K-theorie

Bonjour,
Pourriez-vous m'expliquer pourquoi, si $X$ est un espace compact, $K^0(X)$ est egal a $\pi_1(GL_\infty(C(X))$ ?
En cherchant sur le web, j'ai trouve que l'on definissait generalement $K^0(X)$ en terme de modules projectifs de type fini sur $C(X)$.
Et y-a-t-il une difference entre $K_0(X)$ et $K^0(X)$ ?

Réponses

  • C'est quoi C(X)? Les modules projectifs de type fini c'est grosso-modo la meme chose que les fibres vectoriels: le faisceau des sections d'un fibre forme un module projectif de type fini. Comme K^0(X) c'est le goupe des fibres vectoriels... Mais bon je suis nul en K-theorie je n'en sais pas plus.
    Mauricio
  • C(X) c'est l'ensemble des fonctions continues de X dans $\C$.
    Mais je ne vois pas comment relier le groupe des fibres vectoriels à
    $\pi_1 (GL_\infty(C(X)))$.
  • Bonjour !

    Alors pour commencer, il y a plusieurs types de K-théorie: la K-théorie topologique, et la K-théorie algébrique. La K-théorie topologique se sépare en plusieurs branches: la K-théorie différentielle, qui s'intéresse aux fibrés vectoriels, et la K-théorie des C*-algèbres (ce sont des algèbres de Banach dont la norme vérifie en plus la condition $||x^*x|| = ||x||^2$)

    Si $A$ est une algèbre d'opérateurs, on note $K_i (A)$ ses groupes de K-théorie, et si $X$ est un espace topologique (disons raisonnable, comme localement compact, mais peut-être qu'il faut plus), on note $K^i (X)$ ses groupes de K-théorie, tout ça pour la raison que $K_i$ est covariant, et $K^i$ est contravariant.

    Or, il se trouve que les algèbres de fonctions continues à valeurs complexes sont des C*-algèbres. (et d'ailleurs mieux, toutes les C*-algèbres commutatives sont des algèbres du type $C_0(X)$, l'algèbre des fonctions continues sur $X$ tendant vers zéro à l'infini, avec $X$ localement compact).

    Et là, ça devient magique, car $K^i (X) = K_i (C(X))$.

    Le groupe $K_0 (A)$ (donc pour les algèbres d'opérateurs, hein ?) est construit à partir des classes d'équivalence de projecteurs de $M_\infty (A)$ (espace de toutes les matrices n*n pour tout n), alors que $K^0 (X)$ est construit à partir des classes d'isomorphie de fibrés vectoriels (orientés, je crois). Le fait que $K_0 (C(X)) = K^0 (X)$ est fait en passant par les modules projectifs de type fini: pour $K^0$, les modules en question sont les sections des fibrés, qui sont des $C^\infty (X)$ modules, et pour $K_0$, les modules sont les espaces des matrices, ce sont des $A$-modules, où $A = C(X)$ dans le cas qui nous intéresse. On voit que ça se ressemble pas mal, et il faudra probablement un peu de géométrie des fibrés pour pouvoir dire que c'est la même chose, et construire l'isomorphisme.

    Maintenant, revenons à la question initiale: pour les C*-algèbres, le groupe $K_1 (C(X))$ (on va dire X compact, histoire que l'algèbre ait une unité) est construit comme l'espace des matrices inversibles à coefficients dans $C(X)$, modulo la relation &quotil existe un chemin continu de matrices inversibles qui relie mon inversible à l'identité&quot. Formellement: $K_1 (C(X)) = GL_\infty (C(X)) / GL_\infty (C(X))_0$. Donc en fait, on va compter le nombre de composantes connexes de $GL_\infty (C(X))$, ce qui revient à dire $K_1 (C(X)) = \pi_0 (GL_infty)$.

    Bon, maintenant, on va transformer $K_1$ en $K^0$ et $\pi_0$ en $\pi_1$ par l'opération dite de suspension, et l'utilisation d'un théorème de périodicité qui dit que $K_1 (SA) = K_2 (A) = K_0 (A)$.

    On définit la suspension d'une C*-algèbre $A$ comme:

    $SA = \{ f : [0,1] \longrightarrow A \quad f(0) = f(1) = 0 \} $

    On se rend compte que compter le nombre de composantes connexes de $SA$, c'est calculer $\pi_1$, donc on doit bien trouver quelque chose comme $K^0 (X) = K_0 (C(X)) = K_1 (SC(X)) = \pi_1 (GL_\infty (C(X))$.

