Déterminant et changement de corps de base

Ne vous pressez pas de répondre avec de gros outils, j'ouvre ce fil pour construire une preuve sans background (sur la durée) d'un théorème de Paul Broussous énoncé et prouvé "savamment" dans un autre fil.

Je me contente de l'énoncer pour l'instant, pour ne pas oublier. Évidemment si vous trouvez une preuve sans background, il n'est pas interdit de la poster.

Énoncé : soient $A,B$ des corps commutatifs tels que $A$ est un sous-corps de $B$, avec $B$ de dimension finie quand on le regarde comme espace vectoriel naturel sur $A$.

Soit $E$ un espace vectoriel sur $B$ de dimension finie.
Soit $f\in E^E$ qui est $B$-linéaire.

Notez qu'elle est donc aussi $A$-linéaire.

Soit $x\in B$. Alors $[y\in B\mapsto xy]$ est une application linéaire de l'espace vectoriel $B$ dans lui-même vu comme espace sur sur le corps $A$ et elle a donc un déterminant dans $A$ que je note $D(x)$.

[large]Le théorème de Paul dit que :
$$
det_A(f) = D (det_B(f))

$$[/large]
J'espère qu'avec le temps le présent fil permettra de donner une "preuve à tout le monde" sans peiner à la lire qui maîtrise les données de l'énoncé. C'est le but de ce fil. Personnellement, je n'ai pas assez de temps en ce moment d'avoir fait autre chose que de l'ouvrir.

Pour les gens qui ont du bagage, la preuve avec des outils est ---> http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?3,2279552,2280374#msg-2280374
Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi

Réponses

  • Je veux bien de la paternité de la démonstration, mais pas de l'énoncé. D'ailleurs le mot "théorème" me semble exagéré ici.

    Je pense que l'on doit pouvoir se passer de la connaissance du groupe dérivé de $GL(n)$. Ca n'est pas très naturel de passer par là.
  • Je ne suis pas du tout spécialiste mais dans le Gozard il y a un théorème identique (transitivité "forte" des traces et des normes) dans le cas particulier où $E$ est un corps qui étend B.

    Je ne sais pas si la preuve qui s'y trouve peut se généraliser à $B$-ev de dim finie, il faudrait que je la lise d'abord...


    PS. ce qu'il note $N$ c'est $\det$. D'ailleurs ceci suggère qu'on devrait avoir la même généralisation avec la trace.125266
  • Cet énoncé n'est pas si général car il y a des endomorphismes du $K$-ev $M$ qui ne sont pas des produits par un élément de $M$ et plus généralement des ev sur $L$ qui ne sont pas des corps (par exemple si $L=\C$).
  • Ça ressemble furieusement à Bourbaki, Algèbre, chapitre III, paragraphe 9, n°4, prop 6. Est-ce que je manque quelque chose?

    (Dans le contexte de cette proposition, $K$ désigne un anneau commutatif et pas nécessairement un corps)125268
  • C'est bien ça. Dans le Bourbaki c'est encore plus général.
  • Le résultat est évident lorsque $f$ est une transvection ou une dilatation, donc il est vrai dans le cas général par multiplicativité des deux membres. Ai-je raté quelque chose ?
  • Un très grand merci à vous tous. Je vais éplucher ça avec grand soin mais dans le temps. J'attends avec gourmandise les réactions au post de JLT qui semble "voir", du fait de sa maitrise supérieure à la mienne de ces sujets que ce serait au fond presque trivial.
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  • Bonjour,

    On peut préciser que les transvections forment un système de générateurs d'un certain groupe.

    Cordialement,

    Rescassol
  • JLT : c'est exactement l'argument de Paul dans l'autre fil ;-)
  • Oui c'est la même idée mais je n'ai pas parlé de groupe dérivé.
  • Bien vu, Raoul.S ! La preuve de Bourbaki se base sur le lemme suivant (je l'énonce sur un corps $K$, mais il est valable dans un cadre plus large). Soient $n$ et $d$ deux entiers $\geqslant 1$. Soit $D((X_{ij})_{ij})$ le polynôme déterminant vu comme élément de $\Z [X_{11},...,X_{nn}]$. Pour $i,j=1,...,n$, soient $M_{ij}$ $n^2$ matrices de $M_d (K)$ qui commutent deux à deux. Soit $M$ la matrice de taille $nd\times nd$ qui est donnée par blocs $M=(M_{ij} )_{ij}$. Alors le déterminant de $M\in M_{nd} (K)$ est le déterminant de $D(M_{11},...,M_{nn})\in M_{d}(K)$.

