue compte entre-temps. Tout espace vectoriel, donc en particulier $M^I$ pour $M$ un espace vectoriel est un espace vectoriel et admet une base si on admet l'axiome du choix. Mais on ne sait pas forcément la construire : sachant que toute chaîne de familles libres admet un majorant, on obtient grâce au lemme de Zorn équivalent à l'axiome du choix, une famille libre maximale pour cette propriété, qui est alors une base.

    Comment sait-on qu'on n'est pas capable de la construire ?
  • C'est une question subtile. Il existe des modèles de $\mathsf{ZF}$ sans base de Hamel (c'est-à-dire $\mathbb Q$-base de $\mathbb R$), par exemple le modèle de Solovay où toute partie de $\mathbb R$ est Lebesgue-mesurable (on montre, dans $\mathsf{ZF} + \mathsf{DC}$ il me semble, qu'une base de Hamel est nécessairement non mesurable). Si tu parviens à expliciter une telle base, tu auras trouvé une contradiction dans $\mathsf{ZF}$ !
  • Pas compris (je ne sais pas comment s'articulent les modèles, si AC est un modèle par exemple), mais c'est pas grave.
  • Non, $\mathsf{AC}$ c'est l'axiome du choix.
  • Cela je le sais (heureusement). Pour avoir une base de Hamel, il faut aussi avoir l'AC, donc je ne comprends pas que la contradiction porterait sur ZF et non pas sur ZFC.
  • Dans ZF l'axiome du choix est équivalent à l'existence d'une base dans tout espace vectoriel http://www.math.lsa.umich.edu/~ablass/bases-AC.pdf.

    Par conséquent, si dans ZF tu arrives à montrer qu'une base existe dans tout e.v. tu auras automatiquement montré que l'axiome du choix se prouve dans ZF ce qui est une contradiction car ZF+(non)AC est aussi une théorie cohérente.

    Edit : après avoir relu je me rends compte que ce que dit Poirot est plus subtil que ça car il est question de base de Hamel que j'ai zappé...
  • Tu dis "si AC est un modèle par exemple", je te réponds que AC n'est pas un modèle mais un axiome, donc je ne comprends pas ta réaction.

    Si $\mathsf{ZF}$ est consistante, il existe des modèles de $\mathsf{ZF}$ (théorème de complétude) et alors il existe des modèles de $\mathsf{ZFC}$ (théorème de Gödel des années 30). A partir d'un modèle de $\mathsf{ZFC}$, on peut construire des modèles de $\mathsf{ZF}$ où il n'y a pas de base de Hamel (c'est là que toute la difficulté est cachée, ça n'a absolument rien d'évident, le modèle de Solovay est un bon candidat mais nécessite une hypothèse de grand cardinal, le modèle de Shelah n'en a pas besoin). Donc si tu montres l'existence dans $\mathsf{ZF}$ d'une base de Hamel, tu as établis la non consistance de $\mathsf{ZF}$.

    Le passage par des modèles de $\mathsf{ZFC}$ n'est peut-être même pas obligatoire, je ne suis pas expert en le domaine.
  • Ok merci raoul.S, j'ai compris ce que tu dis.
Connectez-vous ou Inscrivez-vous pour répondre.