    Si tu veux des références pour la K-théorie, je te conseille le bouquin de Wegge-Olsen pour la K-théorie des C*-algèbres, il est très bon, et didactique, et sinon, le bouquin d'Attiyah (un t ? deux t ?) pour la K-théorie des fibrés vectoriels (je l'ai pas lu, celui-là, je peux pas te dire s'il est bon ...)
  • Dieu ce que Globul explique bien.
    Je n'ai jamais vu un gars aussi bien expliquer les maths.

    ;-)

    Au fait, la périodicité de Bott (un t, deux t???), elle tue!
  • Merci beaucoup. Genial !
  • Trés bien expliqué , Karoubi n'aurait pas fait mieux.............
    Tu pourrais pas nous dire qq mots sur Riemann-Roch en K-theorie
    merci
  • Hum ... j'ai bien peur que ça ne soit pas dans mes cordes ... je ne connais même pas l'énoncé du théorème ...
  • cool ! et moi qui n'avais pas pris de notes au dernier exposé... :-)

    Le problème pour les fibrés orientables, c'était l'exemple de $S^1$ je crois (fibré en droites réelles orientable => trivial, et une seule classe non triviale si pas orientable)? La définition du Hatcher change un peu (fibrés complexes, relation d'équivalence $E_1 \sim E_2 \Leftrightarrow E_1\oplus\epsilon^n \simeq E_2\oplus\epsilon^m$, avec $\epsilon^n$ le fibré trivial de dimension n.

    A+
  • Globul: merci pour tes explications mais est-ce que tu peux expliciter comment on definit K_0(C(X)) et l'isomorphisme avec le groupe de K-theorie habituel. L'exemple de Rouquin est bien car il y un seul fibre non trivial donc le groupe K_0(S^1) est Z/2Z (c'est bien ca?)
    Au fait
    1. K_0(C(X)) c'est ce que l'on appelle la KK-theorie?
    2. Est ce qu'il y a une relation avec le theoreme de Connes qui dit que l'algebre de Hochschild de C^infini(X) est quasi-isomorphe a de Rham de X?
    Mauricio
  • Pour ceux que ça interesse, le Wegge-Olsen (K theory and C* algebras) se trouve ici:
    <BR><a href=" <"> <</a><29>>http://lib.org.by/_djvu/M_Mathematics/MC_Calculus/MCf_Functional<BR&gt;
  • Cool ! et moi qui n'avais pas pris de notes au dernier exposé... :-)

    Le problème pour les fibrés orientables, c'était l'exemple de $S^1$ je crois (fibré en droites réelles orientable => trivial, et une seule classe non triviale si pas orientable)? La définition du Hatcher change un peu (fibrés complexes, relation d'équivalence $E_1 \sim E_2 \Leftrightarrow E_1\oplus\epsilon^n \simeq E_2\oplus\epsilon^m$, avec $\epsilon^n$ le fibré trivial de dimension n.

    A+
  • Alors, la construction de $K_0$ (pour les algèbres):

    Tu prends A ta C*-algèbre, on va dire qu'elle a une unité. Tu considères alors $M_\infty (A)$, la limite inductive des matrice carrées n*n, ou tu plonges n*n dans (n+1)*(n+1) en complétant par des zéros.


    Tu considères là dedans les projecteurs (ie $p \in M_\infty (A)$ tq $p = p^2 = p^*$. Tu définis une classe d'équivalence de projecteurs. Tu as trois manières de définir:
    - $p \sim q$ s'il existe $v$ (appelée isométrie partielle) tq $vv^* = p$ et $v^* v = q$. C'est l'équivalence de Murray -- Von Neumann.
    - $p \sim_u q$ si il exist $u$ unitaire tq $p = u q u^*$. C'est l'équivalence unitaire.
    - $p \sim_h q$ s'il existe un chemin continu de projecteurs de l'un à l'autre. (homotopie). (le chemin peut impliquer des projecteurs plus gros que $p$ et $q$.

    Il se trouve que dans $M_\infty (A)$, la garantie de pouvoir prendre des matrices plus grandes garantit que ces trois notions d'équivalence de projecteurs sont ... équivalentes.