    L'intérêt de ce point de vue est bien sûr qu'il n'y a plus de changement de corps de base : tout se passe sur $K$. Si $L/K$ est un extension finie, on voit un endomorphisme $f\in End_L (L^n )$ comme une matrice par blocs dans $M_n (M_d (K))$, $d=[L:K]$, en regardant un élément $x$ de $L$ comme le $K$-endomorphisme de $L$ de multiplication par $x$ (après avoir fixé une base de $L$ sur $K$).
  • De mon téléphone je ne sais pas pourquoi le latex s'affiche minuscule, mais je crois apercevoir que le determinant d'une.matrice carrée dont les clefs sont des matrices carrées commutant entre elles qui est une matrice carrée résultat a son déterminant égal au déterminant de la grosse vue en effaçant les bordures et en la voyant comme à coefficients dans l'anneau initial.

    Merci Paul, en espérant ne pas me tromper.
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  • Elle est marrant la condition "qui commutent entre elles"
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  • Elle suggère que cela pourrait venir d'une identité au niveau des algèbres extérieures, dans l'esprit de ce qu'espérait Maxtimax naguère.
  • En tout cas, la commutativité des matrices semble nécessaire ne serait-ce que pour énoncer le résultat: puisqu'il est question d'évaluer un polynôme en des matrices, mieux-vaut qu'elles commutent entre elles.
  • C'est un peu mon ressenti (de béotien).

    Pour la commutation, chat, cela provient peut-être du fait de la commutativité qui nous conduit à la négligence que quand on dit que le déterminant de
    $$
    \begin{pmatrix}
    a&b\\
    c&d
    \end{pmatrix}

    $$ est $ad-bc$, on s'en fiche un peu que ce soit aussi $ad-cb$, ce dernier étant la "bonne" écriture avec la formule avec la signature, etc ?

    Pour les visiteurs paresseux, l'énoncé que Paul a extrait à son dernier post est la généralisation du fait que le déterminant de
    $$
    \begin{pmatrix}
    A&B\\
    C&D
    \end{pmatrix}

    $$ est le déterminant de $AD-BC$ sous l'hypothèse que les 4 matrices $A,B,C,D$ commutent entre elles.
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  • On peut démontrer le lemme utilisé dans la preuve de Bourbaki et cité par Paul Broussous comme ceci. Par exemple pour $n=2$. Soit $K$ un corps, soit $A,B,C,D$ des matrices de $M_d(K)$ qui commutent deux à deux. Soit $M=\begin{pmatrix} A&B \\ C& D \end{pmatrix}$. Si on se place dans la clôture algébrique de $K$, alors $A,B,C,D$ sont trigonalisables dans une même base.

    $A'=PAP^{-1}, \dots,D'=PDP^{-1}$, avec $A', \dots, D'$ trigonales supérieures.

    Donc, si par exemple $d=2$, $\det \begin{pmatrix} A & B \\ C & D \end{pmatrix}=\det \begin{pmatrix} A' & B' \\ C' & D' \end{pmatrix}=\det \begin{pmatrix} \lambda_1& \alpha& \mu_1& \beta \\0&\lambda_2&0&\mu_2 \\ \nu_1& \gamma& \rho_1& \delta \\0& \nu_2&0& \rho_2 \end{pmatrix}=\det \begin{pmatrix} \lambda_1& 0& \mu_1& 0 \\0&\lambda_2&0&\mu_2 \\ \nu_1& 0& \rho_1& 0 \\0& \nu_2&0& \rho_2 \end{pmatrix}$.

    En effet, pour la dernière égalité, en imaginant le développement du déterminant sous forme $\sum_{\sigma}\epsilon ( \sigma ) \Pi_i m_{i,\sigma(i)}$, on voit que forcément les termes $m_{i,\sigma(i)}$ qui comptent, sont sur les diagonales de $A',B',C'$ ou $D'$.