    Bon, maintenant, tu munis $M_\infty(A)$ de la loi $p \oplus q = $ la matrice diagonale avec $p$ et $q$ sur la diagonale et $0$ ailleurs, et tu quotientes le tout par ta relation d'équivalence. La loi d'addition passe au quotient, et tu as un monoïde : $V(A)$.

    Maintenant, tu prends le groupe de Grotendieck de $V(A)$, et tu obtiens $K_0 (A)$. Pour résumer, les éléments de $K_0 (A)$ sont les différences formelles $x = [p] - [q]$, et $x = 0$ si $\exists n \geq 0$ tq $p \oplus 1_n \sim q \oplus 1_n$.

    Alors je sais pas trop comment construire l'isomorphisme (je connais pas vraiment la K-théorie des fibrés, mais là, comme ça, je dirais que tu peux faire agir tes projecteurs sur les fibrés triviaux pour obtenir des fibrés pas forcément triviaux. Il faut vérifier que ça passe au quotient, mais la condition du Hatcher que Rouquin a donnée:
    $E_1 \sim E_2$ ssi $\exists n \geq 0$ tq $E_1 \oplus \epsilon_n \sim E_2 \oplus \epsilon_n$
    a l'air de ressembler à la condition $x = 0$ ci-dessus.

    Sinon, je propose de faire un peu d'architecture inversée: on a $K_0 (C(S^1)) = \Z$, et les seuls projecteurs des projecteurs triviaux (issus du fait qu'on a une unité: ils sont équivalents à des projecteurs de $M_\infty (\C)$). On a donc $K^0 (S^1) = \Z$, et le groupe est généré par la classe du fibré trivial de dimension 1. (attention, il existe peut-être des $\C$-fibrés non triviaux sur $S^1$, mais modulo la somme directe par un fibré trivial assez grand, ils doivent tous être triviaux).

    Pour $S^2$, on a $K_0 (C(S^2)) = \Z \oplus \Z$. L'un des deux est engendré par les projecteurs triviaux, l'autre par la projection de Bott. Donc normalement, même modulo la stabilisation, on doit avoir des fibrés non triviaux sur $S^2$. Je pense au fibré tangeant : Rouquin --> ce qui me troublait, c'était que si on fait la somme du fibré tangeant et du fibré normal (qui est trivial), on obtient un fibré trivial (du moins je crois ?), mais on n'a le droit qu'au $\C$-fibrés, je crois que c'est là qu'est l'astuce :)

    Sinon, la KK-théorie est un développement de la K-théorie : tu as un foncteur à 2 arguments, bivariant, mais j'y connais rien, et il paraît que c'est super dur.
  • Vu que mon message a été modifié; je précise que l'on peut trouver le Wegge-Olsen à l'adresse indiqué.
  • Merci pour le lien !
  • Globul merci, j'ai imprime ta reponse si j'ai des questions je te les enverrais plus tard.
    Mauricio
  • Salut Globul,
    1. Je n'ai pas compris la loi d'addition. Ca veut dire quoi p+q=...
    p et q sont des matrices semi-infinies, qu'est-ce que tu entends par p et q sur la diagonale.
    2. Si je prends A=endomorphisme de l^2(C) que vaut K_0(A).
    3. quelle est l'opération qui correspond à la suspension de la K-théorie habituelle ?
    Merci,
    Mauricio
  • Bonjour,
    Je crois que p et q sont des matrices finies.
    $p+q= \Big( \begin{array}{11}
    p & 0 \\
    0 & q \\
    \end{array}
    \Big)$
    et si on pose $u=\Big( \begin{array}{11}
    0 & p \\
    q &0 \\
    \end{array}
    \Big)$, on a $p+q=u u^*$ et $q+p=u^* u$ donc $p+q \sim q+p$
  • Oui, $M_\infty$ est l'espace des matrices arbitrairement grandes, mais finies, et l'addition est bien définie comme l'a dit marco.

    Si $H$ est un espace de Hilbert complexe (comme $l^2 (\C)$, par exemple), si on note $B(H)$ l'espace des opérateurs bornés, c'est une C*-algèbre, de même que toute sous-algèbre involutive fermée pour la norme subordonnée. Dans cette algèbre, les projecteurs sont caractérisés par leur rang (ou la dimension de l'espace sur lequel ils projettent), qui est $n$ entier, ou l'infini. Deux projecteurs de même rang sont équivalents (considérer $v$ l'isométrie partielle qui envoie l'image de p sur l'image de q isométriquement, alors $vv^* = p$ et $v^*v = q$). On a donc $V(B(H)) = \N \cup \{ \infty \}$, et en construisant le groupe de Grotendieck, $K_0 (B(H)) = 0$ (car l'infini est absorbant)
    Par contre, si tu considères les opérateurs compacts $K(H)$, tu n'as pas de projecteur de rang infini, donc $K_0 (K(H)) = \Z$.