    Finalement, par permutation des lignes et des colonnes, $\det M= \det \begin{pmatrix} \lambda_1 & \mu_1 &0&0\\ \nu_1 & \rho_1 &0&0\\ 0&0 &\lambda_2 & \mu_2\\0& 0 &\nu_2 & \rho_2\end{pmatrix}= \det \begin{pmatrix} \lambda_1 \rho_1- \nu_1 \mu_1 &0 \\ 0 &\lambda_2 \rho_2- \nu_2 \mu_2 \end{pmatrix}=\det (A'D'-C'B')=\det (AD-CB)$
  • Merci marco. On "imagine bien" le plan pour prouver le cas général avec les matrices, mais je pense qu'on peut l'admettre car là, pour le coup, il s'agit d'une égalité calculatoire pure.

    Peut-être serait-il intéressant d'écrire quelques mosts (que je pourrais reprendre et rédiger en détails plus tard) qui ADMET la version matricielle et EN DEDUIT la version intrinsèque? Certes le déterminant ne dépend pas de la base, mais c'est peu rigoureux de se contenter de ça.
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  • Peut-on se placer sur $\C$ et utiliser la densité des matrices diagonalisables ? Je ne sais pas car il faut que les matrices commutent.
  • Soit $A_1, \dots, A_k$ des matrices à coefficients complexes qui commutent. Existe-t-il des suites de matrices $B_1(n), \dots, B_k(n)$ diagonalisables qui commutent (c'est-à-dire $B_i(n)B_j(n)=B_j(n)B_i(n)$) et telles que $B_i(n)$ tend vers $A_i$, lorsque $n$ tend vers $+ \infty$ ?
  • Ta question en soi est géniale, je la reproduis dans "il est facile de".

    J'avoue que pour le reste, je ne sais pas. Peut-être que l'idée de JLT, une fois détaillée, devient "évidente", je ne sais pas je n'ai pas trop le temps en plus d'alimenter occasionnellement mon fil "quantique".
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  • Il me semble que la réponse à la dernière question de Marco est non: si c'était le cas tout sous-espace de $M_n(\mathbb{C})$ composé de matrices commutants deux à deux serait de dimension au plus n. Or, on peut facilement construire de tels sous-espaces de dimension plus grande par exemple $\begin{pmatrix} 0 & M_3(\mathbb{C}) \\ 0 & 0 \end{pmatrix}$ dans $M_6(\mathbb{C})$.
  • Merci PEA.
    Je me dépêche de taper une proposition. Je ne redéfinis pas ce que veut dire "abélianisé d'un monoïde associatif". Sauf si quelqu'un demande.

    Je propose D'ADMETTRE l'énoncé suivant (qui semble être connu et vrai, d'après mes souvenirs de forum) :

    pour tout corps commutatif $K$ l'abélianisé de $M_n(K)$ est isomorphe, via $\det$, à $(K,\times)$

    Peut-on TRIVIALEMENT déduire l'énoncé initial de Paul de cet énoncé ?

    À vue de nez, ça m'a l'air intéressant de l'aborder comme ça. Ce que Paul a nommé "norme" par exemple va donner un petit parfum de difficulté légère dont j'ignore si elle peut être levée.
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  • Attention, Christophe, que l'abélianisé de ${\rm GL}(2,{\mathbf F}_2 )\simeq {\mathfrak S}_3$ n'est pas isomorphe à ${\mathbf F}_2^\times$, qui est trivial. En effet ${\mathfrak A}_3$ est distingué dans ${\mathfrak S}_3$ et le quotient est abélien non trivial !
  • P.S. Peut-on changer le titre du fil ? Merci !

    Fait.
  • Ah oui merci j'avais un souvenir trop vague. J'ai même hésité à mettre "tout anneau" :-D

    Je ne connais pas l'énoncé formel exact.

    Et au fait pardon pour le titre, j'avais dans le projet de le changer en mettant "Paul" tout court et j'ai oublié par la suite (j'ai tendance à voir tous pseudo comme un code anonymise alors qu'une partie des intervenants mettent leur nom)
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  • Merci Pea. Mais pourquoi si la réponse à la question est oui, tout sous-espace de matrices commutant deux à deux est de dimension au plus $n$ ?
  • Peut-être il faut prendre la limite de la suite des sous-espaces engendrés par les $B_1,\dots, B_k$ qui est bien de dimension au plus $n$.
  • Bonjour Paul, est-ce qu'il y a une autre démonstration du lemme utilisé dans Bourbaki ?
  • Marco : je ne sais pas du tout !
  • Merci pour ta réponse.
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