    L'opération correspondant à la suspension pour les espaces topologiques est la suspension que j'ai définie dans mon premier post : $SC(X) = C(SX)$, tu peux t'en convaincre par curyfication des fonctions.

    J'espère que ça répond à tes questions !
  • Marco Globul, merci pour les reponses.
    Ok pour la suspension mais est-ce que l'on "voit" la periodicite
    de Bott dans ce contexte.
    Pour le reste, je vais y reflechir.
    Mais quelque chose me chiffonne dans K^0(S^1) est engendre par le ruban de Mobius n'est-ce pas? Donc K^0(S^1)=Z/2Z et pas Z??
    Mauricio

  • Non non,

    Mon exemple avec le cercle ne voulait pas dire ça, je m'étais mal exprimé. Par contre, ce qui est vrai c'est que les fibrés en droites réelles sur le cercle modulo isomorphisme forment un groupe pour le *produit tensoriel* isomorphe à $\Z/2\Z$, engendré par la classe du moebius. Mais c'est de la cohomologie, pas de la K-théorie.

    J'essayais de comparer à ce que je connaissais. En sachant que la K-théorie du cercle est $\Z$, ce que je voulais dire c'est que puisqu'il y avait deux fibrés "différents" sur $S^1$, soit ils avaient la même classe en K-théorie, soit il ne fallait pas considerer les fibrés non-orientables dans la définition. Puis j'ai lu le Hatcher, et la définition repose sur les fibrés complexes(ça change beaucoup de choses, il y a plein de classes d'isom de fibrés en droites complexes sur le cercle, pas juste deux), de toutes dimensions, et la loi n'est pas le produit tensoriel mais la somme sirecte, les inverses étant pris formellement (groupe de grothendieck), et la relation d'équivalence est pas la même, donc ma remarque sur le cercle n'a plus d'interet...

    D'ailleurs, j'ai du mal à m'habituer à la relation d'équivalence utilisée pour la K-théorie. Effectivement le fibré tangent d'une sphère a l'air de devenir trivial si on rajoute le fibré normal (d'un plongement dans une sphère plus grosse, par exemple) c'est marrant :-)

    A+
  • Rouquin: Pourquoi dis tu que c'est de la cohomologie?
    Donc tu pretend K^0(S^1)=Z. Alors quel est le generateur? que vaut deux fois le generateur.
    Pour S^2, tu la plonge dans R^3 tu as fibre normal+fibre tangent=fibre trivial donc en K-theorie normal=-tangent.
    Mauricio
  • Sauf erreur de ma part, le fibré normal est trivial donc
    $ [T_{S^2}] = - [N_{S^2/\R^3}] = 0.$
    Le générateur est donné par le fibré canonique sur $S^2 = \mathbb{P}^1(\C)$.
  • YB: tu as raisons plonge ta sphere dans S^2 et prend le champ de vecteur radial. Donc K^0(S^2)=Z mais est-ce que l'on pourrait se mettre d'accord sur
    K^0(S^1).
    Mauricio.
  • Je crois que tu confonds K-theorie et K-theorie réduite.

    Pour tout espace compact $X$, on note $K^0(X)$ le groupe de Grothendieck des fibrés vectoriels complexes sur $X$. C'est le groupe des classes d'isomorphismes de fibrés modulo la relation
    $$
    E \sim F \Leftrightarrow \exists\, n,~ E \oplus \theta^n \simeq F\oplus \theta^n
    $$
    où $\theta$ est le fibré trivial.

    Le choix d'un point-base définit une section de la projection $X\to *$ sur le point et donc un projecteur $X\to * \to X$. Par fonctorialité de $K^0$, on en déduit un projecteur de $K^0 (X)$ et donc une décomposition
    $$
    K^0(X) = K^0(*) \oplus \tilde{K}^0(X) = \Z \oplus \tilde{K}^0(X)
    $$
    où le groupe $\tilde{K}^0(X)$ est la K-théorie réduite de $X$.
    $\tilde{K}^0(X)$ est le groupe des classes d'isomorphismes de fibrés modulo la relation
    $$
    E \sim F \Leftrightarrow \exists\, n,m~ E \oplus \theta^n \simeq F\oplus \theta^m
    $$
    On dit alors que $E$ et $F$ sont stablement isomorphes.

    Pour $X$ localement compact, on définit $K^0(X) = \tilde{K}(X_+)$ comme la K-théorie réduite de son compactifié d'Alexandrov. On retrouve bien la même définition pour $X$ compact car dans ce cas $X_+ = X\amalg *$.


    Le résultat de base de la théorie dit que $K^0(B^n,S^{n-1}) = K^0(\R^{n}) = \tilde{K}^0(S^{n}) = \Z$ si $n$ est pair et $0$ sinon. Le théorème de périodicité de Bott dit juste que le cup-produit avec un générateur de $\tilde{K}^0(S^{2})$ est un isomorphisme
    $$
    K^0(X) \simeq K^0(X) \otimes K^0(\R^{2})
    \simeq K^0(X\times R^{2}) = K^{-2}(X).
    $$

    Ainsi, $K^0(S^1) = \Z$ engendré par le fibré trivial, i.e. $\tilde{K}^0(S^1)=0$.

    De même, $K^0(S^2) = \Z^2$ et $\tilde{K}^0(S^2)=\Z$ engendré par $h-1$ où $h$ est la classe du fibré canonique.

    On a un isomorphisme $\tilde{K}^0(S^n) = \varinjlim_p [S^{n-1},GL_p(\C)]$ qui associe à une fonction $f:S^{n-1} \to GL_p(\C)$ le fibré complexe obtenu en recollant les fibrés triviaux sur les hémisphères de $S^n$ à l'aide de $f$.

    Dans le cas, $n=2$, ceci s'écrit $\tilde{K}^0(S^2) = \pi_1(GL(\C)) = \pi_1(U) = \pi_1(U(1)) = \Z$. Le générateur correspond au fibré de rang 1 obtenu par recollement via le lacet évident $S^1 \to S^1$.

    De même, dans $K^0(B^2,S^{1})$, le générateur est représenté par $[E,F,\alpha]$ où $E=F = B^2\times \C$ et $\alpha: E|_{S^1}\to F|_{S^1}$ est la multiplcation $(z,v) \mapsto (z,zv)$.
  • Il doit y avoir quelques r en indices qui manquent pour indiquer la K-théorie réduite dans le post d'avant :)

    Effectivement, le truc est qu'on considère des fibrés *complexes* (resp. des C*-algèbres sur $\C$), donc on n'a pas le fibré de Möbius sur le cercle. De même, on ne peut pas considérer le fibré normal à $S^2$ (puisque c'est un fibré en droites *réelles*).

    Donc, si on raisonne en K-théorie non réduite, on a que $K^0 (C(S^1)) = K_0 (S^1) = \Z$ et est engendré par le projecteur trivial de dimension 1 (dans $\C$ !) (resp. le fibré trivial de dim 1). On a tout fait pour que ça soit un groupe, alors deux fois le générateur vaut 2, et correspond à la classe d'équivalence du $\C$-fibré trivial de dim 2. Et moins une fois le générateur vaut -1 et ne correspond à rien (c'est une construction formelle).

    Pour $S^2$, la K-théorie non réduite vaut $\Z^2$ et les générateurs sont le fibré trivial de dim 1 et un autre fibré non trivial. Du côté des C*-algèbres, les générateurs sont le projecteur trivial de rang 1, et un projecteur (projecteur de Bott) dans $M_2 (C(S^2))$ (du coup, le fibré en question est probablement de $\C$-dimension 2).

    Du coup, en K-théorie réduite, on a $K^0_r (S^2) = K^0 (\R^2) = \Z$, de même qu'on a $K_0 (C(\R^2)) = \Z$ : on a supprimé la composante &quottriviale" (ou on a supprimé l'unité, si on raisonne en terme d'algèbres, l'unitarisation correspondant à la compactification)

    Sinon, pour &quotvoir" la périodicité de Bott, perso je vois pas. Ca existe et c'est bien, mais pour moi, ce n'est pas une propriété très &quotgraphique&quot.
  • Dans mon post précédent, j'ai noté les groupes de K-théorie réduite, comme c'est l'usage, avec des tildes au dessus du K. Malheureusement, ils n'apparaissent pas très bien à l'écran (Ci-dessous, j'ai utilisé la commande widetilde au lieu de tilde).

    Sinon pour ce qui est de ton projecteur de Bott $p\in M_2(C(S^2))$, il ne correspond pas à un fibré de rang complexe 2 mais bien au fibré de rang 1 que j'ai décrit (ou à son inverse).

    Soit $A = C(X)$. Le théorème Serre-Swan assure que le foncteur
    $$
    E \mapsto \Gamma(X,E)
    $$
    est une équivalence entre fibré sur $X$ et modules projectifs sur $A$.

    Le module libre $A^n$ correspond évidemment au fibré trivial $\theta^n$. Maintenant un module projectif est de la forme $pA^n$ où $p\in M_n(A)$. La correspondance lui associe un projecteur sur $\theta^n$ et donc un fibré image $E \subset \theta^n$.

    Le fait que le générateur de $\widetilde{K}_0(C(S^2))$ soit représentable par $p\in M_2(C(S^2))$ correspond au fait que le générateur $E \in \widetilde{K}^0(S^2)$ est un sous-fibré (de rang $1$) du fibré trivial $\theta^2$.

    Pour ce qui est du théorème de périodicité, on peut quand même se le représenter pour les fibrés car le cup produit par l'élément de Bott
    $$
    -\cup u : K^0(X) = \widetilde{K}^0(X_+) \to \widetilde{K}^0(X_+ \wedge S^2) = K^0(X\times \R^2) = K^{-2}(X)
    $$
    correspond à prendre le produit tensoriel externe d'un fibré $E$ sur $X$ avec le fibré représentant l'élément de Bott.
  • En voilà un topic intéressant !
    Vos explications limpides m'ont permis de me remémorer un peu les cours que j'ai suivi en dea, et aussi de tuer le temps entre deux cours.
  • Merci les gars, je vais etudier tout ca.
    Mauricio
  • Bonjour,
    Si on considere les fibrés sur $\R$, on a bien
    $K_r^0(S^n)=\pi_{n-1}(GL_\infty(\R))$ ?
    Peut-on calculer ce groupe ?
  • Comencons par le cas n=1. Donc on considere les fibres complexe.
    Donc on a un fibre de rang 1 non trivial dont la classe de Chern est 1.
    Probleme: je peux faire deux choses avec ce fibre:
    1. le tensoriser par lui meme n fois, j'obtiens un de fibre de rang 1 de classe de chern egale a $n$.
    2. faire sa somme n fois, j'obtiens un fibre de rang n.
    Si le groupe de K-theorie est Z ca veut dire qu'il y a une relation entre la tensorisation et
    la somme de Whitney mais en fait je ne vois pas laquelle.
    marco: je vais reflechir a ta question.
    Mauricio
  • Pour marco: la méthode est la même que dans le cas complexe.

    A toute application $f: S^{n-1} \to GL_d(\R)$ on peut associer un fibré $E_f$ de rang $d$ sur $S^n$ en recollant le long de l'équateur les fibrés triviaux sur les hémisphères via la fonction de transition $f$.
    La construction ne dépend que de la classe d'homotopie de $f$. On a donc un morphisme
    $$
    \pi_{n-1}(GL_d(\R)) \longrightarrow \Phi_d(S^n)
    $$
    où $\Phi_d$ désigne l'ensemble des classes d'isomorphismes de fibrés réels de rang $d$.

    Ce morphisme est surjectif: pour $E$ un fibré de rang $d$, ses restrictions aux hémisphères sont triviales car ceux-ci sont contractibles. En choisissant des trivialisations, on obtient une fonction de transition $f: S^{n-1}\to GL_d(\R)$ tel que $E = E_f$.

    En revanche, il n'est pas injectif. On a une action de $\Z/2 = \pi_0(GL_d(\R))$ sur le $\pi_{n-1}$ donné par la conjugaison dans $GL_d(\R)$. On montre que
    $$
    \pi_{n-1}(GL_d(\R))/\Z/2 \longrightarrow \Phi_d(S^n)
    $$
    est un isomorphisme.

    L'action de $\Z/2$ est triviale pour $d$ impair donc triviale sur la limite inductive. En passant à la limite, on a un isomorphisme
    $$
    \pi_{n-1}(GL(\R)) = \varinjlim_d \pi_{n-1}(GL_d(\R)) = \varinjlim_d \pi_{n-1}(GL_d(\R))/\Z/2 \longrightarrow \widetilde{KO}(S^n).
    $$
    avec $\widetilde{KO}$ la K-théorie réduite réelle.

    Le théorème de périodicité de Bott des groupes de K-théorie réel affirme que le cup produit avec le générateur
    de $\widetilde{KO}(S^{8}) = \Z$ est un isomorphisme. En particulier, on a
    $$
    \widetilde{KO}(S^{n+8}) \simeq \widetilde{KO}(S^n)
    $$
    On en déduit le théorème original de Bott (sa preuve utilisait la théorie de Morse et pas la K-théorie)
    $$
    \pi_{i+8}(GL(\R)) = \pi_i(GL(\R)).
    $$
    Ainsi, $\widetilde{KO}(S^{i+1}) = \pi_i(GL(\R)) = \Z/2, \Z/2, 0, \Z, 0, 0, 0, \Z$ suivant que $i=0,\ldots,7 \mod 8$. Pour $i=0$, le générateur correspond au ruban de Moebius.

    Le théorème de périodicité est encore valable pour la K-théorie d'une $\R$-algèbre de Banach $A$ et donc pour les $\pi_i(GL(A))$.

    Pour les détails, tu peux consulter le livre de Karoubi ainsi que les articles sur sa page web.
  • YB: je vien de lire ta premiere reponse, c'est tres clair merci.
    Marco: ce n'est pas $R$ mais $C$ d'apres ce que nous dit YB (bien sur il doit y avoir une variante reelle).
    Mais GL(n,C) se contracte sur les matrices diagonales telles que le produit des coefficients diagonaux vaut 1 (on peut toujours trianguler puis amener tous les coeff superieurs la diagonale vers 0) qui sauf erreur de ma part est homtope a un tore (par projection sur un hyperplan) mais probleme les groupes d'homotopie du tore sont nuls (sauf le premier)???!!!
    Mauricio.
  • Je ne suis pas sur de comprendre ta question sur les classes de Chern Mauricio.

    Le caractère de Chern définit un isomorphisme
    $$
    ch: K^0(X)_\Q \longrightarrow \bigoplus_{i\geq 0} H^{2i}(X,\Q)
    $$
    En enlevant le facteur trivial, on a encore un isomorphisme
    $$
    ch: \widetilde{K}^0(X)_\Q \longrightarrow \bigoplus_{i>0} H^{2i}(X,\Q).
    $$

    Si $K^0(X) = \Z$, alors $\widetilde{K}^0(X) = 0$ et la cohomologie paire $>0$ est aussi nulle. C'est le cas des sphères $S^{2n+1}$.

    Dans ce cas, toutes les classes de Chern sont nulles ce qui correspond au fait que tout fibré est stablement équivalent à un fibré trivial. Le seul invariant cohomologique qu'on obtient est le rang des fibrés complexes.
  • YB:Ok dans le cas S^1 tous les fibres sont stablement triviaux donc pas de probleme, la situation est claire maintenant. Ce que tu ecris sur le caractere de Chern m'evoque la version complexe (due a Milnor je crois) du thm de cobordisme de Thom mais je n'arrive pas a faire le lien bien que je sens qu'il y en a un.
    Mauricio
  • Merci pour vos reponses. Je suis impressionné !
    Je n'avais pas pensé a $\Z/2\Z$.
  • Je ne connais pas grand chose au cobordisme. Je peux juste te dire ce que j'ai compris en parcourant l'article de Morel et Levine sur le cobordisme algébrique (qui doit jouer le rôle du cobordisme complexe pour les variétés algébrique).

    Les théories orientés sont une classe de théories cohomologiques généralisées $A^*$ admettant des pull-back push-forward et quelques axiomes comme la formule du fibré projectif. En particulier, elles admettent des classes de Chern.

    Le point fondamental est que ces classes de Chern ne sont pas en général multiplicatives, i.e. ne vérifient pas à priori
    $$
    c_1(L\otimes M) = c_1(L)+c_1(M)
    $$
    pour $L,M$ fibrés en droites.
    A la place, elles vérifient une loi de groupe formel $F_A(u,v) \in A^*(*)[\![u,v]\!]$ caractérisée par
    $$
    c_1(L\otimes M) = F_A(c_1(L),c_1(M)).
    $$

    Le cobordisme est la théorie cohomologique orientée universelle et le groupe formel associé est donné par l'anneau de Lazard.

    La K-théorie est alors universelle pour les théories orientées multiplicatives et le groupe formel associé est le groupe formel multiplicatif.

    Il y a pas mal d'exemples où le caractère de Chern induit un isomorphisme (pour les coeff rationnels). L'exemple que j'ai donné dans mon post précédent se généralise en
    $$
    ch: K^0(X)_\Q \oplus K^1(X)_\Q \longrightarrow H^{ev}(X) \oplus H^{odd}(X).
    $$
    On a un analogue pour les variétés algébriques avec la K-théorie algébrique et la cohomologie motivique (i.e. les groupes de Chow supérieurs)
    $$
    ch: \bigoplus K_n(X)_\Q \longrightarrow \bigoplus H^p(X,\Q(q)) =
    \bigoplus CH^q(X,2q-p)_\Q.
    $$
    On récupère alors les groupes de cohomologie comme les espaces propres pour les opérations d'Adams sur la K-théorie.

    Il y a aussi une version pour les algèbres de Banach et l'homologie cyclique de Connes et Karoubi (version non commutative de la cohomologie de Rham).

    Je ne sais pas s'il existe des isomorphismes de type pour des classes de Chern plus générales. Par exemple, en remplaçant la K-théorie par le cobordisme algébrique.

    En espérant que ça répond un peu à ta question (et que je n'ai dit trop de bêtises).
  • YB: merci, c'est marrant hier je n'avais pas vu ton post sur le thm de Bott original du coup j'y ai reflechi et je me suis rendu compte (enfin!) que le thm de Bott est effectivement au thm de Bott.
    Il y a quelque chose que je ne comprends toujours pas: est-ce que l'on peut vraiment demontrer le thm de Bott de facon purement algebrique, par exemple
    tu dis
    "Le théorème de périodicité de Bott des groupes de K-théorie réel affirme que le cup produit avec le générateur ..."
    Donc plutot qu'une demonstration par la K-theorie est-ce que ce n'est pas plutot une simple reformulation?
    Mauricio (qui espere pouvoir y comprendre quelque chose)
    PS: pour le cobordisme je pensais tout simplement au theoreme de Milnor qui dit que la classe de cobordisme complexe d'une variete est determinee par les classes de Chern de cette variete et pas au cobordisme algebrique auquel je ne comprends rien pour l'instant.
  • Cette discussion est vraiment cool ! Trois jours sans regarder et paf, des caractères de chern, du cobordisme, plein de trucs bien :-D

    Juste pour répondre tardivement à une question qu'on m'a posé, j'ai dit que le problème des fibrés en droites réelles c'est de la cohomologie parce que en fait un fibré est caractérisé par ses fonctions de transition (à isom près), qui forment un 1-cocycle de Cech, cad le cocyle est un élément de $H^1(X,\mathcal{F})$ (cohomologie de Cech des faisceaux, définie pour $X$ paracompact), avec $\mathcal{F}$ le faisceau des fonction réelles qui ne s'annulent pas (les fonctions de transition sont des fonctions inversibles, définies sur les intersections des ouverts trivialisants).

    Soit maintenant le faisceau $\mathcal{G}$ des fonctions réelles sur X, ce faisceau est flasque (on a des partitions de l'unité), donc sa cohomologie en degré strictement positif est nulle. Exercice : avec le formalisme de la cohomologie de Cech, montrer "à la main" que si on a des partitions de l'unité la cohomologie s'annule, c-a-d montrer qu'un cocycle est un cobord.

    Considérons la suite exacte de faisceaux $ \mathcal{G} \to \mathcal{F} \to \Z/2\Z $, la première flèche étant l'exponentielle. la suite longue de cohomologie donne:

    $ H^1(X,\mathcal{G}) \toH^1(X, \mathcal{F}) \to H^1(X,\Z/2\Z) \to H^2(X,\mathcal{G})$, donc, étant donne que $\mathcal{G}$ est flasque :

    $ 0 \toH^1(X, \mathcal{F}) \to H^1(X,\Z/2\Z) \to 0$, le résultat qu'on voulait (un nb pair de tours du fibré le long d'une cavité ne compte pas, en gros).
    Et donc tout ça, c'est de la cohomologie, pas de la K-théorie.

    Bon, maintennat, faut que je lise la fin du thread.

    A+
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